L’épidémie de Covid-19 bouscule l’aménagement des bureaux

« Tout en appelant à télétravailler le plus possible, le ministère du travail a publié le 31 août des règles à respecter pour aménager les espaces de travail. »

Devant la Maison de la radio, dans le 16e arrondissement de Paris, Mathias Wargon, le chef des urgences de l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) est bien embêté. Pour entrer dans le bâtiment qui accueille la radio publique, il est obligé d’attraper la poignée de la porte sans avoir pu se désinfecter les mains au préalable. « Ça ne sert à rien de ne pas se serrer les mains pour tous la mettre sur une porte où il n’y a pas de gel hydroalcoolique, ni avant ni après », dit-il quelques minutes plus tard au micro de Léa Salamé et de Nicolas Demorand sur France Inter.

Depuis que les entreprises peuvent de nouveau accueillir leurs salariés et le public, elles ont dû mettre en place un protocole sanitaire pour respecter des conditions d’hygiène qui permettent de limiter la propagation de l’épidémie. Tout en appelant à télétravailler le plus possible, le ministère du travail a publié le 31 août des règles à respecter pour aménager les espaces de travail. Après avoir considérablement modifié notre rapport à la présence au bureau, l’épidémie due au coronavirus change en profondeur notre conception de l’espace en entreprise.

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Pour accéder à son bureau en sortant de l’ascenseur, Christophe Burckart, le directeur général France de Regus, une entreprise de location de bureaux et d’espaces de coworking, doit désormais faire un détour. Son bureau est à quelques mètres, mais un sens de circulation est imposé dans les couloirs. Ce patron doit donc allonger son parcours pour éviter de croiser ses collaborateurs.

Un protocole à signer

Dans les bureaux qu’il loue, tout a été repensé pour limiter au maximum les contacts, et le protocole sanitaire a été certifié par un organisme indépendant. Des panneaux de plexiglas ont été installés entre les bureaux. Dans les salles de réunions, une place sur deux est condamnée autour des tables pour respecter un mètre de distance entre les participants. Le patron de Regus le reconnaît, « le plus dur à faire respecter, c’est la distanciation sociale. Sans s’en rendre compte, on a tendance à ne pas respecter un mètre de distance lorsqu’on discute avec quelqu’un. Il faut alors montrer l’exemple et faire de la pédagogie ».

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Pour avoir plus de légitimité lorsqu’elle reprend un salarié qui ne respecte pas les gestes barrières, Priscilla Marchand, à la tête de Madame Marchand, une PME de savonnerie installée dans l’Aisne, a demandé à ses équipes de signer le protocole. Cette dirigeante a d’ailleurs impliqué ses cinq salariés dans son élaboration en leur demandant de faire des recherches et de proposer le nouvel aménagement de l’espace. « Dans une entreprise à taille humaine, c’est important d’impliquer les salariés. Chacun est différent dans sa manière d’appréhender le danger. L’objectif, c’est que chacun se sente en sécurité », dit-elle.

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Les entreprises veulent inventer une organisation hybride du travail

Le Covid-19 est parmi nous, certes, mais l’activité doit se poursuivre, et même continuer de se développer. En cette rentrée de septembre, toutes les entreprises n’ont pas retrouvé leur effectif complet au bureau. Elles doivent élaborer une nouvelle organisation du travail, tenant compte des incertitudes qui demeurent. Les Rencontres RH, le rendez-vous mensuel de l’actualité du management organisé par Le Monde en partenariat avec Leboncoin, ont tenu leur dixième édition, mardi 15 septembre, aux Jardins Saint-Dominique à Paris pour en débattre.

« Depuis la sortie du confinement, les entreprises font du yoyo. La vérité du lundi n’est pas celle du mardi, ni celle du mercredi. La question est comment sortir du yoyo ? En parlant solutions ? En cherchant des issues différentes ? En écoutant les salariés ? En renforçant le rôle du DRH ? », a interpellé Isabelle Barth, professeure en sciences de gestion à l’université de Strasbourg.

Dans une sorte d’unanimité, des secteurs de l’assurance, de la banque, de la publicité, de l’agroalimentaire, du luxe, de l’action sociale et de la formation professionnelle, la dizaine de DRH présents ont témoigné « d’une période de retour d’expériences ».

