L’argot de bureau : l’« offboarding », ce n’est qu’un au revoir
« En toute chose, c’est la fin qui est essentielle », clamait Aristote dans sa Poétique. Pourtant, l’imaginaire collectif ne retient des tristes fins en entreprise qu’un adieu bâclé : salarié licencié portant son carton d’affaires la mine déconfite, pot de départ hypocrite à base de mousseux tiède et de discours gênés…
L’« offboarding » veut être une solution à ces mauvais départs : complémentaire de l’« onboarding » – stratégie standardisée d’intégration des jeunes recrues de l’entreprise –, il désigne l’accompagnement d’un salarié sur le point de voguer vers d’autres horizons, qu’il s’agisse d’une fin de CDD, d’un départ en retraite ou d’un licenciement.
Le suivi commence mal : le mot désigne littéralement le fait de « se faire débarquer ». « C’est mal choisi, on devrait plutôt parler d’atterrissage en douceur, juge Jenny Gaultier, directrice générale du Mercato de l’emploi, un réseau de consultants en recrutement. Le mot d’ordre est de donner une vision claire au collaborateur qui s’en va. »
Le pot !
La feuille de route, simple et connue de tous, se traduit donc par une série de tâches, à réaliser par exemple durant le mois qui précède la fin de contrat. La communication en interne est un bon début : celui qui part préviendra son équipe, ce qui brisera les tabous et permettra d’organiser la suite avec moins de stress (passation des missions aux successeurs, réattribution des tâches…).
L’aspect administratif est non négligeable : il ne faut rien oublier, de l’attestation Pôle emploi au badge d’accès, sans oublier ce message de rappel humiliant qui vous indique que vous perdrez vos accès à la boîte mail dans vingt, quinze, dix jours…
Un entretien de sortie, en face-à-face et standardisé, marque la fin du parcours. Attention, pas question de parachute doré pour les uns ou de planeur en plastique pour les autres, le paquetage d’atterrissage est le même pour tous : un état des lieux officiel, où le partant donne son avis sur la boîte, qui lui offre en retour un « feedback ».
Quand le départ est contraint, à la manière d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), l’employeur pourra choisir – grand seigneur – d’offrir un bilan de compétences. Bien évidemment, le meilleur a été gardé pour la fin : le pot ! Tout, sauf organisé à la hâte, il mettra en scène tous les collègues de celui qui part, dans un timing cadré : apéritifs, discours, cadeau de départ et quelques pas de danse.
Ambassadeurs en réseau
Mais à quoi bon remercier, par exemple, un salarié licencié pour insuffisance professionnelle ou un jeune cadre brillant qui file chez le concurrent ? Les amateurs d’offboarding répondent en deux mots : marque employeur. Dans le cas d’un départ en mauvais termes, le protocole peut éviter un scandale et relever une réputation en danger. Marcel, syndicaliste hargneux, sera acheté – pardon, félicité – avec un magnifique voyage aux îles Galapagos. La fin justifie les moyens.
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