L’économie sociale et solidaire se mobilise à New York

« Le café équitable se vend plus cher, les agriculteurs gagnent mieux leur vie et la terre se régénère. »

Monique Barbut dégaine les statistiques qui font mal. La représentante de la convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification frappe fort : 52 % des terres agricoles dans le monde sont dégradées, 820 millions de personnes se couchent en ayant toujours faim. Et en Afrique, faute de production agricole suffisante, 60 millions de jeunes devront migrer vers l’Amérique ou l’Europe pour survivre d’ici à 2045.

C’est ce qu’est venue raconter Mme Barbut, à New York, à la réunion du groupe pilote international de l’Economie sociale et solidaire (ESS) présidé par la France. Un petit groupe formé par une dizaine de pays, qui a profité de la grand messe de l’Assemblée générale des Nations unies pour se retrouver et parler du potentiel de créations d’emploi du secteur ESS.

« Nous devons semer pour un nouveau jour », conclut Mme Barbut, en échangeant un regard complice avec Julien Lampron, directeur de Fondaction, un fonds de 2 milliards de dollars canadiens, qui gère les pensions de retraites des syndicats québécois. Fondaction et quelques autres institutions privées ont promis 100 millions de dollars pour financer plusieurs projets de lutte contre la déforestation au Pérou, en Côte d’Ivoire et ailleurs.

« Nain politique »

Ainsi, le dossier des cafés Selva Norte au Pérou concerne quatre coopératives agricoles et deux mille paysans. Ces derniers abandonnent la technique du « couper-brûler » pour produire un meilleur café et, dans la foulée, réduire de 1,6 million de tonnes leurs émissions de CO2. Le café équitable se vend plus cher, les agriculteurs gagnent mieux leur vie et la terre se régénère. Les intervenants de Grèce, Bulgarie, Sénégal, Slovénie, Maroc… adorent se raconter cette histoire. Car Selva Norte illustre parfaitement les retombées positives de l’économie sociale et solidaire.

Le secteur de 200 000 entreprises, associations, coopératives, mutuelles… représente 10 % du PIB français…

Origine, genre, handicap… un Français sur quatre dit avoir été victime de discrimination au travail

Jacques Toubon a été nommé Défenseur des droits en 2014.

La conclusion sonne comme un avertissement. « Encore aujourd’hui, les propos et comportements sexistes, homophobes, racistes, liés à la religion, handiphobes ou liés à l’état de santé au travail, sont minimisés dans les milieux de travail, en particulier lorsqu’ils tentent d’être justifiés par l’humour », écrivent le défenseur des droits, Jacques Toubon, et l’Organisation internationale du travail (OIT), coauteurs du 11e baromètre de la perception des discriminations dans l’emploi, publié jeudi 27 septembre.

Une situation d’autant plus problématique que ces attitudes sont loin d’être rares : selon cette étude, menée auprès d’un échantillon représentatif de 5 117 personnes, un Français sur quatre déclare avoir été victime de propos ou de comportements discriminatoires au travail au cours des cinq dernières années.

Ce chiffre masque cependant de fortes disparités : ainsi, 54 % des femmes de 18 à 44 ans perçues comme non blanches ont déclaré avoir été victimes de propos ou de comportements discriminatoires, contre 11 % des hommes de 35-44 ans perçus comme blancs (remarques homophobes, liées à la religion, etc.).

  • Le racisme

Le baromètre insiste sur le fait que les discriminations racistes peuvent être liées à l’origine « réelle » des victimes, mais également à leur origine « supposée » par autrui.

Ainsi, selon l’étude, 33 % des personnes perçues comme non blanches déclarent avoir subi des attitudes racistes, contre 6 % des personnes perçues comme blanches, toutes tranches d’âge confondues. Ces discriminations concernent avant tout les personnes perçues comme noires (38 % des victimes) et arabes (34 %), mais aussi celles perçues comme métisses (27 %) et asiatiques (26 %).

