Archive dans juin 2023

Du pareil au même placé en redressement judiciaire, Sergent Major en procédure de sauvegarde

Un magasin de la marque de vêtements pour enfants Du pareil au même, à Paris.

Nouveau coup dur pour le prêt-à-porter : les marques de vêtements pour enfants Du pareil au même (DPAM) et Sergent Major viennent à leur tour allonger la longue liste des enseignes en difficulté récemment placées sous la protection de la justice française. Le groupe, qui possède ces deux enseignes, a annoncé avoir été « impacté » par « les crises sociales, la pandémie de Covid-19, la crise énergétique et l’inflation ».

Comme ses concurrents frappés par cette conjoncture défavorable, DPAM a été placé mercredi 28 juin en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Bobigny, tandis que Sergent Major a été placé en procédure de sauvegarde.

L’enseigne Natalys, autre marque détenue par la holding Générale pour l’enfant (GPE), est pour le moment « épargnée », car, « beaucoup plus petite » que ses sœurs avec ses 10 millions d’euros de chiffre d’affaires, elle ne connaît pas « de problématiques aussi lourdes », a expliqué à l’Agence France-Presse une source proche du dossier.

La holding Générale pour l’enfant, qui emploie 2 500 salariés, a subi un recul de 100 millions d’euros de son chiffre d’affaires sur la période du Covid-19 « en raison de la fermeture des magasins pendant la pandémie », a précisé la même source, selon laquelle le chiffre d’affaires a atteint 275 millions d’euros en 2022. « Le plan de restructuration prévoit une fermeture ou cession de 47 magasins Sergent Major et 87 chez Du pareil au même », tous en France, selon elle.

GPE possède 850 magasins répartis en France, Belgique, Espagne, au Portugal, en Italie, en Allemagne, au Luxembourg, en Slovaquie et en Suisse.

Le groupe a dévoilé son plan de restructuration, incluant notamment un développement de sa stratégie numérique avec pour objectif de réaliser 25 % de ses ventes en ligne « à l’horizon 2027 », fort d’un investissement de 5 millions d’euros. Il envisage également une « extension à l’international sur de nouveaux marchés (Moyen-Orient) et le développement du réseau d’affiliés en France comme en Europe (Grèce) ».

Cocktail détonnant

Camaïeu, Kookaï, Burton of London, Gap France, André, San Marina, Kaporal, Don’t Call Me Jennyfer, désormais DPAM et Sergent Major… Ces marques bien connues du consommateur français ont souffert d’un cocktail détonnant : pandémie, inflation, hausse des coûts de l’énergie, des matières premières, des loyers et des salaires, et concurrence de la seconde main. Il a été fatal pour certaines marques, qui ont été liquidées, comme Camaïeu en septembre 2022, dont le licenciement des 2 100 salariés a fortement marqué les esprits. D’autres sont en redressement judiciaire, comme Kookaï ou Burton of London.

Sans en arriver là, d’autres encore réduisent la voilure, taillant dans les effectifs et fermant des magasins, comme Princesse Tam Tam, Comptoir des cotonniers (groupe Fast Retailing) ou Pimkie. Ces difficultés en série « m’interpellent », a déclaré mercredi soir sur BFM-Business la ministre du commerce, Olivia Grégoire. « Je suis préoccupée par cette crise, mais j’ai à cœur de dire qu’il y a aussi toujours des marques qui s’en sortent bien », a-t-elle poursuivi sans pour autant les citer.

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Certaines des entreprises en difficulté ont par ailleurs du mal à rembourser les prêts garantis par l’Etat (PGE) accordés durant la crise sanitaire. Pour l’habillement, la sortie de la pandémie n’a pas signifié un retour à la situation d’avant le Covid-19 : les ventes sont restées en 2022 près de 10 % inférieures à leur niveau de 2019, selon Gildas Minvielle, directeur de l’observatoire économique de l’Institut français de la mode (IFM).

