Archive dans avril 2024

Assurance-chômage : les grandes étapes d’un durcissement des règles depuis 2017

Après avoir réformé l’assurance-chômage à trois reprises depuis 2017, le président de la République, Emmanuel Macron, a chargé son premier ministre d’étudier un nouveau projet de réforme. Gabriel Attal a annoncé, le 27 mars, « une vraie réforme globale de l’assurance-chômage » pour l’automne. Il compte demander aux partenaires sociaux d’ouvrir de nouvelles négociations sur l’assurance-chômage pour une entrée en vigueur à l’automne.

Le chef de l’Etat poursuit son objectif de parvenir au plein-emploi (un taux de chômage autour des 5 %) d’ici à 2027. Or le taux de chômage a légèrement remonté depuis un an, à 7,5 % de la population active. La France accuse par ailleurs un déficit public de 5,5 % du PIB en 2023 et cherche des moyens de le réduire. Si le gouvernement assure qu’il vise une incitation au travail, et non pas une réforme budgétaire, les syndicats craignent que les chômeurs soient encore stigmatisés et précarisés pour des raisons financières.

Gabriel Attal a déjà esquissé une feuille de route, qui prévoit une réduction « de plusieurs mois » de la durée d’indemnisation (déjà abaissée de vingt-quatre à dix-huit mois lors de la précédente réforme) ; une augmentation de la durée d’affiliation (également allongée ces précédentes années) ; ou encore une baisse du niveau d’indemnisation. Cette dernière hypothèse à « moins [sa] préférence », est toutefois convenu le premier ministre.

Les contours précis de ce durcissement de l’assurance-chômage ne seront connus que dans plusieurs semaines. Mais pour rappeler le contexte de cette nouvelle annonce, Les Décodeurs font le point sur les nombreuses mesures prises depuis 2017.




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Assurance-chômage : le projet de réforme de Gabriel Attal attaqué dans la majorité

Gabriel Attal lors des questions au gouvernement, à l’Assemblée nationale, le 2 avril 2024.

Le projet de réforme de l’assurance-chômage fait tanguer la majorité. Quatre mois après les débats sur la loi immigration qui avaient divisé les élus macronistes, plusieurs députés du camp présidentiel font à nouveau entendre une voix dissonante, cette fois-ci au sujet de la réduction des droits des demandeurs d’emploi annoncée par le premier ministre, Gabriel Attal.

La plupart des critiques viennent d’élus de la majorité classés à l’aile gauche de la majorité. C’est notamment le cas de la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, qui a appelé le gouvernement à temporiser, mardi 2 avril. Rappelant que le gouvernement a plusieurs fois « réformé l’assurance-chômage » et a « déjà réduit la durée d’indemnisation », elle a souligné sur Franceinfo qu’il fallait « évaluer » ces réformes avant d’en envisager une nouvelle. Deux jours plus tôt, l’ex-ministre des transports, Clément Beaune, s’était dit « prudent » face à cette nouvelle réforme, alertant sur le risque de précariser les plus fragiles « si on allait vers des paramètres qui sont trop durs ».

Gabriel Attal a confirmé la préparation d’un nouveau tour de vis pour les chômeurs lors d’un entretien au « 20 heures » de TF1, mercredi 27 mars. Une hypothèse qui est dans les cartons de l’exécutif depuis la fin 2023. Le locataire de Matignon a annoncé qu’« une vraie réforme globale de l’assurance-chômage » serait élaborée d’ici « à l’été », « pour qu’elle puisse entrer en vigueur à l’automne ». Cela serait la quatrième depuis qu’Emmanuel Macron est arrivé à l’Elysée, en 2017.

Tout en indiquant qu’un « document de cadrage » sera envoyé aux partenaires sociaux – normalement chargés de définir les règles d’indemnisation – pour baliser la négociation entre patronat et syndicats, le premier ministre a évoqué les pistes envisagées par l’exécutif : réduction de la durée d’indemnisation, augmentation de la durée d’affiliation (le temps de travail nécessaire pour ouvrir des droits au chômage), ou baisse du montant de l’allocation.

