« Travailler moins pour vivre mieux » : une autre voie à explorer
Livre. Pourquoi le travail est-il omniprésent dans nos vies ? Pourquoi se définit-on par rapport à lui ? Qu’est-ce qui nous pousse à rechercher la productivité et la performance dans notre métier, jusqu’à, parfois, choisir des loisirs qui pourraient être utiles à nos carrières ? Au fil des pages de son essai Travailler moins pour vivre mieux (Dunod), Céline Marty nous invite à interroger notre rapport au travail, sa place dans notre quotidien et au sein de l’organisation sociale. La professeure de philosophie fait le constat critique d’un travail qui envahit nos vies, nous apportant son lot de contraintes, de souffrances, de dépendances.
Une situation qu’elle dénonce, mais dont elle ne voit que peu de remises en cause. Les conditions d’exercice professionnel et la centralité du travail semblent aujourd’hui, à ses yeux, largement acceptées. Elle démontre combien le sujet du travail peut même être « tabou ». Et lorsque la question apparaît au cœur du débat public, c’est uniquement pour être abordée « par un angle technique ou économique, déplore-t-elle. Le marché décide incontestablement du contenu et des conditions du travail, comme si tout cela ne dépendait pas de nous ».
Son ouvrage doit donc se lire comme un appel au sursaut. « Tout n’est pas gravé dans le marbre ! », assure-t-elle. Les lecteurs-citoyens sont invités à s’emparer du sujet, à « se réapproprier le débat public sur le travail ». Pour ce faire, Céline Marty livre quelques pistes de réflexion et d’action, afin de montrer que des alternatives à la situation actuelle sont possibles.
Parvenir à une « société frugale »
Son propos est étroitement lié à la prise en compte de l’urgence écologique. Face à l’épuisement des ressources et aux impacts du productivisme sur l’environnement, l’autrice juge indispensable qu’une autre voie soit empruntée. C’est là le sens du sous-titre de son essai, « Guide pour une philosophie antiproductiviste ». Une réflexion menée en prenant notamment appui sur les écrits d’André Gorz (1923-2007), l’un des pionniers de la décroissance en France (l’autrice est actuellement doctorante en philosophie du travail sur l’œuvre de ce dernier).
Céline Marty appelle à « s’émanciper du productivisme » en questionnant notamment l’utilité des emplois qui nous entourent. « Nous devons poursuivre collectivement ce débat : la publicité est-elle une production essentielle ? Qu’en est-il du marketing ou de l’optimisation fiscale ? » Une réflexion similaire doit être menée sur ce que nous souhaitons produire. « La question est vertigineuse, reconnaît-elle. [Le] marché et l’Etat capitaliste (…) ont, seuls, déterminé le contenu légitime de la production selon leurs intérêts, détruisant ressources humaines et naturelles. Il est grand temps de s’en emparer. »
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