« Rites, symbole, gestuelle »

Pour l’assureur Axa, la phase d’écoute des salariés est ouverte jusque fin octobre : « La prise de recul est indispensable. On a demandé à nos équipes ce que l’on peut garder de ce que l’on a vécu, pour faire un bilan de ces derniers mois, nourrir les formations et identifier les rituels d’un mode de travail hybride. On a besoin d’une vie sur site, on a besoin de recharger nos collectifs. Les nouveaux entrants ont besoin de partager une certaine mixité », a expliqué Diane Deperrois, la DRH d’Axa France. « C’est tout ce qui est autour de la transmission qui construit le collectif », souligne Céline Merle-Beral, la DRH groupe Havas. « C’est la fin du 100 % télétravail, affirme Christophe Le Bars, DRH du groupe Cegos. Les rites, le symbole, la gestuelle, c’est aussi la clé de l’organisation de l’entreprise. »

BNP Paribas Asset Management et la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) aussi ont misé sur l’importance du délibératif et pris le pouls des salariés pour préparer la rentrée en mode « hybride » (présentiel et distanciel). « On avait mené des enquêtes pendant le confinement sur la cohésion d’équipe, la communication entre équipe et manageur. Quand tout le monde part en télétravail, revient, puis repart, la question est comment maintenir le lien social ?. On a demandé aux manageurs et aux directeurs généraux de tous les pays quelle devrait être la norme de télétravail, de quels supports ils auraient besoin, et nous avons adressé un questionnaire à l’ensemble des collaborateurs pour mesurer leur rapport au temps, au travail et nourrir la réflexion sur le télétravail. Ce qu’on en fera va dépendre des pays », explique la DRH de BNP Paribas Asset Management Marion Azuelos.

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Plans sociaux : les oppositions ne ménagent pas le gouvernement

Le député La France insoumise, François Ruffin, devant l’usine Bridgestone, à Béthune (Pas-de-Calais) le 21 septembre.

« Complice », « hypocrite », colleur de « rustines »… Les oppositions ne ménagent pas le gouvernement depuis l’annonce par Bridgestone de la fermeture de son usine de pneus de Béthune, dans le Pas-de-Calais. Derrière les 863 salariés retenant leur souffle, derrière le bras de fer entamé avec le géant japonais, derrière les critiques venant de tous bords contre la politique d’Emmanuel Macron pointe une question redoutée : après ceux de Nokia, Auchan ou encore Renault, le plan social de Bridgestone annonce-t-il une interminable série noire risquant de plomber un peu plus les courbes du chômage ?

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C’est ce que craint la droite, pour qui l’horizon n’a aucune raison de s’éclaircir. « Nous ne sommes pas sortis de la phase d’anesthésie, il y a encore du chômage partiel, des prêts garantis non encore utilisés », alerte Eric Woerth, député Les Républicains (LR) de l’Oise et président de la commission des finances. Comprendre : que va-t-il se passer lorsque ces dispositifs ne seront plus là ? Pour le moment, abonde le patron du groupe LR à l’Assemblée, Damien Abad, « nous ne sommes pas encore en crise systémique ». Le gouvernement « fait du système D pour stopper l’hémorragie, met des rustines », s’inquiète celui qui aurait préféré voir les reports de charge se transformer en annulation pure et simple pour sauver les entreprises et les commerces fragilisés par une crise sanitaire qui n’en finit pas.

Pour autant, nombre d’élus LR reconnaissent le bien-fondé de dispositifs pris pendant le confinement et indiquent qu’ils voteront le plan de relance. « On ne peut pas être contre l’injection de 100 milliards d’euros dans l’économie », poursuit M. Abad, tout en s’inquiétant de la dette. « On va être rattrapés par le fait qu’il faudra payer », acquiesce Eric Woerth.

Pour Marine Le Pen, le souvenir de Whirlpool

« Qu’ils arrêtent l’hypocrisie et qu’ils regardent véritablement les conséquences de la politique qu’ils mènent. » Déjà officiellement candidate à la présidentielle de 2022, Marine Le Pen a profité d’un déplacement dans un refuge pour chevaux victimes de mutilations, lundi 21 septembre, pour mener une charge groupée contre le gouvernement comme l’opposition de droite et dénoncer « la violence et la brutalité de l’ultralibéralisme que défendent des gens comme En marche, des gens comme LR ».