Après les réformes de 2018, 2019 et 2023, « il n’est pas forcément de bonne méthode de réformer aussi rapidement, à nouveau, un point majeur sans qu’on ait pu regarder les effets produits par la précédente réforme », a pointé Yaël Braun-Pivet, mardi.

« Parvenir au plein-emploi »

Conscient des remous provoqués dans les rangs de la majorité par ses déclarations, Gabriel Attal est venu justifier son projet lors de la réunion hebdomadaire du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale, mardi 2 avril au matin. Le chef du gouvernement a ainsi défendu une réforme devant « inciter au travail », sans avoir nécessairement pour but de faire des économies. Une réponse aux critiques du député Renaissance de la Vienne, Sacha Houlié, qui avait jugé, dimanche 31 mars, sur le plateau du Grand Jury RTL-Le Figaro-M6, que la « motivation » de la réforme « n’est pas le retour à l’emploi » mais « une mesure d’économie ». « Est-ce que je pense qu’il faut faire une mesure d’économie sur les chômeurs aujourd’hui ? Je ne le pense pas », a ajouté le président de la commission des lois, figure de l’aile gauche de la majorité.

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A Salers, dans le Cantal, trois générations d’hôteliers racontent soixante ans de clientèle

Lorsque Antoine et Marion Bancarel pénètrent en début de matinée dans le hall de l’Hôtel Le Bailliage à Salers (Cantal), leur marathon ne fait que commencer. Pendant que les hôtes les plus matinaux prennent leur petit déjeuner, Antoine monte contrôler une cheminée dans la chambre 8 et Marion vérifier un volet électrique dans la 12. En reprenant l’établissement en février 2020, ils savaient tous deux qu’ils auraient à régler une multitude de problèmes au quotidien.

De gauche à droite, Charly, 95 ans, et Denise Bancarel, 93 ans. Puis, Marion Bancarel, 32 ans, à côté de Dominique Gouzon, 67 ans, et son mari, Jean-Michel Gouzon, 70 ans, et Antoine Bancarel, 32 ans. Trois générations qui ont dirigé l’Hôtel Le Bailliage, à Salers (Cantal), le 19 mars 2024.

Dans l’entrée, une série de photographies illustre soixante ans d’activité de l’hôtel, transmis sur trois générations. La famille y pose entourée du reste de l’équipe ou de clients plus ou moins célèbres. Denise et Charly Bancarel, les grands-parents d’Antoine, ont fait construire le lieu en 1962, à l’entrée de ce village médiéval situé à 950 mètres d’altitude, qui domine la vallée de la Maronne. A l’époque, elle s’occupe de l’accueil et de la cuisine du restaurant ; lui gère le bar, le PMU, et la station essence installée devant la bâtisse.

Le couple loge à l’arrière de l’hôtel et il n’est pas rare que leurs deux enfants, Jean-Charles et Dominique, traînent au milieu des clients. La vocation naît chez leur fille, Dominique, qui finit par s’associer à l’entreprise de ses parents dans les années 1970, avec son mari, Jean-Michel, qui entreprend alors de se former à la cuisine pour passer derrière les fourneaux. La collaboration entre les deux générations perdure jusqu’en 1999, lorsque Charly et Denise se décident à prendre leur retraite, à presque 70 ans.

Lever le pied n’est pas dans l’ADN de la famille Bancarel. Lorsqu’il se lance avec Denise dans l’hôtellerie, Charly est déjà à la tête d’une société de cars. En parallèle de son activité au Bailliage, il s’occupe donc matin et soir du ramassage scolaire du canton. Son gendre Jean-Michel sera également de la partie, jusqu’à ce que Charly se sépare de l’entreprise de transport quelques années plus tard.

