Auteurs, libraires et éditeurs indépendants souhaitent imposer des conditions à Daniel Kretinsky, l’acquéreur pressenti d’Editis
A côté de réels motifs de satisfaction, des interrogations majeures subsistent après la décision de la Commission européenne d’autoriser sous conditions, vendredi 9 juin, l’acquisition de Lagardère (maison mère d’Hachette Livre, le numéro trois mondial de l’édition) par Vivendi. L’avocate spécialisée en droit de la concurrence Isabelle Wekstein, associée de WAN, qui défend les libraires (le Syndicat de la librairie française, celui des distributeurs de loisirs culturels, et une quinzaine de librairies directement, comme Le Divan à Paris, Passages à Lyon…), les organisations d’auteurs (le Conseil permanent des écrivains et la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse) ainsi que les éditeurs indépendants Actes Sud et L’Ecole des loisirs, ne désarme pas.
« Vivendi a été obligé de renoncer à son projet de fusion des groupes Editis [aujourd’hui encore filiale à 100 % du groupe de Vincent Bolloré] et Hachette. Ce danger, le plus grand, a été définitivement écarté, c’est une très bonne chose », affirme d’emblée l’avocate. Parmi les remèdes imposés par Bruxelles pour mettre la main sur Lagardère, Vivendi devra céder 100 % d’Editis (numéro deux français du secteur et maison mère de Nathan, Pocket, Plon, Bouquins…) et 100 % du magazine Gala. « Ce qui montre que nos préoccupations dans la presse people n’étaient pas absurdes », souligne Isabelle Wekstein, pour qui « la cession de Paris Match aurait peut-être eu plus d’impact en termes de concurrence ».
« C’est le résultat d’une mobilisation sans précédent, depuis plus de deux ans », des auteurs, éditeurs et libraires clients de l’avocate, se sont félicités ces derniers, lundi 12 juin. Ils « approuvent le maintien de deux leaders [dans] l’édition – Hachette [maison mère de Grasset, Calmann-Lévy, Fayard, Stock…] et Editis », mais « demeurent inquiets face aux menaces que fait peser sur le marché français la création d’un duopole ».
Eviter des partages d’informations confidentielles
Aux yeux d’Isabelle Wekstein, « la prise de contrôle exclusive du groupe Lagardère par Vivendi aboutit à un renforcement de la position dominante d’Hachette ». Ses clients rappellent que « dans le secteur du livre, l’hyperconcentration et la financiarisation nuisent aux objectifs de diversité, de liberté et d’indépendance de la création » et « accentuent les déséquilibres entre grands groupes multimédias, d’une part, et auteurs, éditeurs indépendants et libraires, d’autre part ».
Ces derniers seront donc « très attentifs à l’évolution du marché ainsi recomposé » ainsi qu’à la candidature du repreneur pressenti d’Editis, le groupe de Daniel Kretinsky (actionnaire indirect du Monde), précisément parce qu’il est devenu le premier actionnaire de la Fnac (avec 25 % du capital).
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