Archive dans novembre 2020

La technologie viendra-t-elle au secours des télétravailleurs ?

Avec la pandémie de Covid-19 et les confinements instaurés dans de nombreux pays, le télétravail s’est imposé dans le quotidien de nombreux travailleurs. Un déplacement massif rendu possible grâce à différents outils technologiques. Ceux-ci ont néanmoins des limites : les visioconférences fatiguent, les notifications à outrance déconcentrent et ces outils peinent à répondre à toutes les problématiques liées au télétravail, comme l’isolement social. Qu’y peuvent les entreprises du numérique ? Quelles sont les innovations envisagées pour améliorer le quotidien des travailleurs à domicile ?

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  • Les affres de la visioconférence

La visioconférence concentre beaucoup de critiques, dont celles de Dominique Soler, président du cabinet d’ergonomie Human Design Group (HDG) :

« En visio, l’image et le son sont décalés, cela induit une surcharge cognitive. Cela donne aussi le sentiment que l’interlocuteur n’est pas concerné. On perd des informations corporelles clés, comme la gestuelle des mains. On a beaucoup de mal à déchiffrer ce que l’on nous dit. »

Delphine Donne-Crock, directrice de la division créativité et productivité chez Logitech, le fabricant de souris, claviers et webcams, dresse un constat pessimiste sur les réunions mêlant présentiel et distanciel : « Les personnes assises dans la salle de réunion sont avantagées par rapport aux télétravailleurs. » Dominique Soler ajoute que « les gens ont du mal à prendre la parole. Si l’on n’a pas un excellent chef d’orchestre pour donner et relancer la parole, certains ne participent plus ».

Si aucune solution miracle ne semble se dégager pour résoudre tous ces problèmes, quelques pistes sont avancées. Alex Cho, chef de la division PC de Hewlett-Packard, explique que son entreprise travaille sur la vision et l’ouïe :

« Nos études montrent qu’avec la pandémie les consommateurs veulent mieux entendre, mieux voir en visioconférence, qu’elle soit professionnelle ou familiale, mais aussi lorsqu’ils regardent des films et écoutent de la musique. Nous travaillons à des haut-parleurs multiples, à des groupes de micros qui gomment les bruits parasites par intelligence artificielle, à des capteurs d’image plus performants pour les webcams. »

Logitech réfléchit, quant à lui, à « des boutons de raccourci » qui nous aideraient à mieux participer, rapporte Delphine Donne-Crock – sans donner plus de précision pour des raisons de confidentialité. On imagine, par exemple, un bouton coupant le micro directement depuis le clavier.

D’autres idées plus surprenantes – voire inquiétantes – sont avancées. Concernant la fatigue liée aux visioconférences qui s’enchaînent, Andrew Bowell, qui pilote les investissements du groupe Hewlett-Packard dans les start-up (HP Tech Ventures), imagine ainsi un outil qui nous alerterait « quand notre attention dérive » – sans préciser s’il s’agit d’un projet en développement ou d’une simple idée en l’air.

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  • L’explosion des notifications

Beaucoup se plaignent d’une explosion des notifications, « les manageurs en particulier », souligne Dominique Soler. Celles-ci peuvent parfois se compter en centaines pour une seule journée.

Des innovations sont-elles en cours du côté d’Android, le système d’exploitation mobile le plus utilisé au monde ? Interrogé à ce sujet, un porte-parole de Google – qui développe Android – se contente de renvoyer vers le mode d’emploi du logiciel, qui explique les différents réglages de notifications déjà possibles.

Les chercheurs n’ont-ils vraiment rien à nous offrir de neuf ? Dominique Soler n’est pas optimiste : « Je ne sais combien de start-up travaillent là-dessus depuis des années. » Les machines peinent encore à prendre des décisions si complexes sans faire d’erreur.

