Faut-il assouplir les 35 heures à l’hôpital ?

Faut-il assouplir les 35 heures à l’hôpital ?

Des infirmières et aides soignantes se retrouvent au poste de soin de l’hôpital Delafontaine, lors de la crise du Covid-19, à Saint-Denis, le 3 avril.

Au plus fort de l’épidémie de Covid-19, Sandrine (le prénom a été changé), infirmière de jour au CHU de Nantes, n’a pas eu la tête sous l’eau. Au contraire. Son établissement, dans une région relativement épargnée par la maladie, n’a pas vu déferler la vague de patients anticipée. Les forces supplémentaires, recrutées pour l’occasion, ont pu faire autre chose et soulager les équipes habituelles. « Ça nous a donné une bouffée d’oxygène, la descente est d’autant plus dure, raconte-t-elle. On court tout le temps, j’ai comme un nuage de mémos adhésifs qui tournent dans ma tête, c’est usant. »

Son contrat de travail stipule qu’elle doit travailler sept heures trente par jour. Dans ce laps de temps, constate-t-elle, il faut effectuer de plus en plus de tâches, en raison des effectifs contraints. Au fil de sa carrière, Sandrine a vu fondre la durée des « transmissions », ce précieux temps où les équipes se passent le relais, réduit aujourd’hui à quinze minutes. « Dans mon service, quand j’ai 16 patients à transmettre, c’est matériellement impossible. Tous les jours, on fait du rab », explique la quadragénaire.

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Comment réussir à appliquer les 35 heures à l’hôpital ? En embauchant, disent les uns ; en desserrant l’étau réglementaire pour pouvoir enfiler les heures supplémentaires − et les rémunérer −, imaginent les autres.

Aucun gouvernement, jusque-là, n’a pris le risque de rouvrir frontalement ce dossier, qui est l’une des arlésiennes hospitalières. Il est aujourd’hui de nouveau sur la table. La question « n’est pas un tabou (…), le maître-mot doit être le pragmatisme », a déclaré le premier ministre, Edouard Philippe, le 25 mai, en préambule du « Ségur de la santé », la concertation qui doit aboutir avant mi-juillet à une « refondation du système de santé » français. Dix jours plus tôt, le ministre de la santé, Olivier Véran, avait lancé : « N’est-ce pas incohérent de maintenir les 35 heures alors que certains, pour gagner plus, travaillent en dehors en toute légalité ? » Il a ensuite évoqué la nécessité de trouver de la « souplesse ». Certains agents, en effet, arrondissent leurs fins de mois en cumulant les emplois.

« On manque d’agents »

Les rythmes de travail à l’hôpital sont aujourd’hui, dans les faits, très divers : l’accord local en vigueur à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) autorise des organisations en 7 heures 30, 7 heures 36, 10 heures et 12 heures, ces dernières étant dérogatoires et réservées à des nécessités absolues de service, comme en réanimation, en soins intensifs ou aux urgences.

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LJD

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