La stratégie d’une entreprise pour réduire son impact environnemental est une information peu lisible à travers la multitude de labels existants, relève le document communiqué samedi 1ᵉʳ février par l’école, qui distingue deux indicateurs.
Brighton Jonasi, routier originaire du Zimbabwe, travaille en Europe sous contrat slovaque, à Survilliers (Val-d’Oise), le 31 janvier 2025. BENJAMIN GIRETTE POUR « LE MONDE »
« J’ai froid, le toit n’est pas bien fermé, donc il y a de l’eau qui tombe. Mon frigo est vide et ne marche plus. Et j’ai toujours peur. » Sous une pluie battante, à une quarantaine de kilomètres au nord de Paris, sur l’aire d’autoroute de Survilliers (Val-d’Oise), Brighton Jonasi n’ose pas sortir de son camion, ce vendredi 31 janvier, et ne peut même plus le démarrer. Deux jours plus tôt, dans la soirée puis dans la nuit du 29 au 30 janvier, quatre hommes dans un van sont venus lui prendre de force la carte qui lui sert à payer l’essence, le coupe-batterie qui permettait d’enclencher le véhicule et la remorque qu’il transportait.
Ils lui ont dit travailler pour son entreprise slovaque, Global Transporte, un sous-traitant du groupe allemand Hegelmann. Ces derniers jours en Europe, une dizaine d’autres conducteurs d’origine du Zimbabwe ont vécu la même expérience traumatisante et trois d’entre eux sont toujours coincés sur des aires des autoroutes françaises.
Ce qui s’apparente à des mesures de représailles fait suite à un début de grève de ces salariés. Le week-end des 25 et 26 janvier, ils ont stoppé leurs camions, revendiquant une amélioration de leurs conditions de travail et une assurance en cas de problème de santé. Venus en Europe avec la promesse d’un salaire de 1 500 euros mensuels, « voire 2 200 avec les bonus » selon Brighton Jonasi, la plupart ne reçoivent qu’entre 600 et 700 euros, depuis octobre.
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Quand le secteur marchand tousse, l’économie sociale et solidaire (ESS) maintient le cap. Ainsi pourrait-on résumer la situation contrastée de l’emploi dans ces deux univers. Dépendant de la conjoncture économique, le premier souffre de la faiblesse de la consommation et du recul de l’investissement et recrute moins. A l’inverse, les embauches dans l’ESS, qui regroupe les associations, les coopératives, les mutuelles, les fondations et les entreprises d’utilité sociale, « découlent de l’ampleur des besoins sociaux qui continuent de croître », analyse Antoine Détourné, délégué général d’ESS France, qui vient de publier sa note de conjoncture lundi 27 janvier.
Son premier enseignement est que ce « tiers-secteur », distinct des administrations et entreprises à but lucratif, poursuit son développement. Il fait vivre aujourd’hui 2,7 millions de salariés, dont 31 257 emplois supplémentaires créés entre le 1er juillet 2023 et le 30 juin 2024, soit une progression de 1,4 %, nettement supérieure à celle du secteur marchand. Et encore, les créations d’emploi mentionnées dans la note de conjoncture ne prennent pas en compte le travail des bénévoles effectué au sein des associations.
Par catégorie d’employeurs, la plus forte hausse des effectifs de l’ESS concerne les fondations, dont l’activité se concentre dans l’action sociale et sanitaire. Les fondations ont recruté 5 537 postes supplémentaires, marquant une hausse de 4,1 % au premier semestre 2024 en glissement annuel. Suivent les mutuelles, qui interviennent elles aussi dans la santé : + 2,7 % sur un an au premier semestre 2024, soit 3 327 emplois supplémentaires. Mais ce sont les associations qui représentent toujours l’essentiel des effectifs : malgré une croissance de seulement 1 %, elles créent 19 055 postes supplémentaires.