  • La maison, lieu de toutes les nuisances

Travailler à la maison signifie partager l’espace, avec les nuisances que cela implique, et parfois déplacer son poste de travail d’une pièce à l’autre. Ce qui appelle des évolutions ergonomiques auxquelles Hewlett-Packard dit travailler. Alex Cho raconte :

« Vous devriez voir ce qu’il y a dans nos labos ! On ressort d’anciens prototypes écartés parce qu’ils ne faisaient pas sens à l’époque, on reprend des concepts qui n’ont pas percé, on réfléchit à des choses nouvelles. »

Confidentialité oblige, Alex Cho ne fera aucune révélation, rappelant juste travailler « à toute sorte de technologies sans fil ». Mais, en l’écoutant, on entrevoit des ordinateurs portables beaucoup plus grands, qui permettent d’afficher plusieurs documents côte à côte et de taper plus confortablement. Alex Cho souligne aussi que les PC de bureau de type monobloc « tout en un » pourraient jouer un rôle dans l’amélioration de nos postes de travail à domicile : « Ils sont à la fois plus confortables que les PC portables et plus faciles à déplacer que les PC de bureau classiques. »

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  • Un lien social distendu

Autre écueil du télétravail : le sentiment d’isolement. Les réponses envisagées sont surprenantes. Harry Moseley, directeur de la technologie (CIO) de Zoom, logiciel de visioconférence, entrevoit une solution : réinventer les pauses-café et déjeuner grâce à la « visio ». Une intelligence artificielle serait chargée de programmer des rendez-vous entre des employés qui ne se connaissent pas, afin de « reproduire les rencontres qui se produisent spontanément dans un environnement de travail présentiel ».

Harry Moseley évoque une autre idée, encore moins consensuelle : laisser nos webcams connectées en permanence. « Ça ne pose plus problème, croit-il savoir. Les gens se sont habitués aux chats qui passent et aux enfants qui déboulent. La visio toujours allumée n’interdit pas de déconnecter de temps en temps pour aller faire un tennis, ou que sais-je. On se fait confiance. Le manageur ne gère plus des gens, mais des “rendus”. »

Pour rompre la solitude des télétravailleurs, les regards sont également tournés vers la réalité virtuelle (VR). L’espoir est qu’en enfilant un casque on ait l’impression de s’asseoir à côté de ses collègues. Mais selon Dominique Soler, la réalité n’est pas à la hauteur de cet espoir : « L’expressivité des avatars en 3D est encore très pauvre. Comment la rapprocher de celle des humains ? Comment réduire les coûts cognitifs induits par cet appauvrissement ? » Andrew Bowell concède :

« La VR en est encore à ses balbutiements. Mais nous travaillons à diverses améliorations. Nous équipons par exemple des casques de VR de capteurs qui transmettent des informations sur les traits du visage ou les mouvements des yeux, ce qui pourrait permettre de déterminer comment une personne se sent et de communiquer l’information à ses collègues. »

  • Le numérique ne peut pas tout

La plupart des problèmes causés par la massification du télétravail seront donc difficiles à corriger. « Les interfaces numériques n’arrivent pas à la cheville des interfaces humaines », souligne Dominique Soler, qui pense que les outils numériques que nous utilisons en télétravail érodent notre productivité. Ainsi estime-t-il que « refaire tout fonctionner avec les outils numériques qu’on connaît aujourd’hui, ou ceux qui arriveront dans un futur proche, c’est illusoire. D’autant que beaucoup de décideurs de grandes entreprises contraintes de recourir au télétravail pensent que la situation n’est pas durable et qu’ils font le dos rond. Le changement n’est pas leur priorité, ils ne font pas de gros investissements ».

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« Les institutions européennes et les décideurs politiques nationaux ne peuvent pas se permettre d’oublier la jeunesse une nouvelle fois »

Tribune. La crise financière mondiale de 2008 avait déjà laissé de profondes cicatrices en termes de pertes d’emploi et de chômage. En Europe en particulier, le chômage des jeunes a persisté. Aujourd’hui, le Covid-19 risque d’avoir le même effet pour les moins de 25 ans. Pourtant, ni les dirigeants français, italiens ou espagnols ni la présidente de la Commission européenne n’ont donné la priorité à ce problème dans leurs récents discours.

Il est temps que les dirigeants se concentrent sur le risque de perdre une génération. Des politiques audacieuses seront nécessaires. Pendant la crise financière mondiale, le taux de chômage des jeunes était passé d’environ 10 % à 19 % aux Etats-Unis, et de 16 % à 26 % dans l’Union européenne (UE). Il n’est revenu à son niveau de 2008 qu’en 2018 dans l’UE, beaucoup plus lentement qu’aux Etats-Unis. En Grèce, en Espagne et en Italie, il était en 2019 toujours plus élevé qu’avant 2008.

