Archive dans octobre 2020

Quand « les entreprises ne savent plus prédire le risque »

Tribune. La pandémie nous a appris quelque chose : en dépit des sommes colossales que nos entreprises consacrent à vouloir le maîtriser, elles ne savent plus prédire le risque. Elles échouent à réconcilier la rigidité des méthodes de gestion du risque et l’agilité indispensable pour être en capacité d’absorber les chocs imprévus. La planification traditionnelle, linéaire, ne fonctionne plus. Alors, posons la question : dans un monde marqué par la fréquence, l’imprévisibilité et la force des chocs extérieurs, doit-on encore prévoir le risque ?

Dans le nouveau contexte, acceptons de renoncer à « savoir » ce qui va se produire. Organisons plutôt la résilience, cette capacité non pas à cerner les risques à l’avance mais à réagir vite et bien, cette nouvelle qualité qui nous permettra d’adopter des comportements adaptés à un environnement changeant.

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Nos entreprises doivent nécessairement installer un corpus minimum de procédures centralisées et homogènes, mais doivent tout autant imposer l’autonomie de décision nourrie de l’intelligence des situations. Cette double piste est la clé du succès, voire de la survie, de nos entreprises.

L’impensable et pas seulement l’inattendu

Elles devront inventer une nouvelle diversité, authentiquement opérationnelle, pour faire émerger des talents internes d’un nouveau genre, capables de poser des diagnostics et d’apporter des réponses complexes. Les femmes et les hommes de l’entreprise réclameront et devront se voir octroyer un droit renforcé à l’initiative. C’est vital. Car oui, pour se protéger du risque, l’entreprise doit encourager la prise de risque.

Il existe des spécialistes. Ce sont les militaires. Eux savent que planification stratégique et discipline stricte sont les préalables indispensables à une prise de décision rapide, autonome, pertinente

Comment faire ? Avec quels outils ? Pour remplacer la prévision traditionnelle, probabiliste, du risque, nous avons besoin de collaborations innovantes pour explorer les différents mondes dans lesquels nous risquons de nous retrouver. Il est temps de prendre nos distances avec les calculs statistiques de fréquence et de gravité pour redécouvrir la puissance du « scénario planning », et commencer à prendre conscience des options stratégiques dont on ignore absolument tout aujourd’hui. Les scénarios doivent décrire des mondes différents et pas seulement des résultats différents dans le même monde. L’impensable, et pas seulement l’inattendu.

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Télétravail, StopCovid, masques : il faut « installer les mesures de lutte contre l’épidémie dans la durée »

L’application StopCovid, sur un smartphone, en juin.

La chercheuse italienne Vittoria Colizza dirige à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) un laboratoire spécialisé dans la modélisation des épidémies. Ses travaux sur les écoles, les stratégies de contrôle du virus, ou encore l’efficacité du contact tracing apportent un regard critique sur la réponse à l’épidémie. Pour contenir la seconde vague, elle appelle à la mise en place de mesures de long terme comme le télétravail.

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Quelle est la situation épidémique en France ?

L’un des indicateurs importants est le nombre d’hospitalisations, qui est une donnée plus fiable que le nombre de cas pour nous renseigner. La situation est inquiétante lorsqu’on a des niveaux assez élevés et une dynamique soutenue, comme observé en France dans les dernières semaines. On a bien une courbe exponentielle, mais la dynamique est plus lente que dans la première vague.

Les données d’hospitalisations jusqu’à la mi-septembre montraient un taux de reproduction, R, autour de 1,4-1,5 pour certaines régions. Cela correspond à un temps de doublement de l’ordre de onze à quinze jours, contre trois jours pour la première vague. Les dernières données semblent indiquer un ralentissement du taux de croissance de l’épidémie, qui reste à confirmer.

Vous parlez de temps de doublement, de croissance exponentielle, de R… Comment s’y retrouver ?

Ils racontent la même chose, mais de façon différente. Le R est plus facile à saisir car il y a un seuil de référence : au-dessus de 1, l’épidémie progresse, en dessous, elle régresse. Des études cognitives ont montré que le cerveau n’était pas vraiment capable de comprendre une croissance exponentielle. Le temps de doublement est une manière de l’éclairer. Si on a aujourd’hui 200 hospitalisations par jour à Paris, et si on ne fait rien, avec un temps de doublement de quinze jours, on en aura 400 dans deux semaines, 800 dans un mois et 1 600 dans un mois et demi, comme pendant le pic de la première vague.