Se posant à chaque occasion comme seule alternative face à Emmanuel Macron en 2022, la présidente du Rassemblement national avait placé l’insécurité, mais aussi la crise économique comme axes de campagne de sa rentrée politique opposant au « mondialisme » du chef de l’Etat son « localisme ». Après avoir rencontré une délégation de salariés de Bridgestone à huis clos, vendredi, elle n’a pas manqué, lundi, de faire référence à une autre usine des Hauts-de-France devenue symbole de la désindustrialisation comme de son face-à-face avec Emmanuel Macron : « Ce que je ne voudrais pas, c’est voir justement la même chose qu’avec Whirlpool », a-t-elle déclaré. Dans l’entre-deux-tours de la dernière présidentielle, Marine Le Pen et Emmanuel Macron s’étaient en effet tous deux rendus au chevet des salariés de l’usine d’Amiens, promise à la délocalisation en Pologne, avant que la reprise ne tourne au fiasco.

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Covid-19 : un tiers des radios locales privées ont procédé à des licenciements

Au plus près des territoires chers au premier ministre, Jean Castex, les radios privées locales, régionales, thématiques et généralistes indépendantes tirent le diable par la queue. D’après une enquête menée par le Syndicat des radios indépendantes (Sirti) auprès de ses 170 adhérentes, et révélée mardi 22 septembre, 33 % d’entre elles ont supprimé des emplois depuis le confinement de mars. « Il y a eu quasiment 200 suppressions de postes, sur un nombre total de 2 500 salariés, détaille Alain Liberty, président du Sirti. La plupart relèvent du non-renouvellement des personnels en contrats à durée déterminée d’usage [CDDU, liés aux grilles de programmes qui s’interrompent généralement en juin], alors qu’ils auraient dû l’être dans une période normale. »

Des emplois n’ont par ailleurs pas été créés. « Avec l’appétence toujours plus grande pour l’information de proximité, le nombre de journalistes embauchés dans ces stations avait quasiment doublé en dix ans », ajoute M. Liberty, qui en dénombre 500. « Cette dynamique est cassée. »

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Les radios de moyenne ou de grande taille ont payé un tribut plus lourd que les structures modestes (qui ne comptent parfois que deux ou trois salariés), touchant les fonctions d’antenne, les services administratifs et commerciaux et, dans une moindre mesure, la technique.

Baisse de la publicité

Plus inquiétant, cette page sombre est encore loin d’être tournée. Car, au moment où les radios nationales privées regardent avec soulagement leur chiffre d’affaires publicitaire remonter la pente, après un printemps en forme de toboggan, celui des radios locales privées continue de souffrir. « La publicité locale accuse encore des baisses de 30 % ou 35 % par rapport à la même période l’an dernier », assure Jean-Eric Valli, président du groupe 1981, qui rassemble une dizaine de radios musicales et thématiques (Latina, Oüi FM, Voltage…).

Non seulement les enseignes nationales se contentent de campagnes nationales, se passant de déclinaisons locales, mais les événements culturels locaux ont disparu et les chiffres d’affaires des « petits » commerçants sont souvent encore trop fragiles pour envisager des dépenses en promotion… Or, sans retour à une activité économique soutenue, 79 % des radios indépendantes assurent, dans cette même étude, « qu’elles réduiront leur masse salariale en 2021 ».

Dans ce contexte, les trois quarts de ces radios, qui représentent 9 millions d’auditeurs, un quart du chiffre d’affaires de la radio privée en France et un tiers de ses effectifs (chiffres Sirti) réclament la mise en place d’un plan de relance pour leur secteur. Ainsi que l’exonération de leurs charges sociales. Un fonds de soutien à la diffusion hertzienne FM et DAB + (la radio numérique terrestre, en cours de déploiement) de 30 millions d’euros a d’ores et déjà été débloqué par les pouvoirs publics.

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L’APEC annonce son plan de secours pour les jeunes diplômés

« Le volume d’offres d’emplois ouvertes aux jeunes diplômés de l’enseignement supérieur entre janvier et août 2020 a chuté de 42% par rapport à la période janvier-août 2019, là où les annonces pour les cadres ont baissé de l’ordre de 30%. »

« Les jeunes ne connaissent pas l’APEC, or elle est là pour les aider » : le directeur général de l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), Gilles Gateau, a annoncé mardi 22 septembre le lancement d’un plan à destination des fraîchement diplômés, durement frappés par la crise économique. « Car le gel ou le ralentissement des embauches frappent souvent l’insertion des jeunes diplômés », précise M. Gateau. Baptisé Objectif premier emploi, le plan consistera à aider gratuitement 50 000 d’entre eux d’ici l’été 2021, soit deux fois plus qu’habituellement (22 000 en 2019).

