L’argot de bureau : le « hackathon », tout sauf un jeu

L’argot de bureau : le « hackathon », tout sauf un jeu

Un événement « nec mergitur » lancé en 2016 par la Mairie de Paris rassemblant 400 personnes pour imaginer des moyens de lutter contre le terrorisme ; un autre, en février, à l’Agence de l’innovation pour les transports, pour réfléchir au « titre de transport unique » de demain, sous l’égide du gouvernement ; un dernier, en février, à Toulouse, où des étudiants sont invités à inventer « l’aviation verte ». Dans les grandes écoles d’informatique ou de commerce, des administrations, des associations à but non lucratif, en interne dans certaines grandes entreprises (BNP Paribas, SNCF, Axa…), ce mot étrange pullule depuis dix ans, lorsqu’il faut trouver une solution à un problème.

Si le coureur a son marathon, le buveur son barathon, Néfertiti son Akhenaton… le développeur a son hackathon. Ce mot-valise renvoie à la course à pied née en Grèce, et à la culture « hackeur », née aux balbutiements de l’informatique. Les premiers hackathons prennent place au tout début du XXIe siècle.

A l’origine, ce sont des concours d’innovation, réunissant des développeurs souhaitant réaliser un projet de programmation informatique en commun. Chez Facebook, qui fut l’un des premiers amateurs d’affrontements (non violents, que l’on soit clair) entre ses propres employés, un hackathon a donné naissance au bouton « J’aime [Like] » .

Une servitude volontaire

Attaquons donc le hackathon. Si le marathon est une course de fond, il convient ici d’aller vite : le temps très court fait partie du jeu, et il faut obtenir un résultat. La plupart du temps, quarante-huit heures font l’affaire. Chaque équipe, relativement réduite, conçoit puis expérimente sa solution, jusqu’à obtenir un prototype d’application mobile, par exemple. A la fin, c’est la fumée blanche : le projet vainqueur est récompensé.

Cantonné au milieu du code et du logiciel libre, le hackathton s’est vite dévoyé, devenant davantage un jeu de rôle, une expérience « fun ». On imagine tout ce petit monde phosphorant gaiement, animé par des bouffées d’intelligence collective. « Tout devient hackathon, estime l’humoriste Karim Duval, qui y consacre un chapitre dans son Petit Précis de culture bullshit (Le Robert, 224 pages, 13,40 euros) : brainstorming, séminaire d’entreprise, groupe de parole, mölkky géant, chenille… » D’une certaine manière, toute réunion peut devenir hackathon, à la différence que, cette fois-ci, tous les participants se sentent concernés et restent éveillés.

Car l’expérience est sociale : elle est l’occasion pour des participants aux métiers solitaires ou radicalement différents de se rencontrer, et de garder un joli souvenir de ce week-end sans sommeil ni soleil. Les hackathons sont aussi l’occasion pour les entreprises organisatrices de faire rayonner leur « marque employeur », de donner une image jeune, et de repérer un potentiel talent, en conviant étudiants, start-up ou simples curieux.

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LJD

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