Fermeture imposée

En 2019, lorsque Dominique et Jean-Michel annoncent au détour d’un repas qu’ils envisagent de vendre l’hôtel, l’idée de le reprendre germe chez leur neveu, qui « voulai[t] que Le Bailliage reste dans la famille ». Antoine et Marion, alors âgés de 28 ans, travaillent une saison aux côtés de Dominique et Jean-Michel pour rassurer les banques sur leur capacité à gérer le restaurant.

Lesté d’un emprunt de 1,5 million d’euros, le jeune couple devient propriétaire du Bailliage en février 2020, six semaines avant le premier confinement dû à la pandémie de Covid-19. Une des conditions pour toucher les aides de l’Etat est d’avoir démarré son activité avant le 1er février, Antoine et Marion n’y ont donc pas droit.

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A La Poste, les guichetiers appelés à la grève pour défendre leurs conditions de travail

Une intersyndicale réunissant SUD-PTT, la CGT, FO et la CFTC a appelé les guichetiers de La Poste à la grève, mardi 2 avril, pour défendre leurs conditions de travail. SUD-PTT a même lancé un appel à la grève de tous les 160 000 salariés de l’entreprise. La CFDT, premier syndicat chez les postiers (24,5 % en 2022), ne s’est pas associée au mouvement.

Alors que les guichetiers sont appelés à travailler sur des territoires de plus en plus vastes, l’intersyndicale dénonce « la décision unilatérale de l’employeur d’autoriser des déplacements plus longs sur plusieurs bureaux », a expliqué Alain Pelletingeas, de FO, à l’Agence France-Presse ; « jusqu’à 60 kilomètres », a précisé Pascal Frémont, de SUD-PTT.

Les guichetiers, ou « chargés de clientèle », ont été appelés à se rassembler, notamment devant les différentes directions du groupe. Alain Pelletingeas espère que « 30 à 40 % des personnels concernés » se mobiliseront.

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« Salaires au rabais »

Plus largement, SUD-PTT en appelle à tous les employés de La Poste. « Alors que l’entreprise détenue à 100 % par la puissance publique voit son chiffre d’affaires et sa marge d’exploitation progresser, le personnel de La Poste subit réorganisations, transferts et pressions en tous genres », avait déploré le syndicat dans un communiqué vendredi dernier. A ses yeux, « la gouvernance de La Poste est responsable des salaires au rabais, de la précarité galopante et de la dégradation des conditions de travail et d’accès au service public ».

« Une partie de l’activité est sous-traitée. On a forcément l’image de nos cousins de France Télécom, devenue Orange, où toute l’activité de production a été sous-traitée. On a peur de ça », a avancé Pascal Frémont.

Son syndicat avait rappelé vendredi que La Poste avait été la première entreprise française condamnée, à la fin de 2023, pour manquement à son « devoir de vigilance », en raison des conditions de travail des personnes sans papiers français dans ses filiales. Le groupe a fait appel. La Poste a subi en 2023 une baisse de son bénéfice net de 49 %, à 514 millions d’euros. Le chiffre d’affaires s’est, lui, élevé à 34 milliards d’euros, en hausse de 2,4 %.

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Le Monde avec AFP

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Assurance-chômage : Yaël Braun-Pivet opposée à une réduction de la durée d’indemnisation

La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, prononce un discours lors du congrès du MoDem à Blois, le 24 mars 2024.

La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, invitée sur Franceinfo, a exprimé des réserves mardi 2 avril sur la réduction de la durée d’indemnisation du chômage envisagée par le gouvernement pour faire des économies. Elle rappelle qu’il faut avant tout « évaluer » la réforme précédente.

« Nous avons réformé l’assurance-chômage en 2019, en 2022 et en 2023, nous avons déjà réduit la durée d’indemnisation », soutient Mme Braun-Pivet, qui se place à gauche de la politique menée par le gouvernement de Gabriel Attal. « Attention à la stabilité de notre législation et de nos règles : il ne faut pas toucher des paramètres aussi importants aussi rapidement sans avoir évalué la réforme précédente », a insisté la présidente de l’Assemblée.