Pour aider les victimes de discrimination raciste et sexiste, Marie Dasylva a créé en 2017 Nkali, une agence d’accompagnement des femmes perçues comme non blanches dans la gestion des situations de harcèlement en entreprise. Interrogée par Le Monde, elle cite parmi les discriminations subies le « déni de compétence », ainsi que les « techniques d’infériorisation ». Et de citer l’exemple d’un steward d’Air France mis à pied en 2012 :

« La compagnie aérienne estimait que sa coupe afro ne faisait pas “professionnel”. Or l’afro, c’est simplement la façon naturelle dont poussent les cheveux des personnes noires. »


  • Les discriminations liées au handicap

L’étude souligne aussi que 15 % des personnes handicapées ont rapporté des propos et comportements « handiphobes ».

Contactée par Le Monde, la Fédération des associations pour adultes et jeunes handicapés cite, parmi les cas de discriminations « handiphobes », les refus d’embauche, mais aussi les refus d’aménagement de poste :

« Un fonctionnaire avait un handicap au dos. Il était parfaitement apte à son travail, le défenseur des droits s’était d’ailleurs prononcé pour sa titularisation. En mars 2017, il a demandé un siège ergonomique. La réponse, apportée en novembre de la même année, a été négative pour cause de restrictions budgétaires, et ajournée à mars 2018. »

  • L’homophobie

Selon le baromètre, 24 % des personnes homosexuelles ou bisexuelles déclarent avoir été victimes d’attitudes homophobes. Un taux qui monte à 40 % pour les hommes homosexuels ou bisexuels, qui voient notamment leur carrière et leur salaire amputés.

Dans l’étude « Orientation sexuelle et écart de salaire sur le marché du travail français : une identification indirecte » (Insee, 2013), les économistes Thierry Laurent et Ferhat Mihoubi constataient ainsi que les hommes homosexuels gagneraient en moyenne 6,3 % de moins que les hommes hétérosexuels dans le secteur privé, et 5,6 % de moins dans le secteur public.

Lire aussi :   Homophobie et transphobie : les discriminations des LGBT au travail en 4 graphes

  • L’effet cumulatif

Le défenseur des droits et l’OIT notent que toutes ces discriminations sont cumulatives, et appelle à adopter une véritable « analyse intersectionnelle » afin de mieux les appréhender.

Ainsi, si 23 % des femmes déclarent avoir subi un comportement sexiste, la proportion monte à 54 % lorsqu’on interroge les jeunes femmes perçues comme non blanches, qui subissent en sus le racisme.

Avec notamment des conséquences salariales. « L’une de mes clientes était une femme noire travaillant dans la finance. Elle s’était aperçue qu’elle était payée 40 % de moins que son prédécesseur », raconte Marie Dasylva. Soit 30 points de moins que l’écart de salaire moyen entre femmes et hommes en France.

La même logique s’applique aux femmes handicapées, qui sont 43 % à déclarer avoir subi des discriminations. « Les employeurs considèrent d’emblée les femmes comme fragiles et incompétentes », explique au Monde Claire Desaint, vice-présidente et fondatrice de l’association Femmes pour le dire, femmes pour agir : « Du coup, ils se disent qu’une femme en situation de handicap sera absente au moindre “bobo”. » Les femmes bénéficient donc moins du quota de 6 % de travailleurs handicapés obligatoire dans les entreprises de plus de vingt salariés, explique-t-elle.


L’ampleur des discriminations constatée dans ce baromètre amène le défenseur des droits et l’OIT à rappeler, en conclusion de l’étude, que « ces situations sont de nature à engager la responsabilité de l’employeur », du fait de son obligation de sécurité. Ils enjoignent donc fermement aux entreprises d’intégrer la question des discriminations à leur démarche de prévention des risques psychosociaux.

Lire aussi :   Dix ans de lutte contre les discriminations

Ryanair annule 150 vols, l’UE proteste

La compagnie aérienne Ryanair va annuler 150 vols vendredi 28 septembre en raison d’une grève européenne de son personnel de cabine, Bruxelles intimant à la compagnie à bas coûts de « respecter la loi » européenne.

Le transporteur irlandais a ainsi revu à la baisse sa première estimation de 190 suppressions de vols, selon une annonce mercredi sur son compte Twitter. Ryanair explique que la majorité de ses salariés travailleront normalement, ce qui lui permet d’assurer plus de 92 % de ses 2 400 vols prévus ce jour-là.

