Travailleurs sans papiers : une enquête vise une entreprise de collecte de déchets

Travailleurs sans papiers : une enquête vise une entreprise de collecte de déchets

Ils payaient pour travailler. Un mois et demi après le mouvement de grève de quelque 200 travailleurs sans papiers lancé par la CGT dans une dizaine d’entreprises d’Ile-de-France, une enquête pour « emploi d’étrangers en situation irrégulière » est en cours. Cette procédure vise l’entreprise de collecte des déchets Sepur et est conduite par l’inspection du travail, sous la supervision du parquet de Versailles. « Des contrôles de l’inspection du travail ont mis en évidence plusieurs infractions sur l’emploi d’étrangers sans titre, confirme le ministère de l’intérieur. Il y a des conditions de travail qui frisent l’exploitation. Il y aura des conséquences pour les employeurs, des sanctions administratives, des poursuites judiciaires. »

Du 25 octobre au 17 novembre, 59 éboueurs sans papiers, embauchés par le biais des sociétés d’intérim Mistertemp’et Drop Intérim, s’étaient mis en grève pour réclamer leur régularisation.

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En parallèle de l’enquête en cours, au moins huit éboueurs sans papiers, maliens et mauritaniens, ont déposé plainte fin octobre et début novembre pour « extorsion ». D’après les procès-verbaux d’auditions que Le Monde a consultés, la plupart d’entre eux accusent deux chefs d’équipe du dépôt Sepur de Villejust (Essonne) de leur avoir soutiré de l’argent, en échange de quoi ils pouvaient travailler malgré leur situation administrative. Certains travaillaient à temps plein comme « ripeurs » depuis 2019, dans les Hauts-de-Seine, l’Essonne, en Seine-et-Marne, en Seine-Saint-Denis ou encore dans le Val-d’Oise.

« Racketté » par ses supérieurs

Ainsi, Ousmane, un éboueur mauritanien sans papiers, explique dans son audition qu’à partir de décembre 2020 il devait donner « 100 euros par mois » à ces deux chefs. « Si je ne les payais pas, ils ne m’appelaient plus », assure-t-il. Pour pouvoir être déclarés en dépit de leur situation irrégulière, la plupart des plaignants recouraient à des « alias », procédé courant qui consiste à travailler en utilisant les documents d’identité d’une autre personne, en situation régulière, à l’insu ou avec la complicité de l’employeur.

« [Mes supérieurs] m’ont dit de payer 200 euros chaque mois sinon ils mettaient fin à mon contrat », raconte Moussa.

Certains ont aussi eu recours à des faux documents d’identité, à l’instar de Moussa, qui rapporte avoir été « racketté » par ses supérieurs à partir du mois de janvier : « Au début, quand j’ai commencé à travailler avec eux, je leur ai remis une fausse carte nationale d’identité française. Ils se sont aperçus que c’était un faux document, et à partir de ce moment-là ils ont commencé à me faire du chantage en me disant de payer 200 euros chaque mois sinon ils mettaient fin à mon contrat. »

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LJD

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