Humanoïdes, IA… La nouvelle ère des robots est arrivée

Le jeudi 7 novembre, à New York, la maison Sotheby’s a vendu aux enchères la première peinture réalisée par un robot. Ce portrait d’Alan Turing, le célèbre mathématicien, a été adjugé 1,08 million de dollars (1 million d’euros). Son auteur, Ai-Da, est un robot humanoïde, doté d’une intelligence artificielle (IA) et vocale. Ces automates prêts à décorer notre intérieur, à faire le ménage, à livrer, à promener le chien ou à veiller sur nos aînés sont désormais à nos portes.

Sur cet énorme marché mondial émergent, la Chine dispose d’une longueur d’avance. « Notre pays est le plus grand producteur de robotique au monde, notamment pour la livraison, le nettoyage et bien d’autres applications », se félicite Tony Li, PDG de Keenon Robotics. Cette licorne chinoise conçoit des robots pour les tâches de la vie quotidienne : elle en a livré plus de 100 000 à des restaurants, des hôtels, des hôpitaux, des magasins ou des usines.

Avant cette irruption dans les commerces et les foyers, l’« atelier du monde » a fait ses armes dans la robotique industrielle. Selon l’étude annuelle de la Fédération internationale de la robotique, publiée en septembre, plus de 4,2 millions de robots industriels sont actifs dans le monde, en croissance de 10 % sur un an. La Chine est en tête de ce marché en nombre d’installations en 2023, suivie, de loin, par le Japon, les Etats-Unis, la Corée du Sud et l’Allemagne. La France, elle, arrive en huitième position, devancée par l’Italie et l’Inde.

Mais, comme l’a démontré la 10e Conférence mondiale sur les robots, qui s’est tenue fin août à Pékin, le potentiel du marché des robots de service se place à une tout autre échelle, car il vise le grand public. Aux côtés des géants de la robotique industrielle tels que ABB, Kuka, SMC ou encore Tesla, 27 robots humanoïdes ont été présentés dans la capitale chinoise, un record. La compétition mondiale de la robotique au service des humains est donc bien lancée. Ainsi, au concours de robots organisé à Pékin, plus de 7 000 équipes se sont affrontées, venant d’une dizaine de pays.

A la conquête du monde

« Même si les robots humanoïdes commencent à pointer le bout de leur nez en Chine, les robots de service, eux, font déjà partie de la vie quotidienne, qu’ils soient laveurs de vitres, réceptionnistes dans des lieux publics et des hôtels, serveurs dans des restaurants, ou encore livreurs dans des espaces sécurisés comme les grandes universités ou les campus d’entreprise », témoigne Jean-Dominique Séval, consultant et enseignant en technologies de rupture, qui a vécu quatre ans dans la capitale chinoise, jusqu’en août 2022.

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Le vieillissement de la population enseignante, un enjeu majeur de ressources humaines

Le corps enseignant vieillit, et ce phénomène accentué par la réforme des retraites de 2023 s’annonce comme un enjeu majeur pour l’éducation nationale. La mise en garde vient de la Cour des comptes, qui s’est penchée, dans une publication du 26 novembre, sur le sujet de « l’allongement de la vie professionnelle des agents dans [la] fonction publique d’Etat ». Parmi les « zones de tension et de fragilité » que les magistrats ont identifiées : les cadres supérieurs, les agents administratifs de catégorie A et B, et les enseignants.

La pyramide des âges dans le plus gros corps de la fonction publique est déjà « particulièrement vieillissante » et les projections laissent à voir une dégradation sur au moins les deux prochaines décennies, au point que l’institution de la rue Cambon qualifie la situation de l’éducation nationale « d’inquiétante ».

D’un côté, le bas de pyramide s’est atrophié du fait de la forte contraction des recrutements dans les années 2000-2010. A l’autre extrémité, la part des enseignants plus âgés ne cesse d’augmenter sous l’effet des réformes des retraites qui ont affecté les enseignants de manière « plus marquée » que d’autres catégories de la fonction publique d’Etat. En cause : l’allongement, depuis 1980, de la durée d’études requise pour exercer le métier (cinq ans après le bac), qui repousse l’âge d’entrée dans la profession et donc l’âge de la retraite à taux plein – au moins 66 ans, désormais, avec 43 ans de cotisations requis. Dans le même temps, l’accès aux dispositifs de départ anticipé a été fortement réduit.

