Archive dans 2020

« Le Figaro » va supprimer 60 postes

Imprimerie Riccobono à Tremblay-en-France, le 12 août 2020.

Un dernier comité social et économique avant l’été avait laissé deviner quelle serait la teinte de la rentrée au Figaro : elle serait sombre, marquée par un plan d’économies. De fait, les élus du groupe en connaîtront les nuances jeudi, lors d’un CSE extraordinaire ; mais un mail de Marc Feuillée, le directeur général du groupe (Le Figaro, Le Figaro Magazine, Le Figaro Madame, TV Magazine), envoyé vendredi 2 octobre, est d’ores et déjà venu éclairer les salariés sur les intentions de la direction.

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« Nous devons impérativement économiser quatre millions d’euros sur la masse salariale, ce qui représente environ 60 postes », écrit le dirigeant, promettant de « privilégier le dialogue social » et de rechercher « un accord qui permettrait une mise en œuvre équilibrée et comprise par toutes et tous ».

Sur la base du volontariat

De source syndicale, 24 postes seraient visés parmi les cadres et employés (documentation, communication, diffusion, etc.), 15 parmi les journalistes affectés à la réalisation (maquette, secrétariat de rédaction, service iconographique) et six rédacteurs : trois au service des sports, qui compte onze titulaires, et trois sur une vingtaine de journalistes au service culture, et plus particulièrement au Figaroscope, qui n’a pas reparu depuis le confinement. Quinze personnes pourraient en outre quitter l’entreprise sur la base du volontariat – peut-être sous forme de départs à la retraite. Enfin, « une soixantaine de pigistes serait également visée », ajoute Patrick Bele, délégué syndical SNJ.

« Nous devons agir le plus rapidement possible, pour faire face à la crise économique que rencontrent nos journaux, mais aussi investir encore plus dans nos contenus et le développement de notre offre digitale », justifie Marc Feuillée, contacté par Le Monde, rappelant les effets néfastes du confinement sur les rentrées publicitaires et les « pertes financières exceptionnelles causées par la liquidation de Presstalis ».

Dans sa communication interne, le dirigeant se félicite de dénombrer 200 000 abonnés numériques au Figaro à la fin de l’année, « mais ce n’est pas suffisant, tempère-t-il. Nous avons besoin d’investir pour atteindre le plus vite possible le cap des 300 000 abonnés numériques ». Entre 15 et 20 créations de postes, « principalement à la rédaction du Figaro » sont promises, ainsi que des investissements dans le marketing pour accompagner cet élan.

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L’usine du sucrier Cristal Union, à Erstein en Alsace, « est en sursis »

Les arrachages de betteraves viennent juste de démarrer en France. Avec un temps de retard, pour profiter des pluies abondantes capables de donner un petit coup de pouce à la plante assoiffée. En Alsace, aussi, l’usine sucrière d’Erstein (Bas-Rhin) s’apprête à accueillir la nouvelle récolte pour la broyer et la transformer en poudre blanche. Mais ce site de la coopérative Cristal Union est sous pression. Alain Commissaire, le directeur général du groupe sucrier, ne s’en cache pas. « L’usine d’Erstein est en sursis », déclare-t-il.

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En cause, le nombre de jours d’activité de ce site. Pour être compétitifs, les sucriers tentent d’accroître la durée d’utilisation de ces outils industriels très lourds en investissement. « Cette année, à Erstein, la durée de campagne devrait atteindre quatre-vingts à quatre-vingts-quatre jours. Il en faudrait quinze de plus », précise M. Commissaire. Pour atteindre cet objectif, il faut donc accroître le volume de betteraves livrées à l’usine. Or, en Alsace, pas question d’invoquer la jaunisse pour expliquer le manque de plantes. La maladie qui a touché durement les cultures de betteraves au sud de Paris a été bien moins virulente dans l’est de la France.

