Dispositif « zéro artificialisation nette » : « On les mettra où, les usines, demain ? »

Dispositif « zéro artificialisation nette » : « On les mettra où, les usines, demain ? »

Des ouvriers de la cristallerie d’Arques (Pas-de-Calais), en 2003.

A la sortie de Saint-Omer (Pas-de-Calais), le long de l’autoroute A26, qui file vers Boulogne et la mer, le parc d’activités de la Porte-du-Littoral s’apprête à accueillir une nouvelle implantation industrielle. Une usine agroalimentaire doit voir le jour en septembre 2023, avec 25 salariés, peut-être 75, à terme, si tout va bien. Aujourd’hui, le site est en chantier : les fondations sont creusées jusqu’à la limite de la parcelle de 9 hectares, l’espace optimisé au maximum.

Sur la parcelle voisine de 4 hectares, ce sont trois entreprises, deux dans l’agroalimentaire et une dans la ferronnerie, qui sont annoncées. Le tout prend l’allure d’un jeu de construction avec des bâtiments imbriqués les uns dans les autres pour gagner de la place, un seul parking, une seule unité de traitement des eaux et une seule réserve à incendie pour tout le monde.

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Car, aujourd’hui, le mot d’ordre est de densifier pour économiser cette ressource devenue rare : le foncier. Loin, très loin des principes qui ont présidé à l’implantation d’une autre usine, à quelques centaines de mètres de là. Installé en 2015, SOS Oxygène vit en effet au large. Autour du bâtiment, un immense parking aux trois quarts vide, une vaste pelouse de quelque 7 000 mètres carrés : la réserve foncière « au cas où » l’entreprise s’agrandirait un jour. Christian Leroy, président de la communauté de communes du pays de Lumbres, désigne les autres locaux d’activité qui s’alignent de l’autre côté de l’autoroute, entourés, chacun, de leurs haies, de leur carré engazonné et de leur rideau d’arbres. « Aujourd’hui, il faut regrouper les usines pour gagner de la place, alors qu’avant on nous disait qu’il fallait les cacher, faire de l’intégration paysagère. »

10 % des terres sont aujourd’hui artificialisées

C’était avant le dispositif zéro artificialisation nette (ZAN). Inscrit dans la loi Climat et résilience d’août 2021, il vise à préserver la biodiversité et à limiter l’imperméabilisation des sols. Pour cela, la loi impose aux territoires de diminuer de 50 %, d’ici à 2030, le rythme d’artificialisation des terres, des espaces naturels, agricoles ou forestiers. Un objectif qui s’applique à tous et à toutes les activités humaines, qu’il s’agisse de logements, d’infrastructures, d’équipements publics, et donc aussi économiques. Mais « le vrai sujet, c’est quand même l’industrie. On les mettra où, les usines, demain ? », s’interroge Christian Leroy.

A l’échelle de la France, 10 % des terres sont aujourd’hui artificialisées – ce qui en fait le pays le plus bétonné d’Europe par habitant. L’habitat en recouvre 42 %, les infrastructures de transports, 28 %, et l’industrie, 4 %, selon les chiffres de France Stratégie. L’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) démarre d’ailleurs la publication d’une base de données de référence pour la description de l’occupation du sol sur l’ensemble du territoire, avec pour objectif de couvrir la France entière en 2024.

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LJD

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