Des disparités régionales
Par type d’activité, le solde net de l’emploi entre le deuxième trimestre 2023 et le deuxième trimestre 2024 est particulièrement élevé dans l’hébergement social et médico-social : 11 579 emplois supplémentaires. Un volume qui reflète notamment le vieillissement de la population et une meilleure prise en charge des enfants handicapés ou en difficulté. Vient ensuite le secteur de la santé (8 887 emplois supplémentaires), qui profite d’un effet de rattrapage après le Covid. « La crise sanitaire a fait prendre conscience des besoins de recrutement dans ce secteur qui commencent à être comblés », poursuit Antoine Détourné.
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Au Brésil, une monnaie locale solidaire gérée par une banque communautaire a été créée en 1998 dans une favela du Nordeste. Une initiative positive qui a été progressivement dupliquée dans plus de 150 villes du pays. Dans plusieurs pays africains, des expérimentations sont menées dans le secteur informel pour favoriser l’insertion socioprofessionnelle des plus jeunes ou l’accès à la protection sociale.
En France, le mouvement Habitat et humanisme, qui propose des logements aux personnes en situation de précarité, cherche également à rompre l’isolement de ces populations en développant un modèle de tiers-lieu participatif et solidaire. En Corée du Sud, enfin, de nombreux projets ont été menés ces vingt dernières années, inspirés notamment par le modèle de la coopérative de travailleurs, pour favoriser l’accès à l’emploi de différentes populations (femmes ayant interrompu leur carrière pour élever leurs enfants, travailleurs de régions minières en déclin…).
L’innovation sociale ? C’est une matière vivante, qui se répand aujourd’hui dans le monde entier, expliquent Nadine Richez-Battesti, maîtresse de conférences en sciences économiques à Aix-Marseille Université, et Eric Bidet, maître de conférences en sciences de gestion à l’université du Mans. Dans leur ouvrage, L’innovation sociale. Expérimenter et transformer à partir des territoires (Les Petits Matins), les deux auteurs affichent leur volonté de « sortir d’un européano-centrisme » privilégié dans de nombreux travaux de recherche, et mettent en avant la fertilité de cette démarche, tant dans les pays développés que dans ceux en développement.
Les nouveaux défis
A partir de ces nombreux exemples, leur ouvrage permet de définir, par petites touches, ce qui constitue un processus d’innovation sociale, qui doit avant tout « élaborer des réponses nouvelles à des besoins sociaux peu ou mal satisfaits ». « C’est une innovation du quotidien, qui se déploie de façon horizontale et privilégie l’accès et les usages par rapport à la propriété et la croissance », expliquent les auteurs. Souvent lancée dans des domaines où l’action publique montre ses limites, elle naît d’un processus participatif associant les acteurs concernés (utilisateurs, usagers…) et s’ancre fréquemment dans un territoire.
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Le logo de la Régie autonome des transports parisiens (RATP), sur un wagon de métro à la station Front-Populaire, le 24 janvier 2025. JULIE SEBADELHA / AFP
Le groupe RATP compte recruter plus de 5 500 personnes en Ile-de-France en 2025, dont 3 800 en contrat à durée indéterminée (CDI), afin de « maintenir » l’offre de transport en commun francilien, a annoncé la régie de transports parisiens, mercredi 29 janvier.
Les besoins de l’entreprise concernent des profils « très divers », dont « des techniciens de maintenance », des « agents de sûreté » ou encore « des ingénieurs », a déclaré Marie Cosson, directrice du développement des compétences à la RATP.
Parmi les CDI, la RATP veut notamment recruter 1 600 conducteurs de bus et 600 agents de gares et stations. Pour « répondre aux besoins dans les métiers en tension », le groupe prévoit d’embaucher 420 opérateurs de maintenance, 140 agents de sûreté ou encore 107 contrôleurs, détaille le communiqué.
La maintenance est « primordiale pour le bon fonctionnement » du réseau francilien, insiste François Platel, directeur de l’unité de maintenance des matériels sur pneumatique à la RATP.
Depuis l’arrivée de Jean Castex à la tête de l’organisation, la RATP a lancé des campagnes massives de recrutement qui ont permis à l’entreprise de transporter sans couac majeur les millions de visiteurs pendant les Jeux olympiques de Paris 2024.