« Il faudrait 2 000 à 3 000 hectares supplémentaires »

« En Alsace, nous estimons la baisse de rendement cette année entre – 8 % et – 10 %, dont une partie liée à la sécheresse et l’autre à la jaunisse », explique Franck Sander, agriculteur à Ohlungen (Bas-Rhin) et président de la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB). Il s’agit bien plutôt d’une désaffection des agriculteurs alsaciens pour cette culture devenue moins rémunératrice après la fin des quotas sucriers européens en 2017. « Un temps, 7 000 hectares étaient cultivés en betteraves. Puis on a perdu 1 000 hectares », souligne M. Commissaire. Il ajoute : « Il faudrait 2 000 à 3 000 hectares supplémentaires. L’idée est de convaincre des planteurs allemands proches de la frontière et de l’usine » qui viendraient grossir les troupes des 600 planteurs alsaciens.

Le site d’Erstein a déjà subi le plan de restructuration dévoilé par Cristal Union en 2019. La coopérative, dont les comptes ont viré au rouge en 2018, plombés par la baisse du prix du sucre en Europe, a, en effet, décidé d’arrêter la production de deux de ses dix usines. La sucrerie de Bourdon, située à Aulnat dans le Puy-de-Dôme, et celle de Toury en Eure-et-Loir ont définitivement fermé leurs portes cet été. Dans le Bas-Rhin, c’est une partie de l’activité de conditionnement du sucre qui a été transférée à Bazancourt (Marne). A la clé, une suppression de 70 postes sur un total de 200. Sachant que la marque Erstein est avec Daddy l’un des fleurons de Cristal Union et que le début de l’histoire du sucre à Erstein remonte à 1893.

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« Le handicap psychique au travail ne doit plus être un tabou »

Les symptômes du handicap psychique sont autant de signaux d’alerte que les collaborateurs doivent apprendre à détecter.

Membre du conseil d’administration et responsable bénévole des programmes de sensibilisation des entreprises aux handicaps psychiques de l’association Clubhouse France, Lucie Caubel est également cofondatrice du salon de recrutement en ligne Hello handicap.

Dans la vie professionnelle, le handicap psychique est mal connu car il fait partie des handicaps invisibles, comment le définir ?

Méconnu hors de la sphère médicale, le handicap psychique est le plus tabou de tous les handicaps. En France, la loi ne reconnaît d’ailleurs son existence que depuis 2005. Pour mémoire, cette loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées définit le handicap dans toute sa diversité. Les troubles psychiques concernent les maladies comme la bipolarité, la schizophrénie, la dépression chronique, les troubles anxieux, les TOC, les phobies…

Ils se différencient des troubles mentaux, qui entraînent des déficiences intellectuelles et sont souvent dûs à une maladie de naissance. A contrario, la maladie psychiatrique n’altère pas les capacités intellectuelles de la personne. Elle se déclare, en général, entre 15 et 25 ans. Une personne sur cinq sera confrontée à ce type de troubles au cours de sa vie. La dépression frappe 2,5 millions de citoyens par an, c’est même la première cause d’arrêt maladie de longue durée et d’invalidité.

Quel est l’impact de l’épidemie de Covid-19 sur les questions de santé psychique au travail ?

La peur de la maladie génère du stress et de l’angoisse pour tout le monde, mais pour les personnes atteintes de handicap psychique, la période est souvent encore plus difficile à vivre. Certaines, par exemple, n’ont pas supporté l’isolement entraîné par le confinement et la mise en place du télétravail, et ont vu leurs symptômes s’aggraver. Pour d’autres, au contraire, le fait de travailler de chez elles les rassure. Quoi qu’il en soit, pour les employeurs, la question du maintien du lien avec les salariés prend une acuité particulière et demande une vigilance accrue.

Justement, quel regard portent les entreprises sur le handicap psychique, et la crise liée au Covid-19 fait-elle évoluer leur vision ?

La crise met encore plus en avant l’urgence de prendre en compte la santé mentale dans le pays, dans l’emploi et dans la société. Il faut un « plan santé mentale » comme il y a eu un « plan cancer ». Le sujet est encore approché sous le seul angle médical. Il faut pourtant d’urgence un changement des mentalités. Tout reste à faire : les entreprises en sont avec le handicap psychique au même stade qu’elles l’étaient avec le handicap visible il y a trente ans. Soyons clair : ces troubles leur font peur.

