Archive dans 2020

« Une fondation actionnaire suppose une vision de long terme, la volonté de contribuer à l’intérêt général et d’inventer une nouvelle gouvernance »

Tribune. Les protagonistes de l’opération financière qui fait actuellement la une de la presse économique entre Veolia et Suez semblent à première vue donner plus de visibilité à la loi du 22 mai 2019 « relative à la croissance et la transformation des entreprises », dite loi PACTE : Veolia, Suez et Engie ont élaboré leurs « raisons d’être », tandis que Meridiam est une « société à mission », deux innovations phares de cette loi.

Pourtant, l’évolution de leurs modèles de gouvernance se heurte à la dure réalité d’un capitalisme actionnarial, qui n’a jamais eu pour usage de s’encombrer des intérêts des parties prenantes. Pour se protéger du rachat de Véolia, Suez a ainsi décidé de transférer les titres de sa filiale eau au sein d’une fondation de droit néerlandais, non par préoccupation philanthropique, mais pour défendre ses intérêts en devenant temporairement incessible à son concurrent.

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Avant cela, Patrick Drahi avait créé un fonds de dotation pour y loger les titres du journal Libération. Y-a-t-il de sa part une sincère et véritable intention philanthropique qui a pour but la préservation des intérêts de Libération et, au-delà, la liberté et l’indépendance de la presse ? Si personne n’est dupe, il serait préjudiciable que ces initiatives jettent le discrédit sur le bien-fondé d’un modèle très exigeant et vertueux : celui de la fondation actionnaire, dont elles semblent être une pâle imitation.

Intérêt général et préservation du capital et de l’emploi

Transmettre une entreprise à une fondation ne consiste ni à s’en débarrasser, ni à augmenter son pouvoir de négociation dans le cadre de tractations commerciales, ni à s’enrichir personnellement. La création d’une fondation actionnaire est un engagement majeur, qui suppose une vision de long terme, la volonté de contribuer à l’intérêt général par des actions philanthropiques, et la conviction que le modèle capitaliste traditionnel s’essouffle et qu’il faut inventer de nouveaux modes de gouvernance et de propriété.

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Renoncer à vendre une entreprise pour la transmettre à une fondation ou à une structure d’intérêt général assimilée requiert détermination et altruisme. Aujourd’hui, en France, une quinzaine de fondateurs et propriétaires d’entreprises françaises, réunis au sein de la communauté De Facto, se sont engagés sur la voie de la fondation actionnaire. Ils ont décidé de transférer tout ou partie de leurs titres de façon irréversible à une structure à but non lucratif, d’intérêt général et sans propriétaires.

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Le management de transition voit ses missions modifiées par la crise

« Le management de transition – qui consiste à mettre à la disposition temporaire des entreprises des cadres supérieurs chevronnés pour répondre à un besoin urgent – a été malmené par la crise. »

Comme de nombreux secteurs de l’économie, le management de transition – qui consiste à mettre à la disposition temporaire des entreprises des cadres supérieurs chevronnés pour répondre à un besoin urgent – a été malmené par la crise sanitaire. Sur l’année 2020, la perte de chiffre d’affaires du secteur devrait être de l’ordre de 20 %. Jean-Pierre Lacroix, président de France Transition, fédération des acteurs du management de transition, se montre particulièrement prudent sur un redémarrage du marché. « Je ne suis pas euphorique, explique-t-il, maniant l’art de la litote. Il n’y aura pas de changement sur le temps court. Nous sommes sur du temps long. »

Méthode Coué, incantation, certains se montrent cependant plus optimistes. « Les entreprises sont attentistes, c’est vrai, mais depuis mi-août, on perçoit un léger frémissement, constate Patrick Abadie, président du cabinet Delville Management. La crise sanitaire implique des transformations profondes dans les entreprises, ce qui est porteur pour notre secteur. Je pense que la tendance à plus de flexibilité et d’expertise est durable. »

« Une réponse rapide, flexible et adaptée »

Même son de cloche chez Robert Walters. « Le management de transition est adapté aussi bien en période de croissance qu’en période de crise. Actuellement, les entreprises, qui ont peu ou pas de visibilité, hésitent à recruter en CDI. Le management de transition leur offre une réponse rapide, flexible et adaptée », explique Karina Sebti, directrice générale de Robert Walters Management de transition.

