Parcoursup 2019 : concevoir les dispositifs de la sélection
Quatre professionnels ont répondu aux lecteurs sur la sélection des dossiers et la mobilité entre académies.
La plate-forme Parcoursup, qui chemine en 2019 pour la deuxième année, permet de répartir et de sélectionner les candidats dans différentes formations postbac, publiques ou privées. Quelles sont ses logiques ? Comment répondre aux critères demandés ? Quelles sont les nouvelles règles de la mobilité entre académies ?
Camille Stromboni, journaliste du Monde, Natacha Lefauconnier, journaliste indépendante spécialisée, Sylvie Boudrillet, conseillère d’orientation, et Dominique Pimont, conseillère psychologue de l’éducation nationale au centre d’information et d’orientation Mediacom ont répondu en direct aux questions des lecteurs lors d’un tchat organisé par Le Monde mercredi 23 janvier.
Minjeong : Quels sont les critères de sélection des dossiers ?
Natacha Lefauconnier : Les critères de choix des dossiers varient d’une formation à l’autre. Il est donc nécessaire d’aller consulter la fiche de chaque formation qui vous intéresse sur le site Parcoursup. Une fois que vous l’avez trouvée avec le moteur de recherche, cliquez sur chacun des onglets (caractéristiques, etc.). L’onglet « Examen du dossier » vous précisera quels éléments seront regardés attentivement dans votre dossier. Pour vous distinguer (en dehors de vos notes et des appréciations de vos professeurs), vous pouvez peaufiner votre « projet de formation motivé » : expliquez pourquoi cette formation vous motive, montrez que votre profil correspond aux attendus (bonne moyenne dans la discipline principale, etc.), montrez en quoi cette formation correspond à votre projet professionnel (si vous en avez un).
Savez-vous si ces critères seront publiés ?
Camille Strombonk : Les candidats ont, comme l’an dernier, accès aux « attendus » de chaque formation (les compétences et les prérequis) et aux « critères généraux d’appréciation des dossiers » (voir l’onglet « Examen du dossier » sur chaque formation), qui détaillent le plus souvent les pièces prises en compte dans l’examen du dossier (notes de premières, de terminale, fiche avenir, lettre de motivation, attestations extrascolaires, etc.).
Pour le reste, la question de la clarté sur les modalités précises d’examen des dossiers (ordre de prise en compte des critères, hiérarchisation, poids dans la décision de la commission d’examen des dossiers, etc.) a fait l’objet de débats et d’un recours de certains élus (comme le sénateur communiste Pierre Ouzoulias) et syndicats étudiants et enseignants, devant le Défenseur des droits. Ce dernier vient d’émettre une décision demandant que ces informations soient rendues publiques. Reste à savoir si le gouvernement donnera suite à cette recommandation.
Laurent : Comment Parcoursup tient-il compte du fait que certains lycées ont une notation plus stricte que d’autres ?
S. : Cette année, comme en 2018, les formations ont accès au lycée d’origine. On ne peut pas connaitre si elles vont tenir compte de ce dernier, ni « du fait que certains établissements ont une notation plus stricte que d’autres »… La question du lycée d’origine, et de sa prise en compte par les formations du supérieur dans le classement des dossiers des candidats, est particulièrement sensible.
A la suite de craintes de ségrégations venant l’an dernier de lycéens de Seine-Saint-Denis, notamment, la ministre de l’enseignement supérieur a annoncé que la question de l’anonymisation des dossiers était en réflexion. Le Défenseur des droits vient d’annoncer que la prise en compte de ce critère pouvait être assimilée à une « pratique discriminatoire » et demande une plus forte transparence sur le détail des critères appliqués par chaque formation.
Bart : Si je reçois plusieurs propositions favorables et que je dois en accepter une seule (formation sélective), est-ce que cette réponse est définitive, ou puis-je répondre « oui mais » en maintenant des vœux en attente, en espérant obtenir un autre « oui » ?
Sylvie Boudrillet et Dominique Pimont (CIO Mediacom) : Il n’y a pas de réponse « oui mais » à une offre d’admission. Vous devez l’accepter ou la refuser. Cela fait, vous devrez en plus répondre « j’accepte » ou « je renonce à mes vœux en attente ». Attention : l’établissement peut vous avoir fait une proposition avec la réponse « oui » ou « oui si ».
La licence de sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps) est-elle sélective ?
S. : La licence de Staps fait partie des formations universitaires non sélectives. En revanche, cela ne veut pas dire qu’aucune sélection ne peut être faite : lorsque la demande excède le nombre de places, le classement opéré par chaque licence en s’appuyant sur le dossier des candidats servira à départager les candidats. Les Staps font en outre partie des licences « sous pression » (très fortement demandées) ces dernières années, mais de nombreuses places supplémentaires ont été créées, pour essayer de répondre le plus largement possible à la demande.
Comment sont sélectionnés les candidats à des doubles licences ?
B. et D. P. : Ces formations sélectionnent sur dossier, regardent le profil scolaire, le projet de formation motivé, parfois demande un entretien ou un test de langues, selon les mentions de licences envisagées. Les conditions sont à chaque fois précisées sur la plate-forme pour celles qui sont dans Parcoursup : attention tous les doubles cursus ne sont pas dans Parcoursup, notamment pour l’académie de Paris.
Bondycapé : Existe-t-il un statut particulier lorsqu’on est handicapé dans Parcoursup ?
L. : Il y a un onglet, dans votre dossier Parcoursup, « Handicap/besoins spécifiques ». Lisez-le attentivement. Vous verrez qu’on vous conseille, lors de la phase de formulation des vœux, de prendre contact avec le référent handicap de la formation afin de connaître les modalités d’accompagnement et les aides dont vous pourrez bénéficier. Le contact du référent handicap est disponible pour chaque formation référencée sur Parcoursup.
