Depuis près de quatre mois, Sophie, titulaire d’un master de psychologie du travail à l’université de Grenoble-Alpes, cherche un emploi : sans succès. Son diplôme devrait pourtant lui ouvrir des débouchés variés : ressources humaines, santé au travail, insertion professionnelle, orientation ou encore ergonomie. La jeune femme de 23 ans cherche « partout » mais les offres d’emploi, peu nombreuses, sont prises d’assaut très rapidement.
« Je savais que ça ne serait pas simple, mais ça commence à me peser », confie Sophie, qui est retournée vivre chez ses parents en Haute-Savoie, puis chez sa sœur aînée dans le Nord. Elle envisage à présent de trouver un poste alimentaire, dans la logistique, la garde d’enfant ou en tant que caissière, le temps de trouver un emploi de psychologue qui lui conviendrait.
Nombreux sont les jeunes diplômés en psychologie à connaître une insertion difficile. Seuls 63 % des diplômés en master occupent un emploi stable trente mois après la sortie de l’université, selon des chiffres de 2017 du ministère de l’enseignement supérieur. Beaucoup doivent s’accommoder, malgré leur niveau bac +5, d’un statut précaire.
Comme Julie, diplômée en juillet 2017, qui officie en tant qu’autoentrepreneuse. Cinq mois après être sortie de l’université de Caen, où elle a suivi sa deuxième année de master, la jeune femme avait pourtant trouvé un emploi à mi-temps dans une association d’orientation scolaire, intervenant dans les établissements privés de la région lyonnaise. Mais en septembre 2018, le centre dépose le bilan. Elle est licenciée. La jeune femme se heurte alors à une pénurie d’offres dans son secteur – la psychologie du développement de l’enfant et de l’adolescent – à Lyon, où elle souhaite rester.
Depuis, elle intervient en libéral dans plusieurs écoles. « Cette situation est précaire car ma paie dépend de la demande des écoles, explique-t-elle. Certains mois, je travaille très bien, d’autres très peu, voire pas du tout. » Elle gagne désormais entre 1 000 et 1 500 euros net par mois. Avec un tel salaire, impossible de louer son propre appartement dans une ville comme Lyon alors, comme Sophie, elle est retournée vivre chez ses parents.
Pour ces jeunes sortis d’un master de psychologie, le salaire brut annuel s’élève en moyenne à 25 000 euros par an, dix-huit mois après le diplôme, et à 26 500 euros, trente mois après le diplôme, indique le ministère de l’enseignement supérieur. « C’est très bas pour un emploi de cadre ou en profession libérale », observe Jacques Borgy, psychologue clinicien et secrétaire général du Syndicat national des psychologues.
Pour s’en sortir, Sophie envisage de trouver un cabinet au sein duquel se lancer en libéral. De plus en plus de jeunes diplômés en psychologie font ce choix. « On observe une augmentation de l’insertion en exercice libéral depuis un peu plus de cinq ans, note Jacques Borgy. Aujourd’hui, 10 % des étudiants montent une activité libérale dans les deux ou trois ans qui suivent leur diplôme. Il y a dix ans, ils étaient seulement une poignée. » Pour lui, la profession pâtit d’un climat général qui tend externaliser les compétences, avec des établissements qui préfèrent faire appel ponctuellement à des psychologues libéraux plutôt que les embaucher.
Par ailleurs, la part de temps partiels dans la profession atteint un tiers des emplois plus de deux ans après le diplôme. Sortie de l’université de Caen en 2017, Charline, 25 ans, jongle entre un emploi en CDI à mi-temps dans un centre de formation à distance petite enfance à Argentan (Orne) et un CDD à 20 % dans un autre centre à une heure de route du premier. « Cela demande une vraie organisation, et, dans l’un ou l’autre des centres, je rate un certain nombre d’événements ou de problèmes », explique-t-elle.
