Le travail a rendez-vous avec l’histoire
Cet ouvrage collectif dirigé par le juriste Alain Supiot examine et éclaire les défis du travail au XXIe siècle. Cent ans après la création de l’Organisation internationale du travail (OIT), les questions écologiques, technologiques et juridiques sont désormais au cœur des réflexions sur le monde du travail.
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Le Livre. En 1919, l’Organisation internationale du travail (OIT), créée par le traité de Versailles, inscrivait dans sa Constitution la nécessité d’un « régime de travail réellement humain ». Cent ans plus tard, cette mission est toujours d’actualité : la « déclaration du centenaire », adoptée lors de la Conférence internationale du travail de juin 2019, recommande de poursuivre une approche des questions du travail « centrée sur l’humain ».
Le Travail au XXI e siècle est un ouvrage collectif qui fait ressortir l’héritage le plus précieux légué par cette histoire centenaire : « L’idée qu’il n’existe pas de paix durable sans justice sociale, que cette justice sociale ne peut être poursuivie avec succès au niveau d’un seul pays, qu’elle requiert une coopération entre les nations. Les normes internationales du travail restent aujourd’hui le principal instrument à disposition de l’OIT pour promouvoir des conditions de travail décentes pour tous », résume le directeur du bureau de l’OIT pour la France, Cyril Cosme.
Sous la direction du spécialiste du droit du travail et professeur émérite au Collège de France Alain Supiot, l’ouvrage est le fruit d’une discussion entre vingt et un auteurs venus d’horizons disciplinaires et de pays très divers, réunis lors d’un colloque international organisé au Collège de France en février 2019, quelques mois avant le discours de clôture d’Alain Supiot.
L’émergence des questions écologiques et sociétales
Ce n’est pas la première fois que le travail se transforme sous l’effet des changements techniques affectant les modes de production. Cependant, la vitesse avec laquelle les technologies numériques bouleversent aussi bien l’organisation de la production des biens et des services que le rapport entre producteurs et consommateurs est singulière. Deux auteurs se penchent ainsi sur l’intelligence artificielle, qui renouvelle le rapport entre l’homme et la machine : Giuseppe Longo rappelle les propriétés si caractéristiques du travail humain, et Stéphane Mallat souligne les ressorts différents de l’intelligence artificielle et de l’intelligence humaine.
Le livre souligne un autre enjeu essentiel des années à venir : l’articulation entre la question écologique et la question sociale. Les fondateurs de l’OIT restaient éloignés des préoccupations liées à l’environnement, aux risques de surexploitation des ressources naturelles et au dérèglement climatique. « L’époque était au productivisme, à partir d’une organisation scientifique du travail industriel qui allait connaître son apogée dans les années suivant la création de l’Organisation », rappelle Cyril Cosme.