Cette proposition prévoit un plan d’économies annuel de 12 millions d’euros en contrepartie de la réduction du nombre d’emplois supprimés, selon les syndicats.
Le Monde avec AFPPublié aujourd’hui à 12h30, mis à jour à 12h31
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Près d’un millier de salariés de General Electric (GE) Belfort ont approuvé à une très large majorité, lundi 21 octobre, une nouvelle proposition de la direction prévoyant de sauver 307 des 792 suppressions d’emplois prévues par le plan social frappant le site, ont appris des journalistes de l’Agence France-Presse (AFP) et de France Télévisions présents sur place.
Cette proposition de plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), approuvée lors d’un vote à main levée, prévoit un plan d’économies annuel de 12 millions d’euros en contrepartie de la réduction du nombre d’emplois supprimés, selon les syndicats, qui ont organisé ce vote.
General Electric emploie quelque 4 300 salariés à Belfort, dont 1 800 dans cette entité. Le groupe américain avait annoncé en mai dernier un plan social prévoyant la suppression de près de 1 050 postes en France, dont 792 à Belfort.
Samedi, quelque 2 600 manifestants, selon la préfecture, ont battu le pavé à Belfort en soutien aux employés du site industriel. Dans les rangs des manifestants, des élus locaux mais aussi Jean-Luc Mélenchon, qui s’est abstenu de toute déclaration. General Electric est « un fleuron de notre industrie nécessaire pour réaliser la transition énergétique que #Macron et ses amis ont abandonné », a toutefois tweeté le chef de file de la France insoumise.
Cette manifestation a également été marquée par la division syndicale, la CGT ayant décidé de ne pas participer au défilé soutenu par la CFE-CGC et SUD, et de rejoindre un piquet de grève devant l’usine.
La CGT avait rejeté cette nouvelle mouture de PSE approuvée lundi par les salariés. La CFE-CGC et SUD l’avaient approuvée « parce qu’elle est le moins pire des compromis ».
Les baromètres annuels des salaires édités par Randstad le 17 octobre et par le cabinet Robert Half la semaine précédente semblent confirmer un retournement de tendance, en faveur des cols blancs aussi bien que des cols bleus. Du moins, pour les compétences les plus convoitées.
« La transformation numérique des entreprises, les problématiques de gestion des données, de cybersécurité… nécessite des compétences pointues, qui se monnayent cher. » Ingram / Photononstop
Alors que le marché de l’emploi se redresse, la pénurie de profils qualifiés dans certains secteurs semble profiter à toutes les catégories de salariés. Dans son guide des salaires annuel publié le 8 octobre, le cabinet de recrutement spécialisé Robert Half constate une tendance à la hausse en 2019 des salaires moyens des cadres issus de la finance, du juridique et du numérique.
En moyenne, cette augmentation s’établit à 2 % selon les données récoltées auprès de 700 directeurs et manageurs, ainsi que de 1 045 candidats. Une hausse modérée, mais qui confirme le retournement du marché de l’emploi cadres en faveur des candidats au cours des trois dernières années, selon Robert Half.
1,5 million de fiches de paie
Un « dynamisme » alimenté par les départs à la retraite et l’intensification de la mobilité chez les profils les plus recherchés, qui n’hésitent pas à quitter leur emploi pour trouver des conditions plus favorables ailleurs. « Ces dix-huit derniers mois, deux tiers des entreprises déclarent avoir augmenté le salaire proposé pour assurer le recrutement d’un talent », constate Robert Half. Selon l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), le seuil de 300 000 recrutements de cadres pourrait être atteint en 2021.
Cette tendance haussière se voit confirmée par la 11e édition du baromètre annuel des salaires publié par Randstad jeudi 17 octobre, qui s’intéresse aux non-cadres. D’après l’analyse des 1,5 million de fiches de paie de salariés employés par l’agence d’intérim (payés au même niveau que les salariés permanents et hors primes et indemnités spécifiques), le salaire moyen des non-cadres enregistre pour la deuxième année consécutive une progression moyenne de 1,8 %, atteignant 1 636 euros brut en 2019.