Il est très important de bien communiquer sur ce qu’est une croissance exponentielle, car cela permet de comprendre pourquoi, même avec un petit nombre d’hospitalisations, il est urgent de prendre des mesures, sinon, en très peu de temps, le nombre de malades ne sera plus gérable par le système de santé.

Cependant, cette progression correspond à un scénario « où l’on ne ferait rien ». Or, nous ne faisons pas rien : mesures prises par le gouvernement, gestes barrières, changements de comportement dans la vie sociale…

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En six mois, le secteur de l’aéronautique a perdu la totalité des postes créés entre 2009 et 2019

C’est comme si d’un claquement de doigts les bénéfices de dix ans de prospérité avaient été éliminés ! En six mois de crise due au coronavirus, l’aéronautique, autrefois championne des créations d’emplois, est lourdement retombée dans le rouge.

Depuis la crise de 2009, les constructeurs de l’aéronautique comme Airbus, Safran ou Dassault avaient multiplié les embauches avec un solde net, avant la mi-mars, de 11 783 créations d’emplois. La survenue de la pandémie a complètement changé la donne. A la fin septembre, selon les données recueillies par l’observatoire Trendeo de l’emploi et de l’investissement publiées lundi 5 octobre, le secteur a enregistré une perte nette de 11 950 emplois. Si on ajoute les sous-traitants, on parvient même au chiffre de 13 354 postes supprimés.

« Le semestre Covid a effacé la totalité des gains en emplois » des dix années précédentes, s’exclame David Cousquer, créateur et gérant de Trendeo. Pire, selon l’état des lieux dressé par l’observatoire, « l’aéronautique est le secteur le plus touché avec le transport aérien, car l’impact du Covid-19 sur le trafic est annoncé partout comme devant durer au-delà de 2021 ».

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Il faut dire que les effets de la crise ont été aussi violents que soudains. Au premier trimestre, selon l’Insee, la France a perdu 492 000 emplois. Mais en pratique, cette vague de suppressions de postes et de licenciements est intervenue en moins de quinze jours. Juste après l’entrée en vigueur du confinement, le 17 mars. Avec comme premières victimes, les intérimaires qui représentent à eux seuls, selon l’Insee, 63 % des suppressions de postes.

7 712 suppressions d’emplois annoncées chez Air France

Frontières fermées, aéroports vides, compagnies aériennes à l’arrêt, les conséquences de la pandémie ont frappé de plein fouet et au premier chef les constructeurs d’avions et le transport aérien. Air France, avec 7 712 suppressions d’emplois annoncées, et Airbus, avec 5 797, occupent les deux plus hautes marches de ce triste palmarès des réductions d’effectifs déclarées depuis mars.

Dans l’aéronautique, la crise a touché aussi vite et aussi fort les gros donneurs d’ordre comme Airbus et Safran, que la myriade de petites sociétés qui composent la chaîne de sous-traitants. « Cela a été instantané. La chute a démarré dès mars. Nous avons perdu 30 % de notre chiffre d’affaires », se souvient Frédéric Bourgon, patron d’ADB, une petite entreprise tarbaise de quarante salariés spécialisée, notamment, dans le décolletage, le tournage et l’usinage de pièces de moteurs d’avions.

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Le  rebond économique américain moins fort qu’espéré

Les Etats-Unis ont créé en septembre 661 000 emplois, faisant tomber le taux de chômage à 7,9 %. Frappée par le Covid-19, la première économie du monde est au milieu du chemin : elle a récréé 11,4 millions des 22 millions d’emplois perdus en mars et en avril, qui avaient fait bondir le taux de chômage à 14,7 %. Sauf que la seconde moitié du parcours s’annonce très difficile, et les économistes prévoient une reprise en racine carrée inversée, avec un ralentissement de la croissance à mi-rebond. A ce rythme, il faudrait près d’un an et demi pour que le marché de l’emploi retrouve ses niveaux d’avant crise, note le New York Times.