Alors que 6 % des enseignants auront plus de 60 ans en 2025, ils seront 16 % en 2035, calcule ainsi la Cour des comptes. Plusieurs problèmes vont ainsi se poser au premier employeur de l’Etat. Un défi de recrutement, d’abord, pour remplacer les futurs retraités dans un moment de crise d’attractivité du métier dont les effets pourraient ainsi s’aggraver. Des enjeux d’accompagnement, ensuite, alors qu’« il est très difficile d’aménager [les] fin[s] de carrière [des enseignants] comme leur reconversion », remarquent les magistrats. Le rapport note que « le degré de préparation pour faire face à cette tendance irrépressible au moins dans la décennie future paraît très insuffisant ».

« Je finis les semaines exténuée »

Le sévère constat de la Cour des comptes fait écho aux alertes qu’avaient unanimement émises les organisations syndicales au moment de la réforme des retraites, en 2023. L’enjeu des fins de carrière a pris en importance pour des agents qui ont vu leurs conditions de départ à la retraite changer considérablement en vingt ans. Jusqu’au début des années 2000, les enseignants pouvaient partir à 60 ans, et même à 57 ans pour les anciens instituteurs, et avaient droit à une pension à taux plein au bout de 37,5 années de cotisation.

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Fonction publique : un rapport alerte sur la crise d’attractivité

Manifestation dans le cadre d’une journée d’action et de grève dans le secteur public, à Strasbourg, le 5 décembre 2024.

Les ministres passent, la désaffection pour la fonction publique perdure. Ce n’est pas la première crise d’attractivité qu’elle connaît, mais celle-ci est d’une ampleur inédite. Ce désamour n’est toutefois pas irrémédiable et des solutions existent. C’est le constat dressé par France Stratégie − un organisme de réflexion rattaché à Matignon − dans un rapport intitulé « Travailler dans la fonction publique : le défi de l’attractivité », publié lundi 9 décembre. Un travail de dix-huit mois portant sur les trois volets de la fonction publique – Etat, territoriale et hospitalière – qui permet, et c’est là l’un de ses principaux apports, de dresser un panorama global sur les ressorts d’un malaise généralisé à l’ensemble des métiers.

Augmenter les rémunérations, améliorer les conditions de travail, revaloriser les avantages notamment face au secteur privé… Les pistes proposées pour améliorer une situation alarmante ne manqueront pas de conforter les organisations syndicales, puisqu’elles correspondent à leurs revendications depuis de nombreuses années. Car le désaveu n’est pas nouveau. « Nous adressons un message d’alerte aux décideurs parce que cette crise s’installe dans le temps, elle a une dizaine d’années et elle est amenée à durer, signale Emmanuelle Prouet, coordinatrice du projet chez France Stratégie. Mais nous adressons aussi un message d’action car il existe des leviers sur lesquels on peut s’appuyer, et il est important de tous les articuler. »

Les derniers ministres ont d’ailleurs tous évoqué ce manque d’attractivité pour un statut qui concerne aujourd’hui 5,6 millions de personnes. « La question de l’attractivité de la fonction publique, qui représente un emploi sur cinq en France, constitue un enjeu majeur pour les années à venir », écrivait ainsi l’ancienne ministre de la transformation et de la fonction publique Amélie de Montchalin, en septembre 2021.

Insatisfaction salariale

Le rapport va à rebours des pistes ou des réponses proposées par les ministres successifs. Alors que Stanislas Guerini, ministre entre 2022 et septembre 2024, envisageait de faciliter les licenciements de fonctionnaires et de supprimer les catégories A, B et C, France Stratégie préconise de « combiner la garantie de l’emploi avec des perspectives d’évolution et de progression ». Beaucoup plus récemment, plutôt que de viser « une consolidation des avantages à travailler dans la fonction publique pour en faire des arguments d’attractivité », Guillaume Kasbarian, désormais ministre démissionnaire, souhaitait aligner les règles d’indemnisation des agents publics en arrêt maladie sur celles du privé.