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Quand « les entreprises ne savent plus prédire le risque »

Tribune. La pandémie nous a appris quelque chose : en dépit des sommes colossales que nos entreprises consacrent à vouloir le maîtriser, elles ne savent plus prédire le risque. Elles échouent à réconcilier la rigidité des méthodes de gestion du risque et l’agilité indispensable pour être en capacité d’absorber les chocs imprévus. La planification traditionnelle, linéaire, ne fonctionne plus. Alors, posons la question : dans un monde marqué par la fréquence, l’imprévisibilité et la force des chocs extérieurs, doit-on encore prévoir le risque ?

Dans le nouveau contexte, acceptons de renoncer à « savoir » ce qui va se produire. Organisons plutôt la résilience, cette capacité non pas à cerner les risques à l’avance mais à réagir vite et bien, cette nouvelle qualité qui nous permettra d’adopter des comportements adaptés à un environnement changeant.

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Nos entreprises doivent nécessairement installer un corpus minimum de procédures centralisées et homogènes, mais doivent tout autant imposer l’autonomie de décision nourrie de l’intelligence des situations. Cette double piste est la clé du succès, voire de la survie, de nos entreprises.

L’impensable et pas seulement l’inattendu

Elles devront inventer une nouvelle diversité, authentiquement opérationnelle, pour faire émerger des talents internes d’un nouveau genre, capables de poser des diagnostics et d’apporter des réponses complexes. Les femmes et les hommes de l’entreprise réclameront et devront se voir octroyer un droit renforcé à l’initiative. C’est vital. Car oui, pour se protéger du risque, l’entreprise doit encourager la prise de risque.

Il existe des spécialistes. Ce sont les militaires. Eux savent que planification stratégique et discipline stricte sont les préalables indispensables à une prise de décision rapide, autonome, pertinente

Comment faire ? Avec quels outils ? Pour remplacer la prévision traditionnelle, probabiliste, du risque, nous avons besoin de collaborations innovantes pour explorer les différents mondes dans lesquels nous risquons de nous retrouver. Il est temps de prendre nos distances avec les calculs statistiques de fréquence et de gravité pour redécouvrir la puissance du « scénario planning », et commencer à prendre conscience des options stratégiques dont on ignore absolument tout aujourd’hui. Les scénarios doivent décrire des mondes différents et pas seulement des résultats différents dans le même monde. L’impensable, et pas seulement l’inattendu.

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Télétravail, StopCovid, masques : il faut « installer les mesures de lutte contre l’épidémie dans la durée »

L’application StopCovid, sur un smartphone, en juin.

La chercheuse italienne Vittoria Colizza dirige à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) un laboratoire spécialisé dans la modélisation des épidémies. Ses travaux sur les écoles, les stratégies de contrôle du virus, ou encore l’efficacité du contact tracing apportent un regard critique sur la réponse à l’épidémie. Pour contenir la seconde vague, elle appelle à la mise en place de mesures de long terme comme le télétravail.

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Quelle est la situation épidémique en France ?

L’un des indicateurs importants est le nombre d’hospitalisations, qui est une donnée plus fiable que le nombre de cas pour nous renseigner. La situation est inquiétante lorsqu’on a des niveaux assez élevés et une dynamique soutenue, comme observé en France dans les dernières semaines. On a bien une courbe exponentielle, mais la dynamique est plus lente que dans la première vague.

Les données d’hospitalisations jusqu’à la mi-septembre montraient un taux de reproduction, R, autour de 1,4-1,5 pour certaines régions. Cela correspond à un temps de doublement de l’ordre de onze à quinze jours, contre trois jours pour la première vague. Les dernières données semblent indiquer un ralentissement du taux de croissance de l’épidémie, qui reste à confirmer.

Vous parlez de temps de doublement, de croissance exponentielle, de R… Comment s’y retrouver ?

Ils racontent la même chose, mais de façon différente. Le R est plus facile à saisir car il y a un seuil de référence : au-dessus de 1, l’épidémie progresse, en dessous, elle régresse. Des études cognitives ont montré que le cerveau n’était pas vraiment capable de comprendre une croissance exponentielle. Le temps de doublement est une manière de l’éclairer. Si on a aujourd’hui 200 hospitalisations par jour à Paris, et si on ne fait rien, avec un temps de doublement de quinze jours, on en aura 400 dans deux semaines, 800 dans un mois et 1 600 dans un mois et demi, comme pendant le pic de la première vague.