« Les jeunes diplômés en psychologie gagnent aussi à se montrer mobiles. Un tiers d’entre eux doivent trouver un emploi en dehors de la région de leur université », ajoute Jacques Borgy. C’est le cas de Marjorie qui, diplômée d’un master de psychologie et justice à Lille, a préféré accepter une proposition d’embauche à Charleville-Mézières (Ardennes). Loin de sa Normandie natale, elle avoue se sentir très seule.
« Parfois je me dis que j’ai peut-être pris la mauvaise décision, mais je ne me voyais pas attendre des mois sans emploi. Au niveau financier, il fallait que je commence à travailler. » Et même si son travail à la Protection judiciaire de la jeunesse la passionne, la jeune femme de 24 ans garde un œil, chaque semaine, sur les offres d’emploi en Normandie. Avec un constat, encore une fois : très peu d’offres. Et presque exclusivement pour des temps partiels.
L’agence suédoise pour l’emploi, Arbetsförmedlingen, va voir ses activités limitées au profit de sous-traitants privés.
Annoncé par la droite avant les législatives du 9 septembre dernier, la cure d’amincissement d’Arbetsförmedlingen, le Pôle emploi suédois, s’annonce sévère. Mercredi 30 janvier, son patron, Mikael Sjöberg, a fait savoir que 4 500 postes seraient retirés d’ici à la fin de l’année. Soit plus d’un tiers des 13 500 salariés. Ce plan de licenciements intervient à la suite d’une réduction drastique du budget d’Arbetsförmedlingen, destinée à être partiellement remplacée par des acteurs privés.
Ce service public a vu son apport de fonctionnement amputée de 386 millions de couronnes en 2019, et elle le sera de 800 millions additionnels en 2020. Par ailleurs, Arbetsförmedlingen perd 4,5 milliards de couronnes de financements destinés à divers programmes de retour à l’emploi.
La privatisation des services de l’aide à l’emploi a été établie par un accord signé début janvier entre les sociaux-démocrates, les Verts et deux partis de centre-droit. Cet accord a permis la reconduction du gouvernement minoritaire de centre-gauche de Stefan Löfven, avec le soutien au Parlement du centre et des libéraux qui l’ont conditionnée particulièrement à plusieurs réformes de dérégulation.
Des prestations décriées
Selon l’accord, le gouvernement se promet à « réformer en profondeur » Arbetsfömedligen d’ici à 2021 et à transférer la quasi-totalité de ses activités à des sociétés privées. Dès lors, M. Löfven, le premier ministre social-démocrate, élu le 18 janvier, a eu beau jeu de fustiger une réforme « dessinée sur une serviette en papier » par les conservateurs et chrétiens-démocrates.
Depuis plusieurs années déjà, les quatre partis de l’Alliance de centre-droit, composée des conservateurs, centristes, libéraux et chrétiens-démocrates, dans l’opposition depuis 2014, défendaient en faveur d’une réforme en profondeur de ce Pôle emploi. En cause : ses prestations décriées. En 2017, à peine un demandeur d’emploi sur dix a retrouvé un travail en passant par Arbestförmedligen. Dans 1,4 % des cas seulement, après l’aide d’un de ses agents.
Aussitôt, la plupart des recrutements ont lieu directement, via des contacts personnels, des sites Internet tels que LinkedIn, ou par le biais d’agences de placement. Arbetsförmedligen, pour sa part, sous-traite déjà certains de ses services à des acteurs privés, membres de l’organisation professionnelle Almega, qui pousse pour une privatisation du secteur et dont les arguments sont repris par la droite.
Dans le même temps, étrangement, le nombre et la fréquence des accidents ne cessent de baisser. Le recul de la sinistralité se poursuit depuis plus de quinze ans.