De plus, vous avez la possibilité de remplir une fiche de liaison qui pourra être, le cas échéant, transmise à la commission d’accès à l’enseignement supérieur de votre rectorat, chargée des demandes de réexamen de candidatures.
Makix : Je suis intéressé par une filière en particulier. Puis-je faire des vœux identiques dans plusieurs régions ?
Natacha Lefauconnier : Oui, c’est même tout à fait conseillé, si c’est la filière de vos rêves, vous pouvez postuler dans plusieurs académies ! S’il s’agit d’une filière sélective, le critère géographique n’est pas pris en compte, c’est la qualité de votre dossier qu’examinera la commission d’examen des vœux.
S’il s’agit d’une filière non sélective (licence, Paces), vous pouvez solliciter partout, mais il y aura un nombre maximal de candidats « hors secteur » admis, donc vous aurez moins de chances de l’obtenir dans les académies autres que la vôtre. Notez qu’une aide financière à la mobilité étudiante a été mise en place en 2018 et qu’elle sera reconduite et renforcée en 2019. D’un montant de 200 à 1 000 euros, elle sera destinée aux bacheliers ayant saisi le rectorat faute d’obtenir une place dans le supérieur, et qui accepteront une mobilité géographique.
Arthur : Est-ce que les lycéens de banlieue parisienne ont cette année accès aux universités parisiennes ? Sans quota ?
Sylvie Boudrillet et Dominique : Pour les filières non sélectives de l’université, le secteur géographique de recrutement est désormais l’Ile-de-France. La réponse est donc oui, les « lycéens de banlieue » (académies de Créteil et Versailles) ont accès aux universités parisiennes, de la même manière que ceux de l’académie de Paris. Pour les filières sélectives (écoles, BTS, CPGE, DUT, infirmiers, etc.), il n’y a pas de sectorisation.
Camille Stromboni : Les lycéens des trois académies franciliennes sont observés comme appartenant au « secteur » de recrutement. L’an dernier, ce n’était pas le cas.
« Le président de la République vient d’intervenir publiquement, semblant indiquer que le bonus-malus se mettra en place et ce, quel que soit le résultat de la négociation », a regretté pour sa part le Medef, qui devait montrer jeudi aux organisations syndicales ses propositions sur la question des contrats courts.
Pour l’U2P ((artisans, commerçants, professions libérales), le document de cadrage adressé par le gouvernement aux partenaires sociaux leur demandait « de se positionner sur cette problématique, sans pour autant imposer la solution ».
Les CDD de moins d’un mois multipliés par 2,5 en vingt ans
Commencée en novembre, la négociation doit prendre fin le 20 février, après avoir été prolongée de deux séances, syndicats et patronat échouant notamment à se mettre d’accord sur un mécanisme qui réduirait le recours excessif aux contrats courts.
En vingt ans, les CDD de moins d’un mois ont été multipliés par 2,5, une source de précarité et un surcoût de deux milliards d’euros pour l’Unédic, qui gère l’assurance-chômage. Le système de bonus-malus consiste à articuler les cotisations chômage de l’employeur en fonction du taux de rupture de contrats de travail. L’idée est de faire varier la cotisation patronale à l’assurance-chômage, actuellement de 4,05 %, en fonction du taux de rupture de contrats donnant lieu à inscription à Pôle emploi – une promesse présidentielle soutenue par les syndicats.
Mais le patronat y est solidement opposé. En novembre, au tout début de la négociation sur l’assurance-chômage, Geoffroy Roux de Bézieux, le patron du Medef, avait assuré qu’un tel système allait « détruire des CDD et des emplois intérim sans pour autant créer de CDI ».
Le 23 janvier, dans le cadre de la discussion, les organisations patronales Medef, CPME et Union des entreprises de proximité (U2P) ont présenté une série de propositions alternatives au bonus-malus pour réguler les contrats courts.
Y figuraient la suppression des délais de carence, un assouplissement du renouvellement des contrats courts ou encore la priorité à l’embauche en contrat court. Certaines propositions ont été jugées floues, d’autres provocantes par les syndicats.
« Une nouvelle fois, on culpabilise les faibles »
Juste avant les annonces faites par la CPME, le Medef et l’U2P, Laurent Berger, le numéro un de la CFDT, a déclaré, sur RMC/BFM-TV, que « le patronat portera[it] la responsabilité de l’échec » de la négociation sur la réforme de l’assurance-chômage s’il persistait à refuser tout mécanisme de bonus-malus.
Philippe Martinez, son homologue de la CGT, allait dans le même sens sur France Inter : « Du bonus, ils [les employeurs] en ont beaucoup, donc si on pouvait se contenter du malus ça irait mieux », a-t-il ainsi mentionné. Plus généralement, il a critiqué le cadre « contraint » de cette négociation imposée par le gouvernement, qui réclame « 4 milliards d’économies sur le dos des chômeurs ». Et « une nouvelle fois, on culpabilise les plus faibles », a-t-il regretté.
De son côté, Michel Beaugas, le négociateur pour Force ouvrière (FO), a évalué que le patronat prenait « en otage des millions de demandeurs d’emplois sur une position dogmatique ». Il est « très inquiet » que le gouvernement reprenne en main le dossier et impose « une baisse des droits drastique aux demandeurs d’emploi indemnisés ».
« Suspendre, ce n’est pas arrêter », a relativisé Jean-François Foucard, de la CFE-CGC, pour qui la « responsabilisation des entreprises ne peut passer que par des cotisations ». Le gouvernement a imposé aux partenaires sociaux que la nouvelle convention d’assurance-chômage permette entre 3 et 3,9 milliards d’euros d’économies en trois ans.