L’image des enseignants dans la société française
Une grande partie d’enseignants dit subir d’une image dévaluée dans la société française. Enquête après enquête, les Français convoquent pourtant leur affection à la figure du professeur. Enquête sur ce paradoxe.
C’est l’histoire d’un trouble. Un désamour perçu par des générations d’enseignants, convaincus que les Français ne les aiment plus et ont une horrible image de leur métier. « Professeur des écoles n’est qu’un titre, sans prestige, désuet, illustre en quelques mots Gaël, un enseignant lyonnais. Nous sommes méprisés par l’opinion, qui ignore royalement la réalité du métier… » Un fait que les recherches auprès des Français sont pourtant loin de réaffirmer.
La question s’est exigée à l’agenda politique : le 25 avril, lors de la conférence de presse de clôture du grand débat national, Emmanuel Macron a protégé l’exigence de « revaloriser ce métier essentiel à la République et à la vie de la nation qu’est l’enseignant, le professeur, le maître ». Une réévaluation qui pourrait notamment passer par une hausse salariale. En février, le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, appréciait, lui, que le besoin de reconnaissance des enseignants « est évident ». « On doit répéter, sans cesse, que la société française doit aimer ses professeurs », augmentait-il.
Exception européenne
Mais pour persuader les enseignants, le chantier promet d’être ardu. Cette dépréciation perçue des enseignants pour leur profession est en effet profonde. Elle est unique en Europe. Selon les chiffres de la recherche Talis de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) accomplie tous les cinq ans, 5 % des enseignants français pensent que leur métier est amélioré dans la société, contre 31 % en moyenne sur les trente-cinq pays participants. Seule la Slovaquie arrive derrière la France.
Cette autodépréciation française est confirmée par plusieurs enquêtes depuis les années 2000. Avec à chaque fois ce même constat : si les enseignants ont totalement une haute estime de leur métier, ils le jugent rarement « prestigieux » dans la société française. Une sensation qui se met en place avant même d’entamer la formation d’enseignant. Dans une étude du Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) de 2016, un panel d’étudiants de troisième année de licence, dont la moitié envisageait de devenir professeur, classait la profession d’enseignant parmi les moins illustres d’une liste de quinze métiers, juste devant « styliste ». Tout en portant aux nues les métiers de« avocat », « magistrat », ou encore « ingénieur »