Avec cette nouvelle vague d’embauches, la RATP veut poursuivre sur « sa lancée » après le « succès » de l’année 2024, lors de laquelle elle a recruté 3 650 personnes en CDI, signe selon elle de « l’attractivité croissante de l’entreprise ».
Des milliers de recrutements prévus aussi à RATP Dev
Ces recrutements visent également à « relever les défis liés à l’exploitation, la sûreté et la maintenance des infrastructures », notamment dans le cadre du Grand Paris Express, et l’ouverture de la ligne 15 Sud, prévue à l’été 2026, ajoute l’entreprise.
En plus de ces recrutements, la RATP promet qu’elle « proposera au moins » 1 000 contrats d’alternance et 500 contrats d’insertion en 2025.
Filiale de la régie des transports parisiens, pour ses activités en dehors de la région parisienne, RATP Dev prévoit elle aussi de recruter plusieurs milliers de personnes : 3 800 CDI, dont 970 en France (en grande partie à Lyon, selon le groupe), 1 080 aux Etats-Unis, 370 en Italie ou encore 280 en Arabie saoudite.
Emilie Dougnac dans son salon, à Castelmaurou (Haute-Garonne), le 23 janvier 2025. JULIETTE MAS « POUR LE MONDE »
Assise à la table de son salon, Emilie Dougnac tapote nerveusement les touches de son ordinateur portable pour occuper ses mains. Sur la page d’accueil de l’écran, son curriculum vitae s’affiche. Le document, mis à jour, a déjà été envoyé à une centaine d’entreprises. Mais cette secrétaire administrative de 43 ans, diplômée en 2005 d’un brevet de technicien supérieur d’assistante de direction, a reçu dix réponses seulement, toutes négatives. De quoi faire flancher son moral. « Je suis complètement “down”. Je fais une dépression », admet-elle, séchant les larmes qui coulent sur ses joues.
Depuis le 31 décembre 2024, date de fin de son contrat de travail à durée déterminée (CDD) de secrétaire administrative polyvalente à la maison des solidarités Pont-Vieux, à Toulouse, rattachée au conseil départemental de la Haute-Garonne, cette mère de famille est sans emploi : « Les secrétaires ont été les premières à partir. Alors je me suis dit que je n’avais pas de bol et que c’était pour ma pomme. » Comme elle, ils sont 167 à s’être vu notifier, fin 2024, le non-renouvellement de leur contrat par la collectivité présidée par le socialiste Sébastien Vincini.
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S’inquiétant de voir la recherche scientifique faire l’objet d’invectives et de manipulation, trois directeurs d’instituts d’études politiques reviennent, dans une tribune au « Monde », sur la nécessité de placer ces disciplines au service du débat public.
Place du Capitole, à Toulouse, le 25 février 2022. VALENTINE CHAPUIS / AFP
Pascal Mousset, patron de quatre restaurants parisiens, le reconnaît avec un soupir : bien sûr qu’il fait appel, de manière occasionnelle, à des microentrepreneurs, en cuisine ou en salle. « Il y a quelques années, aucun restaurateur ne voulait aller là-dedans, parce que c’est une zone grise. Mais, au vu de la pénurie de personnel, on y est tous obligés », estime le propriétaire de Chez Françoise ou du Petit Marguery.
En cas de pic d’activité, ou d’absence inopinée de salariés le matin, il lui arrive ponctuellement d’utiliser ces applications de mise en relation avec des microentrepreneurs, qui ont fleuri ces dernières années : Brigad, Extracadabra, Onestaff… « Ça prend deux clics, et j’ai 50 candidats, puis une facture qui arrive par e-mail. Si je passe par une boîte d’intérim pour un CDD, c’est une déclaration préalable, un bulletin de salaire, un certificat de travail, une attestation employeur… », explique M. Mousset, par ailleurs président du Groupement national des indépendants Ile-de-France, l’un des gros syndicats patronaux du secteur.
