« Que sait-on du travail ? » : les entreprises ne peuvent, seules, résorber les inégalités subies par les personnes en situation de handicap
51 % : la moitié des personnes limitées par un problème de santé depuis au moins six mois et âgées de 15 à 64 ans étaient en emploi en 2021 contre 70 % des personnes valides, selon l’enquête Emploi de l’Insee. Le taux de chômage de cette catégorie, qui correspond à l’indicateur global de limitation d’activité (GALI), atteignait, de son côté, 13 % contre 8 % pour les valides. Dans leur contribution au projet de médiation scientifique « Que sait-on du travail ? » du Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques (Liepp), diffusé en collaboration avec les Presses de Sciences Po sur la chaîne Emploi du site Lemonde.fr., les chercheuses Anne Revillard, Célia Bouchet et Mathéa Boudinet dressent un état des lieux de l’insertion des handicapés dans les entreprises.
Après avoir précisé que le travail pouvait lui-même créer du handicap chez les salariés, par l’entremise d’accidents du travail et de maladies professionnelles, les autrices constatent que, malgré une plus grande tolérance des entreprises et de réels progrès dans la volonté politique de les intégrer en situation de travail réel, de nombreux obstacles persistent.
Moins présentes dans le monde du travail, les personnes handicapées occupent aussi des emplois moins qualifiés – à 55 %, ce sont des ouvriers et des employés contre 44 % dans la population valide –, et travaillent plus souvent à temps partiel. A profil socioprofessionnel égal, « il existe des écarts de rémunération de plusieurs centaines d’euros entre les personnes en emploi qui ont grandi avec des limitations visuelles ou auditives fortes et les personnes valides ».
Une bonne partie des personnes concernées sont pauvres : d’après une étude datant de 2011, une personne sur cinq ayant grandi avec un handicap perçoit moins de 10 000 euros par an de revenus du travail. Cette proportion atteint 38,7 % pour les individus atteints de limitations cognitives fortes.
Les profils de personnes en situation de handicap sont très hétérogènes, notamment quant à leur nature et leur moment de survenue. Les handicapés de naissance et les porteurs de handicap psychique ou de limitations visuelles fortes sont bien plus souvent au chômage.
Ces constats s’expliquent par deux catégories de causes : le défaut d’accessibilité à l’échelle de la société ou de l’entreprise (manque de matériel adapté, inadaptation des transports, des bâtiments…), et la stigmatisation qui persiste à toutes les étapes de la vie.
Il existe des politiques publiques envers les entreprises et les institutions, qui ont en partie fait leurs preuves : elles sont notamment obligées d’embaucher 6 % de salariés ou d’agents handicapés, à défaut de quoi elles doivent s’acquitter d’une contribution financière. Malheureusement, en 2021, ce taux d’emploi direct n’est que de 3,5 % dans les entreprises privées et publiques, et de 5,4 % dans la fonction publique.
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