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Hôpital : aux urgences, le « désengorgement » promis par Emmanuel Macron n’a pas eu lieu

Dans le service des urgences du centre hospitalier de Perpignan, le 17 juillet 2024.

« Les promesses n’engagent que ceux qui y croient… » La formule, un peu galvaudée, revient ces derniers jours dans la bouche des médecins urgentistes. Il y a vingt mois, le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, promettait de « désengorger » leurs services, porte d’entrée d’un hôpital sous pression. Et ce, d’ici à « décembre 2024 ». A l’époque, beaucoup disaient déjà douter, tout en saluant l’affichage d’une date butoir. L’échéance venue, le doute est devenu certitude : « Sans surprise, la promesse présidentielle n’est pas tenue », rapporte Marc Noizet, président du syndicat SAMU-Urgences de France (SUdF).

La photographie nationale, à la veille des congés de Noël, est « hétérogène », décrit l’urgentiste de Mulhouse (Haut-Rhin) : « Il y a des endroits où les dysfonctionnements et la crise sont toujours aussi profonds, on ne s’en extirpe pas, et d’autres qui se réorganisent et inventent des solutions… Mais la pression est générale, les urgences ne tiennent qu’à un fil. »

De Rennes à Avignon, de Toulouse à La Roche-sur-Yon, en passant par Nice ou Toulon, les soignants ne cachent pas une forme de lassitude face à la « lenteur » de l’action publique et au « flottement » politique. « On n’est pas aidé, euphémise Muriel Vergne, médecin urgentiste au centre hospitalier de Toulon et secrétaire générale de SUdF. Les médecins sont lucides : les urgences, avec ce qui se joue en politique, six ministres de la santé en deux ans – et bientôt sept –, ne sont pas une priorité. »

L’urgentiste relève que, sans être encore « dans le dur » des congés et des épidémies hivernales, les blocs opératoires sont, chez elle, déjà saturés et que l’afflux de patients augmente de jour en jour. « On a des plannings à trous, et le Père Noël ne va pas nous apporter de praticiens dans sa hotte ! » Elle comme d’autres soignants le soulignent : « Il suffit d’un arrêt maladie, d’un médecin de moins au planning, pour que la machine se grippe. »

Le point noir des « lits d’aval »

Récurrentes, les mobilisations de soignants viennent le rappeler. Comme cette grève reconductible, au CHU de Grenoble, qui a redémarré le 10 décembre, pour dénoncer le manque de moyens et les patients qui s’entassent dans les couloirs.

Avant ça, c’est à Périgueux que les soignants se sont mobilisés, ou encore à Carhaix (Finistère). Remontent aussi régulièrement du terrain des récits, plus ou moins graves, symbolisant des conditions d’accueil dégradées : cet automne, le témoignage d’un patient ayant passé une nuit dans un garage de l’hôpital de Langres (Haute-Marne), faute de lit disponible, confirmé par des soignants, a eu un retentissement national.

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Des mobilisations jeudi partout en France « pour l’emploi et l’industrie »

De Marseille à Rennes, en passant par Paris : près de 120 rassemblements et manifestations « pour l’emploi et l’industrie » sont prévus en France, jeudi 12 décembre à l’appel de la Confédération générale du travail (CGT), rejointe par Solidaires et la Fédération syndicale unitaire (FSU), en réponse à une vague de plans sociaux.

Jeudi « sera une journée de convergence avec la grève des cheminots contre le démantèlement du fret ferroviaire et celle des fonctionnaires qui demandent un budget à la hauteur des besoins » et exigent « un gouvernement qui réponde enfin à l’urgence sociale ! », déclare à l’Agence France-Presse la secrétaire générale de la deuxième centrale syndicale, Sophie Binet.

Les annonces de plans sociaux se succèdent tandis que la France se cherche un nouveau premier ministre, après la censure et la démission du gouvernement de Michel Barnier.

Que ce soient dans les grandes entreprises (Auchan, Michelin, Vencorex, PPG…), chez des sous-traitants ou des petites structures, dans de nombreux secteurs (métallurgie, commerce, secteur public et associatif, banques et assurances, chimie…) et un peu partout sur le territoire français, les plans sociaux se multiplient. La deuxième centrale syndicale avait dénombré, le 27 novembre, 286 plans sociaux. Elle en recense désormais 300, avec environ 300 000 emplois menacés ou supprimés, reprenant les données du cabinet Altares.

