Vers des remplaçants professionnels ?

Droit social. Le contrat de travail à durée indéterminée à plein temps et s’inscrivant dans une relation directe de subordination entre employeur et salarié est la norme de la relation de travail. Il confère d’importantes protections aux travailleurs, mais est aussi utile aux employeurs, qui peuvent s’appuyer sur une main-d’œuvre stable, mettre à profit et maintenir à leur service le talent de cette dernière, tout en exerçant leur autorité et autres prérogatives patronales pour diriger et organiser le travail de leurs salariés.
Pourquoi créer un contrat à durée déterminée (CDD) multi-remplacement ? Le CDD est un contrat de travail par lequel un employeur recrute un salarié pour une durée limitée, se démarque de l’« emploi typique » en ce qu’il engendre par essence une plus grande précarité du salarié. Les entreprises y recourent car il présente l’avantage de prendre fin sans formalité, par son seul terme ou la réalisation de son objet, tel le retour du salarié malade remplacé.
Le législateur français a fait du CDD un mode exceptionnel d’embauchage et en a subordonné drastiquement le recours à des cas précis, tout en limitant sa durée et ses possibilités de renouvellement. La comparaison internationale (Bernd Waas, Guus Heerma van Voss, Restatement of Labour Law in Europe vol II : Atypical Employment Relationships, Hart Publishing, 2020) montre que le formalisme qui accompagne ce type de contrat est important en droit français.
Original à plus d’un titre
La législation nationale est également de plus en plus complexe : le CDD est devenu un outil des politiques d’emploi. S’appuyant sur le postulat jamais vérifié qu’une législation contraignante est défavorable à l’emploi en particulier pour les personnes dont l’insertion dans le marché du travail est la plus difficile, les règles dérogatoires et les règles spéciales se sont multipliées : on a vu fleurir, les CDD jeunes, les CDD seniors et celui réservé aux salariés agricoles âgés, les CDD de transition, les contrats d’insertion ou de réinsertion professionnelle, les CDD de mission, les CDD de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité, les emplois saisonniers, le contrat vendange, celui relatif aux emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée, le CDD pour les sportifs professionnels, etc.
L’article 6 de loi « portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein-emploi » de décembre 2022 est venu ajouter à ce millefeuille de règles un nouvel assouplissement. Alors que l’article L. 1242-2 du code du travail impose de conclure un nouveau CDD à chaque mission de remplacement, les entreprises ont été autorisées à procéder au remplacement de plusieurs salariés absents, simultanément ou successivement, au moyen d’un seul CDD multi-remplacement.
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