« Travailler sur le chômage, c’est beaucoup plus global que simplement se dire qu’en réduisant la durée d’indemnisation, on va remettre les gens sur le marché de l’emploi », a-t-elle tancé, évoquant une « situation malheureusement beaucoup plus complexe ».

« Taxe exceptionnelle »

Celle qui a été élue au perchoir en 2022 contre l’avis du président de la République, Emmanuel Macron, a par ailleurs renouvelé sa demande d’une « taxe exceptionnelle » par une augmentation des taxes sur les superprofits ou sur les superdividendes, pour dégager des recettes supplémentaires alors que le déficit public a atteint 5,5 % en 2023, un record.

« Si nous demandons à nos compatriotes de fournir un effort compte tenu de la situation financière de notre pays, cet effort doit être partagé par tous et doit être équitablement réparti. C’est une question de justice sociale », a-t-elle résumé. Elle a aussi rappelé que si le gouvernement envisageait d’aller au-delà des 10 milliards d’euros d’économies décidées pour 2024 il serait tenu de passer par le Parlement avec un projet de budget rectificatif.

Le premier ministre, Gabriel Attal, avait annoncé la semaine dernière sa volonté de réformer à nouveau l’assurance-chômage en réduisant de « plusieurs mois » la durée d’indemnisation des chômeurs, actuellement de dix-huit mois pour les moins de 53 ans, sans aller en dessous de douze mois.

Pour une telle réforme sur les paramètres de l’assurance-chômage, le gouvernement n’a cependant pas besoin de passer par le Parlement. Il doit saisir les partenaires sociaux d’une négociation, par « une lettre de cadrage », et en cas d’échec de la négociation, il peut reprendre la main par décret.

Le Monde avec AFP

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Coup de frein sur le recrutement des cadres

Le refroidissement du marché du travail se confirme en 2024, y compris chez les cadres, révèle le baromètre des prévisions de recrutement de l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), réalisé du 14 novembre 2023 au 24 janvier 2024 et publié mardi 2 avril.

Les embauches se poursuivront à un niveau élevé, pour cette catégorie d’actifs qui connaît une situation de plein-emploi relativement stable depuis des années, avec 337 000 recrutements de CDI et de CDD d’un an et plus prévus en 2024, contre 330 700 un an auparavant.

Mais la dynamique ralentit nettement, avec une hausse annuelle attendue à + 2 %, contre + 7 % un an auparavant. Un coup de frein qui s’explique par « la prudence des entreprises et la conjoncture », explique Pierre Lamblin, directeur des études à l’APEC. L’année 2023 avait marqué le retour à la normale prépandémique du rythme des recrutements, mais les employeurs, déjà confrontés au manque de candidats, avaient fait des prévisions nettement inférieures à ce qu’ils ont finalement réalisé : 330 700 embauches concrétisées contre 308 800 envisagées. « Encore une année record », souligne Gilles Gateau, le directeur général de l’APEC, qui y voit un espoir pour 2024.

Services à forte valeur ajoutée

L’effet de prudence pourrait de nouveau jouer cette année, renforcé par l’évolution de la situation économique. Le contexte conjoncturel n’est en effet pas étranger au coup de frein annoncé pour 2024 : la croissance est moins favorable à l’emploi et « les entreprises pourraient réduire leurs investissements de 0,4 % », précise Laetitia Niaudeau, la directrice générale adjointe de l’APEC.

Les employeurs doivent plus que jamais faire des choix, clairement orientés par les transitions numérique et environnementale. Le nombre de recrutements prévus pour les services à forte valeur ajoutée (189 200) continue ainsi de progresser (+ 4 %), tandis que le secteur du commerce est fragilisé (− 1 %, à 27 000) et que l’immobilier traverse une crise historique (− 30 %, à 3 400). En 2024, plus d’une embauche sur deux concernera l’informatique, le commercial et la recherche et développement.