Dans ce contexte, la centrale de Montreuil appelle à « des actions sur l’ensemble du territoire jeudi, pour défendre l’emploi et l’industrie ». Ainsi, des mobilisations (sur les lieux de travail, rassemblements ou manifestations) sont prévues dans près de 80 départements, avec des « initiatives locales […] devant les entreprises et les préfectures pour exiger un moratoire sur les licenciements », déclare la CGT. Fait rare, le syndicat a même encouragé, dès la fin du mois de novembre, « les salariés à se mettre en grève et à occuper leurs usines pour empêcher les licenciements ».

En attendant la nomination d’un nouveau premier ministre, la CGT maintient ainsi la pression, en forme d’alerte sociale au futur gouvernement. « Le mois de décembre s’annonce rouge, et ce n’est pas le rouge du Père Noël », a promis Sophie Binet. Mais l’appel sera-t-il entendu par les salariés ? « C’est compliqué de se mobiliser lorsqu’on sait qu’on n’a pas d’interlocuteurs en face », juge une source syndicale, sous couvert d’anonymat, redoutant une faible mobilisation.

Manifestation à 14 heures à Paris

Dans le détail, le premier rassemblement se tiendra dès 6 heures devant la gare d’Aurillac (Cantal), avant une manifestation à Toulouse (au départ de Thales Alenia Space), à 10 heures, un rassemblement à la gare Saint-Charles de Marseille à la même heure ou devant la préfecture de Nantes, prévu à 10 h 30. Alors que plusieurs entreprises sont menacées (Vencorex et Valeo), en Isère, un rassemblement se tiendra devant la préfecture de Grenoble, dès 11 heures. D’autres actions seront menées comme aux Fonderies de Bretagne à Lorient (Morbihan), où sera présente Sophie Binet.

L’intersyndicale n’a pas pris position, divisée sur les stratégies à adopter, mais Solidaires et la FSU fonction publique ont rejoint le mouvement. « Il n’est plus possible d’avoir la même politique tant vis-à-vis des agents de la fonction publique que des salariés qui subissent ces licenciements », relève Murielle Guilbert, codéléguée générale à Solidaires. Force ouvrière a, elle, apporté son soutien à « toutes les initiatives et mobilisations déjà décidées » par ses troupes localement.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés En France, l’inquiétude monte face aux plans sociaux

A Paris, trois organisations syndicales (CGT, FSU et Solidaires) de la fonction publique ont décidé d’une nouvelle journée de mobilisation jeudi, avec une manifestation dès 14 heures au départ de la place de la Bastille.

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A la SNCF, seuls les syndicats CGT-Cheminots et SUD-Rail ont maintenu leur appel à la grève pour réclamer un moratoire sur le démantèlement de Fret SNCF et protester contre les modalités de l’ouverture à la concurrence des lignes régionales (TER). Mais le trafic devrait être « normal » pour tous les TGV et légèrement perturbé pour les trains régionaux, selon les prévisions du groupe ferroviaire.

Dans la branche électrique et gazière, très mobilisée les années passées, la grève est reconduite chez GRTgaz dont les salariés s’étaient déjà fortement mobilisés une semaine plus tôt.

Le Monde avec AFP

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Le recrutement des enseignants, chantier vital à l’abandon

Affecter un professeur de qualité dans chaque classe de la maternelle à la terminale. A l’heure où il est question de former un gouvernement d’« intérêt général », qui peut contester cette exigence ? Or, si l’on considère que l’avenir du pays sur le plan économique ou démocratique, comme sur celui du vivre-ensemble, dépend largement du bon fonctionnement du système de recrutement et de formation des enseignants, on peut être légitimement inquiet. Rendue publique jeudi 5 décembre par l’éducation nationale sans le moindre commentaire, la diminution du nombre de places offertes au concours du capes externe, principale voie de recrutement des professeurs de collèges et de lycées généraux, n’est que l’un des symptômes d’une crise qui sévit depuis des décennies mais prend, ces dernières années, des dimensions alarmantes.