Il est très important de bien communiquer sur ce qu’est une croissance exponentielle, car cela permet de comprendre pourquoi, même avec un petit nombre d’hospitalisations, il est urgent de prendre des mesures, sinon, en très peu de temps, le nombre de malades ne sera plus gérable par le système de santé.

Cependant, cette progression correspond à un scénario « où l’on ne ferait rien ». Or, nous ne faisons pas rien : mesures prises par le gouvernement, gestes barrières, changements de comportement dans la vie sociale…

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En six mois, le secteur de l’aéronautique a perdu la totalité des postes créés entre 2009 et 2019

C’est comme si d’un claquement de doigts les bénéfices de dix ans de prospérité avaient été éliminés ! En six mois de crise due au coronavirus, l’aéronautique, autrefois championne des créations d’emplois, est lourdement retombée dans le rouge.

Depuis la crise de 2009, les constructeurs de l’aéronautique comme Airbus, Safran ou Dassault avaient multiplié les embauches avec un solde net, avant la mi-mars, de 11 783 créations d’emplois. La survenue de la pandémie a complètement changé la donne. A la fin septembre, selon les données recueillies par l’observatoire Trendeo de l’emploi et de l’investissement publiées lundi 5 octobre, le secteur a enregistré une perte nette de 11 950 emplois. Si on ajoute les sous-traitants, on parvient même au chiffre de 13 354 postes supprimés.

« Le semestre Covid a effacé la totalité des gains en emplois » des dix années précédentes, s’exclame David Cousquer, créateur et gérant de Trendeo. Pire, selon l’état des lieux dressé par l’observatoire, « l’aéronautique est le secteur le plus touché avec le transport aérien, car l’impact du Covid-19 sur le trafic est annoncé partout comme devant durer au-delà de 2021 ».

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Il faut dire que les effets de la crise ont été aussi violents que soudains. Au premier trimestre, selon l’Insee, la France a perdu 492 000 emplois. Mais en pratique, cette vague de suppressions de postes et de licenciements est intervenue en moins de quinze jours. Juste après l’entrée en vigueur du confinement, le 17 mars. Avec comme premières victimes, les intérimaires qui représentent à eux seuls, selon l’Insee, 63 % des suppressions de postes.

7 712 suppressions d’emplois annoncées chez Air France

Frontières fermées, aéroports vides, compagnies aériennes à l’arrêt, les conséquences de la pandémie ont frappé de plein fouet et au premier chef les constructeurs d’avions et le transport aérien. Air France, avec 7 712 suppressions d’emplois annoncées, et Airbus, avec 5 797, occupent les deux plus hautes marches de ce triste palmarès des réductions d’effectifs déclarées depuis mars.

Dans l’aéronautique, la crise a touché aussi vite et aussi fort les gros donneurs d’ordre comme Airbus et Safran, que la myriade de petites sociétés qui composent la chaîne de sous-traitants. « Cela a été instantané. La chute a démarré dès mars. Nous avons perdu 30 % de notre chiffre d’affaires », se souvient Frédéric Bourgon, patron d’ADB, une petite entreprise tarbaise de quarante salariés spécialisée, notamment, dans le décolletage, le tournage et l’usinage de pièces de moteurs d’avions.

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Le  rebond économique américain moins fort qu’espéré

Les Etats-Unis ont créé en septembre 661 000 emplois, faisant tomber le taux de chômage à 7,9 %. Frappée par le Covid-19, la première économie du monde est au milieu du chemin : elle a récréé 11,4 millions des 22 millions d’emplois perdus en mars et en avril, qui avaient fait bondir le taux de chômage à 14,7 %. Sauf que la seconde moitié du parcours s’annonce très difficile, et les économistes prévoient une reprise en racine carrée inversée, avec un ralentissement de la croissance à mi-rebond. A ce rythme, il faudrait près d’un an et demi pour que le marché de l’emploi retrouve ses niveaux d’avant crise, note le New York Times.

