Archive dans 2025

A La Riche, près de Tours, la fermeture de l’Intermarché risque de condamner le centre commercial

Les rideaux baissés et les vitrines vidées se succèdent, à mesure que l’on progresse dans l’immense espace vacant. Tandis que la musique résonne dans le vide, des bancs inoccupés attendent désespérément d’accueillir des clients en quête de répit. Voilà longtemps que le centre commercial de La Riche Soleil, situé dans une zone périphérique de La Riche (Indre-et-Loire), près de Tours, n’a pas connu de grand fourmillement de fréquentation, à l’image de l’hypermarché qu’il abrite depuis sa création en 2002.

Les galeries du centre commercial La Riche Soleil, près de Tours (Indre-et-Loire), le 18 mars 2025.

Capable d’accueillir une quarantaine de commerces, la galerie marchande attenante, qui n’a jamais fait le plein, a vu les échoppes se vider peu à peu depuis une dizaine d’années, pour ne plus abriter aujourd’hui que six boutiques − un opticien, deux magasins d’une même marque de vêtements, une pharmacie, un coiffeur et une parfumerie. Dans de grandes difficultés financières depuis plusieurs années, le Géant Casino qui s’y nichait a, lui, connu un changement d’enseigne, fin 2023, après la première vague de cessions de magasins Casino au Groupement Mousquetaires, devenant un Intermarché.

Mais cela n’a pas suffi à donner un nouvel élan à l’hypermarché ou à la galerie commerçante. L’Intermarché fait partie des 30 sur près de 300 ex-Casino rachetés, depuis la fin de 2023, par le Groupement Mousquetaires, dont le groupe a annoncé « envisager la fermeture », début avril. Des magasins jugés « commercialement inexploitables en raison d’un manque d’investissements trop important (…), de taux de charges trop élevés (…) et d’une politique commerciale inadaptée ». Au total, près de 680 emplois sont menacés un peu partout dans l’Hexagone, dont 58 sur le site de La Riche, qui comptabilise, à lui seul, 7,5 millions d’euros de pertes annuelles depuis 2022.

Il vous reste 73.22% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

La moitié de l’effectif du site de ventes de mode BazarChic menacé

Des clients attendent devant l’entrée des Galeries Lafayette, au centre commercial du Prado, à Marseille, le 21 janvier 2025.

Les salariés de BazarChic, le site de « ventes privées » de marques de mode, vivent depuis plusieurs mois dans une « situation de stress maximum » et « un climat de brutalité », selon plusieurs élus (sans étiquette syndicale) du comité social et économique (CSE) qui – signe du niveau de tension actuel – souhaitent préserver leur anonymat.

Cette atmosphère délétère s’est installée depuis que les salariés ont appris en novembre 2024 que leur entreprise allait d’abord fermer. Puis, quelques mois plus tard, lorsqu’ils ont su que la société allait finalement être vendue à un gestionnaire d’actifs par son actionnaire, les Galeries Lafayette. Avec à la clé, un plan social petit par son volume brut (58 personnes sur une centaine de salariés), mais rocambolesque par son histoire, émaillée de tensions et de rebondissements, mettant les nerfs des employés à rude épreuve.

En 2016, le groupe de grands magasins avait racheté l’affaire à ses fondateurs, Liberty Verny et Nathalie Gillier, notamment pour écouler les invendus des anciennes collections des Galeries Lafayette. Doté à cette époque de cinq magasins physiques de déstockage et d’un site spécialisé dans le voyage, en plus de son activité principale, BazarChic, créé en 2006, affichait alors 80 millions d’euros de chiffre d’affaires et comptait 6,4 millions de clients.

Il vous reste 74.1% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Les plans sociaux se multiplient dans les enseignes du commerce

Les galeries du centre commercial La Riche Soleil, près de Tours, le 18 mars 2025.

« Ce fut déjà très dur lorsque nous sommes passés de Casino à Intermarché en mai 2024, car nous étions presque perçus comme des incapables par notre nouvel employeur. Mais on s’est dit : “Allez, c’est pour nos emplois, on va tenir bon.” », raconte Saida Azzedine. Comme cette responsable administrative, les 122 salariés de l’ex-Géant Casino Plan de Campagne sont « sous le choc » après onze mois à « tenir bon ». Le 3 avril, ils ont appris la fermeture définitive de leur hypermarché, situé dans une zone commerciale au nord de Marseille, car « rien n’avait fuité ».

Certes, depuis quelques semaines, l’inquiétude ne cessait de monter chez les salariés. Tous se demandaient pourquoi le magasin n’avait toujours pas été repris par un adhérent du Groupement Mousquetaires (Intermarché, Netto…) et restait encore aux mains de la structure de tête, en portage, alors que la plupart des magasins rachetés à Casino, fin 2023, avaient trouvé preneur. Et trouvaient également très étrange les « difficultés de plus en plus grandes » qu’ils rencontraient pour commander des produits et les injonctions de la direction « d’étaler les produits sur les étagères » pour les rendre moins vides, raconte Mme Azzedine, également déléguée syndicale Force ouvrière (FO) de cet hypermarché et élue au comité social et économique.