En 2024, 12 % des postes ouverts au capes sont restés vacants, ce taux atteignant même 36 % en lettres classiques. La pénurie de vocations est telle que, dans chaque discipline, le ministère est contraint de fixer le nombre de postes en fonction du vivier attendu de candidats : plus ce dernier est réduit, plus il restreint le contingent de places, afin de maintenir le niveau du concours et d’afficher un taux de couverture présentable.

Dans les établissements, le recours de plus en plus fréquent à des enseignants contractuels ou aux heures supplémentaires et les absences non remplacées constituent d’autres signes de cette anémie dont souffre l’école. Un mal qui risque de s’aggraver du fait qu’environ 300 000 enseignants doivent partir à la retraite dans les dix ans qui viennent.

Chaos politique

A l’automne 2023, un nouveau ministre de l’éducation plein d’énergie, Gabriel Attal, avait ouvert le grand chantier de l’« attractivité » du métier d’enseignant. La pièce maîtresse de ce projet – le recrutement des professeurs dès le niveau de la licence (bac + 3), au lieu du master 2 (bac + 5), et leur formation rémunérée pendant deux ans – était, à juste titre, considérée comme cruciale. Au point que, le 5 avril 2024, Emmanuel Macron, grillant la politesse à M. Attal devenu premier ministre, annonçait lui-même que le nouveau parcours de formation, destiné à élargir le vivier de recrutement et à améliorer la formation, serait mis en œuvre dès la rentrée de septembre. Depuis lors, le chaos politique provoqué par la dissolution de l’Assemblée nationale, la valse des ministres et surtout les arbitrages budgétaires défavorables ont renvoyé la réforme – qui peut être décidée par décret mais coûterait 600 millions d’euros sur 2025-2027 – dans les limbes.

Lire aussi l’analyse | Article réservé à nos abonnés Les caricatures sur le temps de travail des enseignants fragilisent un métier en crise

L’enjeu n’est pas seulement quantitatif. Depuis longtemps, la crise de recrutement mais aussi les querelles autour du difficile équilibre entre transmission des savoirs et formation pédagogique ont conduit à d’incessants bouleversements des cursus – cinq réformes depuis 1989 –, souvent tournés vers leur allègement et l’affectation rapide dans les classes. Le projet actuellement gelé, assez largement approuvé dans son architecture générale mais contesté dans ses modalités, demande sans doute à être rediscuté.

Attirer des vocations suppose non seulement la mise en place d’aides financières mais aussi l’assurance de n’être placé devant des élèves qu’une fois solidement préparé. La question de la formation et de l’accompagnement des jeunes enseignants doit être prise à bras-le-corps par le prochain gouvernement. C’est une question vitale pour l’avenir, surtout dans un pays où « école » est une autre manière de dire « République ».

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Le Monde

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Cergy-Pontoise : après un mois de grève, des conducteurs de bus toujours en colère et un dialogue au point mort

A la gare de bus de Cergy-Pontoise, le réseau de l'agglomération est à l'arrêt, le 5 decembre 2024.

On ne distingue plus que leurs yeux, seule parcelle d’anatomie à ne pas être recouverte d’un bonnet, d’une écharpe ou d’une paire de gants. Ils sont vingt et un, recroquevillés sur leurs chaises disposées en cercle autour du feu dans lequel une palette en bois est encore en train de brûler. Ce mardi 10 décembre au matin marque le 33e jour de grève des conducteurs de bus de Cergy-Pontoise. Depuis le 7 novembre, ils se retrouvent devant le dépôt de bus de Saint-Ouen-l’Aumône (Val-d’Oise), pour protester contre leur employeur, l’entreprise Francilité Seine et Oise (FSO).

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés La concurrence dans les transports, entre promesses et risques

Ce conflit social prend ses racines dans l’ouverture à la concurrence des lignes de bus de la grande couronne parisienne par l’autorité organisatrice des transports Ile-de-France Mobilités (IDFM), dans le cadre de la réglementation de l’Union européenne. Le 1er janvier 2024, la société FSO du groupe Lacroix & Savac, choisie par IDFM à la suite d’un appel d’offres, a pris en main les lignes gérées jusqu’ici par la Stivo, côté Cergy-Pontoise, et Transdev, côté Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines). L’opérateur doit donc élaborer un nouvel accord avec les salariés en passant de deux à un seul secteur.

