Archive dans 2022

Inflation : les PME prises en étau entre fournisseurs gourmands et clients mécontents

L’un des espaces de stockage des pièces en métal de Gauthier & Cie, entreprise de fabrication de tringles à rideau depuis 1888, à Gellainville (Eure-et-Loir), le 19 avril 2022.

« Au début, c’est le coton qui a flambé. Le prix de la matière brute a été multiplié par trois en deux ans. Le fil teint, lui, a pris 50 % en un an. Puis le polyamide, puis l’élasthanne, puis les pigments pour teindre les chaussettes, qui ont augmenté de près de 50 % sur le seul mois de mars, car ils viennent d’Europe de l’Est. Le tout avec une explosion des frais de transport. Faire venir un conteneur de coton d’Inde nous coûte sept fois plus cher [qu’en 2021] ! » A la tête de Maison Broussaud, une PME familiale qui fabrique des chaussettes pour plusieurs marques dans le Limousin depuis 1938, Alexandra Broussaud passe désormais une grande partie de son temps à calculer et recalculer ses coûts de revient.

Elle tente de desserrer l’étau dans lequel elle est prise, entre fournisseurs gourmands et clients mécontents. « Les premiers mois, on a essayé de ne pas répercuter cette hausse, en mangeant sur nos marges. Mais c’est intenable. La pérennité de l’entreprise est en jeu. Mes clients me disent qu’ils ne peuvent plus accepter d’augmentation de prix. Ils ne peuvent pas vendre une paire de chaussettes plus de 14 ou 15 euros. Ça ne passe plus. »

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Dans un tout autre secteur d’activité, Aurore Lebon doit se colleter avec les mêmes difficultés. « Tous les matériaux sont concernés : le laiton, qui n’est filé que dans deux pays d’Europe, l’Italie et l’Allemagne, a grimpé de 20 % environ depuis septembre [2021]. Tout comme les peintures. On manque de métaux, de composants électroniques pour fabriquer les moteurs de nos stores », explique la présidente de Gauthier & Cie, une entreprise artisanale installée près de Chartres, qui fabrique des tringles et stores haut de gamme.

Morvan Le Doze, dans l’atelier de Gauthier et compagnie, à Gellainville (Eure-et-Loir), le 19 avril 2022.

L’inflation ne ronge pas seulement le pouvoir d’achat des ménages, elle met aussi des milliers de TPE ou de PME dans une situation délicate. Pas besoin d’importer des matières premières, d’utiliser des machines-outils sophistiquées ou des métaux rares pour être touché. La flambée de l’énergie frappe toutes les entreprises, même dans le domaine des services à la personne.

« Négociations parfois très âpres »

A Creutzwald, en Moselle, Ludovic Faroult exploite une petite salle de sport dans le centre-ville. « La facture d’électricité pour chauffer et éclairer la salle, qui est ouverte sept jours sur sept, de 6 heures à 23 heures, a grimpé de 30 % depuis la fin 2021. Impossible de jouer sur le prix de nos abonnements, alors que nous sommes déjà dans une situation financière très délicate, avec trois concurrents dans la commune. Et nous venons d’apprendre qu’une nouvelle salle va ouvrir ! »

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Les horaires « atypiques » concernent désormais plus les femmes que les hommes, notamment parmi les moins qualifiés

Travailler avant 7 heures le matin, après 20 heures le soir, la nuit ou bien le week-end… Ces horaires dits « atypiques » concernaient 36 % des salariés en France en 2019, selon une étude publiée mercredi 27 avril par l’Institut national d’études démographiques (INED). Une proportion « massive », selon Anne Lambert, sociologue et autrice de cette étude, interrogée mercredi sur France Inter. Le chiffre est stable sur la dernière décennie, selon le rapport de l’INED, mais en augmentation sur vingt ans, notamment en raison de l’ubérisation de l’économie et du développement du travail le samedi et le dimanche.

