L’étrange faillite des Editions de la Différence

L’étrange faillite des Editions de la Différence

Les Editions de la Différence peuvent-elles renaître une fois encore de leurs cendres ? Soufiane Bensabra, leur dernier actionnaire et dirigeant, assure y croire. « Je m’active pour trouver un repreneur, et suis en discussion avec un investisseur chinois intéressé », affirme-t-il au Monde. Pas gagné, cependant, tant la situation de l’entreprise parisienne, qui a édité plus de 2 000 titres de littérature, d’essais, de poésie ou encore de livres d’art depuis sa création en 1976, paraît aujourd’hui désespérée.

Victime d’une conjoncture difficile pour toute l’édition, mais aussi d’une gestion calamiteuse et d’un violent conflit entre dirigeants, La Différence a été placée en liquidation judiciaire, le 26 mai, par le tribunal de commerce de Paris.

La société, qui employait une vingtaine de personnes en 2014, ne compte plus aucun salarié. Le jugement n’a pas calmé les tensions. Les deux parties s’accusent mutuellement de vol, d’escroquerie, d’abus de confiance. L’affaire est entre les mains de la police, qui a commencé à entendre les différents protagonistes.

Retournement exceptionnel

Sinistre fin pour une maison qui a publié Michel Houellebecq et Niki de Saint Phalle, Fernando Pessoa, Michel Butor, Peter Handke et Juvénal, ou encore Jean Lassalle, et dont l’élégant logo avait été dessiné par André Masson. Une rechute, en réalité. La Différence avait connu une première liquidation judiciaire, en 2017.

Mais, à l’époque, l’actionnaire majoritaire, Claude Mineraud, un ancien assureur, avait réinjecté des fonds, montré que l’actif restait supérieur au passif, et il avait obtenu, en 2019, l’annulation de la liquidation. Ce retournement exceptionnel avait permis à la société de redémarrer. L’octogénaire Claude Mineraud avait néanmoins estimé qu’il était temps pour lui de passer la main.

C’est alors qu’entre en scène Soufiane Bensabra. Ce courtier en œuvres d’art et collectionneur né en 1980 à Paris est notamment spécialiste de Sayed Haider Raza (1922-2016), l’un des plus célèbres peintres indiens contemporains, longtemps installé en France. Il préside l’une des deux fondations qui se disputent l’héritage du « Picasso indien ». La Différence avait publié une belle monographie sur Raza, en 2008.

« Je voulais acheter un stock de ce livre, j’ai fini par acheter la société », résume Soufiane Bensabra. Une bonne partie des fonds nécessaires est apportée par un Indien, Deepak Gupta, dont la fille, Sanjana, obtient près de 30 % du capital.

Soufiane Bensabra confie alors la présidence de La Différence à un vieil éditeur d’art et restaurateur de tableaux dont il est proche, Jean-Pierre Archenoult, qui a travaillé notamment avec César et Max Ernst. Pleins d’ambition, ils décident non seulement de développer l’activité d’édition, mais d’y ajouter un deuxième métier, la vente au détail des livres de la maison, en ouvrant en 2020 une librairie en plein cœur de Paris, rue de l’Ancienne-Comédie.

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LJD

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