Faute de vaccin efficace, des pans entiers de l’économie ne connaîtront pas de retour à la normale. C’est vrai dans les loisirs et le tourisme : Disney a ainsi annoncé le licenciement de 28 000 employés qui étaient jusqu’à présent en chômage technique, en raison de la non-réouverture du parc d’attractions de Californie, Disneyland. Cela l’est dans l’aérien : United Airlines et American Airlines ont annoncé, début octobre, la suppression de 32 000 emplois ; ces compagnies avaient l’interdiction de licencier jusqu’à fin septembre si elles voulaient conserver les subventions de l’Etat fédéral qui leur ont été octroyées au début de la crise.

C’est le cas aussi dans l’enseignement, qui repart essentiellement en virtuel, les Américains étant beaucoup plus précautionneux que les Européens sur la contamination des enfants : 355 000 postes ont été supprimés en août dans l’éducation privée et publique. Les collectivités territoriales sabrent dans les effectifs, notamment des enseignants, faute de plan de renflouement fédéral (216 00 emplois en moins). Le nombre d’Américains qui déclarent avoir perdu définitivement leur emploi est désormais de 3,8 millions contre 2 millions en avril, ce qui indique l’absence d’espoir d’un retour à la normale.

La fin des aides fédérales et le ralentissement de la reprise ont entraîné un ralentissement du rebond de la consommation

L’économie a été mise sous perfusion par la Reserve fédérale (taux d’intérêt à zéro et octroi de liquidités qui ont permis aux entreprises de s’endetter et d’éviter la faillite), tandis que les ménages ont bénéficié d’aides fédérales (chèque de 1 200 dollars et allocation chômage de 2 400 dollars par mois jusqu’à fin juillet). Ainsi, paradoxalement, le revenu mensuel des Américains a été, depuis avril, supérieur à son niveau de février, avant la crise. Même en août, où il a baissé de 2,7 %, il restait supérieur de 2 % au niveau de février.

La fin des aides fédérales et le ralentissement de la reprise ont toutefois entraîné un ralentissement du rebond de la consommation : après une hausse de 9 % et de 7 % en mai et juin, les dépenses n’ont augmenté que de 2 % et 1 % en juillet et août. En contrepartie, les ménages ont épargné massivement, ce qui pourrait atténuer le choc des mois à venir : le taux d’épargne, qui était de l’ordre de 8 %, a bondi à 20 % en moyenne depuis mars. Il est retombé à 14 % en août.

Le déficit budgétaire devrait atteindre des niveaux abyssaux, passant de 1 000 milliards à 3 200 milliards de dollars, soit près de 16 % du PIB

Le PIB, qui avait reculé en rythme annuel de 5 % et 31 % aux premier et deuxième trimestres, aurait rebondi d’environ 3 % de juillet à septembre, selon les estimations du Wall Street Journal.

Ces chiffres de l’emploi sont les derniers à être publiés avant l’élection du 3 novembre, et ils sont mauvais pour Donald Trump : jamais le chômage n’avait été aussi élevé à la veille d’une élection (il était de 7,8 % à la veille de la réélection de Barack Obama en 2012 et de 7,3 % avant le second mandat de Ronald Reagan en 1984). M. Trump sera le seul président à achever son mandat avec moins d’emplois qu’à son arrivée. Avant la crise du Covid-19, le chômage était de 3,5 %, au plus bas depuis cinquante ans. Le déficit budgétaire va atteindre des niveaux abyssaux, passant de 1 000 milliards à 3 200 milliards de dollars environ, soit près de 16 % du produit intérieur brut, selon les experts du Congrès. La dette fédérale va retrouver ses niveaux d’après-guerre et dépasser les 100 % du PIB.

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A l’approche de l’élection, républicains et démocrates n’ont pas été capables de s’entendre sur un nouveau plan de relance demandé avec insistance par la Reserve fédérale. L’annonce de la contamination au Covid-19 de Donald Trump puis son hospitalisation ont conduit Wall Street à dévisser, vendredi : l’indice S&P 500 a reculé de 0,96 %, tandis que le Nasdaq, riche en technologie, perdait 2,22 %.

