La crise sanitaire a aussi bouleversé le travail des espions

La crise sanitaire a aussi bouleversé le travail des espions

Au centre d’opérations et de renseignement de la gendarmerie, à Evry-Courcouronnes, en juillet 2020.

Quand viendra le temps d’écrire l’histoire du contrôle démocratique du renseignement en France, il faudra s’arrêter sur le rôle méconnu joué par la Commission nationale du contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). Les historiens verront comment une petite instance administrative et consultative, mais indépendante, née de la loi renseignement de 2015, a de fait assumé quasiment seule la fonction de contre-pouvoir dans un domaine pourtant essentiel.

Son cinquième rapport annuel, rendu public jeudi 6 mai, ne déroge pas à la règle. Derrière une présentation comptable et juridique de son activité qui découragerait le plus passionné des affaires d’espionnage, on décèle le regret qu’un champ encore assez vaste de la surveillance d’Etat échappe encore à tout contrôle. C’est aussi le seul document public où l’on découvre concrètement ce que font les services de renseignement français. Car pour chaque opération de surveillance technique, ils doivent saisir la commission qui veille à la conformité légale de leur demande avant de la transmettre au premier ministre qui délivre, seul, l’autorisation.

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En 2020, la commission a été saisie de 79 605 demandes de mise en œuvre de techniques de renseignement contre 73 543 en 2019. Dans 46,3 % des cas, les moyens ont été utilisés pour lutter contre le terrorisme. Cette augmentation cache cependant une surprise. A cause du Covid-19, et faute de pouvoir se déplacer, les espions ont été contraints de travailler à distance grâce aux données de connexion de leurs cibles.

Souhait de peser sur des débats démocratiques

Les mesures les plus intrusives, dites de « proximité », ont chuté de 44 % à cause « du confinement et des restrictions de déplacement imposées par la pandémie en 2020 », dit le rapport. Les services ont moins pu s’introduire dans des lieux privés pour y poser des micros ou dérober les contenus des ordinateurs ou des portables. Mais les « délinquants » et « les criminels » étant eux aussi assujettis aux interdictions de mouvement, leurs méfaits ont aussi été réduits.

La crise sanitaire a également ralenti l’activité du renseignement chargé de la défense des intérêts économiques, qui a perdu six points par rapport à 2019 ; « une conséquence directe de la pandémie qui a entraîné une réduction drastique de l’activité économique ». En revanche, la prévention des violences collectives est passée de 6,2 %, en 2017, à 14,2 % en 2020. La CNCTR dit être « vigilante » à ce que cette « prévention » n’autorise pas « la pénétration d’un milieu syndical ou politique ou la limitation du droit constitutionnel de manifester ses opinions, fussent-elles extrêmes, tant que le risque d’une atteinte grave à la paix publique n’est pas avéré ».

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LJD

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