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Une nouvelle flambée du chômage des jeunes pourrait également mettre une décennie, voire plus, à se normaliser. Les premiers signes sont déjà visibles : le chômage des jeunes aux Etats-Unis était environ deux fois plus élevé en juillet 2020 qu’en juillet 2019. En Europe, il a moins augmenté, mais il est quand même passé de 15 % à plus de 16 % au cours des deux premiers trimestres de 2020, alors que le chômage des plus de 55 ans a diminué.

Ne pas oublier une nouvelle fois la jeunesse

Plus inquiétant encore, le pourcentage de jeunes qui ont renoncé à chercher un emploi a augmenté de cinq points. Certains pays comme l’Espagne et la Croatie sont plus durement touchés. Alors que l’Europe entre dans sa deuxième phase de confinement significatif, ces chiffres risquent de se détériorer rapidement.

Le chômage des jeunes cause des dommages sur le long terme. Les travailleurs qui ont été au chômage dans leur jeunesse ont tendance à gagner beaucoup moins au cours de leur vie et envisagent l’avenir avec moins d’optimisme. Ils ont également tendance à quitter le domicile parental et à fonder une famille plus tard. En moyenne, les Italiens ne quittent le domicile de leurs parents qu’à l’âge de 30 ans. Il n’est donc pas surprenant que le taux de fécondité des Italiens et des Espagnols soit parmi les plus bas d’Europe.

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Les institutions européennes et les décideurs politiques nationaux ne peuvent pas se permettre d’oublier la jeunesse une nouvelle fois. La première grande priorité est de s’assurer que la politique macroéconomique européenne soit appropriée. Une des explications de la lenteur de la reprise de l’emploi chez les jeunes après la crise financière a été la deuxième récession subie par l’Europe en 2011-2013.

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Télétravail : la négociation au point mort

Sitôt engagée, sitôt enlisée. La deuxième séance de négociation sur le télétravail, que les partenaires sociaux ont organisée mardi 10 novembre, a, une fois de plus, montré la profondeur des désaccords entre les protagonistes. « Jeu de dupes », « théâtre d’ombres », « grand n’importe quoi »… A l’issue d’une rencontre qui a duré cinq heures, plusieurs responsables syndicaux ont reproché au patronat de camper dans son refus de parvenir à un accord national interprofessionnel (ANI), s’imposant à l’ensemble des entreprises.

Un immobilisme que les organisations de salariés jugent regrettable à l’heure où le gouvernement souhaite que ce mode d’organisation soit utilisé au maximum par les employeurs depuis le deuxième confinement, instauré le 30 octobre. Pour les centrales syndicales, il y a urgence car le calendrier est serré : à ce stade, il ne reste plus que trois réunions, d’ici au 23 novembre, pour permettre au processus de déboucher, le cas échéant, sur un compromis.

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Le 3 novembre, lors de la première séance de négociation, le patronat avait proposé une sorte de sommaire pour un projet d’accord avec sept grands chapitres qui balayent toutes les problématiques liées au télétravail : mise en place, accompagnement des personnels et des managers, préservation de la relation de travail avec le salarié ou encore « circonstances exceptionnelles » comme celles de la pandémie, etc.

« Ne pas quitter le ring au premier round »

Le problème, c’est que les échanges tardent à décoller, d’après Catherine Pinchaut (CFDT). « Il ne va pas falloir qu’on nous mène en bateau trop longtemps », s’est-elle indignée. A l’en croire, les mouvements d’employeurs n’ont fait que répondre par la négative à ses demandes sur plusieurs points cruciaux – par exemple la définition des postes éligibles au télétravail. « Ça commence à bien faire, on tourne en rond », a-t-elle ajouté, en précisant qu’elle n’avait nullement l’intention de prolonger l’exercice « si on n’a pas de biscuit ». Il est nécessaire, selon elle, de poser « un cadre ». Elle en est d’autant plus convaincue que, à l’heure actuelle, des entreprises « ne jouent pas le jeu » et rechignent à recourir au télétravail, alors que les pouvoirs publics le réclament, pour contenir la propagation du Covid-19.

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Du côté de Force ouvrière, on se veut plus mesuré. Sa représentante, Béatrice Clicq, a cependant jugé que cette négociation était « un combat de boxe ». « On y va avec la volonté d’avancer et de ne pas quitter le ring au premier round », a-t-elle complété. Selon la dirigeante confédérale, il s’agit de ne pas « laisser la main à l’arbitre » – comprendre au gouvernement – et de ne pas « siffler la fin du match ». Elle a cependant reconnu que, « à chaud », le patronat opposait « beaucoup de non » aux propositions syndicales. « Il faut obtenir des avancées très rapidement », a-t-elle insisté, en prévenant : « Ce n’est pas parce qu’on négocie un texte qu’à la fin, on le signera. » Son but reste de conclure un accord qui soit normatif.