Pour Olivia Grégoire, « certaines enseignes vivent une crise de surcapacité avec parfois deux magasins dans la même rue piétonne. Ça impose trois choses aux acteurs : s’engager sur le chemin de la seconde main, personnaliser beaucoup plus les approches et renforcer la stratégie » numérique, a-t-elle insisté sur BFM-Business.

« Depuis le début de l’année, c’est 10 000 emplois qui ont disparu », estimait la semaine dernière Yann Rivoallan, président de la Fédération du prêt-à-porter féminin, en marge du défilé du géant chinois de la « fast fashion » SheIn, qu’il accuse de « détruire les emplois français ».

Le Monde avec AFP

Orange tire un trait sur sa banque en ligne

Six ans après sa naissance, Orange Bank vit ses derniers jours. Réuni dans l’après-midi du mercredi 28 juin, et après plusieurs mois de réflexion, le conseil d’administration de l’opérateur télécoms a rendu son verdict : c’est fini pour l’activité de la banque en ligne créée, fin 2017, sous l’impulsion de l’ancien PDG Stéphane Richard. Des négociations exclusives ont été engagées avec BNP Paribas pour reprendre la clientèle, a confirmé Orange. Un comité social et économique d’Orange Bank devait se tenir jeudi 29 juin, en matinée, pour informer les salariés.

A l’image des difficultés d’Orange Bank à se faire une place au sein du groupe, la sortie se fait par la petite porte. Après avoir espéré trouver un repreneur pour l’ensemble de la structure (clients, salariés et informatique), quitte à lui verser une grosse somme d’argent pour couvrir les pertes futures – des discussions ont été menées en ce sens, notamment avec le fonds d’investissement Cerberus –, l’opérateur a dû se résoudre à la solution minimale : ouvrir sa base de clients à BNP Paribas.

Avec cet accord de référencement, la première banque française pourra contacter les clients d’Orange Bank pour leur proposer de transférer leur compte chez elle, probablement avec une prime de bienvenue. Ce schéma avait été retenu par ING lors de la cession de sa branche française à Boursorama. Pendant ce processus, « il n’y aura aucun changement (…) pour les clients », assure Orange.

Lire aussi (2022) : Article réservé à nos abonnés Orange vise l’Europe pour rentabiliser sa banque

Orange Bank dispose d’un peu plus de 1,5 million de clients en France, détenant 1,7 milliard d’euros d’encours dans leurs comptes ordinaires ou d’épargne. Elle a également plusieurs centaines de milliers de clients en Espagne. Un autre accord est en négociation avec BNP Paribas dans ce pays.

Plus de 1 milliard d’euros de pertes

Il reviendra donc à Orange de fermer la société et surtout de reclasser ses 700 salariés environ, répartis sur deux sites, à Montreuil (Seine-Saint-Denis) et à Amiens. Ce qui promet de nouvelles tensions dans le groupe, alors que plusieurs restructurations sont en cours, dans la division pour les entreprises (Orange Business), le réseau de boutiques et certaines fonctions support. L’opérateur s’engage à reclasser en interne l’ensemble du personnel de sa banque.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Chez Orange, un contrat social à l’épreuve de la nouvelle stratégie

En fermant Orange Bank, le groupe fait le calcul que les charges liées à l’arrêt de l’activité seront inférieures aux pertes que l’établissement aurait continué à essuyer au cours des prochaines années. Depuis sa création, la banque en ligne, qui n’a jamais gagné d’argent, a accumulé plus de 1 milliard d’euros de pertes d’exploitation. Orange a dû réinjecter plusieurs dizaines de millions d’euros chaque année pour renforcer les fonds propres. Et a dû financer la remise à niveau de la plate-forme informatique héritée de Groupama Banque, beaucoup trop lourde pour une banque en ligne, surtout face à des néobanques aux structures plus légères.