Cette mobilisation souhaite répondre à un constat : 210 000 jeunes diplômés arrivent sur le marché du travail en cette rentrée, et il n’y aura pas d’embauches pour tout le monde. Selon les chiffres de l’APEC, le volume d’offres d’emplois ouvertes aux jeunes diplômés de l’enseignement supérieur entre janvier et août 2020 a chuté de 42 % par rapport à la période janvier-août 2019, là où les annonces pour les cadres ont baissé de l’ordre de 30 %.

« Les jeunes diplômés sont plus armés que ceux qui n’ont pas fait autant d’études, mais ce serait une erreur de croire qu’ils sont épargnés et ne rencontrent pas de difficultés d’insertion », constate Gilles Gateau. Cette inquiétude est confirmée par l’augmentation de 68 % du nombre de jeunes diplômés inscrits à Pôle emploi entre février et juillet 2020.

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Le plan « Objectif premier emploi » souhaite donc limiter la casse. Alors que deux fois plus de jeunes qu’à l’ordinaire se sont tournés vers l’APEC en juillet, l’association compte investir dans l’accompagnement, car les jeunes n’ont pas été préparés à une situation de recherche d’emploi selon Gilles Gateau : « j’ai assisté à pas mal d’entretiens avec des jeunes. Pour un certain nombre d’entre eux, la prise de conscience de la nécessité de se lancer dans ces recherches est particulièrement récente. »

Des ateliers en petit comité

Dans le détail, les bénéficiaires du plan seront accueillis dans le cadre d’ateliers d’une demi-journée, par groupes de douze : pendant quatre heures, un consultant de l’APEC les aidera à identifier leurs priorités et à acquérir une méthodologie de recherche d’emploi. Tous les jeunes sont concernés par ces ateliers. « Il y aura des jeunes en fin de contrat en alternance en master, d’autres qui sortent de l’université sans alternance. On aura des jeunes qui chercheront tout de suite un CDI, d’autres une alternance pour faire un nouveau master… »

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Bridgestone à Béthune : le gouvernement promet de tout faire pour sauver l’emploi

La ministre du travail, Elisabeth Borne, et la ministre déléguée à l’industrie, Agnès Pannier-Runacher, à Béthune, le 21 septembre 2020.

Dépêchées dans le Pas-de-Calais, la ministre du travail, Elisabeth Borne, et la ministre déléguée à l’industrie, Agnès Pannier-Runacher, se sont engagées, lundi 21 septembre, à faire tout leur possible pour préserver l’emploi des salariés du site de Bridgestone de Béthune, dont le fabricant japonais de pneumatiques a annoncé la fermeture la semaine dernière.

« Dans la période actuelle, plus que jamais, le gouvernement se battra pied à pied pour sauver les emplois », a déclaré Elisabeth Borne. « Ce site, c’est des compétences qui sont rares, des compétences industrielles, des emplois qualifiés (…). On ne laissera pas perdre ces compétences », a-t-elle ajouté.

Agnès Pannier-Runacher a annoncé que le gouvernement allait mandater un cabinet de conseil pour « contre-expertiser » l’ensemble des scénarios qui ont été étudiés par Bridgestone. Ce travail, réalisé par le cabinet Accenture, « nous permettra non seulement de regarder ces scénarios, mais également (…) de soumettre des scénarios alternatifs autour de cette technologie du pneu », a-t-elle déclaré à la sortie d’une réunion de crise avec la direction du groupe, des élus locaux et des représentants des salariés. Elle a notamment évoqué « la question du recyclage du pneu, comme étant un élément pouvant mettre de la charge dans l’usine ».

Les ministres, élus et la direction Europe du géant japonais du pneumatique se réuniront à nouveau « dans deux à trois semaines » de manière « aussi physique que possible » en fonction des conditions sanitaires, « pour justement revoir les différents scénarios, qui sont des scénarios alternatifs à une fermeture de site », a poursuivi Mme Pannier-Runacher. « Ce qui nous anime, c’est que les salariés de Bridgestone aient un emploi dans un an, dans deux ans, dans trois ans », a-t-elle assuré.