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Avec la reprise de l’épidémie de Covid-19, la pratique du télétravail repart à la hausse

Une employée en télétravail depuis chez elle à Nice, le 15 mai.

Le télétravail lié au coronavirus joue les prolongations. Les déclarations du ministre de la santé Olivier Véran, annonçant mercredi 23 septembre la nouvelle carte de France des zones d’alerte au Covid-19, ont contrarié la dynamique du retour sur site des salariés. Chez Orange, le dispositif de recours au télétravail occasionnel vient ainsi d’être étendu à trois jours par semaine en Ile-de-France depuis lundi 28 septembre. Cette modification de l’organisation est applicable à toutes les « zones d’alerte renforcée ». « C’est le patron de la grande région concernée par une zone d’alerte qui décide de ce passage de deux à trois jours », précise Gervais Pellissier, le DRH de l’opérateur téléphonique.

Après avoir eu quelques difficultés, en mai-juin, à faire revenir des salariés anxieux notamment à l’idée de reprendre les transports en commun, les responsables des ressources humaines tentent, depuis, de répondre à la fois aux objectifs de santé et de performance. A la sortie du confinement le 11 mai, les salariés de Rémy Cointreau avaient repris en télétravail, mais, dès le 8 juin, l’alcoolier leur demandait de revenir sur site au moins deux jours par semaine, avec un maximum de 50 % de l’effectif présent. Et, depuis le 22 juin, le mot d’ordre au siège était devenu : « Présentiel total ».

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« Jusqu’à aujourd’hui, il n’y avait plus de télétravail lié au Covid, explique Marc-Henri Bernard, le DRH de Rémy Cointreau. Mais à la suite des recommandations d’Olivier Véran de faire du télétravail autant que possible, on a rétabli le dispositif du 8 juin. Des salariés commençaient à s’inquiéter, ne comprenant pas pourquoi des entreprises poursuivaient le télétravail et pas nous. » En cette rentrée, les directions des ressources humaines étaient en pleine réflexion sur une nouvelle norme du télétravail hors-Covid. Elles s’apprêtaient à négocier voire à adopter une organisation du télétravail partiel, intégrant les acquis de la période de crise. Orange, Axa, BNP Paribas, Rémy Cointreau, la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), etc., la renégociation du télétravail hors-Covid était pour beaucoup à l’ordre du jour dès septembre.

Impératif de production

« On a cherché à froid à organiser un retour progressif en maintenant du télétravail trois jours par semaine. On réfléchit à un nombre volant de 80 jours de télétravail par an mis à disposition de tous les salariés. Mais combien de jours peut-on imposer sur site ? », s’interrogeait Jérôme Friteau, le DRH de la CNAV le 15 septembre aux Rencontres RH du Monde. Une entreprise du luxe envisageait d’imposer un jour de présentiel fixe pour faciliter la tenue du comité de direction.

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« Il est du ressort de l’Etat de faire respecter les lois en matière d’embauche, de salariat et de travail des journalistes »

Tribune. Des journalistes rémunérés à la pige sans plus aucune commande depuis mars et donc sans avoir gagné un centime ; des pigistes spécialisés en sport, en tourisme ou dans l’actualité culturelle réduits à une quasi-cessation d’activité ; d’autres encore, au chômage, qui n’ont pas pu bénéficier des indemnisations par Pôle emploi, notamment parce qu’il n’y avait pas de rupture de contrat constatée, se retrouvant ainsi dans un sac de nœuds juridico-administratifs ; des promesses d’embauche et de CDD non tenues ; des étudiants journalistes sans stage… La crise sanitaire et sociale touche de plein fouet les journalistes professionnels et fragilise encore plus les plus précaires.

Une donnée démontre à elle seule l’ampleur du séisme : ils ne seront guère plus de 1 300 à faire leur première demande de carte de presse en 2020. Ils étaient 1 700 chaque année depuis trois ans (2019, 2018, 2017), un chiffre en augmentation régulière mais une dynamique stoppée net.

Des mesures facilitantes en 2021

Composées de journalistes élus et d’éditeurs de presse, véritable baromètre de la profession, la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) a très vite évalué la situation. Déjà bienveillante avec les demandeurs soumis à difficultés, elle a pris une mesure inédite au printemps en renouvelant systématiquement toutes les cartes 2019 pour cette année, une décision exceptionnelle saluée par la profession.