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Les partenaires sociaux concluent trois accords nationaux en cinq mois

Carton plein pour les partenaires sociaux. Mardi 27 juin, les instances de la CFE-CGC ont décidé de signer l’accord national interprofessionnel sur la branche accidents du travail-maladies professionnelles. La centrale de l’encadrement était la dernière organisation impliquée dans l’élaboration de ce texte à officialiser sa position. Elle se situe sur la même ligne que les trois mouvements patronaux et les quatre autres syndicats qui avaient participé aux travaux – parachevés durant la nuit du 15 au 16 mai.

Une telle unanimité est rare dans ce type d’exercice, la CGT refusant, bien souvent, d’apposer son paraphe même si elle s’implique beaucoup dans la réflexion collective. Cette fois-ci, la confédération dirigée par Sophie Binet a donné son imprimatur car elle estime, tout comme les sept autres signataires, que l’accord en question peut améliorer le système d’indemnisation des victimes de maladies ou d’accidents liés à leur activité professionnelle (moyens accrus en faveur de la prévention, consolidation des pouvoirs dévolus aux représentants des travailleurs et des employeurs, etc.).

Cet accord national interprofessionnel retient également l’attention car il s’ajoute à deux textes du même type, finalisés à quelques semaines d’intervalle. L’un, en date du 10 février, concerne le « partage de la valeur » et promeut des mécanismes (intéressement, participation, etc.) qui visent à étoffer la rémunération des salariés – notamment dans les petites et moyennes entreprises. Il a été entériné par l’ensemble du patronat et par quatre syndicats sur cinq (la CGT ayant dit non).

L’autre « deal », ficelé le 11 avril, entend encourager les bonnes pratiques en matière de transition écologique. Là encore, tous les mouvements d’employeurs l’ont validé, tandis que deux confédérations seulement (CFDT et CFTC) ont fait un choix identique (la CFE-CGC, la CGT et FO optant pour le refus).

Patronat à l’unisson

Les protagonistes se réjouissent, fort logiquement, de cette succession d’accords nationaux interprofessionnels. « Elle met en lumière la vitalité du dialogue social, sur des thèmes choisis par les acteurs en présence ou proposés par l’exécutif mais en lien étroit avec nos demandes », confie Marylise Léon, la nouvelle secrétaire générale de la CFDT. Ce qui compte en premier lieu, d’après elle, « c’est le contenu » : « Je pense notamment au texte sur le partage de la valeur, qui prévoit de véritables avancées pour les personnes employées dans les PME, précise-t-elle. La diversité des sujets abordés montre aussi que les organisations de salariés et d’employeurs peuvent être force de propositions sur des enjeux cruciaux pour les travailleurs. »

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Le quotidien allemand « Bild » réduit ses coûts et mise sur l’intelligence artificielle

A Berlin, le 9 mars 2012.

Que restera-t-il de Bild, le quotidien emblématique du groupe médias conservateur Axel Springer ? Le tabloïd le plus lu d’Allemagne (1,09 million d’exemplaires vendus début 2023), longtemps un organe de presse au pouvoir politique énorme, s’est lancé dans une sévère cure d’amaigrissement. Environ un tiers des 600 emplois devraient disparaître, a annoncé le groupe, certaines fonctions devant être remplacées par des applications… d’intelligence artificielle (IA), dans laquelle le groupe veut investir.

« Les fonctions de rédacteur en chef, de maquettiste, de correcteur, d’éditeur et de rédacteur photos n’existeront plus à l’avenir comme nous les connaissons aujourd’hui », a expliqué la rédaction en chef du groupe dans un courriel envoyé aux salariés le 19 juin.

Sans préciser à quel horizon ces applications d’IA pourront effectivement remplacer ces fonctions, ni quand les robots pourront faire le travail de manière efficace, le journal a déjà annoncé la fermeture de rédactions régionales, passant de dix-huit à douze bureaux, de petits sites, ou la réduction du nombre de rédacteurs en chef.