Une augmentation légèrement supérieure à celle du smic (+ 1,5 % en 2018) et à l’inflation. Bien que cette hausse demeure modérée, elle semble confirmer un retournement de tendance : « Il s’agit d’un record depuis six ans », se félicite François Béharel, le président du Groupe Randstad France.
Un expert pointe, dans une tribune parue dans « Les Echos« , le « coût significatif » de cette mesure appliquée depuis le quinquennat de François Hollande.
Le dispositif « Territoires zéro chômeur de longue durée » est-il sur la sellette ? La question vient de surgir, sur un ton très polémique, après la publication dans Les Echos d’une tribune rédigée par l’économiste Pierre Cahuc, qui pointe les limites de cette mesure mise en place sous le précédent quinquennat. Elle « ne produit pas le miracle annoncé » et « son coût est significatif », estime-t-il. Des appréciations qui indignent les personnalités à l’origine de cette démarche en faveur des demandeurs d’emploi, expérimentée dans une dizaine de bassins de vie. Alors que son élargissement avait été évoqué en 2018 par Emmanuel Macron, plusieurs protagonistes craignent que l’exécutif soit en train de reconsidérer sa position.
Si le point de vue de M. Cahuc, publié le 18 octobre, suscite autant de réactions, c’est parce que l’intéressé n’est pas n’importe qui. Professeur à Sciences Po, il siège au comité scientifique créé, il y a un an, afin d’évaluer le dispositif incriminé. Le fait qu’il s’exprime avant même que le comité ait rendu ses conclusions est jugé « profondément anormal » par Louis Gallois, président du Fonds d’expérimentation contre le chômage de longue durée, et par Laurent Grandguillaume, le responsable de l’association portant le projet (après en avoir été l’un des instigateurs quand il était député PS de Côte-d’Or). Les deux hommes l’ont écrit dans une lettre adressée le 18 octobre au président de la République.
Evaluation « accélérée »
Sur son blog, M. Grandguillaume tape encore plus fort, fustigeant la « tribune torchon » de M. Cahuc. Il mentionne aussi que l’économiste est proche de Marc Ferracci, le conseiller spécial de la ministre du travail, Muriel Pénicaud, puisque tous deux ont écrit un livre ensemble. M. Grandguillaume déplore par ailleurs que l’idée d’étendre à de nouveaux territoires le programme « zéro chômeur » tarde à se concrétiser et il s’interroge sur les « bruits négatifs » qui émaneraient de « membres du cabinet » de Mme Pénicaud. D’où son inquiétude face à la « langueur instaurée, voire le sabotage orchestré, depuis le ministère du travail ».
Ils étaient tout au plus 2 000 à battre le pavé, samedi, pour témoigner leur soutien aux salariés. La nouvelle mouture du Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) sème la discorde parmi les syndicats.
Dans la manifestation du 19 octobre 2019 à Belfort. VINCENT KESSLER / REUTERS
Fissurée depuis quelques jours, l’intersyndicale a explosé en direct, devant les micros et les caméras des journalistes. Le « clash » s’est produit au pied de la Maison du peuple, point de départ, samedi 19 octobre à Belfort, de la manifestation organisée en soutien aux salariés de General Electric (GE) confrontés à un plan de restructuration très lourd. Elle a réuni quelque 2 000 personnes, un chiffre bien inférieur à celui du précédent défilé, le 22 juin (près de 5 000 participants).
La prise de parole de son représentant à peine achevée, la CGT s’est désolidarisée de la foule pour prendre la direction, avec quelques centaines de personnes, de la Porte de la découverte et du piquet de grève qui bloque l’accès du site de GE depuis le 7 octobre. Sans écouter le discours des représentants de la CFE-CGC ni de Sud qu’elle a copieusement sifflés et hués. Ces deux organisations syndicales ont ensuite pris la même direction, mais par un itinéraire différent. « C’est triste… », regrettait un manifestant. C’est précisément maintenant que l’unité syndicale est primordiale. »
Motif de la discorde : la nouvelle mouture du Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) rejetée par la CGT, « parce qu’elle n’offre pas assez de garanties sur le projet industriel », et acceptée par la CFE-CGC et Sud, « parce qu’elle est le moins pires des compromis ». Son contenu doit être soumis au vote des salariés (à main levée) lundi 21 octobre, à partir de 10 h 30. Ce sont eux qui acteront, ou non, la reprise du travail.