Le coût moyen forfaitaire des accidents du travail est en forte augmentation, relevait à la mi-janvier le cabinet d’audit et d’expertise comptable BDO. Selon le barème des coûts moyens diffusé au Journal officiel fin décembre, ils augmentent de 3,7 % en 2019, soit quasiment le double de 2018 (2 %). Et depuis 2012, la progression atteint presque 18 % en évolution des coûts moyens consolidés. Jusqu’à la réforme de tarification de 2010, les taux de cotisation « accidents du travail-maladie professionnelle » étaient ajustés en fonction des dépenses réelles liées aux accidents du travail de l’entreprise. Ils sont depuis fixés à partir des coûts moyens forfaitaires du secteur.
Le coût moyen forfaitaire des accidents du travail est en forte augmentation, relevait à la mi-janvier le cabinet d’audit et d’expertise comptable BDO. Selon le barème des coûts moyens diffusé au Journal officiel fin décembre, ils augmentent de 3,7 % en 2019, soit quasiment le double de 2018 (2 %). Et depuis 2012, la progression atteint presque 18 % en évolution des coûts moyens consolidés. Jusqu’à la réforme de tarification de 2010, les taux de cotisation « accidents du travail-maladie professionnelle » étaient ajustés en fonction des dépenses réelles liées aux accidents du travail de l’entreprise. Ils sont depuis fixés à partir des coûts moyens forfaitaires du secteur.
Le coût moyen forfaitaire est établi chaque année pour chaque domaine d’activité et catégorie de sinistre par l’Assurance-maladie et les organismes paritaires des secteurs (comité technique national) à partir des dépenses moyennes annuelles provoquées par les accidents du travail et maladies professionnelles (soins, indemnités journalières, rentes) du secteur concerné. Le barème des coûts, ainsi constitué, a pour but de permettre aux employeurs d’évaluer l’impact financier des accidents du travail dans leur entreprise.
« Normalement ces coûts devraient être corrélés à la sinistralité [accident du travail/maladie professionnelle] mais, paradoxalement, la fréquence des accidents du travail et leur nombre baissent », déclare Nicolas Moretti, expert risques professionnels chez BDO. En effet, depuis une vingtaine d’années, la tendance générale est à la baisse pour la fréquence des accidents du travail (hormis l’intérim et les services à la personne, action sociale, santé, nettoyage), ainsi que pour leur nombre.
Hausse des coûts selon la nature des accidents
De 760 000 accidents du travail en 2002, ils sont passés à 632 918 en 2017. « Avec une moyenne de 33,4 accidents du travail pour 1 000 salariés en 2017, la sinistralité se fixe à un niveau historiquement bas », confirme la branche risques professionnels de la Sécurité sociale. Les accidents du travail coûtent donc globalement plus cher. La branche « risques professionnels » de l’Assurance maladie donne plusieurs explications à la hausse des coûts moyens, dont « l’évolution conjoncturelle des prestations (IJ)[indemnité journalière] et rentes indexées sur les salaires, l’augmentation du coût des soins, la revalorisation des indemnités en capital » (Rapport annuel 2017 publié le 28 janvier 2019)
L’augmentation des coûts varie fortement selon la nature des accidents. En 2019, le coût d’une incapacité permanente de 40 % et plus est en hausse de 12,45 %, contre 0,12 % pour les incapacités permanentes de moins de 10 %. « Les sinistres de moins de quatre jours représentent 29 % de l’ensemble des sinistres reconnus mais ne pèsent que 2 % dans l’ensemble de la dépense, alors que les arrêts de plus de 150 jours évoquent 7 % des sinistres mais coûtent très cher (62 % de la dépense) », précise le rapport annuel de l’Assurance maladie.
Enfin, cette augmentation du coût moyen « n’est pas sans incidence sur le calcul des cotisations AT/MP [accident du travail/maladie professionnelle] » versées par l’employeur, souligne Nicolas Moretti. En effet, le niveau de cotisation « accident du travail, maladie professionnelle » est réactualisé en fonction du coût moyen forfaitaire, du nombre d’accidents du travail au sein de leur entreprise et de leur masse salariale (coût moyen forfaitaire multiplié par le nombre d’accidents du travail et divisé par la masse salariale). « Le principe plus le risque de l’entreprise est élevé, plus sa cotisation est élevée, est appliqué. Mais les entreprises qui risquent moins peuvent être pénalisées par le coût moyen », regrette M. Moretti.