Dans la journée, la commissaire européenne aux affaires sociales, Marianne Thyssen, est intervenue pour rappeler Ryanair à l’ordre. « Le respect du droit communautaire n’est pas quelque chose sur lequel les travailleurs devraient avoir à négocier, ni quelque chose qui peut être fait différemment d’un pays à l’autre », a prévenu Mme Thyssen à l’issue de sa rencontre à Bruxelles avec le directeur général de la compagnie, Michael O’Leary, à la demande de ce dernier. « Ce n’est pas le pavillon de l’avion qui détermine la loi applicable. C’est l’endroit d’où les travailleurs partent le matin et reviennent le soir, sans que l’employeur ait à couvrir les frais », a insisté la Commission européenne dans un communiqué.

30 000 clients affectés

Mardi, Ryanair avait donné une première prévision de 190 vols annulés, estimant alors que 30 000 clients seraient affectés par ce mouvement social, qualifié une nouvelle fois d’« inutile ».

Le transporteur précise que tous les clients concernés ont été prévenus par courrier électronique et SMS depuis mardi. L’appel à la grève concerne le personnel navigant d’Espagne, de Belgique, des Pays-Bas, du Portugal et d’Italie.

Le syndicat des pilotes allemands a annoncé vendredi soir rejoindre le mouvement européen, tandis que celui du personnel naviguant allemand s’est donné jusqu’à jeudi soir pour décider d’un éventuel appel à la grève.

Ryanair avait déjà dû annuler 150 vols en Allemagne le 12 septembre en raison d’une grève des pilotes et du personnel.

« Pas une jungle »

La commissaire européenne rappelle à Ryanair qu’« avec le succès vient aussi la responsabilité ». « Le marché intérieur n’est pas une jungle : il comporte des règles claires sur la mobilité équitable du travail et la protection des travailleurs ».

M. O’Leary a pour sa part appelé à « annuler la grève » lors d’une conférence de presse à Diegem, près de l’aéroport de Bruxelles-Zaventem, selon des propos rapportés par l’agence Belga. « On accepte de négocier et il y a quand même une grève », a-t-il fait valoir, avant de lancer : « Annulez cette grève qui n’est pas soutenue par la très grande majorité des travailleurs de Ryanair ! »

M. O’Leary a aussi menacé de « diminuer la flotte » de Ryanair dans les aéroports belges de Bruxelles et Charleroi s’il devait continuer à y affronter le mécontentement syndical.

Les syndicats réclament de meilleures conditions de travail et l’emploi de chaque salarié via un contrat relevant de son pays de résidence, contrairement à la pratique historique de Ryanair d’employer une bonne part de son personnel via des contrats de droit irlandais.

Le mouvement dure

Cette grève coordonnée de vendredi marque la poursuite d’un mouvement social qui frappe la compagnie aérienne à bas coût depuis cet été.

Ryanair a subi deux vastes mouvements d’arrêt du travail de ses employés coordonnés dans plusieurs pays européens : chez le personnel de cabine fin juillet (600 vols annulés et 100 000 passagers touchés) puis chez les pilotes au cœur du mois d’août (400 vols annulés et 55 000 passagers touchés). Avec 150 suppressions de vols prévues pour ce vendredi à travers l’Europe, soit autant que la grève allemande de mi-septembre, l’ampleur du mouvement semble néanmoins donner des signes d’essoufflement.

La compagnie tente d’éteindre la contestation en signant dernièrement plusieurs accords avec des syndicats, notamment au Royaume-Uni, en Irlande et en Italie, dans lesquels la direction accepte des augmentations de salaires et des améliorations des conditions de travail.

Ryanair connaît une grogne sociale endémique depuis un an, qui a débuté avec le mécontentement de ses pilotes, ce qui l’a contrainte à engager des négociations avec des syndicats ces derniers mois, ce qu’elle avait refusé de faire pendant ses 30 premières années d’existence.

Le pied de nez d’Air France à AccorHotels

Stand d’Air France au salon du tourisme IFTM Top Resa, à Paris, le 23 septembre 2014.

La nouvelle ne va pas ravir AccorHotels. A l’occasion de l’ouverture, mardi 25 septembre, du salon du tourisme IFTM Top Resa au Parc des expositions de la porte de Versailles, à Paris, Air France a annoncé un partenariat avec le site de réservation d’hébergement en ligne Booking.com. L’accord d’une durée de trois ans met fin au précédent partenariat qui associait Air France au groupe hôtelier français présidé par Sébastien Bazin.