Faute de vaccin efficace, des pans entiers de l’économie ne connaîtront pas de retour à la normale. C’est vrai dans les loisirs et le tourisme : Disney a ainsi annoncé le licenciement de 28 000 employés qui étaient jusqu’à présent en chômage technique, en raison de la non-réouverture du parc d’attractions de Californie, Disneyland. Cela l’est dans l’aérien : United Airlines et American Airlines ont annoncé, début octobre, la suppression de 32 000 emplois ; ces compagnies avaient l’interdiction de licencier jusqu’à fin septembre si elles voulaient conserver les subventions de l’Etat fédéral qui leur ont été octroyées au début de la crise.

C’est le cas aussi dans l’enseignement, qui repart essentiellement en virtuel, les Américains étant beaucoup plus précautionneux que les Européens sur la contamination des enfants : 355 000 postes ont été supprimés en août dans l’éducation privée et publique. Les collectivités territoriales sabrent dans les effectifs, notamment des enseignants, faute de plan de renflouement fédéral (216 00 emplois en moins). Le nombre d’Américains qui déclarent avoir perdu définitivement leur emploi est désormais de 3,8 millions contre 2 millions en avril, ce qui indique l’absence d’espoir d’un retour à la normale.

La fin des aides fédérales et le ralentissement de la reprise ont entraîné un ralentissement du rebond de la consommation

L’économie a été mise sous perfusion par la Reserve fédérale (taux d’intérêt à zéro et octroi de liquidités qui ont permis aux entreprises de s’endetter et d’éviter la faillite), tandis que les ménages ont bénéficié d’aides fédérales (chèque de 1 200 dollars et allocation chômage de 2 400 dollars par mois jusqu’à fin juillet). Ainsi, paradoxalement, le revenu mensuel des Américains a été, depuis avril, supérieur à son niveau de février, avant la crise. Même en août, où il a baissé de 2,7 %, il restait supérieur de 2 % au niveau de février.

La fin des aides fédérales et le ralentissement de la reprise ont toutefois entraîné un ralentissement du rebond de la consommation : après une hausse de 9 % et de 7 % en mai et juin, les dépenses n’ont augmenté que de 2 % et 1 % en juillet et août. En contrepartie, les ménages ont épargné massivement, ce qui pourrait atténuer le choc des mois à venir : le taux d’épargne, qui était de l’ordre de 8 %, a bondi à 20 % en moyenne depuis mars. Il est retombé à 14 % en août.

Le déficit budgétaire devrait atteindre des niveaux abyssaux, passant de 1 000 milliards à 3 200 milliards de dollars, soit près de 16 % du PIB

Le PIB, qui avait reculé en rythme annuel de 5 % et 31 % aux premier et deuxième trimestres, aurait rebondi d’environ 3 % de juillet à septembre, selon les estimations du Wall Street Journal.

Ces chiffres de l’emploi sont les derniers à être publiés avant l’élection du 3 novembre, et ils sont mauvais pour Donald Trump : jamais le chômage n’avait été aussi élevé à la veille d’une élection (il était de 7,8 % à la veille de la réélection de Barack Obama en 2012 et de 7,3 % avant le second mandat de Ronald Reagan en 1984). M. Trump sera le seul président à achever son mandat avec moins d’emplois qu’à son arrivée. Avant la crise du Covid-19, le chômage était de 3,5 %, au plus bas depuis cinquante ans. Le déficit budgétaire va atteindre des niveaux abyssaux, passant de 1 000 milliards à 3 200 milliards de dollars environ, soit près de 16 % du produit intérieur brut, selon les experts du Congrès. La dette fédérale va retrouver ses niveaux d’après-guerre et dépasser les 100 % du PIB.

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A l’approche de l’élection, républicains et démocrates n’ont pas été capables de s’entendre sur un nouveau plan de relance demandé avec insistance par la Reserve fédérale. L’annonce de la contamination au Covid-19 de Donald Trump puis son hospitalisation ont conduit Wall Street à dévisser, vendredi : l’indice S&P 500 a reculé de 0,96 %, tandis que le Nasdaq, riche en technologie, perdait 2,22 %.

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Avec la reprise de l’épidémie de Covid-19, la pratique du télétravail repart à la hausse

Une employée en télétravail depuis chez elle à Nice, le 15 mai.

