En Europe, le lien entre santé mentale et travail fait débat
Alors que la réforme des retraites remet sur le devant de la scène médiatique le sujet du mal-être au travail, la reconnaissance du caractère professionnel de troubles psychiques est loin de faire consensus en Europe, constate Eurogip. Dans son dernier rapport, publié en mai, cet observatoire, créé par l’Assurance-maladie-Risques professionnels, s’est penché sur la façon dont plusieurs pays européens se sont emparés de ce sujet.
A l’image de la France, seulement une poignée de nos voisins ont entrouvert la porte à une reconnaissance en maladies professionnelles de pathologies telles que la dépression ou le burn-out : le Danemark, l’Espagne, l’Italie et la Suède.
En cause, la difficulté à mesurer objectivement l’impact de conditions de travail dégradées – harcèlement, surcharge de travail… – sur la santé mentale d’un travailleur, alors que des facteurs extraprofessionnels peuvent également l’affecter. L’Allemagne, l’Autriche ou encore la Suisse excluent cette possibilité.
Des critères d’appréciation très différents
Seul pays à avoir inscrit deux troubles mentaux – le stress post-traumatique et la dépression du vétéran – dans la liste des maladies professionnelles (sans pour autant écarter l’examen de pathologies hors liste), le Danemark arrive en tête des pays qui enregistrent le plus de demandes de reconnaissance et de cas reconnus. Mais avec un taux de reconnaissance des maladies psychiques plus faible (7 %) qu’en Italie (10 %) et surtout qu’en France, où ce taux atteint les 52 % (dans le secteur privé).
Dans le système français, les dossiers déposés sont beaucoup moins nombreux (16 demandes en moyenne pour 100 000 assurés, contre 162 au Danemark), mais appréciés au cas par cas par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP). « Il est tentant d’interpréter ces taux de reconnaissance comme une illustration du degré d’ouverture du système de reconnaissance des maladies professionnelles psychiques », avancent les auteurs de l’étude.
Ces chiffres couvrent aussi des critères d’appréciation très différents d’un pays à l’autre. « Les interprétations jurisprudentielles de ce que recouvre un accident du travail d’une part, les procédures réglementaires de reconnaissance des maladies professionnelles d’autre part expliquent aussi cet écart au niveau des demandes et des reconnaissances », souligne Eurogip.
En France, la législation fixe un taux d’incapacité permanente d’au moins 25 % lorsqu’une maladie professionnelle est reconnue, ce qui suppose des lésions psychiques graves et irréversibles sur des victimes pas toujours en capacité de monter un dossier.
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