Il cache surtout des réalités divergentes entre les niveaux de qualification, et entre les sexes. Selon l’un des principaux enseignements de cette étude, les femmes sont désormais proportionnellement plus nombreuses que les hommes à travailler avec des horaires atypiques (37 % contre 35 %). Parmi elles, les moins qualifiées sont les plus concernées et celles dont l’exposition aux horaires atypiques a le plus augmenté. Les cadres, à l’inverse, connaissent une « relative normalisation de leurs horaires de travail », mais doivent toujours composer avec des horaires « imprévisibles et variables ».

« La part des femmes cadres en horaires atypiques diminue de 23 % entre 2013 et 2019 tandis qu’elle augmente de 11 % pour les ouvrières non qualifiées. Chez les hommes, la polarisation sociale est moins marquée. La part des cadres en horaires atypiques diminue de 14 % tandis que celle des ouvriers non qualifiés stagne », constate l’étude, réalisée à partir des enquêtes « Conditions de travail » de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques.

Les femmes travaillent davantage le week-end

L’étude explique :

« D’un côté, les politiques de conciliation du travail et de la famille dans les grandes entreprises ont pu contribuer à améliorer les conditions de travail des plus qualifiées (…). De l’autre, les femmes peu qualifiées sont surreprésentées dans les métiers du commerce où le travail dominical a progressé (vendeuse, agent de nettoyage…) ainsi que dans les métiers des services à la personne (aide-soignante, aide à domicile, aide ménagère), où les horaires atypiques sont structurels. »

« Toutefois, tandis que le travail du soir et de nuit a légèrement reculé entre 2013 et 2019, le travail du samedi, du dimanche et du matin (de 5 heures à 7 heures) a augmenté pour certaines catégories de salariés », selon l’étude. Les auteurs y voient une conséquence des lois qui ont étendu le recours dérogatoire au travail dominical et favorisé la modulation du temps de travail.

Là encore, les différences sont marquées entre les sexes. Les femmes travaillent plus souvent le samedi et le dimanche tandis que les hommes restent proportionnellement plus nombreux à travailler tôt le matin, le soir et surtout la nuit. Leur exposition aux horaires atypiques tend cependant à se réduire.

Cumul des contraintes

Parmi ces salariés soumis à des horaires atypiques, nombreux sont ceux qui cumulent d’autres contraintes : des horaires variables d’un jour sur l’autre pour 35 % d’entre eux, des journées discontinues, avec des interruptions de travail d’au moins trois heures (9 %) ou encore des horaires connus au maximum la veille (12 %). L’association entre les horaires atypiques et le sexe varie à la fois selon la catégorie socioprofessionnelle et selon le secteur d’activité, note également le rapport de l’INED. « Les ouvrières non qualifiées travaillent fréquemment comme agentes d’entretien tandis que les hommes sont plus souvent manœuvres dans le BTP, où les heures diurnes et en semaine sont plus fréquentes », cite en exemple l’étude.

Là encore, les femmes peu qualifiées sont particulièrement concernées. Les ouvrières et employées non qualifiées font ainsi plus souvent face à des journées discontinues et des horaires imprévisibles. Selon l’étude, ce groupe des « petits temps fragmentés et horaires imprévisibles » rassemble 18 % des salariés.

L’étude ne permet cependant pas de savoir si ces horaires atypiques sont le fruit d’un choix des salariés ou d’une contrainte. Sur France Inter, Anne Lambert a évoqué une proportion de deux tiers des salariés qui y seraient contraints. Parmi le tiers des personnes qui en font le choix, la sociologue estime qu’il s’agit majoritairement de femmes avec de très jeunes enfants.

Le Monde avec AFP

Les invisibles « élections professionnelles des travailleurs indépendants des plates-formes »

« Les premières élections de représentativité des travailleurs indépendants utilisant des plates-formes de mise en relation se tiendront du 9 au 16 mai 2022 », selon le site de l’Autorité des relations sociales des plates-formes d’emploi (ARPE), consulté le 22 avril. Qui le sait ? Qui en parle ?

