Médecine du travail : dilemme à l’hôpital

Chronique. Protéger ou remettre au travail : une alternative qui se pose à l’hôpital, même pour les plus fragiles. Comme pour tous les travailleurs, le Haut Conseil de la santé publique s’est prononcé sur la protection des soignants vulnérables, qui de par leur état de santé (diabète, maladie cardiovasculaire, mucoviscidose, etc.) développeraient en cas de contamination par le Covid-19 une forme grave de la maladie. Il a recommandé « une exclusion des services à haut risque de transmission » ou « un réaménagement du poste de travail ».
Concrètement, le médecin du travail informe les responsables des ressources humaines que l’agent doit être en autorisation d’absence. Sauf que les hôpitaux ont manqué de bras. « On était en guerre », rappelle Jean-Dominique Dewitte, le président de la Société française de médecine du travail (SFMT).
Avec le double objectif de « contribuer à la protection des agents, mais aussi [de] contribuer à maintenir la capacité soignante des établissements », le 23 mars la SFMT a publié une nouvelle recommandation. Elle y préconise une application variable de la mise en arrêt des personnels soignants fragiles, en fonction de la gravité de leur situation.
Un classement des catégories à risque
Dans un tableau, elle classe les services hospitaliers en quatre catégories de risque de contamination et détaille le seuil de fragilité en deçà duquel elle estime non indispensable l’éviction d’un agent vulnérable. Les médecins du travail qui suivent la recommandation le réaffectent alors dans un autre service. « Aucune des personnes qu’on a laissées au travail dans notre hôpital n’a été contaminée », note M. Dewitte.
Y a-t-il une prise de risque pour les agents vulnérables ? « Probablement un petit peu, reconnaît Jean-François Gehanno, l’ancien président de la SFMT. Au départ, la question était : Peut-on affecter ces personnes dans un service hors Covid ? » « Quand on a rédigé en urgence la recommandation, beaucoup nous demandaient de les aider à prendre des décisions, car dans l’Est, il n’y avait plus suffisamment de médecins ni de personnel soignant. Il fallait préserver les forces. Le fait d’avoir fait ces recommandations nous a été reproché, on n’aurait pu nous reprocher le contraire », ajoute M. Dewitte.
« Les recommandations de la SFMT peuvent être interprétées au détriment de la protection des salariés fragiles, s’inquiète un interne en médecine du travail. C’est évidemment moins protecteur d’être réaffecté dans un service hors Covid que de rester chez soi », précise-t-il.
Il vous reste 31.27% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.