Une économie de 100 millions d’euros d’ici à 2025

Le plan d’Axel Springer s’inscrit dans un large programme de réduction des coûts et de numérisation au sein des deux titres phares du groupe en Allemagne : le tabloïd Bild et le quotidien plus sérieux Die Welt devront réaliser une économie de 100 millions d’euros d’ici à 2025, avait annoncé le directeur d’Axel Springer, Mathias Döpfner, en février.

Cette annonce sonne comme une remise en cause de la stratégie de développement des deux titres menée ces dernières années. M. Döpfner avait misé sur une croissance de Bild et Die Welt, imaginée numérique, conservatrice et, surtout, rentable. Au prix d’investissements importants, les deux quotidiens historiques du groupe avaient développé une offre multicanal. Le résultat n’a apparemment pas été à la hauteur des attentes. Bild, qui vendait 2,4 millions d’exemplaires par jour fin 2014, n’a pas réussi à enrayer le déclin, malgré la forte hausse des abonnements payants en ligne sur la même période (650 000 fin 2022).

La nouvelle directrice du tabloïd, Marion Horn, tente donc de redresser la rentabilité en réduisant les coûts et en misant sur l’automatisation. Le groupe précise que l’intelligence artificielle ne fera que « soutenir » le travail des journalistes. « Nous voyons dans l’IA générative un grand potentiel pour offrir à nos lecteurs et utilisateurs des produits encore plus attrayants et adaptés à leurs besoins », a déclaré Samir Fadlallah, responsable du développement de l’intelligence artificielle chez Axel Springer, à l’agence Reuters, le 22 juin.

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Quand les DRH parlent de « sens au travail »

Carnet de bureau. Près d’un tiers (29 %) « des Français ne perçoivent ni le sens ni l’utilité de leur emploi », mentionne le rapport « Du sens à l’ouvrage. Comprendre les nouvelles aspirations dans le travail », présenté le 22 juin au siège de Renault et réalisé par Jean-Baptiste Barfety, également rédacteur du rapport Notat-Senard, qui a inspiré la création de la « raison d’être » en entreprise. Depuis le Covid, après la « Great Resignation » des Etats-Unis en 2021, suivie par une forte hausse des démissions en France à partir de 2022, la question du sens revient comme un boomerang se coincer dans la porte des DRH.

« La logique de récompense ne suffit plus et la promesse de bien-être ne convainc pas », poursuit le texte réalisé dans le cadre du « Projet Sens », créé par dix grandes entreprises « désireuses d’étudier le sujet ». Outre Renault, le collectif de leurs directions des ressources humaines regroupe la RATP, la SNCF, le Groupe ADP, AG2R La Mondiale, la MAIF, le Crédit mutuel alliance fédérale, Dassault Systèmes et Orange. Au cœur de leurs préoccupations : « 43 % des actifs envisagent de quitter leur emploi pour un autre qui ait plus de sens dans les deux prochaines années », selon une étude OpinionWay de juin 2022.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Les DRH confrontés au phénomène insidieux du « quiet quitting »

Mais de quel sens parle-t-on ? De récents travaux d’économistes ont extrait la notion de sens d’un contexte impressionniste où l’avaient plongée les très nombreux témoignages qui ont nourri les débats depuis le Covid sur la quête de travail respectueux de l’éthique, de la planète, en cohérence si possible avec les valeurs des salariés. Témoignages certes authentiques mais qui ne reflètent que des cas particuliers.

« Ressenti » et « vécu »

Les deux chercheurs Thomas Coutrot et Coralie Perez, cités dans le rapport, ont ainsi objectivé la question du sens à partir des statistiques sur les enjeux de transformation de soi et du monde (développement des compétences, utilité pour la société). Leurs études ont établi un lien solide entre « sens au travail », conditions qui permettent de faire un travail de qualité et sortie de l’entreprise (abandons de poste, démissions, etc.).