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Printemps annonce la fermeture de sept magasins du groupe

A l’entrée du magasin Printemps Haussmann, le 28 mai à Paris.

Le groupe Printemps s’impose un régime sec. Le distributeur qui détient l’enseigne de grands magasins Printemps et la chaîne Citadium a présenté « un plan de relance » à ses partenaires sociaux, mardi 10 novembre. Il consiste à fermer quatre de ses 19 magasins Printemps et trois de ses huit boutiques Citadium exploitées en France.

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D’ici à janvier 2022, le groupe détenu depuis 2013 par le fonds Disa, aux mains de personnalités du Qatar, va tirer le rideau de ses magasins Printemps du centre Italie 2 à Paris, du Havre, de Strasbourg et de Metz, ainsi que les adresses qu’exploite Citadium à Paris, sur l’avenue des Champs-Elysées et la place de la Nation, et à Toulon. Le plan porte également sur une réorganisation des services au sein du siège du Printemps.

Baisse chronique de fréquentation

Ces mesures sont destinées à « réduire les pertes opérationnelles du groupe », avance une porte-parole du Printemps, sans toutefois en chiffrer le montant. Elles déboucheront sur la suppression de 428 emplois au sein de l’entreprise, d’ici à juillet 2021 ; 70 % des suppressions d’emplois concernent des postes de collaborateurs employés en magasins et le reste relève d’une réorganisation de ses services au sein de la centrale d’achat. Le groupe s’engage d’ores et déjà à « éviter les licenciements » en favorisant des mesures de reclassement. En interne, les salariés s’inquiètent sur un plan qui porte sur « plus de 10 % des effectifs ».

Le groupe est dans le rouge depuis 2016, précise une porte-parole

Les difficultés du groupe, dont les ventes ont atteint 1,7 milliard d’euros l’an dernier, ne sont pas nouvelles. L’enseigne Printemps est confrontée à la mauvaise santé du marché de l’habillement en France et à la baisse chronique de la fréquentation des grands magasins. Bien que le groupe revendique 70 millions de visiteurs par an, les ventes sont « en recul de 17 % sur les cinq dernières années », précise-t-il.

La mise à l’arrêt du marché du tourisme en France, depuis le début de la pandémie de Covid-19, a exacerbé sa dépendance à la clientèle locale, notamment à Paris, où il exploite le grand magasin Printemps du boulevard Haussmann. Le groupe est dans le rouge depuis 2016, précise une porte-parole.

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Manifestement, après avoir financé des rénovations spectaculaires au sein de l’enseigne, ses actionnaires ont perdu patience. Fin février, Paolo de Cesare, président du groupe depuis 2013, avait été remercié. Il n’a été remplacé que huit mois plus tard, lors de la nomination de Jean-Marc Bellaïche. Cet ancien associé du cabinet de conseil Boston Consulting Group et directeur de la stratégie de la marque américaine Tiffany est entré en fonction le 1er octobre.

Avec le reconfinement, la panique gagne les commerçants français

Lyon le 6 novembre 2020.
Bertrand Guyot, directeur du magasin de meubles et décoration Benoit-Guyot dans le deuxième arrondissement.

Bruno Amsellem / Divergence pour «Le Monde»

Six mois après le premier confinement destiné à lutter contre la crise sanitaire liée au Covid-19, Le Monde a réinterrogé les commerçants de Lille, Marseille, Paris, Lyon et Dolus-d’Oléron (Charente-Maritime) rencontrés à la mi-avril. A la résignation dont ils faisaient preuve au printemps ont succédé le désespoir et la colère de devoir fermer leurs établissements à la veille de l’habituelle ruée des achats de Noël. La possibilité de vendre en ligne et de livrer en magasin n’est pas une solution miracle, alors que novembre et décembre peuvent représenter jusqu’à 60 % de l’activité d’un détaillant de jouets.

Or dans le même temps, ils expliquent que leurs différends avec leurs bailleurs et leurs assureurs ne sont toujours pas réglés. A l’instar des 200 000 commerçants concernés par ces fermetures administratives en France, et en dépit de la flambée de la pandémie, tous espèrent que le gouvernement autorisera la réouverture des commerces de produits non essentiels dès le 12 novembre.

