Les problèmes d’emploi, symptôme persistant de la relégation des banlieues
Onze agences Pôle emploi dégradées, deux autres incendiées. Comme l’ensemble des institutions, le service public de l’emploi n’a pas été épargné par les émeutes ayant touché la France après la mort du jeune Nahel M., tué par un policier à Nanterre, mardi 27 juin. Un symbole pour des territoires dont les habitants sont souvent très éloignés du marché de l’emploi. Le taux de chômage y est plus de deux fois supérieur à la moyenne nationale, à 18 % de la population active contre 7,1 %.
Un signe de plus de la relégation des 1 514 quartiers prioritaires de la ville (QPV) que compte le pays, et de la situation défavorable des banlieues par rapport au reste du territoire. Et c’est un élément qui revêt une importance considérable au regard de l’objectif répété comme un mantra par le gouvernement depuis plus d’un an : atteindre le plein-emploi – autour de 5 % de chômage – d’ici à 2027. Pire, alors que les jeunes de moins de 25 ans sont surreprésentés dans les QPV (39,1 % contre 29,9 % en métropole), le taux de chômage des moins de 30 ans s’y élevait, en 2020, à 30,4 %, selon un rapport de l’Observatoire national des politiques de la ville.
La situation s’y améliore pourtant et la bonne santé actuelle du marché du travail profite aussi aux quartiers populaires. Le chômage y a baissé de manière rapide et régulière – il était de 26,4 % en 2015 –, mais l’écart avec le reste du territoire reste grand. Une dynamique baissière qui relève de « l’exploit », selon le président de l’Observatoire des inégalités, Louis Maurin, tant ces territoires accueillent sans cesse les personnes les plus en difficulté alors que « ceux qui trouvent un emploi stable les quittent ».
Ce dernier tempère cependant : « Ce serait une erreur de croire que l’amélioration sur l’emploi réglera mécaniquement tous les problèmes. » Une analyse que partage le président de la Fédération des acteurs de la solidarité, Pascal Brice. « Le taux de chômage va continuer de baisser, souligne-t-il. Mais il va falloir continuer à travailler sur la question de la pauvreté et de la précarité. » Parmi les résidents de QPV ayant un emploi, un sur cinq a signé un contrat précaire (CDD, apprentissage, intérim, stages), contre un sur sept dans les agglomérations auxquelles ces quartiers appartiennent. Et selon les travaux de l’Observatoire national des politiques de la ville, ils sont à 70,8 % ouvriers ou employés, contre une moyenne de 44,9 % en France (hors Mayotte).
Un décalage entre la mobilisation et les résultats
L’entrepreneuriat et les emplois ubérisés ont parfois été mis en avant comme remède possible au chômage, un phénomène à « relativiser » selon Louis Maurin. « La plupart des jeunes des QPV cherchent un emploi salarié pour la stabilité, qui représente le meilleur moyen de s’en sortir, d’acheter un pavillon, etc. », indique-t-il.
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