Lire l’analyse de Thomas Coutrot et Coralie Perez pour le projet du Liepp : Article réservé à nos abonnés « Le sens du travail, enjeu majeur de santé publique »

Les DRH et les dirigeants du « Projet Sens » n’ont pas tout à fait la même approche de cette notion. « Nous la définissons comme l’alignement ressenti entre ce qui se passe dans l’entreprise et ce qui est vécu et attendu par le salarié », annonce le rapport Barfety. Il ne s’agit donc plus du travail réel du salarié, susceptible (ou pas) de renforcer ses compétences ou d’améliorer le sort de ses semblables à travers les services ou les produits créés, mais de « ressenti » et de « vécu ».

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La transparence des salaires est un atout-clé pour recruter, mais elle reste délicate à manier

« Dans les offres d’emploi, on voit encore trop souvent les composantes du package de rémunération (50 % de la carte de transport, douze jours de RTT, 60 % de la mutuelle), mais pas le salaire en lui-même. C’est une perte de temps pour tout le monde, estime Nayla Glaise, présidente de l’organisation syndicale Eurocadres. La directive européenne va aider à réduire cette opacité. » Le 24 avril, le Conseil de l’Union européenne a adopté une directive sur la transparence des salaires, à transposer dans le droit français sous trois ans, qui prévoit notamment que les employeurs informent les demandeurs d’emploi du montant de départ ou de la fourchette de rémunération initiale des postes publiés.

Cette directive devrait accélérer une évolution déjà à l’œuvre : entre janvier 2019 et mars 2023, la part d’offres publiées sur le site Indeed mentionnant une rémunération chiffrée a doublé en France, atteignant 49,5 %. Ce sont des professions qui peinent à recruter qui ont connu la plus forte augmentation de la part d’offres « avec salaire » : hôtellerie-restauration, soins à domicile ou encore pharmacie. A contrario, 46 % des salariés français ne répondent pas aux offres d’emploi si le salaire n’est pas indiqué, selon une enquête du cabinet Robert Half menée en avril.

Les entreprises ne s’y trompent pas : afficher un salaire, ou au minimum une fourchette, est un atout-clé pour susciter des candidatures et recruter plus vite. « Quand un candidat entre dans notre processus, il sait très vite à quel salaire exact il peut prétendre, ce qui évite trois semaines de négociation », se réjouit Paul Sauveplane, directeur des ressources humaines (DRH) d’Alan. Cette start-up spécialisée dans la santé, qui compte 525 salariés en France, en Belgique et en Espagne, applique une transparence totale des salaires depuis sa création en 2016. Une grille accessible à tous indique les rémunérations avec deux facteurs : l’expérience professionnelle, et un niveau exprimé en lettre (de A à J) qui objective les compétences.

Inégalités limitées voire supprimées

Chez Lucca, une entreprise de 500 personnes qui propose des logiciels RH, la transparence est également de mise depuis l’origine : un logiciel interne permet de consulter la rémunération de chaque individu. « Il y a une grille, mise à jour tous les six mois en fonction des salaires du marché, détaille Charles de Fréminville, DRH. Ça plaît à tout le monde, beaucoup de candidats viennent pour cela. »

Les deux DRH expliquent aussi que la transparence a permis de limiter, voire de supprimer, les inégalités de salaires entre les femmes et les hommes.

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« Aux Etats-Unis, les projets de loi se multiplient pour faciliter l’emploi des jeunes de moins de 16 ans »

Encore un effet pervers de la pandémie de Covid-19, les projets de loi se multiplient aux Etats-Unis pour faciliter l’emploi des jeunes de moins de 16 ans. Une remise en cause de l’un des grands acquis du New Deal : la loi de 1938, le Fair Labor Standards Act, qui limite la durée du travail des enfants et la nature des tâches qui peuvent leur être demandées. Le phénomène avait commencé avant même la pandémie : depuis 2018, les infractions à la législation sur le travail des enfants ont augmenté de 69 %, selon le ministère du travail américain (DOL). Et la pandémie l’a accentué.