Cette annonce semble mettre un point final aux velléités d’AccorHotels, qui envisageait, il y a moins de deux mois, d’entrer en force dans le capital de la compagnie aérienne en rachetant la participation de l’Etat. Le groupe hôtelier voulait notamment mettre la main sur le programme de fidélité d’Air France.

« La plate-forme d’AccorHotels ne faisait pas le poids par rapport au nombre de destinations desservies par Air France », expliquent en chœur Soline de Montrémy, directrice générale des ventes globales et des partenariats commerciaux d’Air France-KLM, et sa collègue Delphine Barault, directrice business development et partenariats commerciaux. En pratique, font-elles savoir, Accor ne proposait aucun hôtel sur un quart des destinations d’Air France et un tiers supplémentaire des dessertes de la compagnie aérienne était mal couvert par le groupe hôtelier.

Des recettes annexes

En outre, Air France n’écarte pas la gamme Accor de son offre puisque les hôtels du groupe français sont aussi référencés par la plate-forme de Booking.com, précisent Mmes de Montrémy et Barault. Enfin, en s’alliant avec Booking, elle rationalise son offre puisque les autres filiales de la compagnie franco-néerlandaise, KLM, Transavia et Hop !, avaient déjà noué un partenariat avec le site de réservations.

Concrètement, les clients d’Air France pourront désormais réserver une chambre d’hôtel sur Booking par le biais du site de la compagnie aérienne et gagner des miles.

Dans un premier temps, chaque…

Une solution s’esquisse pour les salariés de l’acierie d’Ascoval

Le site Ascoval de  Saint-Saulve (Nord), le 29 janvier.

C’est un répit de courte durée, mais peut-être cela suffira-t-il à assurer un avenir aux 281 salariés de l’aciérie d’Ascoval. Mercredi 26 septembre, les administrateurs judiciaires de la société, à la demande du gouvernement, ont obtenu auprès du tribunal de grande instance (TGI) de Strasbourg, un sursis de quatre semaines pour consolider le projet de reprise de l’aciérie de Saint-Saulve, dans le Valenciennois. Les syndicats espèrent désormais un épilogue positif après de longs mois d’attente.

En février, Ascometal, le propriétaire à 60 % d’Ascoval avait été repris à la barre de la chambre commerciale du TGI de Strasbourg par le groupe Schmolz + Bickenbach. Cependant, l’aciériste suisse avait refusé de prendre possession de l’usine des Hauts-de-France, codétenue par Vallourec à 40 %. Afin d’assurer un premier sursis d’un an, le groupe parapétrolier et le sidérurgiste helvète avaient accepté de maintenir jusqu’au 31 janvier 2019 un volume de commandes suffisantes à un prix au-dessus du marché pour lui permettre de se trouver un avenir.

Lire aussi :   Sidérurgie : l’usine de Saint-Saulve gagne un an de sursis

Seul Altifort a déposé un dossier ferme

En juillet, trois candidats se sont manifestés auprès des magistrats strasbourgeois pour reprendre l’usine, mais seul Altifort, une société franco-belge a finalement déposé un dossier ferme. Créé en 2013, ce groupe industriel a repris neuf sites, notamment à Vallourec et ArcelorMittal. « A la fin de l’année, nous devrions compter 1 500 salariés et réaliser 200 millions d’euros », avance Bart Gruyaert, son directeur général. « Notre volonté est d’installer à proximité de l’aciérie un train à fil pour transformer l’acier en filin afin de pouvoir s’adresser à divers clients, au lieu du seul Vallourec », détaille-t-il.

Altifort propose au tribunal d’investir quelque 140 millions d’euros, financés grâce à des fonds propres, des prêts bancaires, des fonds d’investissement ainsi que diverses aides publiques. En échange, la société propose de maintenir 181 emplois et d’en créer 133 supplémentaires. « Pour cela, a rappelé Bruno Le Maire, le ministre de l’économie, après une réunion avec les syndicats de l’usine mardi matin à Bercy, Altifort a besoin de financements complémentaires. » Dans le détail, la société demande à Vallourec la prise en charge, à hauteur de 6 millions d’euros, des comptes épargne-temps des salariés sur la période avant 2017, quand l’usine était détenue par Vallourec.