Elle note, par ailleurs, un changement dans la typologie des missions : « L’incertitude économique rebat les cartes des priorités. Gestion de la trésorerie, restructurations et transformation de l’organisation sont aujourd’hui les préoccupations majeures des entreprises. Les manageurs de transition vont désormais être appelés pour de la gestion de crise. » Ainsi, « alors qu’avant le Covid-19 les DRH étaient recherchés pour mener un plan d’embauche sur un marché du travail tendu, ces professionnels sont désormais demandés pour gérer des plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) », illustre Patrick Abadie.

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Reste que cela a un coût : de 1 300 à 4 500 euros par jour, selon les fonctions et les profils, d’après une étude de Robert Walters publiée le 17 septembre. « C’est cher, c’est vrai, reconnaît Philippe Tellier, directeur des manageurs de site chez GT Logistics, entreprise de sous-traitance industrielle comptant mille salariés en France, qui fait régulièrement appel à des manageurs de transition. Mais nous sommes prêts à payer le prix fort, car rien ne serait pire que de laisser un poste vacant. » De plus, il apprécie la réactivité de la formule.

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La pandémie de Covid-19 accélère la mondialisation des services

Les activités de services ne sont plus à l’abri des délocalisations. Sur les 1 233 emplois que veut supprimer Nokia en France, 80 % sont des postes d’ingénieurs en recherche et développement (R&D). Une partie serait délocalisée en Pologne ou en Inde, selon les représentants des salariés de l’entreprise. Technicolor a également annoncé, en juillet, vouloir supprimer 110 postes dans un de ses centres de R&D, en transférant son activité de développement de logiciel en Inde.

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« Un boom des délocalisations pourrait bien advenir dans les activités de services, affirme El Mouhoub Mouhoud, professeur d’économie à l’université Paris-Dauphine, y compris pour des tâches élaborées. » Les confinements liés la pandémie de Covid-19 ont accéléré l’adoption et l’usage des technologies numériques dans de nombreux secteurs d’activité. En France, le nombre de téléconsultations de médecine a été multiplié par plus de 100 entre février et avril 2020. A l’université, les étudiants suivent désormais les cours depuis l’étranger, en visioconférence. « La distance n’est plus un obstacle à la fourniture d’un service », observe M. Mouhoud. A cela s’ajoute un mouvement de sous-traitance commencé il y a plusieurs décennies. « Les services comme la comptabilité, le marketing ont été progressivement externalisés notamment par les entreprises manufacturières, explique Isabelle Méjean, professeur à l’école Polytechnique. Or les services externalisés peuvent être plus facilement délocalisés. »

« Nouveau moteur »

Le numérique est aux services ce que le container fût au transport de marchandises : il décuple le volume des échanges. Dans une étude publiée fin septembre, Western Union prévoit que la valeur du commerce international des services augmentera d’environ un tiers d’ici 2025. Les plus fortes hausses seront enregistrées dans les secteurs des services aux entreprises (+ 37 %), des technologies de l’information (+ 35 %) et de la finance (+ 32 %). En décembre 2019, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) voyait déjà dans les services le « nouveau moteur de la mondialisation ». La valeur des échanges dans ce secteur a augmenté plus rapidement que celle des biens, à un rythme annuel de 5,4 %, entre 2005 et 2017. Les services, qui ne pesaient que 9 % du commerce mondial en 1970, représentent désormais 20 %. Contrairement aux marchandises, les services échappent aux droits de douane et aux coûts de transport dans un monde où les tensions protectionnistes sont réapparues.

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« Pourquoi l’alignement entre l’entreprise et la société est-il si difficile à obtenir ? »

Tribune. J’appartiens à une génération née au début des années 1980, qui a grandi avec l’impératif de réconcilier l’entreprise et la société, le business et l’environnement, le salarié et le citoyen, mais qui n’a aussi cessé de vivre, malgré une somme de petits pas, la difficulté de cet alignement dans la vraie vie.

En témoignent le flux et le reflux, l’espoir puis la déception, autour de l’émergence de la notion de développement durable (dans les années 1980) puis de celle de responsabilité sociale de l’entreprise (RSE, années 2000), puis la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) de 2001, le pacte pour la planète, de Nicolas Hulot (2007).