« Le problème, ce sont les prédateurs financiers »
Que dit cette nouvelle version du PSE dévoilé le 28 mai ? Que ce ne sont plus 792 emplois, mais environ 500 qui seraient supprimés. L’effectif du pôle gaz passerait ainsi de 1 760 postes au 30 avril 2019 à 1 400 avant la fin du premier trimestre 2020, avec des départs volontaires et un plan senior, et à 1 275 à partir du dernier trimestre 2020 avec, si nécessaire, des départs contraints. La direction a conditionné la mise en œuvre de ce nouveau PSE à la levée du piquet de grève, mais sans fixer de date butoir. En fin d’après-midi, samedi, la CGT n’avait pas encore fait part de ses intentions.
« Le volet social est important, mais ce qu’on veut, c’est un avenir industriel pour Belfort, plaide Michel, 67 ans, retraité d’Alstom, venu soutenir les salariés dans leur combat. La direction dit vouloir travailler à la diversification du site dans l’aéronautique avec un objectif de 200 emplois à l’horizon 2023. Ce n’est pas assez. Pour poursuivre l’aventure industrielle qui a démarré ici il y a 140 ans, il faut aller beaucoup plus loin. »
Pour Otis David, contrôleur en imagerie 3D à Bourogne, l’autre site de GE dans le département (fabrication d’ailettes), « le problème, ce sont les prédateurs financiers. Ce sont eux qui mènent le monde aujourd’hui, pas les politiques. » Agé de 45 ans et père de trois enfants, il avait quinze ans lorsqu’il a intégré le CFA d’Alsthom (qui n’avait pas encore perdu son « h »). Il participe au blocage des deux sites de GE depuis le début, du matin au soir. Plus rien n’entre, ni ne sort, de la plus petite pièce à la turbine. La semaine, il est à Belfort, le week-end à Bourogne. Pas question de recourir à la violence, ni d’abîmer l’outil industriel : « On veut montrer que les voyous, ce sont eux, pas nous ! Un emploi perdu chez GE, ce sont trois à cinq autres détruits à l’extérieur par effet domino. »
Pour Henri, 73 ans, ancien commercial, ce qui se passe en ce moment avec General Electric ne concerne pas seulement Belfort, mais la France entière : « L’Etat a abandonné son industrie, et depuis trop longtemps. Il doit la replacer de toute urgence au centre de ses préoccupations. Les élus locaux ont aussi un rôle à jouer : ils doivent passer à l’offensive, être force de proposition, mouiller vraiment la chemise. Pour cela, il faut une volonté politique. » Il s’inquiète : « Mais en sont-ils seulement capables ? »
Le premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, durant une convention du parti Droit et Justice, à Kielce (centre-est du pays), le 9 octobre. WOJTEK RADWANSKI / AFP
Le parti ultraconservateur Droit et justice (PiS), large vainqueur des élections législatives du 13 octobre, doit sa victoire, comme en 2015, à des promesses économiques et sociales qui bousculent la doxa libérale en vigueur dans le pays depuis la chute du communisme. Lors de la précédente législature, le parti de Jaroslaw Kaczynski a mis en place une révolution sur le marché du travail, en introduisant pour la première fois un salaire minimum horaire à 13 zlotys (3 euros), qu’il a promis de porter à 17 zlotys au 1er janvier 2020. Un tournant, dans un pays où un serveur de café pouvait, il y a encore peu, être rémunéré l’équivalent de 90 centimes d’euro de l’heure.
La promesse phare de la campagne qui a mené à la réélection du PiS a été de quasi doubler le SMIC mensuel brut à l’horizon 2022, pour le porter à 4 000 zlotys (933 euros), contre 2 250 zlotys actuellement. L’intention affichée par le parti ultraconservateur est claire : la Pologne voudrait sortir d’un modèle économique qui consiste à attirer massivement les investisseurs étrangers – parmi lesquels l’industrie allemande occupe une place de premier plan – avec, pour principal atout, le bas coût de sa main-d’œuvre. Un modèle qualifié, par certains économistes, de « capitalisme périphérique », qui a contribué au développement spectaculaire du pays d’Europe de l’Est depuis 1989, mais qui est sur le point de montrer ses limites.