Les disparités d’intentions d’embauche se retrouvent dans les régions, selon leurs activités économiques. D’un an à l’autre, les prévisions de recrutement de cadres en Pays de la Loire ne progressent plus que de 4 % (contre 18 % en 2023), en Auvergne-Rhône-Alpes de 3 % (contre 14 %), en Occitanie de 3 % (contre 12 %), et dans le Grand-Est de 1 % (contre 8 %). Mais avec leurs hausses de 4 % et de 3 %, les régions Pays de la Loire et Occitanie maintiennent les plus forts taux de l’année, portées par « la bonne orientation » des activités informatiques et « la bonne tenue » de la filière aéronautique, commente l’APEC.

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L’entreprise de crèches en question

Entreprises. A la suite d’un rapport public de l’inspection générale des affaires sociales, en mars 2023, et de livres rapportant des maltraitances dans les crèches du secteur lucratif, l’Assemblée nationale a constitué une commission d’enquête sur « le modèle économique des crèches et la qualité d’accueil des jeunes enfants ». Celle-ci vient d’interroger les grands groupes du secteur (Babilou, People & Baby, La Maison bleue, Les Petits Chaperons rouges…) sur leurs actionnariats, leurs modèles économiques et leurs politiques de qualité.

Ces témoignages, visibles par tous, retracent des croissances réussies mais qui exigent des formes nouvelles de gouvernance et de contrôle.

Dans les années 2000, l’Etat peine à répondre aux besoins dans ses domaines habituels. Il suscite alors la création d’entreprises de crèches qui bénéficient du financement public des prestations. Les investisseurs seront séduits par leur potentiel de croissance rapide en France et à l’étranger.

20 % des places

Aujourd’hui, ces entreprises détiennent environ 20 % des places (80 000) et ont réalisé l’essentiel de la croissance du secteur. Elles innovent avec les réservations de places pour les entreprises et les organismes, et s’appuient aussi sur un large réseau de crèches, souvent associatives, pour rester près du domicile des enfants. Enfin, leurs actionnaires ne reçoivent pas de dividendes et misent sur la croissance du secteur pour valoriser leurs titres.

Ce modèle suscite plusieurs critiques. Les prestations étant, pour l’essentiel, payées par l’argent public, on demande aux entreprises de mieux justifier de leurs coûts et de leurs marges. On craint aussi que leur rentabilité ne repose sur des conditions de travail dégradées. Pour autant, crèches publiques ou privées doivent se conformer à un grand nombre de normes de qualité et font l’objet de contrôles inopinés par la protection maternelle et infantile.

Aussi, et comme pour les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), personne n’avait prévu l’indignation générale provoquée par le signalement de maltraitances ou la révélation d’indicateurs de gestion contraires à la qualité de l’accueil. Cela venait conforter le soupçon d’un secteur trop financiarisé, autant que les difficultés à contrôler des activités aussi sensibles.

Attractivité et transparence

Pour sortir de ce piège et restaurer la confiance, il faut d’abord une gouvernance propre aux valeurs du métier. Certaines entreprises ont déjà adopté la qualité de société à mission. Elle engage les actionnaires sur ces valeurs, impose un comité de mission, la publication régulière d’un rapport de mission et un audit indépendant. En s’étendant au secteur, cette mutation améliorerait son attractivité et sa transparence.

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Paolo Gentiloni et Nicolas Schmit, commissaires européens : « Trop de travailleurs de l’UE manquent encore de salaire décent, de sécurité de l’emploi ou d’égalité des chances »

Quatre ans se sont écoulés depuis la première vague de l’épidémie de Covid-19, plongeant notre continent dans un cauchemar inimaginable jusqu’alors. La plupart des Européens ont passé les fêtes de Pâques isolés de leurs proches, craignant non seulement pour leur santé, mais aussi pour leurs moyens de subsistance, alors que l’activité économique s’effondrait.