Le télétravail lié au coronavirus joue les prolongations. Les déclarations du ministre de la santé Olivier Véran, annonçant mercredi 23 septembre la nouvelle carte de France des zones d’alerte au Covid-19, ont contrarié la dynamique du retour sur site des salariés. Chez Orange, le dispositif de recours au télétravail occasionnel vient ainsi d’être étendu à trois jours par semaine en Ile-de-France depuis lundi 28 septembre. Cette modification de l’organisation est applicable à toutes les « zones d’alerte renforcée ». « C’est le patron de la grande région concernée par une zone d’alerte qui décide de ce passage de deux à trois jours », précise Gervais Pellissier, le DRH de l’opérateur téléphonique.

Après avoir eu quelques difficultés, en mai-juin, à faire revenir des salariés anxieux notamment à l’idée de reprendre les transports en commun, les responsables des ressources humaines tentent, depuis, de répondre à la fois aux objectifs de santé et de performance. A la sortie du confinement le 11 mai, les salariés de Rémy Cointreau avaient repris en télétravail, mais, dès le 8 juin, l’alcoolier leur demandait de revenir sur site au moins deux jours par semaine, avec un maximum de 50 % de l’effectif présent. Et, depuis le 22 juin, le mot d’ordre au siège était devenu : « Présentiel total ».

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« Jusqu’à aujourd’hui, il n’y avait plus de télétravail lié au Covid, explique Marc-Henri Bernard, le DRH de Rémy Cointreau. Mais à la suite des recommandations d’Olivier Véran de faire du télétravail autant que possible, on a rétabli le dispositif du 8 juin. Des salariés commençaient à s’inquiéter, ne comprenant pas pourquoi des entreprises poursuivaient le télétravail et pas nous. » En cette rentrée, les directions des ressources humaines étaient en pleine réflexion sur une nouvelle norme du télétravail hors-Covid. Elles s’apprêtaient à négocier voire à adopter une organisation du télétravail partiel, intégrant les acquis de la période de crise. Orange, Axa, BNP Paribas, Rémy Cointreau, la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), etc., la renégociation du télétravail hors-Covid était pour beaucoup à l’ordre du jour dès septembre.

Impératif de production

« On a cherché à froid à organiser un retour progressif en maintenant du télétravail trois jours par semaine. On réfléchit à un nombre volant de 80 jours de télétravail par an mis à disposition de tous les salariés. Mais combien de jours peut-on imposer sur site ? », s’interrogeait Jérôme Friteau, le DRH de la CNAV le 15 septembre aux Rencontres RH du Monde. Une entreprise du luxe envisageait d’imposer un jour de présentiel fixe pour faciliter la tenue du comité de direction.

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« Il est du ressort de l’Etat de faire respecter les lois en matière d’embauche, de salariat et de travail des journalistes »

Tribune. Des journalistes rémunérés à la pige sans plus aucune commande depuis mars et donc sans avoir gagné un centime ; des pigistes spécialisés en sport, en tourisme ou dans l’actualité culturelle réduits à une quasi-cessation d’activité ; d’autres encore, au chômage, qui n’ont pas pu bénéficier des indemnisations par Pôle emploi, notamment parce qu’il n’y avait pas de rupture de contrat constatée, se retrouvant ainsi dans un sac de nœuds juridico-administratifs ; des promesses d’embauche et de CDD non tenues ; des étudiants journalistes sans stage… La crise sanitaire et sociale touche de plein fouet les journalistes professionnels et fragilise encore plus les plus précaires.

Une donnée démontre à elle seule l’ampleur du séisme : ils ne seront guère plus de 1 300 à faire leur première demande de carte de presse en 2020. Ils étaient 1 700 chaque année depuis trois ans (2019, 2018, 2017), un chiffre en augmentation régulière mais une dynamique stoppée net.

Des mesures facilitantes en 2021

Composées de journalistes élus et d’éditeurs de presse, véritable baromètre de la profession, la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) a très vite évalué la situation. Déjà bienveillante avec les demandeurs soumis à difficultés, elle a pris une mesure inédite au printemps en renouvelant systématiquement toutes les cartes 2019 pour cette année, une décision exceptionnelle saluée par la profession.

Pour la carte 2021, elle appliquera des mesures facilitantes pour que les journalistes puissent obtenir ou conserver la carte de presse, appréciera la moyenne des salaires (ou piges) des demandeurs sur un temps beaucoup plus long qu’habituellement (au terme de la loi, le journalisme doit être une « activité principale, régulière et rétribuée ») et prolongera une troisième année (au lieu de deux) la possibilité d’obtenir la carte de presse tout en étant demandeur d’emploi.