Eviter le plafond de verre
Lors d’un débat à l’Université économique de Poznan (ouest), le 3 octobre, la ministre des entreprises et des technologies, Jadwiga Emilewicz, candidate aux législatives, expliquait ce point de vue. « La Pologne se développe très vite, mais nos moteurs de croissance se tarissent. Nous sommes devenus “l’atelier d’assemblage” de l’Europe. Nous avons bien intégré la chaîne de production globale de richesses, mais à un très bas niveau. Tout ce qui est matière à haute plus value, l’innovation, la propriété intellectuelle, et qui doit être source de croissance pour les décennies à venir, se trouve en dehors de nos frontières. »
L’objectif du plan Morawiecki était d’éviter ce que les économistes polonais appellent le « piège du revenu intermédiaire »
Ce constat n’a rien de nouveau. Il était déjà au cœur de la première législature du parti ultraconservateur. En 2016, Mateusz Morawiecki, le ministre de l’économie et des finances, devenu depuis premier ministre, présentait sa « stratégie pour un développement responsable », rapidement appelée « plan Morawiecki ». Son objectif était d’éviter ce que les économistes polonais appellent le « piège du revenu intermédiaire », et qui est devenu une véritable hantise sur les bords de la Vistule. Il s’agit de l’impossibilité de rattraper le niveau de développement des Etats les plus riches, pour cause d’incapacité à produire des richesses autrement que par les sources de croissance à faible plus-value. En d’autres termes : éviter le plafond de verre auquel se sont heurtés Espagnols, Portugais ou Grecs, et réussir ce qu’ont pu faire le Japon ou la Corée du Sud.
Des employés du géant américain General Electric bloquent l’entrée principale de l’usine de Belfort, le 10 octobre. SEBASTIEN BOZON / AFP
Le coup de fil a été décisif. Mardi 15 octobre, vers 20 heures, Bruno Le Maire profite d’une suspension de séance lors de l’examen du projet de budget 2020 à l’Assemblée nationale pour appeler le PDG de General Electric (GE), Larry Culp. Le ministre de l’économie veut lui arracher un feu vert pour l’accord informel qu’il a élaboré à Bercy, quelques heures plus tôt, avec l’intersyndicale (CGT, CFE-CGC, SUD) et les dirigeants français du conglomérat américain : sauver 307 emplois sur les 792 postes que GE entend supprimer dans l’activité des turbines de centrales au gaz fabriquées à Belfort et Bourogne (Territoire de Belfort).
Le « boss » donne son assentiment, à condition que les salariés acceptent un plan d’économies de 12 millions d’euros par an. Son contenu reste à négocier, mais il rognera forcément certains acquis (salaires, RTT, primes, heures supplémentaires…). Les salariés seront consultés, lundi 21 octobre, et, s’ils acceptent de négocier sur la base de l’accord, des discussions formelles s’engageront jusqu’à la fin du mois. L’horizon se dégage enfin, quelques jours avant la date d’expiration de la procédure légale de consultation sur le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), justement fixée ce jour-là. En cas de rejet, la direction déposera sa proposition initiale à la direction régionale du travail, avec 111 postes sauvegardés sur 792.
Il a fallu quatre mois de tensions et de manifestations depuis l’annonce, le 28 mai, de la suppression de 792 emplois dans le Territoire de Belfort et de 252 postes en région parisienne. Quatre mois de politique de la chaise vide de la part des syndicats, mais de tractations informelles avec l’équipe de M. Le Maire. Quatre mois de mobilisation des élus de droite et de gauche. Et, pour finir, quelques jours de discussions-marathons sur fond de blocage du site, qui se poursuivait samedi matin.