Pour la carte 2021, elle appliquera des mesures facilitantes pour que les journalistes puissent obtenir ou conserver la carte de presse, appréciera la moyenne des salaires (ou piges) des demandeurs sur un temps beaucoup plus long qu’habituellement (au terme de la loi, le journalisme doit être une « activité principale, régulière et rétribuée ») et prolongera une troisième année (au lieu de deux) la possibilité d’obtenir la carte de presse tout en étant demandeur d’emploi.

Pour les maintenir dans la profession et accompagner les journalistes, la commission prend toute sa part. Est-ce le cas de tous ?

Des postulants à la carte de presse qui ne l’obtiennent pas, notamment pour des raisons de rémunération, critiquent parfois la CCIJP. Il est plus aisé de cibler une instance officielle bien identifiée que de combattre de vrais responsables disséminés dans un monde économique parfois nébuleux.

Chantage

Et pourtant, ils existent bien et se sont parfois manifestés lors de cette crise inédite. Des groupes de presse ont annoncé des licenciements, « mesures financières », justifiaient-ils, affichant à l’inverse un peu plus tard des résultats positifs. Paradoxalement d’ailleurs à la demande accrue d’information, beaucoup de titres, de sites, de radios, de chaînes de télé ont réduit leur pagination, le nombre de leurs éditions ou leur contenu dès le confinement, et ne sont pas revenus après l’été à la situation antérieure. Il y a eu dans notre secteur ce que certains ont appelé ailleurs des effets d’aubaine…

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Les extraits du compte privé de Facebook peuvent servir de preuve contre le salarié

« Concernant la question de la loyauté de la preuve, la Cour de cassation considère que l’employeur n’avait pas eu recours à un stratagème dans la mesure où la publication litigieuse avait été communiquée spontanément à l’employeur par un courriel d’une autre salariée de l’entreprise. »

Une manageuse de la société Petit Bateau est licenciée pour faute grave, pour avoir manqué à son obligation contractuelle de confidentialité, en publiant en avril 2014 sur son compte Facebook une photographie de la nouvelle collection Petit Bateau printemps-été 2015 qui avait été présentée exclusivement aux commerciaux de la société.

La lettre de licenciement soulignait, notamment, qu’en agissant de la sorte, la salariée avait pris le risque de perturber les actions de communication de l’entreprise sur une collection future et de dévoiler la future collection à la concurrence. La lettre soulignait à cet égard que la salariée comptait dans son réseau d’amis Facebook de nombreux professionnels de la mode « été » de la distribution appartenant à des entreprises telles que Kenzo, Jacadi, H&M et Zalando.

La salariée a contesté son licenciement en faisant valoir principalement qu’elle avait été victime d’une intrusion abusive et illicite dans sa vie privée et que, pour accéder à sa page personnelle, l’employeur avait utilisé un procédé déloyal.

La cour d’appel de Paris constate que ses « amis » Facebook – plus de deux cents – sont des professionnels de la mode dont certains travaillent auprès d’entreprises concurrentes. Elle juge que l’employeur n’a pas recouru à un procédé déloyal dans la mesure où il a été informé de cette diffusion par un des « amis » de la salariée travaillant au sein de la société qui s’étonnait de cette publication.

Confidentialité

La salariée saisit la Cour de cassation qui rejette son pourvoi (Cass. soc., 30 septembre 2020 n° 19-12.058) et reconnaît que la production en justice par l’employeur d’une photographie extraite du compte Facebook de la salariée, auquel il n’était pas autorisé à accéder, ainsi que des éléments d’identification des « amis » professionnels de la mode destinataires de cette publication, constituait une atteinte à la vie privée de la salariée.

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Néanmoins, la Cour de cassation juge que le droit à la preuve peut justifier de tels éléments si cette production est indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte est proportionnée au but poursuivi.