Lire aussi :   Ascoval : l’Etat accepte de mettre la main à la poche

De même, la société franco-belge souhaiterait que le groupe parapétrolier finance pour 12 millions d’euros la remise en état des halles pour installer le train à fil. Enfin, Altifort voudrait obtenir pour 50 millions d’euros de commandes pendant dix-huit mois : plus de 200 000 tonnes d’acier à 248 euros la tonne… « Par rapport à un autre approvisionnement, cela représente un surcoût de 20 à 30 millions d’euros », précise un observateur du dossier.

« L’Etat s’engage »

Dans un communiqué envoyé mardi, Ascoval soutient le plan d’Altifort, sachant qu’elle a déjà fait une partie du chemin en réduisant drastiquement ses coûts depuis 2017. La productivité a progressé de 30 % en deux ans. Le prix de la tonne revient à 270 euros, contre encore 400 euros il y a deux ans. « A l’avenir, nous voulons encore améliorer ce coût, en passant à 185 euros la tonne », précis Bart Gruyaert.

Pour l’instant, M. Le Maire ne veut pas promettre la lune. « Ce dont nous sommes convenus, c’est de travailler exclusivement sur cette option de reprise. Ça va être difficile, je ne l’ai pas caché aux salariés, la conjoncture n’est pas bonne, Vallourec n’est pas en meilleure forme non plus, donc c’est compliqué mais nous devons mettre toutes nos énergies à garantir la pérennité du site. »

« Le cap est enfin donné, se satisfait Bruno Kopczinsky, porte-parole de l’intersyndicale de l’usine. Le ministre s’est engagé pour le plan Altifort. L’Etat, qui détient 16,22 % de Valourec, va utiliser sa position d’actionnaire pour que Vallourec prenne ses responsabilités. Enfin, l’Etat s’engage. On est soulagé. On avance. » M. Gruyaert confirme : « Que le ministre s’engage pour la reprise d’Ascoval est un premier signe positif ! »

Une flexibilité du travail sous conditions

« personne ne peut aujourd’hui dire ce qu’est, dans le cas précis d’un salarié, une garantie au moins équivalente, qui redonne la primauté de l’accord d’entreprise sur les règles issues d’un accord de branche. »

Question de droit social. Les « ordonnances Macron » du 22 septembre 2017 ont bouleversé la hiérarchie des sources du droit négocié du travail. Désormais, c’est la convention ou l’accord collectif d’entreprise qui prime sur la convention ou l’accord collectif de branche. Ce nouveau principe s’applique même si l’accord d’entreprise est moins favorable aux salariés que ladite convention ou accord collectif de branche. C‘est là une mesure forte de « flexibilisation » adoptée dans le but que les « besoins » spécifiques, les caractéristiques d’organisation et d’activité de l’entreprise soient mieux pris en compte dans les négociations des conditions de travail des salariés.

Toutefois et afin d’éviter de trop fortes distorsions de concurrence par le coût du travail au sein d’une même branche professionnelle, les réformateurs ont prévu de nombreuses exceptions à ce principe.

Ainsi, aux termes de l’article L2253-1 du code du travail, l’accord de branche prime toujours sur l’accord d’entreprise concernant de nombreux points : les salaires minimaux, la classification, les conditions et durées de renouvellement de la période d’essai, ainsi que dans certains domaines de la durée du travail (la période de référence en cas de répartition de la durée du travail sur plus d’une semaine, le régime d’équivalence, etc.), les contrats à durée indéterminée de chantier, ou encore les dispositions relatives aux durées maximales du contrat à durée déterminée.

En tous ces domaines, les négociateurs d’entreprise doivent respecter les dispositions de la convention ou accord collectif de branche, évidemment si un tel accord existe, s’il est applicable à l’entreprise et s’il traite du thème en question.