Le marché unique européen a été confronté à une forte fragmentation : les pays les plus riches pouvaient dépenser tout ce qu’il fallait pour protéger leurs travailleurs et leurs entreprises, mais qu’en était-il de ceux qui étaient confrontés à une dette publique élevée ? Les tensions entre le Nord et le Sud, l’héritage amer de la crise de l’euro du début des années 2010 n’étaient pas encore levés : les arguments en faveur de la solidarité européenne étaient clairs, mais il n’était pas facile de les traduire par une action commune.

L’issue est apparue quelques heures seulement avant le week-end de Pâques. Après une vidéoconférence de dix-huit heures, les ministres des finances de l’Union européenne (UE) ont apporté leur soutien à un vaste ensemble de mesures de soutien économique. SURE [acronyme de Support to Mitigate Unemployment Risks in an Emergency, que l’on peut traduire par « soutien pour atténuer les risques de chômage en cas d’urgence »], un programme innovant de 100 milliards d’euros, a permis à la Commission européenne de lever des fonds sur les marchés afin de prêter aux Etats membres à des taux favorables, de financer des dispositifs de chômage partiel offrant des revenus aux travailleurs licenciés en attendant de retrouver leur emploi.

Pour des transitions inclusives

SURE a été mis en place jusqu’à la fin de 2022 et son impact a été remarquable. L’instrument a soutenu environ 31,5 millions de salariés et de travailleurs indépendants et plus de 2,5 millions d’entreprises, principalement des petites et moyennes entreprises (PME), dans les dix-neuf pays de l’UE qui en ont fait la demande. Il a également contribué à ouvrir la voie à NextGenerationEU, le programme de financement de 800 milliards d’euros soutenant désormais les investissements et les réformes dans l’ensemble de l’Union. Tous deux ont joué un rôle essentiel pour faire en sorte que notre économie puisse rapidement sortir du choc dû au Covid-19, évitant ainsi une crise socio-économique encore plus profonde.

Depuis la pandémie, le marché du travail européen a continué d’évoluer. Un taux de chômage historiquement bas masque la pénurie persistante de main-d’œuvre et de compétences. Le modèle européen d’économie sociale de marché a résisté à l’épreuve du temps, mais les transformations économiques et démographiques massives auxquelles nous sommes aujourd’hui confrontés posent un énorme défi.

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Ces salariés rémunérés au smic toute leur carrière : « Le temporaire dure depuis vingt-deux ans »

Un salarié contrôle une machine dans la verrerie d’Arc, à Arques (Pas-de-Calais), le 9 septembre 2022.

En intégrant Phone Régie en 2002 en tant qu’hôtesse d’accueil standardiste en région parisienne, Géraldine (le prénom a été changé), alors âgée de 30 ans, en était persuadée : ce boulot « alimentaire » rémunéré au smic, qui lui permettait d’échapper au chômage, ne serait que « temporaire ». « Mais le temporaire dure depuis vingt-deux ans, et je suis toujours au smic », raconte-t-elle.

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Elle a bien été augmentée « une fois » par sa direction « d’une dizaine d’euros en 2010 », se remémore-t-elle, avant d’être rattrapée par le smic, indexé, lui, sur l’inflation. « A quoi ça sert d’aller batailler auprès de la direction pour avoir une augmentation, si c’est pour être de nouveau au smic quelque temps après ? », s’interroge cette mère de deux enfants, âgés de 10 et 18 ans.

Plus de 3 millions de salariés, soit près d’une personne sur cinq (17,3 % ) dans le secteur privé non agricole, sont payés actuellement au salaire minimum (1 398,69 euros net par mois). Un niveau inédit – la proportion était de près de 12 % en 2021 – atteint en raison, notamment, de la flambée des prix et de la politique d’exonération de charges. Les rémunérations jusqu’à 1,6 fois le smic sont exonérées de cotisations patronales, mais pas au-delà, ce qui n’incite pas les entreprises à revaloriser les fiches de paie. « Augmenter de 100 euros le revenu d’un employé au smic » revient aux entreprises à « débourser 238 euros de plus », résumait, le 30 janvier, à l’Assemblée nationale, le premier ministre, Gabriel Attal.

