A la BBC, coupes budgétaires et crise de la transition numérique

A la BBC, coupes budgétaires et crise de la transition numérique

A Londres, en 2012.

Les bars situés autour du siège de la BBC, à Oxford Circus, dans le centre de Londres, sont en pleine activité en ce moment, multipliant les pots de départ organisés par des journalistes de longue date quittant la corporation. Voilà trois ans que les plans de restructuration se succèdent, et le nombre de salariés a déjà été réduit de 1 800 personnes (portant le total à 17 700, dont 5 500 journalistes). A l’automne 2023, même des programmes phares autrefois intouchables ont été frappés, avec des économies imposées au grand journal du soir, « Newsnight », et à l’émission d’enquêtes « Panorama », l’équivalent de notre « Envoyé spécial ».

Le 26 mars, Tim Davie, le directeur général du média britannique public (télévision, radio et site Internet), a rappelé dans un grand discours la crise financière de son groupe. « Le budget a été réduit de 30 % en termes réels entre 2010 et 2020. »

Pendant cette décennie, les gouvernements conservateurs qui se sont succédé ont imposé soit un gel de la redevance, soit une augmentation inférieure à l’inflation, tout en supprimant des enveloppes spécifiques consacrées notamment au World Service (les programmes à l’international) et à l’aide aux personnes âgées pour payer la redevance. Un plan d’économies de 500 millions de livres sterling (585 millions d’euros) par an est en cours, et M. Davie annonce qu’il faudra y ajouter 200 millions de livres.

« Une approche à courte vue »

En temps normal, une telle réduction budgétaire aurait déjà été douloureuse. Mais elle se déroule alors que le monde de la télévision vit une transformation historique, avec la concurrence des plates-formes de streaming, comme Netflix, et des réseaux sociaux. En 2022, selon l’Ofcom, le régulateur des télécoms du Royaume-Uni, les Britanniques regardaient en moyenne quatre heures et demie de vidéos par jour, dont seulement deux heures de télévision en direct.

Pour les moins de 25 ans, le temps passé devant la télévision a été divisé par trois en une décennie, pour atteindre environ quarante minutes par jour en 2022. Chez les personnes âgées, la tendance à la baisse a également commencé il y a deux ans. « Retirer de l’argent à la BBC pendant cette période était une approche particulièrement à courte vue », critique M. Davie.

Dans ces circonstances, la Corporation fait de la résistance. Elle reste, de loin, le média le plus lu, écouté ou regardé au Royaume-Uni, avec près de 90 % des adultes britanniques qui l’utilisent chaque semaine. A travers le monde, 450 millions de personnes font de même (y compris dans ses déclinaisons en 41 langues étrangères), ce qui en fait la première marque de média anglophone au monde. « Le public britannique passe plus de temps à regarder la BBC et iPlayer [sa plate-forme de vidéo à la demande] que l’ensemble des plates-formes de streaming combinées », souligne M. Davie.

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LJD

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