A Grigny, l’usine Bergams liquidée sur fond de tensions entre salariés

A Grigny, l’usine Bergams liquidée sur fond de tensions entre salariés

Deux manifestantes devant l'usine Bergams de Grigny (Essonne), le 22 septembre 2021.

C’est dans un contexte de tensions et de déchirements rarement vus au sein d’un collectif de salariés que le tribunal de commerce d’Evry-Courcouronnes a décidé, mercredi 17 novembre, la mise en liquidation de l’entreprise Bergams, en cessation de paiements depuis quinze jours. C’était le premier employeur de Grigny (Essonne), l’une des villes les plus pauvres de France.

Des 283 salariés de la société spécialisée dans le « snacking ultra-frais », qui préparaient des salades et des sandwichs triangle pour la SNCF, Monoprix, Servair, Starbucks et pour de nombreux restaurants d’entreprises en région parisienne, une centaine (35 %) étaient en grève depuis deux mois pour dénoncer un accord de performance collective (APC) appliqué depuis janvier.

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Celui-ci a accru le temps de travail et baissé les rémunérations d’une partie des salariés, en particulier sur les chaînes de production. Le seul moyen, selon la direction, de sauver cette société frappée par la crise sanitaire, ses clients ayant sensiblement réduit leurs commandes. Tout juste rentable avant la pandémie de Covid-19, après des années de perte, elle a vu son chiffre d’affaires chuter de 55 % en 2020, et a fini sur un déficit de 8,6 millions d’euros. Ses fonds propres sont négatifs.

L’activité de l’entreprise était quasiment à l’arrêt depuis le premier jour de la contestation, le 14 septembre. Car bien que minoritaires, la plupart des grévistes travaillaient sur les chaînes de production (à 90 % en grève) et à la préparation de commandes. La direction les accuse en outre d’avoir totalement bloqué les livraisons et les expéditions dès le début du mouvement, ce qu’ils contestent. Le titre du communiqué publié par Bergams jeudi est sans détour : pour l’entreprise, la liquidation judiciaire est « la conséquence directe » du blocage de son site de production à Grigny.

Impact sur la feuille de paie

Cinq jours plus tôt, pancarte « blocage = chômage » autour du cou, un front de salariés non-grévistes était venu donner de la voix face aux grévistes réunis devant le tribunal de commerce d’Evry, alors que s’y déroulait l’audience. « C’est à cause des grévistes que la boîte a coulé, pas à cause des patrons », assénait une salariée. « L’APC, ils l’ont signé ! Oui, certains ont perdu du salaire, mais il y a eu un référendum, on a fait un choix. On a décidé ce sacrifice pour garder nos emplois. L’activité était bien repartie, ils ont tout fait capoter ! », lançait une autre. « Vous êtes manipulés par la direction ! Vous croyez qu’on a perdu deux mois de salaire pour voir fermer la boîte ? », rétorquait une gréviste.

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LJD

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