Le travail post-Covid : « Personne ne s’est occupé des plantes ! »

A la rentrée, l’état des plantes vertes au bureau sera le nouvel indicateur de la bonne santé des entreprises. A-t-on pu les faire arroser ? L’entreprise a-t-elle cru en sa réouverture ? Guillaume Brunet, jardinier en chef chez Atelier Brâam, spécialiste de la cafétéria naturelle d’entreprise, se souvient du tableau trouvé chez certains clients. Des feuilles partout par terre, les monsteras et aspidistras desséchées, les feuilles des ficus jaunies. Il a remplacé les plantes mortes, un peu comme les parents renouvellent les poissons rouges avant le retour de vacances des enfants.
Pour autant, à l’exception de quelques filiales de grands groupes étrangers qui, les yeux sur leurs directives, ont refusé de laisser les clés de leurs locaux aux jardiniers pendant le premier confinement, rares sont les entreprises à avoir abandonné leurs plantes vertes. Comme si la peur que la verdure ne tienne pas allait de pair avec celle de ne pas retrouver son bureau, analyse Olivier Bedouelle, du paysagiste Sauvaje.
Un marqueur hiérarchique
Cet attachement en dit long sur le statut qu’a gagné la plante verte dans l’entreprise au cours du dernier demi-siècle, proscrite, puis élément de décor, enfin symbole de vivant. Dans les années 1980, « on peut fêter l’écologie et la contre-culture en incitant au port des jeans et à l’installation des plantes de bureau », écrit François Cusset dans La Décennie. La tendance est aux grands atriums. Le nombre et la taille des plantes dont on hérite deviennent des marqueurs de sa place dans la hiérarchie.
« Si vous mettez des plantes en plastique, vous pouvez considérer que les salariés sont en plastique. » Alexis Tricoire, designer végétal
Avec l’apparition des coupes budgétaires, à la fin des années 1980, on passe des bacs Riviera blancs composés d’une grande plante, d’une moyenne et d’une fleurie à un ratio d’une plante par bac. Une dizaine d’années plus tard, la plante n’a plus sa place dans les grands open spaces, quand le nomadisme devient à la mode. C’est l’époque où l’on regarde de haut les secrétaires qui partent avec leurs plantes quand elles changent de poste. « Les petits pots de fleurs, c’est le syndrome de la carte postale », lâche l’architecte Jean-Michel Wilmotte. La décoration végétale est « top-down », une décision venue d’en haut, la plante verte est « bottom-up », une aspiration collégiale, symbole de résistance aux règles.
Fureur des années 2000, les bonsaïs sont trop difficiles à entretenir. Symbole de prouesse technique, les murs et logos végétaux d’intérieur, eux, amorcent leur déclin. Quasiment toujours réalisés en « stabilisé », avec un produit chimique pour éviter la putréfaction, chers et menaçant de fuite, leur entretien coûteux est peu compatible avec l’époque.
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