Autant d’avatars d’une transformation sociale plusieurs fois souhaitée, qui s’est trop souvent limitée à l’évolution du cadre réglementaire, à la normalisation de pratiques sectorielles comme l’investissement socialement responsable (ISR) ou les critères « environnement, social, gouvernance » (ESG) dans la finance, et à un verdissement des intentions portées sur la place publique.

Contrainte externe

La création du statut d’entreprise à mission par la loi Pacte [Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises] du 22 mai 2019 a cristallisé le même élan et le même espoir. Mais force est de constater que plus d’un an après et malgré quelques exemples, la vague d’adoption de l’entreprise à mission n’a pas encore eu lieu. Le contexte de crise sanitaire, lui-même précédé par une crise sociale et l’éveil de la vigilance écologique, aurait pu constituer un aiguillon ; mais la multiplicité des initiatives récentes, publiques et privées, autour de la RSE a considérablement brouillé et dilué le message.

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Finalement, pourquoi cet alignement entre l’entreprise et la société est-il si difficile à obtenir ? Certainement parce qu’aucune de ces évolutions, positives en soi, n’a atteint directement le cœur du réacteur, à savoir la pratique effective de la gouvernance.

L’entreprise à mission a ouvert une brèche conceptuelle dans l’évidence de la société anonyme, mais elle amende plus le formalisme juridique de la gouvernance qu’elle n’en transforme sa vie réelle

Le développement durable et la RSE ont davantage agi comme une contrainte externe, et ont vu leur place dans l’agenda stratégique fluctuer au gré des crises économiques et des impératifs de rétablissement des marges. L’entreprise à mission a ouvert une vraie brèche conceptuelle dans l’évidence de la société anonyme, mais elle amende aujourd’hui plus le formalisme juridique de la gouvernance qu’elle n’en transforme sa vie réelle.

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Entre Emmanuel Macron et les syndicats, la brouille persiste

Le président de la République, Emmanuel Macron, et le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, en octobre 2017.

Analyse. La démarche est inédite. Le 14 octobre, jour de l’interview télévisée d’Emmanuel Macron sur la crise sanitaire, les numéros un des cinq organisations syndicales représentatives – Laurent Berger (CFDT), Philippe Martinez (CGT), Yves Veyrier (FO), François Hommeril (CFE-CGC) et Cyril Chabanier (CFTC) – ont adressé une lettre commune au premier ministre. « Une copie de ce courrier est adressée à monsieur le président de la République », ont précisé les signataires, comme pour nommer le véritable destinataire.

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D’emblée, les cinq dirigeants soulignent que « dans une telle période d’incertitude et d’inquiétude tant pour la santé que pour l’emploi, il [leur] parait essentiel que le dialogue social se traduise par une écoute et une réponse effective de la part des pouvoirs publics et le respect de l’autonomie de la négociation collective ». Notant les « restrictions importantes » que les dispositions sanitaires entraînent sur les droits syndicaux, ils demandent « une réunion rapide sur l’évaluation des conséquences des ordonnances travail, afin de rétablir les droits de représentation collective à la hauteur des enjeux actuels ».

Ils « exigent dans le même temps une réunion d’urgence consacrée à la reconnaissance effective du rôle essentiel des salariés et salariées des emplois dits de la deuxième ligne, qui doit se traduire sans délai par une revalorisation des salaires, conditions de travail, d’emploi et de carrières ».

« Mauvais signal »

Mettant de côté leurs nombreuses divergences, tous les cinq réaffirment que les aides publiques aux entreprises supposent de « véritables engagements » et des « contreparties » sur l’emploi, les salaires et les garanties collectives. Et invitent le gouvernement à abandonner la réforme de l’assurance-chômage et à ne « pas remettre à l’ordre du jour le sujet des retraites ». Cette initiative commune a été décidée, le 13 octobre, lors d’une réunion des cinq dirigeants – en visioconférence pour des raisons sanitaires – qui a permis, en une heure et au moyen de quelques retouches, de mettre tout le monde d’accord. De l’avis de tous, « Philippe [Martinez] a été extrêmement positif », en dépit des remous que sa signature pourrait provoquer en interne.