Dans l’hôtellerie et la restauration, le nombre de microentrepreneurs est en croissance continue. Il est passé de 99 000, en 2018, à 150 000, en 2023 (des chiffres qui ne comptent pas les livreurs de repas), selon les données de l’Urssaf, tandis que le chiffre d’affaires global déclaré par ces travailleurs a doublé au cours de cette période. Une goutte d’eau dans un secteur qui compte plus de 1,3 million d’employés, mais qui témoigne de changements culturels en cours dans cet univers.
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Dans le BTP, il est fréquent que des salariés « passent en indépendant », pour réaliser des petits chantiers notamment. « Entre 60 % et 70 % des inscrits en chambre des métiers sont des autoentrepreneurs, on l’accepte, mais on le déplore car cela génère des travailleurs socialement précaires », explique Jean-Claude Rancurel, président des métiers de la couverture et plomberie-chauffage à la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), le syndicat patronal du bâtiment. « On voit des chefs d’entreprise avec un surplus de commandes avoir recours à des autoentrepreneurs, tout simplement car pas mal de salariés s’en vont (…). Ils ne peuvent pas faire autrement, ou alors ils ont eu l’expérience de personnes moins compétentes en intérim. » De mission en mission, la population des travailleurs indépendants investit les entreprises à la place de salariés ou d’intérimaires.
Les plateformes de mise en relation qui ont émergé ces dix dernières années – StaffMe, Yoss, Malt, Upwork, Brigad… –, « se rapprochent d’un marché qui appartient d’ordinaire aux agences d’intérim traditionnelles, notamment vis-à-vis des jeunes », observe Grégoire Leclercq, fondateur de la Fédération nationale des autoentrepreneurs. « Les plateformes approchent le besoin de leurs clients de la même manière que les entreprises de travail temporaire, avec un modèle d’affaires extrêmement dynamique, ce qui est susceptible de poser un problème de concurrence avec l’emploi salarié en général », confirme Isabelle Eynaud-Chevalier, déléguée générale de Prism’emploi, la fédération des professionnels de l’intérim.
Carnet de bureau. L’apprentissage a beau satisfaire les entreprises et près de 1 million d’apprentis, comme le confirme chaque année l’Observatoire de l’alternance, son encadrement est toujours complexe. Les nouvelles règles d’aide qui entreront en vigueur au lendemain de la publication du décret attendue pour la fin du mois de janvier, et dont le projet a été transmis aux partenaires sociaux le 17 janvier, ne dérogent pas à ce constat.
L’aide aux entreprises est de deux natures : tout d’abord, une aide unique, versée chaque mois durant plusieurs années pour le recrutement d’un apprenti sous condition. Existe également une aide exceptionnelle, versée seulement la première année en remplacement de l’aide unique.
La complexité reflète à la fois l’intention de s’ajuster au plus près d’une réalité complexe et de corriger les dérives des réformes successives aux dépens des jeunes. Après le relèvement de l’âge d’accès à l’apprentissage de 25 à 29 ans, introduit par la loi sur l’avenir professionnel de 2018 qui a profondément réformé le système, c’est le dispositif d’aides qui a été révisé en 2020 pour élargir l’éligibilité aux étudiants du supérieur.
C’est ainsi que l’aide exceptionnelle a été instaurée dans le cadre du dispositif « 1 jeune, 1 solution » pour que les entreprises embauchent davantage de jeunes jusqu’au niveau master, malgré la morosité du contexte économique d’alors.
Un effet d’aubaine
A ce niveau de qualification, les grandes entreprises sont souvent réticentes à recruter des débutants. L’aide exceptionnelle les incite à le faire, quitte à créer un effet d’aubaine pour les employeurs tentés d’embaucher à bas prix des jeunes mis en situation de production, alors qu’ils sont venus pour apprendre.
Trois entreprises sur dix se sont tournées vers l’apprentissage après la mise en place de ce dispositif, indique le Baromètre de l’alternance 2024. Le nombre d’apprentis qui préparent un diplôme du supérieur a ainsi quasi triplé entre 2019 (203 846) et 2023 (635 825), selon les chiffres de la direction de l’évaluation, de la perspective et de la performance de l’éducation nationale.
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