Ce même article précise toutefois que cette primauté de l’accord de branche sur l’accord d’entreprise ne joue pas « lorsque ce dernier assure des garanties au moins équivalentes à celles prévues par l’accord de branche ». Dans…

Le démarrage laborieux de la carte d’identité des ouvriers du bâtiment

« Fin juillet, sur un effectif global de 1,63 million de salariés, 1,3 million de cartes avaient été délivrées par environ 75 % des entreprises. »

Les professionnels du bâtiment et des travaux publics la réclamaient à cor et à cri : la carte d’identification professionnelle du bâtiment et des travaux publics (BTP) est définitivement entrée en vigueur le 1er octobre 2017 pour lutter plus efficacement contre le travail illégal et la fraude au travail détaché. Mais après un an d’existence, elle est encore loin d’avoir fait ses preuves.

Chaque salarié est, depuis cette date, censé porter en permanence sur lui, pendant le chantier, une carte établie par la Caisse des congés payés du bâtiment et fournie par son employeur, moyennant 10,80 euros. Elle précise son identité, photo à l’appui, mais surtout son statut : salarié, intérimaire ou travailleur détaché, c’est-à-dire des salariés étrangers européens envoyés en France pour des missions théoriquement temporaires. Un code QR doit permettre le contrôle rapide des informations par les inspecteurs du travail, munis d’une application ad hoc pour smartphone.

Fin juillet, sur un effectif global de 1,63 million de salariés, 1,3 million de cartes avaient été délivrées par environ 75 % des entreprises, dont environ 81 000 à des travailleurs détachés. Mais le déploiement s’est opéré lentement, région par région, commençant par le Sud-Ouest et finissant par l’Ile-de-France. Ce n’est que fin août que les inspecteurs d’Ile-de-France, par exemple, se sont vus équiper des indispensables lecteurs de code QR (dont les gendarmes devraient également être bientôt munis).

Obstacles

Non seulement ces débuts ont été lents mais d’autres obstacles ont entravé l’efficacité de cette carte. « De toute façon, personne ne la porte sur le chantier car on ne nous la demande jamais. Les ouvriers sont d’ailleurs réticents à garder leurs papiers sur eux, de peur de les perdre », confie Afonso Fontes Teixeira, syndicaliste CGT et maçon dans une importante entreprise du BTP. « Ça ne sert à rien, parce qu’il n’y a pas de contrôles, les inspecteurs du…

« Brown-out », « soulmate » : décrypter la novlangue pour mieux comprendre notre environnement

« Le Pouvoir des imaginaires. 1 001 initiatives pour révolutionner la consommation », de Patrice Duchemin. Editions Arkhê, 216 pages, 14,90 euros.

Le brown-out, littéralement « baisse de courant », est le nom donné à une maladie du travail provoquée par une opposition entre l’éthique personnelle d’un salarié et les tâches professionnelles qui lui sont demandées. La shrinkflation – contraction de shrink, ratatiner, et inflation – désigne le procédé qui consiste à vendre au même prix un produit conditionné dont le poids a été réduit par le fabricant. Les tablettes de chocolat ne pèsent plus toujours 100 grammes et, au Royaume-Uni, les triangles des barres Toblerone sont, depuis peu, davantage espacés. Les henrys (« High Earners Not Rich Yet », « hauts revenus en voie de devenir riches ») sont une nouvelle cible pour les marques de luxe. Pas encore très riches, mais assez pour être tentés.

Enfin, l’office soulmate (« l’âme sœur du bureau ») est un concept américain qui décrit la personne avec laquelle chaque salarié entretient une relation privilégiée au bureau. « Celle à qui il est possible de raconter ses petites frustrations quotidiennes, ses problèmes du quotidien ou ses états d’âme devant la machine à café ou sur la messagerie instantanée de l’entreprise », détaille Patrice Duchemin, qui recense, dans Le Pouvoir des imaginaires (Arkhê), vingt-cinq termes de novlangue.

« Bien sûr, ce ne sont que des mots. Mais les mots sont bavards. Ils permettent d’entendre et de comprendre notre environnement. Ils peuvent être des sources d’inspiration et des grilles d’analyse pertinentes », affirme le sociologue de la consommation. Alors que certains choisissent de voyager au bout du monde pour trouver la nouvelle tendance qui doit irriguer notre futur, et l’illustrent ensuite par des exemples qu’ils ne manqueront pas de trouver, quitte à forcer la réalité, l’enseignant au Celsa prend le chemin inverse.

