Donald Trump amplifie la crise structurelle de la sidérurgie européenne

Donald Trump amplifie la crise structurelle de la sidérurgie européenne

Le secteur est déjà malmené par le ralentissement de l’industrie manufacturière, notamment l’automobile, et d’importantes surcapacités de production.

Par Publié aujourd’hui à 09h41

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L’usine British Steel de Scunthorpe, dans le nord-est de l’Angleterre, en septembre 2016.
L’usine British Steel de Scunthorpe, dans le nord-est de l’Angleterre, en septembre 2016. LINDSEY PARNABY / AFP

Après une relative accalmie en 2017-2018, en partie liée au dynamisme d’une industrie automobile très gourmande en acier, la sidérurgie européenne est de nouveau entrée dans une période de fortes turbulences. A quelques jours d’intervalle, deux événements ont confirmé que la restructuration du secteur, difficile et chaotique, était loin d’être achevée dans une Europe souffrant à la fois d’une baisse de la demande et de surcapacités de production : l’annonce du rachat de British Steel en faillite par le conglomérat chinois Jingye Steel et l’abandon par ArcelorMittal de son projet de reprise de l’aciériste italien Ilva.

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Si la demande globale d’acier devrait progresser de 3,9 % cette année dans le monde, notamment tirée par la Chine, la consommation européenne va baisser de 1,2 %. Or l’Europe reste très exposée au commerce mondial de l’acier en raison de l’ouverture de son marché au nom de la concurrence défendue par la Commission. Celle-ci a bien pris des mesures pour plafonner les importations, mais le lobby Eurofer (Association européenne de l’acier) les juge insuffisantes et fait pression sur Bruxelles pour qu’elles soient « adaptées aux conditions du marché actuel ».

« La Chine, la Russie et la Turquie ont vu le marché américain se fermer et exportent leurs surplus vers l’Europe », constate un important industriel

Car les industriels ne prévoient pas de rebond en 2020. « Le ralentissement actuel du secteur manufacturier dans l’Union européenne [UE] ne devrait pas se terminer rapidement », prévenait, fin octobre, le directeur général d’Eurofer, Axel Eggert. A cela s’ajoutent les différends commerciaux entre les Etats-Unis et leurs partenaires, et les incertitudes entourant le Brexit.

La situation s’est en effet dégradée depuis que Donald Trump a augmenté de 25 % les droits de douane sur les importations d’acier étranger en 2018. « Nous sommes à la peine en raison du désordre qu’il a mis sur le marché mondial », dénonce un important industriel. « La Chine, la Russie et la Turquie ont vu le marché américain se fermer et exportent leurs surplus vers l’Europe », constate-t-il. Les importations y ont crû de 12 % en 2018, entraînant la baisse des prix de vente et obligeant les aciéristes européens à réduire leur offre, notamment par l’arrêt de hauts-fourneaux.

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C’est dans ce contexte que les groupes opérant sur le Vieux Continent doivent poursuivre la restructuration de leurs activités. Leur part dans la production mondiale d’acier brut (1,8 milliard de tonnes) est tombée en dix ans de 15 % à 9,3 %. Les experts évaluent les surcapacités globales à environ 500 millions de tonnes, dont les deux tiers imputables à la Chine. « Pour l’Europe, qui produit 170 millions de tonnes, elles se situent entre 30 et 50 millions de tonnes », note Marcel Genet, spécialiste du secteur et PDG du cabinet Laplace Conseil, en rappelant que c’est le rouleau compresseur chinois qui a changé la donne, passant d’une modeste production en 2000 à 54 % du marché aujourd’hui.

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LJD

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