Caviste, une reconversion prisée chez les trentenaires
Sur la photo de son compte LinkedIn, Coraline Lan-Lemasson, 35 ans, pose tout sourire avec un tire-bouchon entre les mains. Un accessoire qui résume à lui seul sa nouvelle vie professionnelle. Cette ancienne responsable du marketing dans l’industrie pharmaceutique a rencontré son époux, Thomas, 35 ans également, au sein des Laboratoires Pierre Fabre. Après un début de carrière prometteur, le jeune couple s’envole pour un tour du monde de neuf mois. A leur retour en France, en 2019, ils tentent, en vain, de renouer avec le métro-boulot-dodo parisien. Au bout de six mois, l’envie de se reconvertir leur semble évidente. « On voulait exercer un métier plus concret, raconte la jeune femme, avec enthousiasme. On s’est souvenu que les deux choses qui nous avaient le plus manqué en voyage, c’étaient le vin et le fromage. On a donc décidé de s’engager dans ce secteur passion. »
Les jeunes mariés ont beau avoir quelques connaissances acquises au fil de visites de vignobles et de bonnes tables, ils ont commencé par se former. Pendant un an, Coraline a suivi les cours du Centre interprofessionnel de formation des commerces de l’alimentation de Toulouse pour obtenir son certificat de qualification professionnelle (CQP) de vendeur conseil caviste. Une formation pour laquelle elle n’a rien déboursé, le tout étant financé par la branche professionnelle. Après quelques mois de recherche et un prêt à la banque, Coraline et Thomas ont inauguré, en septembre 2021, La Bonne Combine, un lieu chaleureux au cœur de la capitale de l’Occitanie, qui allie 300 références de vins et un peu moins de fromages.
Le couple Lemasson n’est pas le seul à avoir choisi de bouleverser son quotidien pour s’installer au milieu des bouteilles de rouge et de blanc. « Depuis le Covid, nous avons constaté l’arrivée de jeunes professionnels, relate Patrick Jourdain, président du Syndicat des cavistes. Souvent lassés par un quotidien urbain, ils quittent leur emploi pour se lancer dans le secteur en quête d’une autre qualité de vie. » Patrick Jourdain n’est pas étonné de cet engouement. Depuis plusieurs années, la proportion de reconversions « frôle les 80 % ». « Les cavistes qui s’engagent en formation initiale dans la profession sont très rares », poursuit-il. En général, les profils sont toujours les mêmes : des CSP+ passionnés, souvent d’anciens cadres dans la banque ou la grande distribution, qui se tournent vers un milieu qui les fait rêver.
Pas de diplôme spécifique
« Après le Covid, les gens ont redécouvert leurs cavistes, ces commerçants de proximité restés ouverts pendant le confinement, analyse Géraldine Gossot, la directrice de l’Université du vin de Suze-la-Rousse (Drôme), une formation réputée dans le milieu. Beaucoup ont alors sauté le pas pour concrétiser leur envie de changement et on a eu un gros coup de chaud sur les inscriptions à la rentrée 2020-2021. » Un succès qu’elle explique par des raisons culturelles, puisque « beaucoup de gens sont passionnés par le vin en France » mais aussi par l’accessibilité du métier. « C’est une profession généraliste, concrète, qu’on peut exercer sans se former de manière trop technique, analyse-t-elle. Devenir vigneron, c’est plus difficile par exemple. »
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