A la Société générale, un cas emblématique de discrimination syndicale

A la Société générale, un cas emblématique de discrimination syndicale

« Ma compréhension était que vous étiez prêt à renoncer à vos activités syndicales pour un poste intéressant. Qu’en est-il exactement ? » « Vous êtes prêt à réduire le champ de vos activités syndicales si le poste proposé l’exige. » Ces mails, envoyés en 2007 et en 2008 par une responsable hiérarchique à Jean-Pierre Lamonnier, cadre à la Société générale, ont notamment permis de prouver la discrimination syndicale dont il a fait l’objet. « Ce sont des pièces très intéressantes, car l’obtention d’une promotion est conditionnée au fait de ne plus être syndicaliste. Cela veut dire qu’on ne peut pas mener les deux en même temps, c’est cela qui fait que la discrimination existe », explique son avocat, Me Xavier Sauvignet.

Elu depuis 2001 du Syndicat national de la banque et du crédit (SNB), principale organisation de salariés dans cette banque, M. Lamonnier, parti à la retraite en 2019, a fait condamner son entreprise en appel, le 19 avril 2023, à lui verser près de 600 000 euros, car il avait été victime de discrimination syndicale durant toutes ces années.

Interdite depuis les lois Auroux de 1982, la discrimination syndicale est inscrite dans le code du travail (articles L.1132-1 et L.2141-5) : l’employeur doit veiller à ce que l’exercice de fonctions représentatives n’influe pas sur le déroulement de la carrière du salarié. Cela concerne l’ensemble de la relation de travail, du recrutement à la rémunération en passant par la formation professionnelle.

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La discrimination syndicale est un phénomène difficile à mesurer, mais concerne près de la moitié (46 %) des personnes syndiquées, qui estiment avoir déjà été discriminées au cours de leur carrière en raison de leur activité syndicale, selon un baromètre du Défenseur des droits et de l’Organisation internationale du travail publié en 2019. En 2021, 5,5 % des saisines du Défenseur des droits concernent des activités syndicales, ce qui en fait le cinquième facteur de discrimination relevé, notamment devant l’âge ou le sexe.

Absence d’évolution

La plupart du temps, ces discriminations se traduisent par une absence d’évolution professionnelle. Pour 51 % des personnes exerçant ou ayant exercé une activité syndicale, cette dernière a représenté un frein dans leur évolution professionnelle (en matière de qualification, d’avancement, de grade…).

C’est justement le cas de Jean-Pierre Lamonnier : depuis la prise de ses mandats syndicaux, cet ancien expert-comptable est resté bloqué au niveau I de la convention collective de l’entreprise (sur une échelle allant des lettres A à L) pendant vingt-deux ans. « Normalement, il faut quatre à cinq ans avant de passer au niveau supérieur, on a retrouvé ce délai moyen dans les bilans sociaux », précise son avocat. En 2016, alors qu’il était âgé de 62 ans, l’âge moyen des collègues de sa catégorie se situait autour de 40 ans.

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LJD

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