Pour la haute juridiction, cette production réunissait ces conditions dans la mesure où la défense de l’intérêt légitime de l’employeur à la confidentialité de ses affaires était en jeu et que, d’autre part, l’employeur n’avait fait procéder au constat d’huissier que pour contrecarrer la contestation de la salariée quant à l’identité du titulaire du compte. Enfin, concernant la question de la loyauté de la preuve, la Cour de cassation considère que l’employeur n’avait pas eu recours à un stratagème dans la mesure où la publication litigieuse avait été communiquée spontanément à l’employeur par un courriel d’une autre salariée de l’entreprise autorisée à accéder comme « amie » au compte privé Facebook de la salariée.

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A Radio France, les syndicats acceptent le plan de la direction

Cinq des six syndicats de Radio France ont apposé leur signature au bas du « Projet accord emploi 2022 », jeudi 1er octobre, entérinant de ce fait le plan d’économies proposé par la direction. Trois cent quarante personnes quitteront donc l’entreprise d’ici à 2022, uniquement sur la base du volontariat ; les départs en retraite et les fins de carrière seront encouragés. En échange, 271 embauches devront être réalisées, par le remplacement d’un départ sur deux d’abord, par la création de postes ensuite.

« Ces embauches permettront de proposer à des salariés non permanents de Radio France un CDI, avec un objectif de 70 % de propositions d’embauches à leur endroit », se félicite la direction de Radio France dans un communiqué. Sans surprise, seule la CGT a refusé de signer ce plan. « Il n’est en rien “équilibré”, et encore moins “socialement responsable” », fustige le syndicat, qui n’y voit qu’un « accord de suppressions d’emplois ».

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« Une solution moins pire »

Cette rupture conventionnelle collective a paru « une solution moins pire qu’un plan de départs volontaires », commente Jean-Paul Quennesson du syndicat SUD, dont la signature ne paraissait pas parmi les plus acquises. Présenté à l’automne 2019, ce plan initial avait occasionné la grève la plus longue qu’ait connue Radio France.

« On a pesé le pour et le contre, mais ce plan promet des embauches de CDD », fait à son tour valoir Valeria Emanuele, élue SNJ. « Nous essaierons évidemment de peser le plus possible pour diminuer la précarité », ajoute Philippe Ballet, à l’UNSA, qui attend encore quelques contreparties supplémentaires.

La trajectoire financière, qui accule Radio France à des économies (40 millions par an, auxquels s’ajoute le redéploiement de 20 millions vers le numérique), demeure toutefois dans leur ligne de mire. « Nous voulons pouvoir démontrer qu’elle est insoutenable », insiste Jean-Paul Quennesson, pour qui l’accord de ce jour ne signifie pas que la « colère » des salariés est éteinte.

Alors que le groupe devrait être déficitaire d’environ 20 millions d’euros cette année, il devrait bénéficier d’une dotation de 20 millions d’euros sur deux ans dans le cadre du plan de relance, a précisé la ministre de la culture, Roselyne Bachelot, en début de semaine.

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« On a beau être combatif, vient un moment où on s’écroule » : la détresse des petits patrons face à la crise

Ricardo Blanch, 64 ans, patron de Paris Querido Voyage. Aubervilliers.

BRUNO FERT POUR « LE MONDE »

Par

Publié aujourd’hui à 01h12, mis à jour à 10h18

Des crises, ces chefs d’entreprise en avaient pourtant traversées. Mais aucun n’aurait imaginé connaître pareille déflagration. « Vous avez beau vous débattre dans tous les sens, ne plus dormir, chercher toutes les solutions, vous ne pouvez rien contre une activité qui ne repart pas et des banques qui refusent de vous aider », lâche Roger (qui a souhaité conserver l’anonymat), visage marqué, seul au milieu des scies à panneaux et des plaqueuses empoussiérées, dans ses grands entrepôts déserts.

Voilà sept mois que les machines de sa société d’événementiel, spécialisée dans la conception de stands pour les foires et salons, sont à l’arrêt, et que son équipe de vingt et un salariés est au chômage partiel. Avec l’interdiction des grandes manifestations, son secteur est l’un des plus sinistrés par la crise liée au Covid-19. Celle-ci a frappé « au pire moment » : l’entreprise réalise 70 % de son chiffre d’affaires entre février et juin. Sept mois que le dirigeant niçois de 58 ans frappe à toutes les portes pour tenter d’obtenir des aides et stopper cette descente aux enfers. En vain. Trésorerie exsangue, dettes qui s’accumulent, refus du prêt garanti par l’Etat (PGE) par les banques, assignation d’expulsion du bailleur… Au pied du mur, Roger vient de déposer le bilan.