Selon des nouvelles données, l’activité physique professionnelle n’aurait pas des succès aussi francs sur la santé que celle adoptée en loisir.
« Dix mille pas et plus ». C’était à la fin des années 1940, le docteur Jeremy Morris découvrait grâce à un autobus à impériale ce qui allait dévoiler l’un des médicaments les plus universels − et le sujet obsessionnel de cette chronique : l’activité physique (AP). L’épidémiologiste britannique constatait en effet que les contrôleurs des bus à double étage, très mobiles, faisaient deux fois moins d’infarctus du myocarde que leurs collègues conducteurs, assis 90 % du temps. Pendant des décennies, Jeremy Morris a multiplié les études pour démontrer les bénéfices de l’AP, professionnelle ou de loisirs, et les conséquences délétères de la sédentarité.
En 2010, peu après la mort de ce pionnier − à 99 ans et demi −, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a émis des appuis mondiaux sur l’activité physique, pour tous les âges de la vie. Depuis les travaux de Jeremy Morris, de nombreuses publications ont confirmé et précisé les bienfaits de divers types d’AP, principalement dans le cadre des loisirs, sur le cœur et bien d’autres organes.
Mais quid des métiers physiquement actifs comme la construction, l’agriculture, la manutention, ou encore les soins aux personnes âgées ? Selon des données actuelles, l’activité physique professionnelle (APP) n’aurait pas des bénéfices aussi francs sur la santé que celle de loisirs. Ainsi, une revue de la littérature (23 études prospectives) montre que contrairement à l’AP récréative, qui protège de l’infarctus du myocarde avec un « effet dose », l’APP est associée à un risque accru d’accident cardiaque, d’autant plus grand qu’elle est intense (Current Opinion in Cardiology, 2013).
Une méta-analyse plus fraîche de 17 études (incluant193 000 participants) retrouve, elle, un risque de mortalité prématurée augmenté de 18 % chez les hommes exerçant une profession avec un niveau élevé d’AP, par rapport à ceux exerçant un métier moins physique. L’association n’est pas observée chez les femmes, décalrent Pieter Coenen (université d’Amsterdam, Pays-Bas) et ses collègues (British Journal of Sports Medicine, mai 2018).
Elévation prolongée de la fréquence cardiaque
Dans leur éditorial paru quelques mois plus tôt dans la même revue, ces auteurs offrent six hypothèses pour expliquer ce paradoxe de l’activité physique. De fait, à y regarder de près, les caractéristiques des efforts physiques fournis par des manutentionnaires ou des agriculteurs sont bien différentes de celles d’un entraînement sportif, de déplacements actifs ou de loisirs dynamiques.
Actuellement, les start-up issues de la recherche trouvent beaucoup de difficultés à se financer du fait de la durée du développement de ces entreprises jugée trop longue par les investisseurs.
Bpifrance a annoncé, mercredi 30 janvier, son plan pour défendre l’émergence de pépites françaises dans le secteur de la « deep tech », qui se concentre sur l’innovation de rupture. Une démarche qui traduit une inflexion dans sa politique de financement de l’innovation. Acteur central dans le financement de l’écosystème des start-up françaises, aujourd’hui robuste, l’établissement français souhaite désormais porter une attention particulière à ces start-up singulières, issues de la recherche fondamentale.
Le constat de la banque publique d’investissement est que l’écosystème de financement des start-up classiques – qui ont bénéficié de l’essor d’Internet et du mobile – est aujourd’hui « adapté » à leurs besoins, alors que leurs homologues de la deep tech peinent encore à attirer les capitaux. Un handicap qui s’explique, selon elle, par « le risque technologique élevé » et la durée de développement particulièrement long des projets de ces entreprises.