« Manque de considération »

Des employés, à l’instar de Géraldine, se retrouvent ainsi cantonnés au salaire minimum tout au long de leur vie professionnelle. Dans une étude parue en 2019 sur les trajectoires salariales de salariés au smic entre 1995 et 2015, la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques estimait que 20 % des salariés rémunérés autour du smic l’étaient depuis au moins deux ans.

Ce « phénomène de stagnation » se « concentre sur une partie des salariés qui restent durablement rémunérés » au smic, notamment les femmes et les travailleurs de plus de 50 ans. Et plus le temps passé au smic s’accroît, plus le risque de ne pas voir sa fiche de paie évoluer augmente. Derrière cette absence d’évolution salariale, ces travailleurs au smic, qui occupent le plus souvent un emploi pénible (hôtellerie-restauration, grande distribution, logistique…), souffrent aussi « d’être bloqués à leur poste et de ne plus pouvoir connaître de mobilité ascendante au sein de leur entreprise », relève Lucas Tranchant, maître de conférences en sociologie à l’université Paris-VIII. Et il y a cette réalité moins visible, mais tout aussi lancinante pour ces salariés, du « manque de considération » et de « reconnaissance » qui accentue leur amertume vis-à-vis de leur employeur, les interrogeant sur le sens même de leur travail.

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Les pistes pour « désmicardiser » la France

« Désmicardiser la France » : le premier ministre, Gabriel Attal, en a fait l’un de ses slogans, qu’il évoque à chaque sortie médiatique. Jeudi 28 mars, le gouvernement a même instauré un Haut Conseil des rémunérations, chargé de réfléchir à des mesures pour y parvenir. La tâche sera ardue : le 1er janvier 2023, 17 % des salariés du privé étaient rémunérés au smic (1 766,92 euros brut, pour un temps plein, au 1er janvier 2024), un niveau historiquement élevé.

En 2021, ils n’étaient « que » 12 %. Ce phénomène s’explique avant tout par l’indexation du salaire minimum sur l’inflation : en trois ans, compte tenu de la hausse des prix de 12,4 % sur la période, il a progressé de près de 14,8 %, tandis que les autres salaires augmentaient moins vite (+ 10,9 % pour le salaire horaire de base des employés et ouvriers, selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, Dares), resserrant l’éventail des rémunérations.

Cette « smicardisation », qui alimente le sentiment de déclassement d’une partie des Français, leur désarroi face à la flambée des prix, a aussi des causes structurelles. « La principale raison pour laquelle les salaires n’augmentent pas, c’est quand même la faiblesse de la croissance », rappelle Michaël Zemmour, maître de conférences à Paris-I Panthéon-Sorbonne et membre du Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques. Cette panne des salaires est aussi le fruit des politiques publiques mises en œuvre ces dernières années : on pourrait les remettre en cause. » Revue de détail.

Mieux lisser les exonérations de charges

« On a un système qui fait qu’il n’y a plus beaucoup d’intérêt pour quiconque d’augmenter les salariés qui sont au smic. L’employeur, ça lui coûte très cher, le salarié au smic, il va à la fin gagner moins », a déclaré, en forçant un peu le trait, Gabriel Attal, mercredi 27 mars sur TF1.

Comment en est-on est arrivé là ? Depuis trente ans, les gouvernements de droite comme de gauche ont abaissé le coût du travail sur les catégories les plus modestes, afin de lutter contre le chômage et de soutenir la compétitivité des entreprises. Résultat : le smic est aujourd’hui quasiment exempt de charges. Au-delà, trois systèmes d’exonérations patronales s’empilent : l’« allègement Fillon », ou réduction drastique des cotisations sur les salaires compris entre 1 et 1,6 fois le smic, la baisse sur les cotisations maladie jusqu’à 2,5 smic, et celle sur les cotisations familiales, jusqu’à 3,5 smic. Au total, ces allègements représentent aujourd’hui 73,6 milliards d’euros, selon l’Urssaf.

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