Sur un sujet qui concerne des dizaines de milliers de livreurs d’un secteur qui pose nombre de questions sociales, environnementales, économiques et en ces temps éminemment politiques, il y a étonnamment peu de débats publics. Les réseaux sociaux, les médias font un bruit minimal sur ces élections. Elles sont pourtant d’un type particulier, les premières, à notre connaissance, pour lesquelles les votants peuvent choisir d’être représentés soit par une organisation syndicale, soit par une organisation patronale. Et elles sont riches de transformations futures du métier de livreur des plates-formes.

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Nous savons maintenant qui se présentera au vote – six organisations syndicales (CFTC, CGT, CNT-SO, SUD-Commerces, FO et UNSA), deux organisations professionnelles (Fédération nationale des microentrepreneurs et Fédération nationale des transports routiers/FNTR) ainsi que Union-Indépendants –, mais les informations sur le corps électoral sont rares.

Selon les articles L. 7341-1 et L. 7342-8 du code du travail, sont concernés les travailleurs indépendants recourant à une ou plusieurs plates-formes de mise en relation par voie électronique pour l’exercice de leur activité professionnelle (livraison et courses VTC, au total plus de 100 000 personnes). Mais combien de votants ? Combien par villes ? Qui sont-ils ? Ni les médias, ni l’ARPE, ni les organisations représentatives ne nous le disent. Il y a un vide de discussion.

Très peu de femmes

La bonne nouvelle, c’est que les livreurs, eux, sont au courant, en tout cas une bonne partie d’entre eux. Selon une enquête réalisée par la chaire Logistics City/6t auprès de cinq cents livreurs dans le nord et l’est de Paris, du 9 au 18 mars, 57 % des livreurs exerçant à Paris se déclarent informés de la tenue des élections et 34 % d’entre eux sont sûrs de vouloir y participer (47 % sont sûrs de ne pas y participer et 19 % hésitent).

Ces taux, y compris pour les intentions de vote, sont d’ailleurs remarquables tant on qualifie souvent la génération des livreurs du numérique de passive ou individualiste. Enquêter sur ces nouveaux travailleurs est riche d’enseignements. Les livreurs des plates-formes sont divers et ont des vues multiples sur leur métier même si des traits de leur situation de travail convergent.

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La bonne santé de l’emploi cadre ralentie par le conflit en Ukraine

Gilles Gateau, directeur général de l’APEC.

Une dynamique qui se maintient, non loin du niveau d’avant-pandémie, mais qui fléchit depuis l’irruption de la guerre en Ukraine. L’Association pour l’emploi des cadres (APEC) a fait le bilan de ce début d’année, et publie son baromètre pour le deuxième trimestre, ce mercredi 27 avril, ainsi qu’une version révisée de ses prévisions de recrutement de cadres 2022.

Début avril, l’organisme avait annoncé le recrutement de 269 100 cadres en CDI ou en CDD d’un an et plus en France en 2021, soit 18 % de plus qu’en 2020 (228 700). « 2021 fut l’année du rebond pour l’emploi cadre, avec une forte dynamique dans beaucoup de secteurs, fonctions et territoires », rappelle le président de l’APEC, Gilles Gateau. Après sondage de son « panel », un échantillon représentatif composé de 8 000 entreprises, l’APEC prévoyait en janvier une accentuation de cette dynamique, avec 289 300 recrutements de cadres attendus sur 2022 (+ 8 % par rapport à 2021).

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Pourtant, « alors que l’année 2022 semblait prendre le même chemin, les impacts de la guerre en Ukraine viennent infléchir légèrement nos prévisions de recrutements de cadres », ajoute M. Gateau. En effet, après une analyse sectorielle réalisée en mars 2022, prenant en compte les premiers impacts de la guerre en Ukraine et la mise en forme de la dernière vague de son enquête trimestrielle (auprès de 1 000 entreprises et 2 000 cadres), l’organisme a revu légèrement ses chiffres à la baisse : 282 000 embauches sont attendues (seulement 5 % de plus qu’en 2021, et un niveau égal à 2019).