L’industrie à la peine
Les « GE Belfort » ne sont qu’à moitié surpris, fin mai, par un plan dont l’annonce a été repoussée au lendemain des élections européennes. GE vend quatre fois moins de turbines qu’il y a dix ans, et la menace d’un millier de suppressions d’emplois plane depuis des mois. Guère surpris, mais indignés. Car on est loin des 1 000 embauches promises lors du rachat d’Alstom Power par le géant de Boston, même si les postes supprimés concernent une activité rachetée à Alstom en 1999, et non en 2015.
L’annonce de GE tombe dans un climat où le sentiment général peut se résumer ainsi : « France, ton industrie fout le camp ! »Un mois plus tôt, au sortir de la crise des « gilets jaunes », Emmanuel Macron a annoncé « un pacte productif pour atteindre le plein-emploi en 2025 ». Mais plusieurs sites sont frappés par une menace – ou une décision – de fermeture : l’aciérie Ascoval (Nord), Ford Blanquefort (Gironde), le papetier Arjowiggins (Sarthe), l’usine d’électroménager Whirlpool d’Amiens (Somme)… La décision de GE, qui a annoncé la suppression de 12 500 postes (dont 5 000 en Europe) dans sa branche « Power », est du pire effet. D’autant que ses salariés français ne sont plus protégés par les clauses de l’accord de 2015 sur la reprise d’Alstom.
Fondateur du cabinet Master qui accompagne les organisations dans des démarches et des outils innovants de management de la santé et qualité de vie au travail
Dans une tribune au « Monde », Vincent Baud, expert en management, lance un cri d’alarme sur les conditions de travail des cadres, happés par les tâches numériques.
Publié le 19 octobre 2019 à 00h43Temps de Lecture 4 min.
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« Le temps passé par les cadres en réunion est en inflation constante, il augmenterait de 5 % par an allant de 4 à 8 heures/semaine, et ces chiffres doublent pour les cadres supérieurs ! » Topic / Photononstop
Voici le constat désemparé qu’un cadre me dressait sur le sujet de sa qualité de vie au travail : « Je ne sais pas ce que je ferais de mes journées si je n’avais plus ni courriels ni réunions… »
Pire : 78 % des participants estiment que leur opinion n’y est rarement voire jamais prise en compte. La moitié n’a ni ordre du jour, ni relevé de décisions, faute de temps.
Quant au temps passé devant leur messagerie, il est de plus de cinq heures par jour, et le plus souvent pendant les réunions. Lire et écrire des courriels. Organiser et participer à des réunions. En présence. A distance. Encore et encore.
C’est le fléau qui touche tant de cadres aujourd’hui, perdus dans la jungle d’un agenda qui dirige leur vie, agenda qu’ils ne maîtrisent d’ailleurs plus, le verrou qui consistait pour eux à être les seuls à pouvoir y inscrire l’emploi de leur temps ayant sauté par des invitations auto-inscrites se chevauchant, voire pire, fixées sans leur accord.
Ainsi, une responsable de la qualité de vie au travail (QVT) qui évoquait ce sujet avec moi s’est vu intimer l’ordre de rejoindre séance tenante une conférence qui l’avait désignée organisatrice sans même qu’elle l’ait acceptée. « Nous sommes huit et on t’attend ! »
Une spirale qui touche la santé et la performance
L’agenda des cadres est devenu, comme leurs messageries, un bar ouvert à tous les excès et sollicitations au point que certains y inscrivent, en acte de résistance, de faux rendez-vous pour se préserver quelques instants.
Les cadres sont devenus prisonniers du piège suivant : profiter de tout instant au travail, dont les réunions, pour réduire la charge à emporter à la maison, et travailler à la maison pour réduire la charge qu’ils retrouveront au travail.
Vous êtes inscrit à Pôle emploi. Savez-vous que les règles d’indemnisation du chômage vont évoluer à partir du 1er novembre ? Vous êtes-vous renseigné sur le contenu de cette réforme ? Si oui, que vous inspire-t-elle ? Le gouvernement indique que le nouveau dispositif cherche à encourager le maintien dans un emploi durable : qu’en pensez-vous ? Est-ce de nature à modifier votre comportement dans la recherche d’une activité ? Détaillez-nous votre situation.