L’organisme financier s’engage réellement à soutenir directement, et sur la durée, 2 000 start-up de la deep tech d’ici 2023 grâce à une enveloppe de 775 millions d’euros. Sur la même période, elle va également injecter un milliard dans des fonds deep tech afin de renforcer les capacités de financement du secteur. Enfin, elle entend mieux accompagner les acteurs du secteur, pour les aider dans leur passage de la recherche à l’entreprenariat, avec la difficulté notamment à traduire une découverte faite en laboratoire en un résultat à succès. L’établissement veut également inciter au rapprochement entre start-up et grands groupes pour accélérer le développement des premières.
Une opportunité économique pour le pays
Simultanément à l’annonce de ce plan, Bpifrance a également présenté un référentiel permettant de distinguer les entreprises éligibles à ces aides. Celui-ci précise notamment que les start-up intéressées devront avoir « la capacité à lever des verrous technologiques », à créer « un avantage fortement différenciateur », et conserver un lien fort avec le monde de la recherche.
Derrière l’effort consenti par l’établissement français, réside la conviction que la deep tech est une opportunité économique pour le pays : « Dans les prochaines années, l’innovation naîtra de la recherche », déclare Nicolas Dufourcq, le directeur général de Bpifrance, persuadé que la France peut « être aux avant-postes dans les technologies fondamentales ». Cette démarche s’inscrit surtout dans le droit fil de la politique du gouvernement, qui veut convertir l’excellence des filières scientifiques françaises en succès économique dans des domaines porteurs tels que l’intelligence artificielle, la blockchain, l’informatique quantique ou la e-santé. A cet effet, il a installé en juillet 2018 un conseil de l’innovation doté d’un budget de 4,5 milliards d’euros pour financer des actions sur la durée du quinquennat.
Un rapport de l’inspection du travail alerte sur une « situation dangereuse pour les travailleurs » de la cokerie de l’aciérie avec une concentration 3 000 % au-dessus de la norme.
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Le 8 octobre 2018, la visite de l’inspectrice du travail des Bouches-du-Rhône dans l’usine d’ArcelorMittal de Fos-sur-Mer avait mal commencé : son badge d’accès « avait été désactivé ». Elle s’est terminée par un rapport accablant, concluant à une « situation dangereuse avérée pour les travailleurs » du groupe sidérurgique. Le Monde a eu accès à l’intégralité du document, dont l’existence a été révélée par le site Marsactu, lundi 28 janvier.
Lors de sa visite, l’inspectrice s’est concentrée sur la cokerie d’ArcelorMittal, où est produite la coke essentielle à la fabrication de la fonte. Venue contrôler « l’exposition au risque chimique des salariés » de l’une des usines les plus polluantes de France et d’Europe, elle est allée de mauvaise surprise en mauvaise surprise.
Dans son rapport, l’inspectrice relève de nombreuses anomalies et dysfonctionnements qui, note-t-elle, s’inscrivent dans la durée. Elle consigne ainsi « une nouvelle fois la persistance de fuites sur les portes de fours ». Les fours nO 108, 133, 138, 143,145, 148, 154, 158, 160… laissent échapper de manière importante des fumerolles jaunes caractéristiques de l’émanation d’agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) tels que le benzène, le monoxyde de carbone ou les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP).
Une catégorie de travailleurs est particulièrement surexposée à ces gaz : les ouvriers qui se relaient dans les cabines d’enfournement du charbon. La présence de benzo[a]pyrène, un HAP classé CMR, a été mesurée en août 2018 à des concentrations égales à 3 206,7 % de la valeur limite d’exposition professionnelle. La situation s’est même dégradée, puisqu’un contrôle effectué en juin avait révélé un dépassement de 1 400 %. Aucune mesure corrective n’avait été prise par ArcelorMittal à la suite de ces contrôles, note le rapport de l’inspection du travail.