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« Sauvegarder la compétitivité »

Le fabricant japonais de pneumatiques Bridgestone a annoncé mercredi vouloir entamer des discussions en vue de la fermeture de son usine de Béthune, une décision vivement contestée par le gouvernement français, qui se dit en « désaccord total ».

A l’issue de la réunion de lundi, Bridgestone a déclaré dans un communiqué que le projet de cessation totale d’activité était « la seule option qui permettrait de répondre à la surcapacité de production structurelle de Bridgestone et donc de sauvegarder la compétitivité de ses opérations en Europe ».

« Notre priorité est la recherche active et de manière approfondie de projets alternatifs de reconversion du site avec et sans Bridgestone et de travailler à la revitalisation du territoire », a annoncé un porte-parole à l’agence de presse Reuters. Bridgestone met en avant la faiblesse de la demande et la forte concurrence pour justifier sa décision.

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Un « petit espoir », pour les syndicats

« En France, il y a des lois qui font que quand on veut lancer un PSE [plan de sauvegarde de l’emploi] on doit justifier de difficultés économiques. (…) Je pense que la direction de Bridgestone a bien compris qu’on était déterminés à faire appliquer ces législations protectrices pour les salariés et pour les emplois », a, de son côté, prévenu Mme Borne.

« La direction nous a très expressément dit qu’elle était prête à ouvrir des scénarios alternatifs », a encore déclaré Mme Pannier-Runacher. « Nous serons extrêmement exigeants, notamment sur le respect de la parole donnée », a-t-elle insisté, appelant Bridgestone à se saisir des dispositifs prévus notamment dans le plan de relance. « On n’a jamais eu de moyens aussi considérables que ceux qu’on peut mobiliser aujourd’hui (…) pour accompagner un site industriel qui veut se moderniser », a renchéri Mme Borne, assurant que le gouvernement serait « très exigeant vis-à-vis de l’entreprise pour qu’elle mobilise bien tous ces outils exceptionnels ».

« On connaît cette direction de Bridgestone, comment elle opère. Mais il y a quand même un petit espoir du fait qu’ils acceptent de discuter ; on aurait pu dire : “La porte est fermée, pas de discussion.” Donc, on s’accroche à ça », a réagi Bruno Wable, de la CGT, à l’issue de la réunion de lundi.

L’usine de Béthune, mise en service en 1961 et d’une capacité de production d’environ 17 000 pneus par jour, emploie 863 personnes.

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Le Monde avec AFP et Reuters

Territoire zéro chômeur : « De profondes erreurs de conception, qui vont bien au-delà des calculs erronés »

Tribune. La chronique « Territoire zéro chômeur : pour la généralisation d’un dispositif d’utilité sociale », publiée le 19 septembre dans « Le Monde », plaide pour la généralisation du dispositif d’utilité sociale « Territoires zéro chômeur de longue durée » qui fait l’objet d’un projet de loi actuellement en débat au Parlement, en reprenant à son compte les arguments de ses promoteurs.

Cette initiative crée des entreprises à but d’emploi (EBE) dont la finalité est d’embaucher en CDI des chômeurs de longue durée, rémunérés au smic, afin de répondre à des besoins non satisfaits, car peu rentables. Leurs activités ne doivent pas concurrencer l’emploi existant. L’expérimentation concerne 10 territoires, qui emploient environ 800 personnes. Le projet de loi propose de l’étendre à 50 territoires supplémentaires.

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La chronique soutient tout d’abord que le coût de ce dispositif est somme toute modique, de l’ordre de 6 000 euros annuels par équivalent temps plein. Cette évaluation est étonnante : deux rapports, rédigés par l’inspection générale des finances et l’inspection générale des affaires sociales (pages 28 et 35) d’une part, et un comité scientifique d’autre part, montrent que le coût annuel net d’un emploi créé par ce dispositif s’élève à 25 000 euros et non 6 000 euros.

Donner de véritables emplois avec des perspectives d’avenir

Le texte affirme aussi qu’il faut tenir compte de « la valeur proprement incalculable que représentent la dignité et l’utilité retrouvées » grâce à l’accès à l’emploi des personnes qui en sont durablement exclues. On ne peut qu’être d’accord : la privation d’emploi est une atteinte à la dignité, source de souffrance, dont les effets délétères sur la santé et l’espérance de vie sont bien documentés.