A ce jour, le courrier est resté lettre morte, comme si les destinataires étaient aux abonnés absents. Lors de son interview télévisée, M. Macron n’y a pas fait allusion mais a retoqué la proposition de la CFDT d’augmenter les minima sociaux et de faire bénéficier les moins de 25 ans du RSA. Annonçant une « aide exceptionnelle » pour une partie des précaires, le président a réaffirmé que « nos fondamentaux, c’est la lutte contre la pauvreté par l’activité et le travail. (…) Plus on augmente de manière unilatérale tous nos minima sociaux, plus on rend difficile le retour à l’activité ». « C’est totalement faux », s’est insurgé M. Hommeril en s’appuyant sur les travaux d’Esther Duflo relatifs à la lutte contre la pauvreté, couronnés par le prix Nobel d’économie en 2019.

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Avec la crise, le régime de l’assurance-chômage enregistre un déficit « d’une ampleur inédite »

C’est un choc d’une rare violence pour l’assurance-chômage, frappée de plein fouet par les conséquences de l’épidémie de Covid-19. Fin 2020, elle pourrait être amenée à indemniser quelque 420 000 personnes supplémentaires par rapport à fin 2019, selon des chiffres présentés, mercredi 21 octobre, lors d’un bureau de l’Unédic, l’association copilotée par les partenaires sociaux qui gèrent le dispositif.

La crise économique fait chuter ses comptes de façon vertigineuse, même si la dégradation devrait finalement être moins importante qu’anticipée en juin en raison d’un rebond de l’activité cet été.

A la fin de cette année, le déficit, « d’une ampleur inédite » selon l’Unédic, devrait atteindre 18,7 milliards d’euros avant de diminuer presque de moitié à la fin 2021, à 9,7 milliards d’euros. Un chiffre à mettre en regard des prévisions annoncées avant le début de l’épidémie pour mesurer l’étendue des dégâts. En février, les gestionnaires du régime espéraient alors renouer avec les excédents à partir de l’an prochain, mettant fin à une décennie d’exercices déficitaires.

Rôle de stabilisateur

L’assurance-chômage se trouve prise dans un redoutable effet ciseau. Du côté des dépenses, sous l’effet de la récession, les allocations versées aux demandeurs d’emploi progresseraient de 4,1 milliards d’euros fin 2020. Mais c’est le chômage partiel, utilisé à grande échelle pendant le confinement décidé en mars et que l’Unédic finance pour un tiers, qui plombe la facture. Il coûterait cette année 8,3 milliards d’euros au régime.

Parallèlement, l’Unédic connaîtrait une baisse « historique » de 10 % de ses recettes. Plusieurs facteurs l’expliquent : reports et exonérations de cotisations, baisse de la masse salariale sur laquelle sont assises les contributions à l’assurance-chômage à la suite des réductions d’emplois dans le privé ou encore rentrées d’argent plus faibles en raison du chômage partiel, exonéré de cotisations.

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« En continuant d’amortir massivement les effets de la crise sur l’économie et auprès de millions de ménages, l’organisme paritaire, comme il l’a fait depuis mars, continue de jouer pleinement son rôle de stabilisateur économique et social », souligne l’Unédic dans un communiqué.

Les conséquences n’en sont pas moins terribles pour le régime : le déficit porterait la dette à 55,5 milliards d’euros fin 2020 (contre 37,4 milliards un an plus tôt) puis à 65,2 milliards d’euros fin 2021. Lors d’une conférence de presse, le directeur général de l’Unédic, Christophe Valentie, a cependant insisté sur « le niveau d’incertitudes élevé » qui entoure ces données. « On ne peut pas prévoir ce qui n’est pas prévisible : la question d’un second confinement ou la découverte d’un vaccin miraculeux dans deux semaines aura évidemment un impact », a-t-il ajouté.

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Alimentation : « Le problème des circuits courts est avant tout un problème d’offre, pas de demande »

Tribune. On ne compte plus les études montrant que les Français souhaitent manger plus local et plus responsable, à commencer par l’approvisionnement des cantines scolaires pour que nos enfants mangent enfin des produits frais, locaux et de saison. Lors de la présidentielle de 2017, un candidat [Jean-Luc Mélenchon] déclarait ainsi sa volonté de « privilégier systématiquement les circuits courts et les productions locales dans la commande publique (alimentation, fournitures, etc.) et les rendre obligatoires pour les cantines scolaires ».