Indiquez bien vos coordonnées pour pouvoir être rappelé(e). Ces témoignages pourront être publiés dans le cadre d’un article sur Lemonde.fr.
RÈGLEMENT
En participant à cet appel à témoignages, vous autorisez la publication totale ou partielle de votre contibution sur le site Le Monde.fr, dans le quotidien Le Monde, dans « M, le Magazine du Monde » ou sur tout autre site où la Société éditrice du Monde publie du contenu éditorial (Facebook, Twitter, Digiteka, Instagram, etc.). Tout témoignage contenant des propos contraires à la loi est proscrit et ne sera évidemment pas publié. Une orthographe et une mise en forme soignées sont exigées (pas de textes en lettres capitales, pas d’abréviations ou d’écrits de type « SMS »). Vous devez impérativement préciser la date et le lieu où ont été pris vos documents photographiques ou vidéo et rédiger une légende descriptive. Votre témoignage doit être signé de vos prénom et nom. Les demandes d’anonymat en cas de publication seront examinées par la rédaction au cas par cas. L’intégralité des conditions de dépôt de témoignage est accessible sous le formulaire ci-contre.
Maître de conférences en gestion au Laboratoire gouvernance et contrôle organisationnel/LGCO, université Toulouse-3-Paul-Sabatier
Caroline Aubry, enseignante en gestion du risque, décrit dans une tribune au « Monde » les facteurs qui ont placé cette discipline au cœur de la stratégie des entreprises.
Publié aujourd’hui à 14h00Temps de Lecture 3 min.
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« L’incendie de l’usine Lubrizol, le 26 septembre, n’est pas qu’un risque « traditionnel » d’incendie ; il s’agit d’un risque éthique dans sa dimension de développement durable.» LOU BENOIST / AFP
Tribune. L’actualité récente témoigne de l’élargissement de la nature et de l’ampleur des risques, qui fait aujourd’hui de sa gestion une variable stratégique de la réflexion des entreprises. Les cyber-attaques subies par Airbus ces derniers mois appartiennent à la catégorie des risques nouveaux ; le cyber-risque est d’ailleurs le premier cité par les entreprises dans le baromètre des risques de l’assureur Allianz.
L’incendie de l’usine Lubrizol, le jeudi 26 septembre, n’est pas qu’un risque « traditionnel » d’incendie ; il s’agit d’un risque éthique dans sa dimension de développement durable. La plainte déposée le 26 septembre par la Fédération Internationale pour les droits humains contre BNP Paribas et ses anciens dirigeants, pour complicité de torture, crimes contre l’humanité, génocide, blanchiment et recel au Soudan, est un risque éthique dans sa dimension de gouvernance : respect par l’entreprise des engagements pris, transparence et ouverture aux besoins de l’environnement dans laquelle elle opère, prise en compte des parties prenantes, les actionnaires et tous les groupes ou individus qui peuvent affecter ou être affectés par la réalisation de ses objectifs.
Les entreprises doivent faire face à des risques potentiels plus difficiles à cerner car ils sortent du champ de compétences des experts. Depuis trente ans, ces facteurs les ont conduites à mettre en place une démarche globale de gestion des risques, nommée « Enterprise-Risk-Management » (ERM) par les Anglo-Saxons ; ils ont contribué à la création d’une fonction dédiée à la gestion des risques.
Anxiété collective
L’élargissement du domaine de la gestion des risques s’est amorcé dans les années 1990 avec l’apparition de nouveaux risques issus des changements technologiques. Il s’est poursuivi avec la multiplication de qualificatifs venus en préciser la nature : éthique, environnemental, social, de gouvernance, de réputation, etc.
Est ensuite apparue l’idée d’une perception du risque différente selon les individus ou les niveaux dans l’entreprise. Cette perception est en effet fortement liée aux caractéristiques individuelles de l’acteur, sa personnalité, son histoire, ses préjugés, son exposition au risque…
L’élargissement du domaine de la gestion des risques s’est amorcé dans les années 1990 avec l’apparition de nouveaux risques issus des changements technologiques
Cette subjectivité intervient aussi dans la relation de l’entreprise avec les acteurs de la société civile. Par exemple, l’explosion de l’usine AZF à Toulouse en septembre 2001 a généré en France un état d’anxiété collective, accentué par la vigilance nouvelle des acteurs de la société civile qui ont pris conscience de ces vulnérabilités ; les populations habitant à proximité d’installations classées Seveso ont une perception accrue du risque.