Il n’y a aucun doute sur ce sujet. Il faut donc financer des dispositifs qui accompagnent vers l’emploi. Mais ce n’est pas suffisant. Il faut donner de véritables emplois avec des perspectives d’avenir. Et c’est là que le bât blesse avec cette expérimentation, qui suppose qu’obtenir un emploi rémunéré à vie au Smic est suffisant pour retrouver sa dignité.

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Les études de terrain qui accompagnent le rapport du comité scientifique le montrent clairement. Ainsi, une salariée d’un territoire confie : « Je suis venue pour donner des compétences, (…) personne n’en a rien à péter » « Je ne pensais pas tomber si bas ». Et l’étude note : « La majorité des salariés rencontrés ont évoqué le poids de l’expérience sur leur moral, les désillusions ressenties depuis la concrétisation du projet, le sentiment d’inutilité parfois ou de perte de temps. »

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Faillites d’entreprises : dernière ligne droite avant le tribunal ou sauvetage in extremis

« Les dirigeants nous disent : “Je n’ai plus que quatre mois pour faire mon business. Si je sors des clous, je peux tomber”. » Pour Thierry Millon, directeur des études chez Altares Dun & Bradstreet, spécialiste des restructurations, beaucoup de défaillances vont se jouer dans les semaines qui nous séparent de 2021. Le moratoire de six mois sur les remboursements de crédits accordé par les banques le 15 mars a pris fin, les tribunaux de commerce ont repris leur activité, et l’échéance du bilan de fin d’année se rapproche. De plus, du fait du sursis accordé pendant la crise sanitaire aux entreprises en difficulté, celles qui se sont trouvées en cessation de paiements entre le 13 mars et le 23 août ont jusqu’au 7 octobre pour demander l’ouverture d’une procédure collective (conciliation, redressement ou liquidation). En effet, le délai pour saisir le tribunal en cas de cessation de paiements est de quarante-cinq jours maximum.

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L’affolement, pourtant, ne semble pas s’être emparé des chefs d’entreprise, à en croire les experts qui les accompagnent au quotidien. L’heure est plutôt à tenter de trouver des solutions pour sortir de l’année 2020 la tête haute, sans passer par la case tribunal de commerce. « On attend un tsunami, mais il peut encore être évité, remarque Denis Le Bossé, président du cabinet de recouvrement ARC. Aidées par le PGE [prêt garanti par l’Etat], beaucoup de sociétés ont restructuré, réorganisé, repensé leur modèle économique. » « Quand on a encore un peu de trésorerie, des perspectives sur son marché et peu de passifs, il y a encore des choses à faire, renchérit Michel Gire, associé cofondateur du cabinet d’expertise-comptable GMBA. Avoir une bonne anticipation, une gestion de trésorerie très précise et une stratégie de relance des clients permet d’éviter d’aller vers la liquidation judiciaire. »

Licencier, une « première tentation »

Très peu se sont d’ores et déjà résolu à jeter l’éponge. Frédéric Maillard, expert-comptable associé chez Exco, un cabinet qui accompagne environ 300 clients (PME, TPE, artisans, commerçants, professions libérales…) en témoigne : « Un seul client a déposé le bilan jusqu’à présent, car il est sur une activité véritablement sinistrée. Une partie d’entre eux ont retrouvé une situation quasi normale, d’autres continuent de souffrir mais cherchent l’équilibre du modèle pour pouvoir survivre. Ils réfléchissent à l’évolution de la demande et du marché. En fonction de ce qu’ils auront réussi à faire d’ici à la fin de l’année, ils décideront d’arrêter ou non. »

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« L’expérience du confinement a montré les limites du cadre juridique du télétravail »

Tribune. La pratique du télétravail, qui concernait un quart des salariés en mai selon le ministère du travail, n’a cessé de reculer depuis le déconfinement pour ne concerner plus que 17 % des salariés en juin, puis 10 % en juillet. La question est de savoir si elle ne va pas revenir à la situation antérieure à l’épidémie de Covid-19. En 2017, le télétravail régulier ne concernait que 3 % des salariés. En toute logique, avec le déconfinement, certaines entreprises ont abandonné le télétravail car elles n’étaient pas dotées d’un cadre permettant de structurer cette pratique.

Or, étant donné que le télétravail peut s’accompagner d’effets positifs aussi bien que négatifs, il est important que l’engagement d’une entreprise sur ce sujet soit réfléchi et débattu. C’est pourquoi un accord d’entreprise apparaît particulièrement adapté, d’autant que le cadre légal régit finalement assez peu certains aspects du télétravail. L’expérience du confinement a en effet montré les limites du cadre juridique actuel. Ce constat a entraîné des discussions entre les partenaires sociaux, qui pourraient aboutir à un accord national interprofessionnel (ANI).

