La grève pour le climat est-elle licite ?

La grève pour le climat est-elle licite ?

Jean-Emmanuel Ray, dans sa chronique, précise les conditions d’acceptabilité du droit de grève face aux bouleversements et à l’urgence climatique.

Publié aujourd’hui à 06h30 Temps de Lecture 2 min.

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« Un arrêt de travail fondé sur ce seul motif [ le déréglemnt climatique] sera considéré comme illicite dans la plupart des pays développés »
« Un arrêt de travail fondé sur ce seul motif [ le déréglemnt climatique] sera considéré comme illicite dans la plupart des pays développés » Till Jacket / Photononstop

Droit social. Dans de nombreux pays, de puissantes manifestations ont eu lieu le vendredi 20 septembre contre le dérèglement climatique (« Fridays For Future »). Elles risquent de se reproduire, toujours un vendredi… Mais pour des raisons très différentes, un arrêt de travail fondé sur ce seul motif sera considéré comme illicite dans la plupart des pays développés.

En France, « l’exercice normal du droit de grève » exige l’existence de revendications professionnelles. De nature politique, un mouvement exclusivement fondé sur le changement climatique n’est donc pas licite ; à moins que ses organisateurs y ajoutent des revendications sociales sur la qualité de vie au travail, le télétravail… Sinon, il s’agit d’un « mouvement illicite » susceptible d’entraîner pour ses participants les mêmes sanctions disciplinaires que pour un salarié absent sans motif dans les mêmes conditions, avec un éventuel licenciement en cas de récidive.

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Seule exception : la très politique grève du 24 avril 1961 à la suite du putsch des généraux à Alger. Dans son arrêt du 16 juin 1963, la Cour de cassation n’avait pas évoqué le terme « grève », mais un « arrêt général de travail organisé par toutes les organisations syndicales en réponse à un appel du chef de l’Etat pour protester contre le mouvement insurrectionnel d’Alger ». Puisqu’il s’agissait d’un mouvement de civisme, l’employeur ne pouvait pas sanctionner un participant à cet « arrêt général » en forme de mobilisation des citoyens.

Une dynamique collective et consensuelle

Cette « illicéité » de principe est la même dans la plupart des pays du monde, car la grève est un « conflit d’intérêts » qui oppose les syndicats au « partenaire social adéquat » : l’employeur susceptible de négocier leurs revendications. Alors une grève mondiale pour le climat…

Sans parler du fréquent « devoir de paix », lié à la signature d’un accord collectif, aux Etats-Unis, au Canada ou en Allemagne. Pendant toute sa durée, les syndicats ne peuvent valablement déclencher une grève : s’ils le font tout de même, l’employeur pourra les assigner en responsabilité contractuelle.

Mais le contentieux n’est ni le droit ni la vie. Dans nos sociétés qui font la part belle à la réputation, l’entreprise médiatisée licenciant ainsi un collaborateur aurait sans doute judiciairement raison, mais médiatiquement tort.

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LJD

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