Confrontées à une pénurie de candidats – plus de 2 millions de salariés manquent à l’appel –, les entreprises ne demandent qu’à recruter une main-d’œuvre peu regardante sur les horaires et les salaires : comme les jeunes, et principalement les migrants. Plus de 125 000 mineurs non accompagnés sont arrivés d’Amérique centrale en 2022. Une manne pour l’industrie agroalimentaire, la sous-traitance mécanique, la manutention…

En 2002, le DOL a épinglé 835 entreprises employant illégalement 3 860 mineurs. Les noms de grandes entreprises ont été cités : McDonald’s, Dunkin Donuts ou encore Hyundai. Leurs responsables plaident qu’ils n’y sont pour rien, expliquant que les recrutements sont opérés par leurs franchises ou par des agences de travail intérimaire. En février, le secrétaire au travail, Marty Walsh, a accusé le monde patronal de complaisance coupable. « Tout le monde a une responsabilité, a-t-il sermonné. Le travail des enfants n’est pas un problème du XIXe siècle, mais un problème d’aujourd’hui. »

Le plus important scandale révélé par le ministère concernait 102 enfants, âgés de 13 à 17 ans, employés illégalement par Packers Sanitation Services, une entreprise de nettoyage d’abattoirs, dans treize usines de conditionnement de viande appartenant aux géants de la viande comme Tyson Foods ou Cargill dans huit Etats. Les enfants travaillaient la nuit à nettoyer des machines, à découper les os avec des produits chimiques dangereux et présentaient des brûlures caustiques aux mains. Plusieurs étaient arrivés récemment du Guatemala. Packers Sanitation Services, qui appartient depuis 2018 à la firme d’investissement Blackstone, a été condamné à une amende de 1,5 million de dollars (1,4 million d’euros).

Sans autorisation parentale

Pour contourner la loi de 1938, les industriels comptent sur l’aide du monde politique. Dans les Etats républicains, les bonnes volontés abondent. L’Arkansas, sous la houlette de sa nouvelle gouverneure, l’ancienne porte-parole à la Maison Blanche de Donald Trump Sarah Huckabee Sanders, a été le premier Etat à adopter, en mars, un texte pour faciliter le travail des enfants.

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Les maladies professionnelles des « salariés âgés » ne pénaliseront plus leurs employeurs

Droit social. La loi n° 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2023 portant réforme des retraites (LFSS-R) est l’outil législatif destiné aux questions financières de l’année, mais organise ici une modification durable des paramètres essentiels de prestations de Sécurité sociale.

Mais elle ne porte pas uniquement, comme son nom pourrait le laisser croire, sur les pensions de retraite : elle aborde aussi les règles des cotisations payées par les seuls employeurs au régime d’indemnisation des risques professionnels. On trouve en effet dans le fourre-tout de la LFSS-R un article 5 qui concerne la charge financière d’une maladie professionnelle pour les salariés âgés.

Chaque entreprise paie une cotisation au titre des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), avec un taux variable, fonction de l’effectif de personnes exerçant sous une même autorité et en un certain lieu, du secteur professionnel de l’entité concernée, et de sa sinistralité.

« Sinistralité directe »

Ce paramètre (la « sinistralité »), dit « taux net », reflète la fréquence et la gravité des maladies et accidents survenus : il est calculé soit au niveau national, par agrégation du nombre d’accidents dans les petits établissements d’un même secteur d’activité, soit en fonction des accidents et des maladies professionnels effectivement survenus dans l’établissement – on parle alors de « sinistralité directe ».

Ce « taux net » finance les prestations. Il sanctionne ou récompense le niveau et l’évolution de la sinistralité de l’entreprise. Il a aussi pour but d’inciter l’employeur à adapter l’organisation du travail pour la rendre plus sûre et de prévenir accidents et maladies professionnelles.