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Une fois passée cette étape, la négociation d’entreprise va progresser et le nombre d’accords de télétravail va augmenter de deux manières : de nombreuses entreprises dépourvues d’accord vont en conclure, et celles déjà couvertes par un accord souhaiteront l’adapter et dépasser certaines lacunes révélées par le confinement. Dans cette perspective, notre analyse de 125 accords d’entreprise sur le télétravail, conclus avant l’épidémie de coronavirus, nous permet d’identifier des évolutions souhaitables pour les futurs accords.

Distinguer plusieurs catégories de télétravailleurs

Tout d’abord, les critères d’éligibilité doivent être réévalués à l’aune du confinement. Il s’agit principalement du temps de présence et de l’ancienneté, et, dans une moindre mesure, de critères liés à la profession ou au service. Rarement définis, ces derniers sont laissés à la libre appréciation du manageur. Nous conseillons au contraire de les faire reposer sur des éléments objectifs afin d’assurer une égalité de traitement entre les salariés.

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Les accords devraient également distinguer plusieurs catégories de télétravailleurs, basées sur les notions d’autonomie et de contrôle et intégrant les situations de travail et le descriptif des tâches. La pratique montre que les télétravailleurs parviennent à dégager de l’autonomie dans l’organisation de leur temps de travail alors que les accords ne l’envisagent généralement pas (plus des deux tiers des accords analysés prévoient majoritairement les mêmes horaires qu’au bureau).

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Les cadres sur les réseaux sociaux : « Entre flagornerie individualisée et “lèche-bottes” institutionalisé »

Tribune. Le recours massif aux réseaux sociaux par la plupart des entreprises est aujourd’hui chose commune, mais l’incitation grandissante des salariés à y jouer un rôle actif est relativement récente. Au risque de fracturer, ou de renouveler pour les plus optimistes, la relation employeur-salarié. Une promenade d’investigation sur quelques plates-formes numériques du moment (LinkedIn, réseaux sociaux internes des entreprises, Facebook…) dévoile, pour un individu étranger au monde de l’entreprise, un univers d’employés dévots, solidaires et décontractés, au sein d’espaces de travail à l’iconographie d’hôtellerie vacancière de luxe avec, en parallèle, un monde de « coachs » prêts à porter assistance à leur réussite professionnelle et/ou privée.

Les textes qui agrémentent ces visuels soignés et policés clament, à la quasi-unanimité, l’amour et la fierté que ressentent les salariés à l’égard de leur entreprise. Les images et émoticônes surannées gomment les aspérités d’un néolibéralisme tant décrié et d’un mal-être au travail qui touche, par déduction pourrait-on supposer, les entreprises absentes de ces réseaux sociaux. Impulsés par des start-up pionnières maîtrisant ces nouveaux codes communicationnels, les grands groupes ne sont jamais en reste dès lors qu’il faut « faire jeune » et se rêver agile.

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Une observation attentive des « posts » du réseau professionnel LinkedIn, plate-forme de recrutement mais aussi enseigne de communication des entreprises, révèle une rhétorique et une dialectique uniformisée donnant à voir des salariés prenant soin de ne jamais « tirer la couverture à soi », dans un contexte revendiqué de « bienveillance ». Comme si, par enchantement, les jeux de pouvoirs documentés depuis les années 1970 par les travaux des sociologues Erhard Friedberg et Michel Crozier s’étaient évaporés, et les cadres étaient soudain habités des préceptes de sagesse de la philosophie de Sénèque.

Le succès d’une communication virale

Bien évidemment, il n’en est rien. Un nouveau genre théâtral se fait jour, la comédie « hypocrito-tragique », où le salarié, dans un formidable effort narcissique et schizophrénique, joue le bonheur dans un certain renoncement de son « moi » au risque de se perdre. Plusieurs utilisateurs assidus de LinkedIn nous diront que continuellement, ils se mentent à eux-mêmes pour se conformer à leur cadre professionnel (enquête postée le 21 août 2020 sur la plate-forme LinkedIn : une cinquantaine d’utilisateurs ont réagi à travers des commentaires publics et/ou privés, poursuivis par des interviews plus personnelles).

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