Il vous reste 85.98% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Le plan d’investissement dans les compétences est un échec

Les salariés français « enregistrent des scores médiocres dans les enquêtes internationales sur les compétences des actifs (…). Le déficit de compétences pèse directement sur l’emploi et l’activité économique ». Tel était le diagnostic dressé en 2017 par l’Etat dans le rapport de présentation du plan d’investissement dans les compétences (PIC).

Doté de 15 milliards d’euros, ce plan pluriannuel se déclinait sur trois axes : il s’agissait de faciliter l’accès à la formation professionnelle pour les personnes les plus éloignées de l’emploi, de mieux répondre aux besoins de compétences de l’économie, et de transformer le système de formation professionnelle.

Agence France Travail, à Asnières-sur-Seine (Hauts-de-Seine), le 16 avril.

Pour s’assurer de l’efficacité de l’action publique, le PIC se voyait adjoindre un conseil scientifique d’évaluation. Huit ans plus tard, dans son rapport final publié le 10 avril, ce conseil a livré son verdict, qui confirme celui de la Cour des comptes en janvier : le PIC a échoué sur l’essentiel.

Piloté par Marc Gurgand, Roland Rathelot, Carole Tuchszirer, trois chercheurs spécialistes de la formation et du marché du travail, le conseil d’évaluation relativise d’abord l’impact du PIC sur le développement de la formation professionnelle.

Il vous reste 67.88% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Rémy Ponge, sociologue : « En un siècle, les sources de souffrance au travail se sont diversifiées »

Le sociologue Rémy Ponge, maître de conférences à l’institut régional du travail de l’université Aix-Marseille et auteur de l’ouvrage Se tenir debout. Un siècle de luttes contre les souffrances au travail (La Dispute), estime que les actions en justice peuvent être un levier efficace pour la prise en compte des enjeux de santé par l’entreprise.

Dans votre ouvrage, vous mettez en lumière que les souffrances psychiques existaient déjà dans les années 1930. Que recouvraient-elles alors ?

Cette période correspond au développement du capitalisme industriel aux Etats-Unis et en Europe. Elle voit le taylorisme et le fordisme se mettre en place, et avec eux des usines où les ouvriers effectuent des tâches répétitives, avec de fortes cadences et dans des conditions épuisantes. Une nouvelle forme de fatigue, dite « nerveuse » ou « industrielle », touche alors les travailleurs. Elle est d’ordre physique, mais aussi psychique et se traduit par différents symptômes : maux de tête, de ventre, épuisement, abattement… On constate par ailleurs que c’est une fatigue que le repos ne parvient pas à faire disparaître.

On retrouve beaucoup de points communs avec les symptômes décrits aujourd’hui lorsqu’on évoque le burn-out…

La sémantique a évolué, mais on constate en effet des similitudes. Des formes de souffrance demeurent, étroitement liées à des organisations du travail. Le travail à la chaîne existe encore. On pourrait aussi faire un parallèle entre les conditions de travail des salariés des centres d’appels actuels et celles des téléphonistes des PTT qui mettaient en relation les usagers au téléphone dans les années 1950 et 1960. Leur tâche était monotone et demandait beaucoup d’attention. Certaines, alors, faisaient des « crises de nerfs ».

Aujourd’hui comme hier, la pénibilité est bien présente. Une évolution s’est toutefois dessinée avec les décennies : les sources de souffrance ont eu tendance à se diversifier, notamment avec le développement de nouveaux métiers. Des facteurs de risque ont émergé, entre autres le management algorithmique, le management par le chiffre et par objectif ou encore les politiques d’individualisation (à travers les primes, les recrutements, les objectifs donnés…).

Il vous reste 67.77% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

« Le dilemme » : Est-il acceptable de mal travailler quand on est mal payé ?

Christine Noël-Lemaitre, philosophe du travail, est maître de conférences en philosophie à Aix-Marseille Université. Alors, lorsqu’un jour une assistante administrative de l’université lui a tendu sa fiche de paie en lui disant : « Regardez ce que je gagne : 900 euros [elle travaillait à temps partiel]. Qu’est-ce que vous imaginez que j’aie envie de faire pour ce salaire ? », cela lui a donné une nouvelle occasion de réfléchir à la question suivante : peut-on mal faire un travail pour lequel on est mal payé ?

Elle s’est souvenue d’une autre assistante, assurément mal rémunérée elle aussi, qui faisait toujours des pieds et des mains pour aider les étudiants, même ceux qui ne respectaient pas les délais. Faisait-elle le travail pour lequel elle était payée ou davantage ? Ce « cœur à l’ouvrage », qui s’oppose au « minimum syndical », vocable péjoratif censé désigner le seuil en deçà duquel un travailleur tire-au-flanc n’oserait pas descendre, a un autre nom : le surtravail. Soit le supplément de travail non rémunéré, non spécifié dans le contrat, que l’on attend malgré tout des employés.

Il vous reste 84.68% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur : « Une agence indépendante demeure la meilleure garantie pour assurer une égale dignité de traitement aux établissements d’enseignement supérieur et de recherche »

Dans une tribune au « Monde », l’ancien directeur général de l’enseignement supérieur Jean-Marc Monteil estime que la suppression de l’autorité administrative ne ferait qu’accentuer les problèmes qui se posent au sein du monde universitaire. Il appelle à faire évoluer cette structure plutôt qu’à s’en défaire.