L’inspectrice a également constaté qu’un salarié conduisait l’une des enfourneuses sans protection respiratoire, que d’autres fumaient, buvaient et mangeaient dans des zones où le port du masque est normalement obligatoire ou encore que le dispositif de détection du monoxyde d’azote au sein des cabines était défaillant.
Sur la base de ces multiples infractions, l’inspection du travail des Bouches-du-Rhône a enclenché une procédure de mise en demeure préalable à l’arrêt temporaire d’activité, et donné deux mois à ArcelorMittal pour établir un plan d’action. Dans un courrier adressé à ses salariés mardi 28 janvier, le groupe sidérurgique tente d’éteindre ce nouveau départ d’incendie. « Contrairement à ce qu’affirment plusieurs articles de presse diffusés ces derniers jours, l’environnement et la santé sont notre principale priorité », indique ArcelorMittal. Le texte reprend les éléments de langage envoyés aux médias.
La loi « avenir professionnel », décrétée en septembre 2018, prévoit, sous de nombreuses conditions, que les indépendants puissent disposer d’un droit au chômage.
Annoncée en septembre 2018, la loi « avenir professionnel » contient une mesure susceptible de progresser le sort des autoentrepreneurs : celle qui étend l’assurance-chômage aux travailleurs indépendants. Le texte prévoit, en effet, d’accorder, sous certaines conditions, une allocation aux personnes bénéficiant de ce statut, « en cas de cessation involontaire d’activité ». Le dispositif n’est pas encore entré en vigueur, le décret d’application devant être publié au Journal officiel dans les semaines à venir. Cette rémunération pourrait se présenter sous la forme d’une somme forfaitaire de 800 euros par mois, versés pendant six mois.
Les autoentrepreneurs étant observés comme une catégorie de travailleurs indépendants, ils sont, en principe, éligibles à une telle couverture. Mais très peu y auront recours, pronostique Grégoire Leclercq, président de la Fédération nationale des autoentrepreneurs car la mise en œuvre s’avère « complexe » et « peu rentable ». La loi « avenir professionnel » fixe plusieurs règles pour avoir droit à une telle allocation : il faut notamment avoir été placé en redressement ou en liquidation judiciaire. Or, très peu d’autoentrepreneurs se déclarent en arrêt de paiement et vont au tribunal de commerce, à l’heure actuelle. M. Leclercq souhaite par conséquent que les critères d’attribution soient revus.
Le projet de loi « avenir professionnel », dans la version élue au Parlement, avait par ailleurs donné la possibilité aux plateformes numériques de conclure des chartes, afin d’accorder des droits supplémentaires aux personnes qui travaillent pour elles, sous le statut d’autoentrepreneur (par exemple un accès amélioré à la formation continue). Invalidée par le Conseil constitutionnel pour des raisons techniques, cette disposition a été reprise dans le projet de loi « d’orientation des mobilités », que les sénateurs doivent observer en première lecture au mois de mars.
Roger Sue, sociologue du travail, professeur à l’université Paris-Descartes, explique l’objectif de l’essor de l’autoentreprenariat sur le travail.
Selon le sociologue du travail, Roger Sue, « le phénomène des autoentrepreneurs participe d’une forme de désintégration du travail ».
Les entreprises font de plus en plus appel aux autoentrepreneurs pour emplir certaines missions. En quoi cela change-t-il les relations au travail ?
Le phénomène des autoentrepreneurs collabore d’une forme de désintégration du travail. Le travail se fragmente, se parcellise. On n’a moins besoin des gens à plein temps. Nombre d’autoentrepreneurs sont dans la multi-activité et deviennent des prestataires de services. Ce mouvement apporte une agilité dont les entreprises ont besoin. Pour un dirigeant, il est plus facile de gérer une mission ad hoc qu’un emploi. La mission lui admet de mieux définir les objectifs, les compétences, le temps passé.
