Une « handimarche » pour garder son emploi

« Nous, on est des smicards, on transpire tous les mois pour 1 200 balles, on demande juste qu’on nous laisse travailler. » Tous les jours depuis lundi 17 août, Emile Prono plaide sa cause et celle de ses collègues du groupe Earta là où ses pas le portent. Lundi à Nantes, mardi à Ancenis (Loire-Atlantique), mercredi à Angers, puis ce sera Le Mans, La Ferté-Bernard (Sarthe), Chartres, et s’il n’a pas été entendu d’ici là, le délégué syndical CFDT Santé-sociaux et trésorier du CSE de la société sarthoise sera à Paris, le 31 août, devant le palais de l’Elysée ou l’Hôtel Matignon – voire les deux.
Avec lui, une vingtaine de collègues participe à cette « handimarche » de combat un brin désarmante : au 1er septembre, une partie des 230 salariés atteints de handicap (sur les 250 que compte l’entreprise dans la Sarthe et en Loire-Atlantique) risque de se retrouver sans activité. Tant que Presstalis existait, en effet, Earta sous-traitait les invendus de la presse récupérés par la SAD (Société Agence diffusion) sur une partie de l’Ouest de la France : d’un côté, des publications partaient au pilon (les quotidiens, les hebdomadaires), de l’autre, des titres (mensuels, trimestriels, hors-séries, etc.) étaient reconditionnés, en route pour une nouvelle vie en kiosque.
Une « situation inextricable »
Depuis que Presstalis, reprise par les quotidiens début juillet, est devenue France Messagerie (au prix d’une restructuration drastique), la SAD, l’une de ses filiales, a été liquidée, faisant passer sa collaboration avec Earta de vie à trépas. « On a investi 800 000 euros ces dernières années pour industrialiser la gestion des invendus, on a embauché 50 personnes, etc., se désole Didier Rio, le patron d’Earta. Presstalis apportait 2 des 7 millions d’euros de notre chiffre d’affaires. Si cela s’arrête, on va perdre 30 % à 35 % de notre activité, et je n’aurai d’autre choix que de licencier une soixantaine de salariés. » Dans l’espoir de retourner la situation, Didier Rio marche, lui aussi.
« En coordination entre France Messagerie et les MLP [l’autre distributeur de la presse en France], ces mandats ont été réattribués à des opérateurs qualifiés, indépendants, qui ont leurs propres salariés à faire travailler », justifie Cédric Dugardin, le directeur général de France Messagerie, qui parle de « situation inextricable ». Un seul des dépositaires qui récupèrent cette activité de retour des invendus, celui du Mans, a accepté de continuer de travailler avec Earta ; celui de Nantes, lui, n’y tient pas.
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