Pour les maintenir dans la profession et accompagner les journalistes, la commission prend toute sa part. Est-ce le cas de tous ?

Des postulants à la carte de presse qui ne l’obtiennent pas, notamment pour des raisons de rémunération, critiquent parfois la CCIJP. Il est plus aisé de cibler une instance officielle bien identifiée que de combattre de vrais responsables disséminés dans un monde économique parfois nébuleux.

Chantage

Et pourtant, ils existent bien et se sont parfois manifestés lors de cette crise inédite. Des groupes de presse ont annoncé des licenciements, « mesures financières », justifiaient-ils, affichant à l’inverse un peu plus tard des résultats positifs. Paradoxalement d’ailleurs à la demande accrue d’information, beaucoup de titres, de sites, de radios, de chaînes de télé ont réduit leur pagination, le nombre de leurs éditions ou leur contenu dès le confinement, et ne sont pas revenus après l’été à la situation antérieure. Il y a eu dans notre secteur ce que certains ont appelé ailleurs des effets d’aubaine…

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Les extraits du compte privé de Facebook peuvent servir de preuve contre le salarié

« Concernant la question de la loyauté de la preuve, la Cour de cassation considère que l’employeur n’avait pas eu recours à un stratagème dans la mesure où la publication litigieuse avait été communiquée spontanément à l’employeur par un courriel d’une autre salariée de l’entreprise. »

Une manageuse de la société Petit Bateau est licenciée pour faute grave, pour avoir manqué à son obligation contractuelle de confidentialité, en publiant en avril 2014 sur son compte Facebook une photographie de la nouvelle collection Petit Bateau printemps-été 2015 qui avait été présentée exclusivement aux commerciaux de la société.

La lettre de licenciement soulignait, notamment, qu’en agissant de la sorte, la salariée avait pris le risque de perturber les actions de communication de l’entreprise sur une collection future et de dévoiler la future collection à la concurrence. La lettre soulignait à cet égard que la salariée comptait dans son réseau d’amis Facebook de nombreux professionnels de la mode « été » de la distribution appartenant à des entreprises telles que Kenzo, Jacadi, H&M et Zalando.

La salariée a contesté son licenciement en faisant valoir principalement qu’elle avait été victime d’une intrusion abusive et illicite dans sa vie privée et que, pour accéder à sa page personnelle, l’employeur avait utilisé un procédé déloyal.

La cour d’appel de Paris constate que ses « amis » Facebook – plus de deux cents – sont des professionnels de la mode dont certains travaillent auprès d’entreprises concurrentes. Elle juge que l’employeur n’a pas recouru à un procédé déloyal dans la mesure où il a été informé de cette diffusion par un des « amis » de la salariée travaillant au sein de la société qui s’étonnait de cette publication.

Confidentialité

La salariée saisit la Cour de cassation qui rejette son pourvoi (Cass. soc., 30 septembre 2020 n° 19-12.058) et reconnaît que la production en justice par l’employeur d’une photographie extraite du compte Facebook de la salariée, auquel il n’était pas autorisé à accéder, ainsi que des éléments d’identification des « amis » professionnels de la mode destinataires de cette publication, constituait une atteinte à la vie privée de la salariée.

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Néanmoins, la Cour de cassation juge que le droit à la preuve peut justifier de tels éléments si cette production est indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte est proportionnée au but poursuivi.

Pour la haute juridiction, cette production réunissait ces conditions dans la mesure où la défense de l’intérêt légitime de l’employeur à la confidentialité de ses affaires était en jeu et que, d’autre part, l’employeur n’avait fait procéder au constat d’huissier que pour contrecarrer la contestation de la salariée quant à l’identité du titulaire du compte. Enfin, concernant la question de la loyauté de la preuve, la Cour de cassation considère que l’employeur n’avait pas eu recours à un stratagème dans la mesure où la publication litigieuse avait été communiquée spontanément à l’employeur par un courriel d’une autre salariée de l’entreprise autorisée à accéder comme « amie » au compte privé Facebook de la salariée.

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