L’entreprise progresse vers une agrégation d’individualités, sur un temps court. Ce n’est évidemment pas vrai partout, c’est, par exemple, moins le cas dans l’industrie que dans l’économie de la connaissance.
Même si le salariat sera toujours présent et que les syndicats doivent se mobiliser, cette fragmentation du marché du travail est irrémédiable. Or cette individualisation du travail mène à l’éclatement des collectifs et à l’éclatement statutaire.
Quelles sont les conséquences pour les négociations internes à l’entreprise ?
La contagion progressive de la précarisation et externalisation de l’emploi est proportionnellement préoccupante. On est toujours dans un marché du travail dual avec un stock d’emplois à près de 80 % en CDI, mais avec un flux de CDD qui cèdent progressivement leur place aux autoentrepreneurs. La contractualisation inter-individuelle participe à la diminution du rapport de force entre salariés et employeurs et annonce à terme la fin des conventions collectives.
Les formes de travail individuel entraînent une dérégulation du marché considérable, avec une hyper-concurrence. Les plates-formes ont déjà favorisé la dégradation de la situation des autoentrepreneurs. A ce jeu-là, le moins-disant risque d’être gagnant, jusqu’à renvoyer la responsabilité du chômage à l’individu. Un autoentrepreneur sans travail est un individu qui n’aura pas su se vendre.
Comment l’entreprise peut-elle poursuivre sa croissance avec un effectif atomisé ?
Les autoentrepreneurs restent marginaux dans l’entreprise autour d’un milieu dur, qui a tendance à se restreindre, car les activités changent de plus en plus vite et les restructurations s’accélèrent. Le zapping des autoentrepreneurs est payant pour l’employeur car ils réunissent expériences et formations à l’extérieur, mais ils rejettent dans le même temps la notion de fidélisation à l’entreprise.
Le Medef, qui avait claqué la porte lundi de la discussion sur l’assurance-chômage pour protester contre les déclarations d’Emmanuel Macron sur le « bonus-malus », va revenir à la table des discussions, a présenté jeudi 31 janvier son président Geoffroy Roux de Bézieux, dans une conversation au Parisien :
« Je vais proposer à nos instances – et je ne doute pas qu’elles acceptent – de revenir dans la négociation, même si elle est difficile. »
Les organisations patronales avaient arrêté lundi leur contribution à la négociation, fâchées par la « détermination » affichée par Emmanuel Macron, lors de sa rencontre jeudi avec des citoyens dans la Drôme, à mettre en place le « bonus-malus » sur les contrats courts réclamé par les syndicats pour lutter contre la précarité.
« Désinciter à la précarité des contrats »
Mais le premier ministre, Edouard Philippe, a assuré mercredi à l’Assemblée que c’était aux organisations patronales et syndicales de conduire la négociation, sans prononcer le mot « bonus-malus » honni par les organisations patronales :
« C’est à elles qu’il revient de définir les façons, les instruments, les moyens pour faire en sorte que notre système d’indemnisation du chômage puisse être à nouveau équilibré (…), favoriser le retour à l’emploi et, en tout état de cause, favoriser la pérennité des contrats et “désinciter” à la précarité des contrats. »
Le désaccord de lundi avait causé l’annulation d’une séance de négociations jeudi, au cours de laquelle le patronat devait présenter un texte global sur tous les points délicats, dont la lutte contre les contrats courts, la gouvernance du système et les règles d’indemnisation.
Lorsqu’une nouvelle séance sera programmée une autre fois, « nous allons faire des propositions alternatives [au bonus-malus] », a répété M. Roux de Bézieux. L’objectif est de conclure la négociation le 20 février. De sa part, le secrétaire général de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), Jean-Eudes Du Mesnil, a déclaré que son organisation considérait « positivement les déclarations du premier ministre » et allait « très rapidement consulter ses instances pour décider » d’un retour aux négociations.