Imaginons qu’une telle décision soit prise aujourd’hui. Par exemple, si Paris ou Bordeaux le décidaient ? Eh bien il n’y aurait tout simplement pas de production locale susceptible de fournir ces cantines.

Rendons-nous bien compte des ordres de grandeur. Pour relocaliser 10 % de la consommation en légumes de Paris, il faudrait mettre en culture 3 400 hectares de maraîchage, 1 100 pour l’agglomération de Bordeaux ou encore 620 pour celle de Nantes, qui vient de créer un potager urbain géant de 2,5 hectares pour en faire l’épicentre de son plaidoyer auprès de toutes les populations.

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Aujourd’hui, la production de n’importe quel maraîcher bio autour d’une agglomération est instantanément absorbée par les associations pour le maintien d’une agriculture paysanne (AMAP), par les magasins de producteurs ou autres enseignes bio. Le problème des circuits courts est donc avant tout un problème d’offre, pas de demande.

De nombreux verrous

La maire de Paris, Anne Hidalgo, l’a bien compris en décidant de participer aux investissements nécessaires à la mise en service de cette nouvelle agriculture nourricière au travers d’une coopérative, AgriParis.

Les agriculteurs, les maraîchers ne poussent pas dans les comités ou dans les plans alimentaires territoriaux (PAT), encore moins sur des terres nues qu’il faut équiper à hauteur de 100 000 euros en moyenne pour être dans de bonnes conditions de travail, dans une ferme de proximité en maraîchage diversifié (foncier, bâti, serres, irrigation).

Faute de terres, faute d’accompagnement, chaque année ce sont des centaines d’agriculteurs fraîchement diplômés qui échouent à s’installer. Et faute d’investissements adéquats, le revenu moyen du maraîcher en France s’établit à 750 euros par mois. Difficile dans ces conditions de répondre à la demande croissante en produits locaux !

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Si l’on ne fait rien, la situation ne risque pas de s’améliorer. Dans les dix ans qui viennent, 50 % des agriculteurs français vont faire valoir leurs droits à la retraite. Pour assurer la reprise de toutes ces exploitations à transmettre dans les prochaines années, il faudrait que la proportion des « hors cadres familiaux », ces paysans sans terre qui constituent aujourd’hui un tiers des candidats à l’installation, soit encore plus importante.

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Les entreprises savent-elles employer ?

« Pour faciliter les reconversions des salariés dont l’emploi serait menacé, le ministère du travail a soumis, le 9 octobre, aux partenaires sociaux l’idée de créer un dispositif destiné aux métiers en tension : un compte personnel de formation « métiers en tension » cofinancé par l’Etat, l’entreprise reconvertissant et l’entreprise recruteuse. »

Carnet de bureau. Sait-on pourquoi certains recrutements sont difficiles ? Les tensions sur le marché du travail ne cessent d’augmenter depuis 2015, notait le 8 octobre la direction de l’animation de la recherche, des études et statistiques du ministère du travail (Dares). Cadres en informatique, ingénieurs en bâtiment, aides à domicile : cette tension était, fin 2019, au plus haut niveau depuis 2011, avec « des besoins croissants de recrutement ».

Le Covid-19 n’a pas mis fin au phénomène. Pour « faciliter les reconversions des salariés dont l’emploi serait menacé », le ministère du travail a soumis, le 9 octobre, aux partenaires sociaux l’idée de créer un dispositif destiné aux métiers en tension : un compte personnel de formation « métiers en tension » cofinancé par l’Etat, l’entreprise reconvertissant et l’entreprise recruteuse.

La Dares et Pôle emploi ont identifié six critères pour analyser les facteurs à l’origine des tensions : la fréquence élevée des besoins qui, atténuée par la crise, pourrait améliorer la situation dans le BTP par exemple ; les conditions de travail contraignantes (contraintes physiques, rythmes, horaires décalés, travail répétitif…) qui compliquent durablement l’emploi des aides à domicile ou aides ménagères ; la non-durabilité de l’emploi – l’attractivité du CDD est relative – ; le manque de main-d’œuvre disponible comme pour les dessinateurs en électricité par exemple ; l’inadéquation géographique et enfin le lien entre la spécialité de la formation et le métier.