Une hausse des défaillances se profile – de l’ordre de 21 % d’ici à 2021

Sur près de quatre millions de petites et moyennes entreprises (PME), combien sont-ils, ces dirigeants qui, en ce moment, livrent une bataille à corps perdu pour tenter de « sauver la boîte » ? Alors que peu de procédures ont été engagées durant le confinement et que les entreprises étaient assez protégées de la faillite par différents dispositifs, une hausse des défaillances se profile – de l’ordre de 21 % d’ici à 2021, selon un rapport de l’assureur-crédit Coface publié début juin. Evénementiel, restauration, tourisme, artisanat… autour de lui, Roger ne compte plus ceux qui se préparent à mettre la clé sous la porte.

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A Armentières (Nord), Rousselle Industrie, petite société quasi centenaire qui fabrique des machines pour la chimie, y a échappé de peu. Après des mois à remuer ciel et terre, Eric Plaisant a fini par arracher les accords de prêts qui conditionnaient le redémarrage de son activité. Reste à ce que les fonds soient versés. Soulagé, le patron de 59 ans est aussi « à genoux » : « Six mois comme ça, c’est l’équivalent de trois ans. On a l’impression qu’on ne verra jamais le bout », dit-il. La société se relevait à peine de la crise de 2008 et d’un plan de continuation sur dix ans. L’homme, lui, a encore besoin de somnifères pour trouver le sommeil.

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Restauration d’entreprise : Elior va supprimer plus de 1 800 postes en France

Sinistrée depuis l’épidémie de Covid-19 qui a conduit les grandes entreprises, notamment, à mettre leurs salariés en télétravail, le géant de la restauration collective Elior a annoncé, jeudi 1er octobre, la suppression de 1 888 postes en France dans sa branche dédiée à la restauration d’entreprise.

Cette réorganisation, qui fait l’objet d’un plan de sauvegarde de l’emploi présenté aux organisations syndicales, touche 1 260 lieux de restauration exploités par ses filiales Elior Entreprises et Arpège, précise le groupe dans un communiqué.

Elior tentera de « proposer un reclassement aux collaborateurs concernés » vers ses autres activités en France et estime « à plus de 1 000 le nombre de postes potentiellement disponibles dans l’année à venir », précise Frédéric Galliath, directeur général de l’activité entreprise au sein d’Elior France, cité par le communiqué. « L’entreprise va maintenant s’engager dans une démarche de concertation et d’échanges avec [ses] partenaires sociaux pour limiter au maximum l’impact de ce projet sur l’emploi », dit-il.

« Reprise très molle »

Au total, 9 500 salariés travaillent aujourd’hui dans la restauration d’entreprise en France au sein d’Elior Entreprises et Arpège, qui est le segment haut de gamme de cette activité et compte parmi ses clients nombre de grandes entreprises ayant leur siège social dans le quartier d’affaires de La Défense, dont les effectifs présents au bureau au quotidien ont fondu. La branche restauration d’entreprise d’Elior a ainsi vu son activité se contracter de 45 %, comparé à l’an dernier, en raison de la crise sanitaire : à la période de confinement, où elle était quasi nulle, a succédé une reprise très molle, a précisé un porte-parole.

En effet, les restaurants d’entreprises sont aujourd’hui largement désertés en raison d’un recours accru au télétravail, qui représente désormais en moyenne « plus de deux jours par semaine contre moins d’un jour » avant la crise sanitaire, parmi les clients d’Elior.

Le plan de restructuration actuel est néanmoins « calibré sur une baisse d’activité de 20 % », ce qui est le niveau sur lequel le groupe table après la crise sanitaire, car la restauration d’entreprise devrait rester durablement affectée par ces changements de mode de travail, a indiqué le porte-parole. En complément de ces réductions de postes, Elior « envisage d’avoir recours à un dispositif d’activité partielle de longue durée dans les sites », en particulier ceux de grande taille, précise-t-il.

Le Monde avec AFP