Emploi handicapé : la donne a changé
Peu à peu les emplois handicapés s’imposent dans les entreprises. Cependant, ils restent encore de nombreux obstacles, comme la prise en compte réelle du handicap et de son adaptation pour une intégration pérenne des handicapés dans les entreprises.
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Chronique « Carnet de bureau ». A quelques jours de la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées, qui s’ouvrira le 18 novembre, le taux de chômage 2019 des personnes en situation de handicap est en très légère baisse annuelle de 1 point, à 18 % ! Une pincée de contrats courts (grâce aux « CDD tremplin » de la loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel »), une autre d’apprentissage, une dernière pincée de créations d’entreprises et… quelque 5 900 personnes ont retrouvé le chemin de l’entreprise.
De façon précaire ? Probablement. Le CDD tremplin, mis en place pour faciliter le retour à l’emploi dans le milieu ordinaire, a fait des heureux : « Ça nous permet de prendre des risques en recrutement, en embauchant des candidats inexpérimentés, ou peu formés », explique Claire Sala-Angeli, la responsable du recrutement de l’agence de communication Les Papillons de jour, qui en a signé cinq cette année. Les contrats courts sont en hausse. Mais les contrats durables sont en baisse, et le chômage de longue durée continue de progresser.
La donne a changé. Le mot d’ordre est double : retour à l’emploi et intégration dans le « milieu ordinaire ». « Avant on nous demandait de créer de l’emploi durable, désormais la demande est de réduire le chômage en concrétisant 40 000 mises en emploi d’ici à 2022, en échange de la pérennité de notre modèle d’entreprises adaptées », explique Sylvain Couthier, président du groupe ATF. Ces entreprises sont subventionnées pour embaucher majoritairement des personnes en situation de handicap et les former pour les ramener vers les entreprises « ordinaires ».
L’importance de l’adaptation au poste
Le donneur d’ordre demande un profil – technicien informatique, administrateur paie –, et l’entreprise adaptée forme le candidat. « Cela ouvre de nouvelles perspectives. Mais le vrai changement est que, dans la formation à mettre en place, on précise la fiche de poste tâche par tâche pour s’adapter à la personne », explique M. Couthier.
Car, après avoir mis le pied dans la porte de l’entreprise, la clé du maintien en emploi, c’est l’adaptation au poste. Les tâches impossibles à un aveugle ne posent pas de problème à un sourd, et pour un handicap évolutif l’adaptation est permanente.
Le rôle de l’accompagnement au sein de l’entreprise est donc essentiel. C’est grâce à un dispositif expérimental d’« emploi accompagné » lancé dans le cadre de la loi travail de 2016, que Victoria Lahouel, hypersomniaque, a trouvé une place stable. Après des tests neuropsychologiques et accompagnée dans l’entreprise par un référent handicap, elle est enfin en CDI en horaires aménagés à vingt-cinq heures par semaine. « Avant, je me débrouillais toute seule, mais l’hypersomnie, c’était compliqué à expliquer aux employeurs. “Ce sont des grosses conneries”, m’a-t-on dit. Les employeurs ne me gardaient pas. Pourtant je peux travailler normalement », souligne-t-elle. En 2019, le dispositif « emploi accompagné » n’a profité qu’à quelque 2 000 élus sur quelque 507 600 demandeurs d’emploi.