Une retraitée autorisée pendant quinze ans à occuper son logement de fonction est soudain menacée d’expulsion

Une retraitée autorisée pendant quinze ans à occuper son logement de fonction est soudain menacée d’expulsion

Le salarié qui dispose d’un logement de fonction n’est pas considéré comme un locataire qui bénéficierait d’un bail relevant de la loi du 6 juillet 1989.

Lorsqu’il perd son emploi, il doit rendre le logement, parce que celui-ci est « un avantage en nature accessoire au contrat de travail », selon la jurisprudence de la Cour de cassation. Si, à l’expiration de son préavis ou de son délai pour partir, il se maintient dans les lieux, il est considéré comme un « occupant sans droit ni titre », et l’ex-employeur peut demander au juge l’autorisation de l’expulser.

Mais peut-il attendre quinze ans avant de se prononcer ? Telle est la question que pose l’affaire suivante dans laquelle une retraitée se voit signifier son congé par l’employeur qu’elle avait quitté quinze ans auparavant.

En 1961, la Caisse centrale de crédit hôtelier, commercial et industriel embauche Mme X. En 1970, elle met à la disposition de celle-ci, moyennant un loyer modique, un appartement qu’elle possède, dans le 14arrondissement de Paris. Le 31 mai 2000, Mme X prend sa retraite. La Caisse centrale ne lui demandant pas de partir, elle se maintient dans les lieux, sans toutefois qu’un contrat de bail ait remplacé la convention d’occupation qui existait depuis 1970.

Lire aussi : La locataire âgée devait bénéficier d’une offre de relogement

Le 25 juillet 2014, la société BPIfrance financement, qui vient aux droits [intervenant pour le compte] de la Caisse centrale, fait savoir à Mme X, désormais âgée de 71 ans – ainsi qu’à d’autres personnes dans la même situation – qu’elle veut vendre le logement, libre de toute occupation. Elle lui donne un an pour partir. Mme X, qui ne peut pas se reloger à un prix équivalent (460 euros), se maintient dans les lieux. Le 21 août 2015, la société demande son expulsion.

Intention de « nover »

En première instance et en appel, les magistrats considèrent que son action est prescrite, donc irrecevable. Mais la Cour de cassation juge, le 30 juin 2021, que cette action, « fondée sur le droit de propriété », n’est « pas susceptible de prescription ». La cour d’appel de Paris, devant laquelle l’affaire est renvoyée, ordonne donc l’expulsion de Mme X, le 24 mars 2022.

Elle écarte l’argument de son avocate, selon lequel « les parties ont entendu nover », c’est-à-dire substituer un contrat de bail à l’ancienne convention de mise à disposition. La cour rappelle en effet que « la volonté de nover ne se présume pas ». Or, constate-t-elle, Mme X ne produit aucun « acte » juridique, prouvant qu’une volonté commune de modifier la substance du précédent contrat existait.

Il vous reste 35.71% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Avatar
LJD

Les commentaires sont fermés.