Street-fishing et poulaillers urbains

Il part du repérage de micro-faits, des initiatives a priori anecdotiques,…

« En entreprise, les faits religieux sont majoritairement peu problématiques »

« le fait religieux appréhendé comme un phénomène global est à la fois banal, présent dans une majorité d’entreprises et peu perturbateur. »

Tribune. La religion et les faits religieux se sont installés dans le quotidien des entreprises françaises. En 2018, d’après les résultats de l’enquête annuelle de l’Observatoire du fait religieux en entreprise (réalisée en partenariat avec l’Institut Randstad), près de deux entreprises sur trois rencontrent ces questions à des fréquences diverses : quotidiennement pour certaines, simplement quelques fois par an pour d’autres.

le fait religieux au travail est peu conflictuel et perturbe peu le fonctionnement de l’entreprise

Toutefois ce qui était encore exceptionnel il y a une dizaine d’années s’est aujourd’hui banalisé. Quelles en sont les conséquences ? Comment ces faits et comportements, impactent-ils le fonctionnement de l’organisation, la réalisation du travail et les rapports entre les personnes ? Un premier élément important qui ressort de l’enquête menée est que le fait religieux au travail est peu conflictuel et perturbe peu le fonctionnement de l’entreprise.

Une fois sur deux un acte ou un comportement ayant un caractère religieux ne suscite aucune action ou réaction de la part de collègues ou de managers. Lorsque c’est le cas il s’agit la plupart du temps de répondre à une demande d’absence ou de modification de planning justifiée par le souhait d’assister à une fête religieuse ou de respecter un rite. Ces décisions sont par ailleurs le plus souvent acceptées par les salariés et ne suscitent des conflits et des blocages que dans moins de 10 % des cas.

Bien saisir les enjeux

L’enquête souligne par ailleurs que d’autres sujets, par exemple la politique ou la vie personnelle, génèrent davantage de tensions au travail que la religion. Ainsi le fait religieux appréhendé comme un phénomène global est à la fois banal, présent dans une majorité d’entreprises et peu perturbateur. Il génère rarement des interventions managériales ou des conflits entre collègues et avec le management. Il gêne peu la bonne marche de l’organisation,…

Un programme économique clé en mains pour la gauche

« Une autre voie est possible », d’Eric Heyer, Pascal Lokiec et Dominique Méda, Flammarion, 360 pages, 21 euros.

Livres. La gauche française, éclatée façon puzzle, cherche donc de nouvelles idées pour rebondir. Pierre Rosanvallon, avec Notre histoire intellectuelle et politique, 1968-2018 (Seuil), s’efforçait de lui proposer une nouvelle méthode de mobilisation politique. Voici deux livres qui, parus quasiment le même jour, visent à lui offrir un programme économique « clé en main », avec deux titres significativement proches.

Et un premier constat similaire. Ce qu’une poignée d’économistes s’évertuait à clamer dans le désert du consensus néolibéral de la fin du siècle dernier – les inégalités s’accentuent ; l’instabilité financière et le marché tout puissant menacent la croissance, l’environnement et la démocratie ; l’Etat et les institutions économiques doivent jouer un rôle de régulateur, de garant et d’investisseur – est en train de devenir le consensus des économistes, jusque dans les bastions considérés comme les ordonnateurs de la politique économique menée jusqu’à la grande crise de 2008 : le Fonds monétaire international (FMI), l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la Commission de Bruxelles et même la Banque centrale européenne (BCE).

Depuis quatre à cinq ans, ces institutions multiplient les rapports préconisant la hausse des salaires et des investissements publics, la réduction des inégalités, la mise au pas de la finance de l’ombre et des paradis fiscaux, une fiscalité plus progressive et redistributive, l’abondance de la liquidité sans craindre l’inflation, le rééquilibrage du commerce entre pays excédentaires et déficitaires…

Mais les politiques, et d’ailleurs la plupart des experts médiatiques, n’ont toujours pas tiré les conclusions pratiques de ce revirement intellectuel spectaculaire, notent les auteurs. Ils continuent à analyser la situation économique avec les concepts d’avant-crise et à prescrire les solutions… qui y ont mené.

Dans les bras de l’extrême droite

Les…