S’ajoutent à ce premier facteur quatre majorations uniformes et donc déconnectées de la sinistralité de l’établissement. Elles n’ont donc pas d’effet incitatif à la prévention.

Ainsi, certaines maladies professionnelles ne sont pas imputées au compte AT-MP de l’employeur, mais sont inscrites à un compte spécial, mutualisé entre tous les employeurs, car financé par une de ces majorations forfaitaires, dite « M3 ».

Un compte spécial mutualisé

La réforme de 2023 consiste à affecter les coûts liés aux maladies professionnelles, « dont l’effet est différé dans le temps », à ce compte spécial mutualisé : celles-ci ne seraient donc plus comptabilisées au titre du taux net. Cette mesure est censée favoriser l’emploi de salariés âgés, qui sont nécessairement statistiquement plus frappés par des maladies qu’ils
ont pu contracter dans un emploi précédent ou dont les maladies se révèlent avec l’âge.

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« Chez Disneyland Paris, on est artiste comme on pourrait être expert-comptable, c’est sécurisant » : enquête sur les jeunes recrues de l’empire Mickey

Le soleil cogne sur la tôle grise d’un ensemble de hangars situé en bordure de départementale, à Pantin, en Seine-Saint-Denis. Dans un coin, des danseuses s’échauffent sur le bitume, le tee-shirt floqué d’un numéro. Il n’est pas encore 9 h 30 et quelque 350 jeunes artistes ont déjà répondu présent à l’audition Disney qui commence tout juste. Français comme étrangers, tous espèrent décrocher un rôle dans Le Roi Lion, l’un des spectacles proposés quotidiennement aux visiteurs de Disneyland Paris, à Marne-la-Vallée. Jade, 20 ans, s’y frotte pour la deuxième fois, rêvant de « danser pour des enfants, et de voir les paillettes dans leurs yeux ». D’autres sont plus terre à terre. « J’ai besoin de travailler, je préfère signer avec Disney qu’avec Franprix », estime Jessy, 31 ans, danseur professionnel classique tout juste revenu d’Australie.

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Le parc figure parmi les vingt premiers employeurs d’artistes en France, et représente un vivier de près de 1 500 artistes intermittents, sollicités pour des missions de quelques jours comme pour des contrats de plusieurs mois. Danseurs, comédiens, chanteurs, ou encore circassiens déambulent dans le parc, costumés en Tigrou, Minnie ou Mickey. Ils animent les shows quotidiens et participent à des événements privés organisés pour le compte d’entreprises ou de clients fortunés. En revanche, on ne les retrouve pas aux premières loges du conflit social historique qui secoue actuellement le parc, porté par des salariés qui réclament de meilleures conditions de travail.

Aucun des jeunes interrogés par Le Monde n’a pris part aux manifestations, par méconnaissance et souvent par crainte de se saborder. « Les employeurs d’intermittents ont une liberté contractuelle totale, ils peuvent cesser de les faire travailler sans se justifier. Cette crainte du faux pas est forte dans un grand groupe comme Disney, où les artistes sont interchangeables », contextualise le sociologue Pierre-Michel Menger, spécialiste du travail créateur. D’autant plus quand l’entreprise représente une grande part du marché.

« Un contrat chez Disney permet souvent d’avoir suffisamment de cachets pour devenir intermittent. C’est un luxe pour un débutant. On rejoue le même spectacle six fois par jour, ce n’est pas ce qu’il y a de plus épanouissant. Mais c’est une bonne expérience, dans l’attente d’une meilleure opportunité », raconte Lucas, 22 ans, interprète d’un des personnages principaux du spectacle inspiré de La Reine des neiges. Comme toutes les personnes interrogées par Le Monde, sauf exception, il s’exprime anonymement afin de préserver sa carrière (tous les prénoms ont été modifiés).

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