  • « Laissez-nous travailler »
    Thierry Wainstein, détaillant de chaussures Félix Shoes, à Lille

Après « l’abnégation » dont il a fait preuve lors du premier confinement, Thierry Wainstein, troisième génération à la tête de la boutique de chaussures Félix Shoes, à Lille, a la « rage ». Sa boutique affiche une baisse de 25 % du chiffre d’affaires. Jusqu’ici, pas de licenciements. Mais il prévoit désormais « une catastrophe » tant « l’ambiance est bizarre ». « L’argent est là, mais les clients n’ont plus envie de consommer, préférant faire des économies au cas où. » Ce détaillant indépendant de chaussures avait pourtant bien redémarré son activité, au lendemain du déconfinement de mai. « C’était extraordinaire, se souvient-il. Les quinze premiers jours, on pensait même qu’on rattraperait ce qu’on avait perdu. » Mais la fièvre acheteuse est vite retombée. « Faut nous laisser exercer. On est en train d’asphyxier l’économie », lance M. Wainstein, qui plaide pour une annulation de ses loyers. « Quoi qu’il arrive, il y aura des morts du Covid-19, donc laissez-nous au moins travailler. »

  • « Il faudra plusieurs années pour se relever »
    Laurence Renaux-Guez, gérante de la quincaillerie Maison Empereur, à Marseille

« Je suis dans ma boutique et j’ai presque envie de pleurer. On vient de recevoir toute la marchandise commandée pour Noël… C’est une catastrophe. » A la Maison Empereur, magasin du centre-ville de Marseille aux 5,5 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel, l’optimisme et la soif d’entreprendre de Laurence Renaux-Guez, 52 ans, sont à terre. « En avril, on pensait que c’était juste un mauvais moment à surmonter. L’été a été très bon, grâce à de nombreux touristes. Mais, dès septembre, on a senti l’angoisse remonter », raconte-t-elle. Prudente, Mme Renaux-Guez n’a pas touché au million d’euros d’aide (au taux de 0,25 %) de la Banque publique d’investissement (BPI), reçu dès avril. « Je le garde par sécurité, mais je sais que, si je l’utilise, je n’arriverai pas à le rembourser », redoute-t-elle.

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Le taux de chômage atteint 9 % au troisième trimestre, selon l’Insee

La hausse était prévisible, mais elle n’en est pas moins intrigante, à première vue. Au troisième trimestre, le nombre de chômeurs, au sens du Bureau international du travail (BIT), a très fortement augmenté : + 628 000 sur l’ensemble du territoire (outre-mer compris, sauf Mayotte), selon les statistiques diffusées, mardi 10 novembre, par l’Insee. Le taux de chômage s’établit désormais à 9 % de la population active, soit un pourcentage supérieur (de 0,9 point) à celui des trois derniers mois de 2019, avant que la crise économique liée à l’épidémie de Covid-19 ne survienne.

Ces données sont de nature à semer la perplexité, dans la mesure où durant l’été, l’économie tricolore a connu une nette embellie, après la brutale entrée en récession de la mi-mars. Une embellie qui s’est d’ailleurs traduite par un reflux du nombre de demandeurs d’emploi entre début juillet et fin septembre (– 11 % pour la catégorie A de Pôle emploi).

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Ces tendances, malaisées à suivre et à démêler, tiennent au fait que les enquêtes de l’Insee ont été bousculées par un contexte hors norme. Premier élément à mentionner : les normes du BIT, qui sont différentes de celles de Pôle emploi, stipulent qu’un individu n’est considéré comme chômeur qu’à plusieurs conditions (notamment être disponible immédiatement pour travailler et rechercher activement un poste). Or les personnes correspondant à ce profil avaient vu leur nombre reculer au printemps, à cause du confinement : certaines avaient cessé de prospecter les entreprises dans les secteurs mis à l’arrêt tandis que d’autres n’étaient pas libres de leurs mouvements car elles devaient garder leurs enfants à la maison. En outre, la collecte des informations par l’Insee s’était effectuée dans des conditions très dégradées, en particulier de la mi-mars à la mi-mai.