C’est cet accord qui déclenche les protestations. Les « anciens Stivo » préservent leur salaire de 2 400 euros net mensuels en moyenne avec les primes. Mais les nouveaux conducteurs, arrivés depuis la reprise du secteur par FSO, signent leur contrat à 1 490 euros. « Ils sont payés 13,70 euros de l’heure alors qu’en 1998, quand je suis entré dans l’entreprise, j’étais payé 15 euros de l’heure », souffle Cyrille Mauger, délégué syndical Force ouvrière (FO), qui vient de passer sa 33e nuit sur le lieu du piquet de grève.

Patrick Valet, conducteur depuis quatorze ans, devant le dépôt de bus de Saint-Ouen-l’Aumône (Val-d’Oise), le 10 décembre 2024.

Mehdi, 31 ans, fait partie des « petits nouveaux ». A peine cinq mois après son arrivée, il songe à démissionner. « Je passe d’un salaire de 2 500 euros en tant que chauffeur intérimaire à 1 450 euros en CDI, ici. Mon banquier fait la gueule et moi aussi », s’exaspère-t-il. Le jeune conducteur dénonce également les « journées en coupure » récurrentes. S’il n’avait pas fait grève ce mardi, Mehdi aurait travaillé de 6 heures à 9 h 30 puis de 15 heures à 19 h 45. « Je ne suis pas payé entre 9 h 30 et 15 heures alors que les anciens Stivo, si, poursuit-il. Je me lève à 4 h 45 et je rentre chez moi à 21 heures à cause des bouchons, ce n’est pas une vie. »

Patrick Valet, conducteur depuis quatorze ans, qui fait partie des anciens, assure avoir perdu « 200 euros de salaire » depuis que FSO a repris le secteur. Sur sa feuille de service, qui répertorie minute par minute son trajet du jour, il est écrit qu’il doit travailler de 5 h 42 à 12 h 39 mercredi 11 décembre. « La prime repas est déclenchée à partir de 12 h 40, je perds donc 9 euros de prime pour une minute de travail en moins », explique-t-il d’un ton désabusé. « S’il y a des aberrations comme celle-là, on peut en parler et trouver des solutions. Il est possible qu’on ait raté des choses », reconnaît Stéphane Bonnaud, directeur du développement de Lacroix & Savac.

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En Allemagne, le conflit social chez Volkswagen se durcit et se politise

Un rassemblement du syndicat IG Metall devant le siège de Volkswagen, à Wolfsburg (Basse-Saxe), le 9 décembre 2024.

La pression monte sur Oliver Blume, patron du groupe Volkswagen. Lundi 9 décembre, une seconde salve de grèves a perturbé la production de neuf sites allemands du constructeur. Et 68 000 salariés ont cessé le travail pour quelques heures, rapporte le syndicat IG Metall. A Wolfsburg (Basse-Saxe), une manifestation géante a rassemblé plusieurs dizaines de milliers de salariés à l’usine historique de Volkswagen. Dans la cité automobile, le quatrième round de négociations sur les salaires s’est tenu lundi après-midi, sans résultat.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Crise chez Volkswagen : le modèle social allemand à l’épreuve

Pour l’instant, le conflit se déroule dans le cadre d’un rituel éprouvé par des décennies de cogestion à l’allemande. La dernière convention collective de Volkswagen a pris fin le 1er décembre, ce qui a marqué la fin de la « période de paix », pendant laquelle les salariés n’ont, en principe, pas le droit de faire grève.

Chaque round de négociation entre patronat et syndicat est ensuite précédé de grèves dites « d’avertissement », afin de faire pression sur les discussions. IG Metall réclame 7 % d’augmentation et des garanties sur les emplois. Dans le reste de l’industrie, les salariés ont obtenu, à la mi-novembre, 5,5 % de hausse de salaire. Un signe important de maintien du dialogue social, malgré la crise aiguë qui secoue tout le secteur, où les plans sociaux se multiplient depuis plusieurs mois.