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Ce n’est pas la première étude à se pencher sur l’inadéquation entre l’offre et la demande d’emploi, interrogeant notamment l’employabilité des chercheurs d’emploi. Le collectif Pacte civique propose de changer de paradigme en questionnant la capacité des entreprises à employer, aussi bien pour recruter à l’extérieur qu’en mobilité interne.

Accessible en Open source

Quelle connaissance les entreprises ont-elles des compétences disponibles au sein de leur effectif ? Utilisent-elles au mieux les savoir-faire de leur collectif ? La transformation numérique a été pour beaucoup l’occasion d’actualiser leur référentiel métier et de redécouvrir leurs collaborateurs, pour faciliter des passerelles entre les métiers des travaux publics et ceux des éoliennes, chez Orange, par exemple.

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Le collectif Pacte civique, membre fondateur de l’association Territoire zéro chômeur de longue durée, propose d’analyser la capacité des entreprises à employer, par la mise en place d’un questionnaire co-construit sur mesure avec les salariés. Ce questionnaire leur permet de noter, sous le couvert de l’anonymat, la qualité du dialogue dans leur entreprise, le travail d’intégration des nouvelles recrues, le respect des contraintes personnelles, leur sentiment d’être utiles à l’entreprise, le soutien qu’ils reçoivent pour se former, etc.

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A Clermont-Ferrand, les espaces de coworking font le plein

« Autre argument qui séduit les entreprises et les travailleurs indépendants : la flexibilité des espaces de coworking. »

Dans l’ancienne menuiserie aux hauts murs blancs reconvertie en espace de travail partagé, il n’y a plus un bureau libre. Les coworkeurs pianotent sur leurs ordinateurs, cachés sous leurs masques. « Ici, il y a l’équipe du Connecteur [une association spécialisée dans l’innovation entrepreneuriale], ici un pôle de photographes, là d’autres entrepreneurs et là-bas un studio photo », explique Claude Servol, le fondateur de Cowork’it, en déambulant au milieu de l’open space de 300 m2.

Avant le confinement, seuls huit postes de travail avaient trouvé preneur. Aujourd’hui, les vingt postes sont occupés par des indépendants ou des salariés en télétravail. Tous occupent un poste fixe afin de limiter les risques liés au Covid-19.

C’est le cas de Simon Tinquaut, chef de projet et ingénieur en conception mécanique dans une entreprise qui conçoit des compresseurs industriels. Le jeune homme a été embauché pendant le confinement par cette société basée à Saint-Cyprien, dans la Loire, à 145 kilomètres de Clermont-Ferrand. Il souhaite alors s’installer avec sa compagne dans la préfecture du Puy-de-Dôme et propose à l’entreprise de travailler à distance depuis un espace de coworking, afin d’éviter trois heures de trajet quotidien et d’exercer dans un environnement convivial.

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« Nous avons accepté sa proposition, car, pour une entreprise comme la nôtre, c’est un excellent moyen de ne pas nous priver de talents qui ont des contraintes géographiques tout en offrant à notre salarié un cadre de travail constructif, avec du lien social », précise Christelle Linossier, présidente de l’entreprise MAC3 SAS. Simon Tinquaut, quant à lui, apprécie de trouver dans cet espace une ambiance similaire à celle d’une entreprise, mais aussi plus de tranquillité. « Comme je ne suis pas au sein de l’entreprise, les demandes inopinées sont plus rares. Les échanges sont davantage planifiés par courriel ou par téléphone, et je suis donc moins déconcentré et plus efficace dans mon travail », explique l’ingénieur, qui ne se rend que très rarement au siège de l’entreprise.

Une communauté impliquée

Egalement installé dans le centre-ville de Clermont-Ferrand, Nicolas Roger, de l’espace de coworking Local 19, observe le même phénomène de regain d’intérêt pour son tiers lieu. Ces derniers mois, son téléphone n’arrête pas de sonner et, même si les coworkeurs ne sont pas tous revenus à plein temps, les huit bureaux qu’il propose sont tous loués. « Je reçois au moins deux appels par jour, contre un par mois auparavant », raconte le photographe, qui a cofondé cet espace il y a dix ans.

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