« Une baisse en trompe-l’œil »

Résultat : le taux de chômage, au sens du BIT, avait enregistré, durant le premier semestre, « une baisse en trompe-l’œil », pour descendre à 7,1 %. « Le troisième trimestre marque un retour à la normale, concernant les comportements de recherche [d’emploi] », souligne l’Insee, ce qui a pour effet d’accroître le nombre de chômeurs. Il s’agit donc d’un rebond, « en partie mécanique », mais qui « témoigne bien (…) d’une nette dégradation du marché du travail ».

Cette envolée du chômage a été « atténuée par le recours au chômage partiel et par le basculement dans l’inactivité de nombreuses personnes, qui ont cessé leurs démarches pour décrocher un contrat de travail », décrypte Eric Heyer, de l’Observatoire français des conjonctures économiques.

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Taux de chômage à 9 %, forte hausse au troisième trimestre

Illustration Pôle emploi.

Le taux de chômage a bondi de 1,9 point au troisième trimestre 2020 pour s’établir à 9 % de la population active en France (hors Mayotte), selon les chiffres publiés mardi 10 novembre par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).

La France compte 2,7 millions de chômeurs, soit 628 000 personnes de plus au cours du trimestre, entre juillet et septembre. Sur un an, le taux de chômage, mesuré selon les normes du Bureau international du travail (BIT), est en hausse de 0,6 point.

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Le taux au 3e trimestre se situe à 0,9 point au-dessus de son niveau d’avant la crise sanitaire au 4e trimestre 2019, précise l’Insee. Le chiffre est conforme aux dernières prévisions de l’institut. Dans une note de conjoncture, au début d’octobre, l’Insee avait prévu que le taux de chômage atteindrait 9 % au 3e trimestre puis 9,7 % à la fin de 2020, soit 1,6 point de plus qu’un an plus tôt.

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Baisse en trompe l’œil en début d’année

Le reconfinement décidé depuis face à la reprise de l’épidémie de Covid-19 rend toutefois les prévisions économiques pour la fin de l’année et 2021 compliquées.

La forte hausse au 3e trimestre survient après une baisse « en trompe-l’œil » aux deux trimestres précédents. Au deuxième trimestre, malgré la baisse du nombre d’emplois, le taux de chômage avait ainsi diminué de 0,7 point, à 7,1 %, mais c’était lié au confinement ayant empêché beaucoup de personnes sans emploi d’en chercher un. Déjà, au premier trimestre, le taux de chômage avait reculé de 0,3 point, à 7,8 %.

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Des reculs inhérents à la définition même du chômeur au sens du BIT, traditionnel thermomètre mesurant le taux de chômage, qui définit notamment un chômeur comme une personne ayant recherché activement un emploi dans le mois précédent.

Le rebond du chômage au 3e trimestre « est d’une ampleur inédite depuis que l’Insee le mesure (1975), mais est en partie mécanique, par contrecoup de la baisse en trompe-l’œil liée au confinement », rapporte ainsi l’Insee.

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Le Monde avec AFP

Covid-19 : les enjeux d’une « grève sanitaire » dans les établissements scolaires

Des élèves d’une école primaire de Bischwiller (Bas-Rhin), le 2 novembre.

L’école peut-elle rester l’exception au serrage de vis national entamé avec le second confinement ? En appelant à leur première « grève Covid », les syndicats enseignants répondent par la négative. La FSU, FO, la CGT, le Snalc, le SNCL-FAEN et SUD-Education ont déclaré une « journée de grève sanitaire », mardi 10 novembre, « partout où les conditions sanitaires ne seraient pas réunies ». Deux syndicats de premier plan, le SGEN-CFDT et le SE-UNSA, n’ont pas rejoint cet appel.

  • Au lycée, des enseignants concentrés sur la mise en place des demi-groupes

Entre l’annonce de cette grève – le 4 novembre – et sa date effective, l’éducation nationale a signalé une avancée susceptible de couper l’herbe sous le pied des grévistes : les lycées peuvent désormais organiser l’enseignement en effectifs réduits avec une partie des élèves à distance, a fait savoir Jean-Michel Blanquer le 5 novembre.

