L’impact variable du télétravail sur la productivité
Travailler à distance permet-t-il de travailler mieux et, au final, cela contribue-t-il à l’amélioration de la productivité des salariés ? Sur le terrain, la question est loin d’être tranchée. « Lorsque les collaborateurs sont présents, rien qu’en faisant le tour des bureaux le matin, je règle dix problèmes », témoigne Raymond Dorge, président du cabinet d’expertise-comptable GMBA.
« Depuis que je travaille de chez moi, je perds beaucoup moins de temps, ne serait-ce qu’en transports ou en réunions », rétorque, sous couvert d’anonymat, Bernard, un cadre expérimenté du secteur bancaire. « Pour les jeunes recrues qui ont besoin d’être formées et accompagnées, le télétravail est une catastrophe », ajoute Raymond Dorge.
La littérature économique n’apporte pas de réponse plus claire. L’impact du télétravail sur la productivité « dépend de nombreux facteurs », soulignent Cyprien Batut et Youri Tabet dans un papier publié en novembre 2020 par la direction générale du Trésor. A savoir, les conditions de sa mise en place – les outils mis à disposition, la formation des salariés –, l’organisation du travail dans l’entreprise et du management, et les caractéristiques des métiers.
Coûts cachés
« Quand les collaborateurs travaillent sur une activité qu’ils maîtrisent parfaitement, comme les activités de gestion, le télétravail va plutôt améliorer la productivité », témoigne François-Xavier Selleret, directeur général de l’Agirc-Arrco, qui compte 13 000 salariés. « A l’inverse, quand on est sur des activités de pilotage de projet, qui demandent plus d’interactivité, le télétravail représente un challenge, et un challenge dans la durée. Le problème est alors de savoir comment entretenir la transversalité, favoriser le collectif », souligne le dirigeant.
« Sur une activité parfaitement maîtrisée, le télétravail va plutôt améliorer la productivité » François-Xavier Selleret, de l’Agirc-Arrco
Certains chercheurs confirment que si le télétravail permet de réaliser des économies de temps et d’argent, en abaissant les temps de transport pour les salariés ou le nombre de mètres carrés de bureaux nécessaires aux entreprises, il engendre des coûts cachés qui pèsent lourd dans la balance.
« Le coût intégral du télétravail peut être le double des coûts visibles », résume Laurent Cappelletti, professeur titulaire de la chaire comptabilité et contrôle de gestion au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM). D’après les recherches menées aux CNAM et corroborées par des ergonomes, la perte de productivité lorsque l’entreprise est à 100 % en télétravail peut atteindre 20 %, voire davantage en cas de mauvaises conditions.
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