Sauf que la négociation actuelle chez Volkswagen, qui doit déterminer le tarif « maison » de la marque, est déjà hors normes. Contrairement aux cycles précédents, aucune base de négociation n’est pour l’instant acquise, aucun calendrier ne semble jusqu’ici arrêté par les deux parties. La direction souhaite une baisse de salaire de 10 %, et a évoqué la fermeture de trois usines, ainsi que des licenciements secs, pour la première fois de l’histoire du groupe. Volkswagen veut adapter ses capacités de production à une situation jugée « sérieuse » : la demande de véhicules reste durablement faible en Europe, les ventes du groupe en Chine se sont effondrées, et les Allemands doivent affronter une concurrence sévère sur la voiture électrique et connectée. Les bénéfices chinois, qui avaient assuré la paix sociale à Wolfsburg depuis quinze ans, se sont définitivement taris.

Ambiance délétère

Lors d’une visite aux salariés, mercredi 4 décembre, M. Blume a mis en garde les salariés contre des revendications qu’il juge irréalistes dans la situation actuelle. « Nous pouvons bien fabriquer les meilleures voitures du monde, cela ne joue aucun rôle si nous ne gagnons pas d’argent avec », a-t-il prévenu, en estimant qu’il fallait continuer à négocier. IG Metall, de son côté, a déposé une proposition qui fait certaines concessions sur les salaires, mais exclut toute fermeture de site. « Insuffisant », a opposé la direction. Tout porte à croire que le bras de fer va se poursuivre au-delà des fêtes de Noël. Cela aggraverait l’ambiance, déjà délétère, qui pèse sur le pays, un peu plus de deux mois avant les élections anticipées, prévues le 23 février 2025.

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La direction de « Libération » critiquée en interne pour son management « vertical » et son « interventionnisme »

A la rédaction de « Libération », à Paris, le 21 mars 2023.

Les salariés du journal Libération étaient invités à participer, mercredi 4 décembre, à une assemblée générale à l’initiative du comité social et économique (CSE) et de la Société des journalistes et du personnel de Libération (SJPL), l’organe de représentation des personnels de l’entreprise. L’idée était de recréer du lien dans ce quotidien qui s’est considérablement rajeuni ces dernières années, de discuter des évolutions éditoriales, mais aussi d’aborder le management de la direction, notamment celui de Dov Alfon, directeur de la rédaction depuis 2020.

Si c’est sous l’impulsion de l’ancien d’Haaretz que Libération a fortement progressé en termes d’abonnés (plus de 100 000 abonnés numériques revendiqués en septembre, contre 20 000 début 2020), la manière de diriger de ce journaliste ne fait pas l’unanimité au sein du quotidien. La question de la « perte de sens » du travail journalistique s’additionne à la fragilité économique du titre et aux interrogations sur sa structure capitalistique, alors que le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky vient, selon nos informations, d’accorder un troisième prêt d’une quinzaine de millions d’euros au journal classé à gauche. Les deux précédents représentaient un montant de près de trente millions d’euros.

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En déménageant, Hachette et Editis regroupent leurs effectifs

Le siège de la maison d’édition Hachette Livre, à Vanves (Hauts-de-Seine), le 24 octobre 2023.

L’heure des économies a sonné, au moins dans les deux premiers groupes d’édition français. Hachette, passé dans le giron du groupe de Vincent Bolloré, Vivendi ; et Editis, racheté par le groupe du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, Czech Media Invest (CMI), fin 2023, resserrent les boulons. Pour ce, les deux rivaux veulent déménager les effectifs de certaines de leurs filiales au sein du quartier général de leur maison mère. Quitte à tenter une opération au chausse-pied, en pariant sur les vertus du télétravail.

C’est ainsi que les représentants du personnel d’Hachette ont été récemment avertis par la direction que près de 250 salariés, issus notamment de la maison d’édition scolaire Hatier, allaient rejoindre les bureaux d’Hachette Livre, situés rue Jean-Bleuzen à Vanves (Hauts-de-Seine). Ils quitteront donc leurs splendides locaux – le siège historique d’Hatier – rue d’Assas, dans le 6arrondissement de Paris, qui pourrait, à terme, être vendu.

L’autre grand chantier d’Hachette, le déménagement de son centre de distribution de Maurepas (Yvelines) vers Germainville (Eure-et-Loir), a été définitivement abandonné en janvier. Lancé en 2019, ce projet évalué à 150 millions d’euros, qui nécessitait de déplacer plus de 500 salariés, n’avait pas convaincu la direction de Vivendi.

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