Nouveaux témoignages dans le procès France Télécom 

Nouveaux témoignages dans le procès France Télécom 

Monique Fraysse-Guiglini, qui était médecin du travail dans une direction régionale, a déclaré, lundi, devant le tribunal correctionnel, un témoignage terrible sur les conditions pénibles des travailleurs qu’elle a observée dans l’entreprise.

Chacune de ses déclarations fait mal. Et elles font d’autant plus mal qu’elles émanent d’une femme médecin du travail, qui a connu au plus près dans son cabinet le mal-être des travailleurs de France Télécom. Monique Fraysse-Guiglini a été recruté dans l’entreprise en 1994 et affectée à la direction opérationnelle de Grenoble. De l’entreprise, elle a connu plusieurs mutations et sait les inquiétudes que celles-ci génèrent sur les salariés. Mais aucune d’entre elles, assure-t-elle, ne ressemble à la crise qu’elle a remarqué à partir du mitan des années 2000.

Nommée à la barre des témoins à la demande des parties civiles, Monique Fraysse-Guiglini raconte qu’en 2007, elle constate une première augmentation singulière des demandes de rendez-vous « spontanés » à la médecine du travail. « Les salariés me disent que tout semble être fait pour les déstabiliser. Ils vivent dans la crainte de voir leur poste disparaître ou d’être mutés dans une autre ville. » A la fin de l’année, elle fait un rapport à sa direction sur cette augmentation du nombre de rendez-vous qui lui semble « préoccupante. » Avec quelques collègues, elle en parle au directeur groupe des ressources humaines, Olivier Barberot, qui leur répond :

« Vous, les médecins, c’est bien normal, vous ne voyez que les gens à problème. »

On lui demande, comme aux autres médecins salariés de l’entreprise, de participer aux premières cellules d’écoute mises en place par l’entreprise. Elle s’y dénie.

« Nous sommes relancés par la hiérarchie qui fait pression pour que nous y participions. Mais il y avait pour nous un problème d’incompatibilité déontologique. »

« J’assiste aussi à des dérives violentes »

« Dans mon cabinet, poursuit-elle, j’observe des syndromes anxio-dépressifs, des syndromes addictifs – tabac, alcool, médicaments – et j’ai la certitude qu’ils sont en lien avec la situation de travail. J’assiste aussi à des dérives violentes de la part de certains salariés, l’un qui frappe contre les murs en apprenant sa mutation, un autre qui se jette sur son manager, un autre encore qui tombe dans un mutisme profond. »

En 2008, Monique Fraysse-Guiglini évoque dans son rapport d’activité « la pression subie par les cadres supérieurs ». Elle indique que celle-ci est « mal vécue, fragilise les individus, déstabilise leur vie personnelle et a des répercussions sur leur santé ». Elle souligne aussi dans ce rapport le « conflit de loyauté » vécu par ces cadres, partagés entre les liens qui les unissent à leurs équipes et le devoir d’obéissance qu’ils ont vis-à-vis de la direction.

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LJD

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