Le dialogue social simplifié a complexifié le rôle des élus
Dans la foulée des ordonnances travail de 2017, les comités sociaux et économiques (CSE) ont succédé en 2018 aux précédentes instances représentatives du personnel : le comité d’entreprise, les délégués du personnel et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).
En 2023, la majorité des CSE arrivent au terme de leur premier mandat : c’est l’heure du bilan. A l’occasion des Rencontres RH, le rendez-vous mensuel de l’actualité du management organisé par Le Monde en partenariat avec ManpowerGroup et Malakoff Humanis, une dizaine de DRH ont débattu, mardi 6 juin, des conséquences de la réforme sur le dialogue social.
En introduction, le sociologue du travail et des relations professionnelles Frédéric Rey, également maître de conférences au CNAM, a présenté les principaux enseignements d’une étude commandée par la CFDT et publiée en janvier 2023, sur l’expérience vécue par près de 3 000 élus depuis la création des CSE : « La rationalisation du dialogue voulue par la réforme a eu des effets pervers dans les entreprises. » Il énumère : « Une diminution des moyens et une multiplication des sujets traités ; l’impression d’un dialogue social de surface, qui respecte les formes mais ne permet pas véritablement de contribuer à la coproduction des règles de l’entreprise ; enfin la transformation de l’exercice des mandats : plus de dossiers, plus techniques, qui touchent un ensemble plus large de problématiques. »
Une simplification et une centralisation des échanges avec les élus
Si l’échantillon n’est pas représentatif car il compte une majorité de répondants cadres, délégués syndicaux, et travaillant dans de grandes entreprises, M. Rey ajoute que « ce que l’on voit, c’est donc ce qu’ont vécu les élus des entreprises qui ont le plus de moyens ! »
De manière générale, les DRH n’ont pas vécu la même expérience : ils saluent une simplification et une centralisation des échanges avec les élus du personnel. « Globalement, on arrive à faire fonctionner correctement nos instances, le CSE a clarifié les choses », estime Valérie Migrenne, DRH du réseau Société générale. En 2024, onze CSE « de régions » y seront créés.
« La rationalisation a permis de favoriser la négociation, témoigne Jérôme Friteau, DRH de la CNAV. On a mis en place des représentants de proximité, pour autant les organisations syndicales ont besoin de tout faire remonter en CSE dès lors que ça doit prendre un caractère visible, car ils veulent échanger avec la direction. »
Jean-Louis Sotton, DRH de l’Hôpital américain de Paris, dit avoir vu disparaître des doublons qui existaient entre CHSCT et CE : « Avec la réforme, toute la partie information consultation est concentrée sur le CSE, et la CHSCT traite deux fois plus de sujets concrets pour améliorer les conditions de travail. Le CSE regroupe tous les avis, c’est un partenaire complet qui donne un avis global. »
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