Devant le magasin Casino de La Roseraie, à Angers, dimanche 1er septembre Y T D/Le Monde
Le juge des référés du tribunal de grande instance d’Angers a tranché. L’emploi d’animatrices dans l’hypermarché Géant Casino La Roseraie le dimanche après-midi, à partir de 12 h 30, est illégal. Dans sa décision, rendue publique jeudi 17 octobre, le magistrat condamne ainsi la société marseillaise Evénement, sous son enseigne commerciale Etic, à cesser son activité angevine le dimanche après-midi sous peine de payer 5 000 euros par salarié illégalement employé.
« Je suis époustouflé qu’en France on ne puisse plus travailler », s’étonne Geoffroy de Peretti, patron d’Evénement, qui emploie les quatre animatrices concernées. L’inspection du travail avait constaté lors de plusieurs visites d’observation que celles-ci avaient pour « activité réelle et essentielle la gestion du passage des clients aux caisses automatiques du magasin et la gestion des produits et paniers dans la zone de caisse » depuis l’ouverture polémique du magasin le 25 août.
Lors de l’audience du 3 octobre, qui ne visait d’ailleurs pas directement le groupe Casino, l’avocate de la CFDT, Me Hélène Signoret, avait ajouté : « Le principe du repos dominical est très clair et la volonté de Casino est tout aussi claire : contourner les règles et l’ordre public social. »
L’avocat d’Etic avait affirmé que le rôle des animatrices se bornait à une « campagne promotionnelle pour une application mobile » limitée dans le temps. Me Pierre Arnoux avait ajouté : « Dire qu’elles remplacent les caissières, c’est faux et archifaux. Les caisses automatiques permettent de faire fonctionner le magasin. On peut le regretter, s’en offusquer, avoir un jugement moral mais, aujourd’hui, on fait du droit. Dire que la société Evénement n’a pas le droit de faire travailler ses hôtesses le dimanche après-midi, c’est une hérésie. Si on avait fait cette animation sur le parking du magasin, l’inspection du travail serait-elle venue nous voir ? Je ne le pense pas. »
Les syndicats plutôt satisfaits
Une argumentation que le juge des référés n’avait pas retenue, de même que toutes les exceptions au travail dominical soulevées par l’avocat. Cette décision ne marque pourtant pas un coup d’arrêt à ces ouvertures dominicales. Le groupe Casino, qui a validé l’ouverture des magasins de Gap (Hautes-Alpes) et de Chaumont (Haute-Marne) ce dimanche 13 octobre, répète que « le jugement dans sa globalité ne concerne ni Géant Casino ni l’hypermarché d’Angers. Il ne concerne que la société Etic », comme l’indique une porte-parole du groupe au Courrier de l’Ouest. « Ce dispositif avait été imaginé pour accompagner les premiers dimanches les clients qui ne sont pas habitués aux caisses automatiques ».
Dimanche 20 octobre, l’hypermarché d’Angers – qui enregistre désormais un millier de clients l’après-midi – devrait donc être de nouveau ouvert, mais sans animatrices. Seuls des vigiles veilleront à la sécurité du magasin. Les clients qui rencontreront des problèmes lors du passage en caisse seront invités à appeler un numéro d’assistance.
Malgré cela, les sept organisations syndicales qui s’étaient portées parties civiles dans ce dossier emblématique (elles toucheront chacune 500 euros au titre de leur préjudice moral) sont plutôt satisfaites. Elles demandent à Etic « de ne pas jouer la surenchère et de se conformer à la loi ». Elles enjoignent également à Casino « d’assumer sa responsabilité sociale » en proposant aux quatre animatrices d’Etic « de rejoindre les effectifs du magasin ».
Jeudi soir, M. Peretti, qui emploie également les animatrices dans les magasins de Gap et de Chaumont, ne savait pas encore s’il allait faire appel de cette décision.