Dès la rentrée du 2 novembre, les lycées s’étaient en effet mobilisés, déclarant la grève ou menaçant de le faire, pour obtenir les demi-groupes. De nombreux enseignants confiaient lundi soir au Monde qu’ils ne se joindraient pas au mouvement, considérant avoir obtenu gain de cause. L’heure est donc à la mise en place concrète de ces demi-groupes dans les lycées, une application de la nouvelle donne sanitaire encore hétérogène. « Les réponses aux demandes de dédoublement se font petit à petit, analyse Sophie Vénétitay, du SNES-FSU, avec des choix assez différents de roulements, parfois par blocs de plusieurs jours, parfois sur une demi-journée. »

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  • Les collèges pourraient davantage se mobiliser

Les choses se compliquent cependant pour les collèges. N’ayant pas obtenu le dédoublement des classes, ils pourraient davantage suivre l’appel du 10 novembre. « Beaucoup d’enseignants de collège ne comprennent pas pourquoi ils n’ont pas eu droit à cette mesure, rapporte Jean-Rémi Girard, du Snalc. Alors qu’ils ont des soucis assez similaires à ceux des lycées sur le brassage au moment des entrées et des sorties, dans les couloirs et à la cantine. »

Le SNES-FSU reproche à Jean-Michel Blanquer de ne pas être allé « au bout de la logique » en laissant les collèges en marge du dispositif. Le 6 novembre, sur RTL, le ministre de l’éducation nationale s’en est expliqué, arguant d’une densité « en général moins forte » au collège, où les élèves peuvent plus facilement rester dans la même classe toute la journée – puisqu’ils ne sont pas mélangés, comme les lycéens, pour les enseignements de spécialité. Les collégiens sont en outre considérés comme moins contagieux, a-t-il ajouté.

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Geoffroy Roux de Bézieux : « Il faut rouvrir tous les commerces le plus rapidement possible »

Le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, à Matignon, en novembre 2019.

Alors que les commerces jugés « non essentiels » sont de nouveau fermés depuis le reconfinement, le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, qui assure avoir mis en garde l’exécutif, estime que le gouvernement « ne peut pas prendre des décisions en quarante-huit heures », auxquelles les entrepreneurs ne sont « ni préparés ni associés ».

Comprenez-vous la colère qui monte autour de la question de l’ouverture des commerces ?

Je ne suis pas surpris car j’avais prévenu le gouvernement avant la décision. Il y a une profonde colère, un profond désespoir, qui s’est installé chez des centaines de milliers d’entrepreneurs, particulièrement les commerçants qui sont confrontés parfois à des situations kafkaïennes. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’en leur imposant ces nouvelles mesures de confinement, on met en péril, dans beaucoup de cas, ce qui constitue leur patrimoine, le travail de toute une vie. Dans certains cas, ils ne se remettront pas de cette crise.

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Qu’allez-vous demander au cours de la réunion qui doit se tenir jeudi 12 novembre à Bercy sur le sujet ?

La bonne solution, c’est de rouvrir tous les commerces, le plus rapidement possible. Peut-être avec des conditions sanitaires plus strictes, peut-être avec des jauges à revoir, peut-être avec un système de rendez-vous. Mais on ne peut pas passer le mois de décembre avec des magasins fermés. Ce serait un tsunami économique. Et j’ajoute que l’impact va au-delà des commerces : quand les magasins de jouets sont fermés, ce sont des fabricants qui sont touchés.

A quelle date faut-il rouvrir ?

Le plus important est de donner rapidement un signal, une perspective. Les entrepreneurs ont besoin d’anticiper et d’espoir pour vivre. Il y a un risque que cette colère se tourne vers le gouvernement. Si en décembre, les commerces non alimentaires sont fermés, il sera difficile de maîtriser ce que l’on voit monter.

Ce sera plus difficile pour les restaurants…

Regardez l’exemple de Singapour. Pourquoi ne pas demander aux gens qui veulent aller au restaurant d’accepter d’être géolocalisés ? Il faut qu’on accepte que cette technologie soit mise temporairement au service de la lutte contre la pandémie.

Comment redonner aujourd’hui des perspectives aux entreprises ?

Soyons justes : on a tous été pris de court par l’ampleur de cette deuxième vague. Maintenant, ce qui semble se dessiner, c’est que l’on va devoir vivre et travailler avec le virus jusqu’à ce qu’un vaccin soit disponible. C’est ça la réalité. Le gouvernement ne peut pas prendre des décisions en 48 heures, auxquelles nous ne sommes ni préparés ni associés. Ce qu’on attend de l’exécutif, c’est une stratégie sanitaire et économique de long terme. Dans ce contexte, la parole publique est très importante, et le « stop and go » est dévastateur pour la confiance.

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