La confiance des entreprises affectée

Comme en 2021, des disparités persisteraient selon les filières : l’ingénierie-R & D, les services informatiques et le conseil, tous en progression par rapport à 2019, représenteraient à eux trois 45 % des recrutements de cadres en 2022, tandis que le secteur hôtellerie-restauration-loisirs (– 25 % par rapport à 2019), l’industrie automobile-aéronautique (– 21 %) ou la communication-médias (– 21 %) peineraient encore à relever la tête.

L’analyse effective des offres d’emploi cadre publiées sur apec.fr au premier trimestre 2022, bien plus nombreuses qu’en 2021 (+ 16 % par rapport au quatrième trimestre) révèle les mêmes tendances : malgré le variant Omicron et des difficultés de production et de recrutement – toujours plus fortes, ces dernières concernent 69 % des entreprises, et 87% d’entre elles pointent le manque de profils disponibles sur le marché –, les sociétés sondées ont été plus nombreuses à recruter des cadres, et le baromètre du deuxième trimestre marque un reflux, dû à la guerre. Les intentions de recrutement de cadres à trois mois sont en baisse côté PME (16 %, – 3 points) et côté grandes structures (58 %, – 9 points), mais elles ressortent toujours à des niveaux élevés.

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Face à l’afflux de candidats, les formations de brasseur de bière sont sous pression

Munis de tabliers et de bottes blanches, six élèves concassent 200 kilos de grains de malt. Réunis depuis 8 heures du matin dans la brasserie du lycée agricole de Douai (Nord), ils versent la mouture dans un imposant récipient en cuivre. « Malléable, bon conducteur thermique et bactéricide, le cuivre était très utilisé par le passé, raconte David Lutin. Vous travaillez avec un matériel d’exception : des cuves en cuivre, on n’en trouve quasiment plus désormais. Lorsque les Allemands ont occupé le nord de la France pendant la seconde guerre mondiale, ils les ont fait fondre pour fabriquer des obus. »

Le maître brasseur, au physique aussi imposant que son débit de parole est rapide, alterne anecdotes sur l’histoire de la profession, conseils pour l’installation, et détails techniques sur l’élaboration de la bière. « Si des billes se forment, écrase-les sur le bord. La maische doit être aussi homogène que possible. Et pour la température, on vise 67 degrés », glisse-t-il à une élève qui mélange la mouture de malt à l’eau, à l’aide d’une pelle en bois percée en son milieu. « On appelle ça un fourquet, corrige le formateur. Les brasseurs ont leur vocabulaire, qu’il faut maîtriser tout en sachant faire preuve de créativité. Les fûts, par exemple, écopent toujours de sobriquets. Généralement, c’est le nom du conjoint ou des enfants, car un brasseur passe plus de temps au travail qu’à la maison. Le métier est dur : autrefois, on disait qu’on brassait au sang et à la sueur. »

450 demandes, 24 places

Aujourd’hui, la profession attire moult candidats, et le marché mousse. La France est le pays européen qui compte le plus grand nombre de brasseries : 2 300 en 2020, contre 200 en 2009. Lancée en 2019 par les organisations professionnelles, proposée sur trois centres à ce jour, la nouvelle certification préparant au titre professionnel de brasseur affiche complet jusqu’en 2023, s’enthousiasme David Lutin : « A Douai, pour 24 places par an, on reçoit 450 demandes. De mon côté, quand j’avais cherché une formation de brasseur au début des années 2000, j’avais dû me rendre en Belgique car il n’y en avait plus en France ! Je suis rentré bredouille. Faute de candidatures, même la formation proposée à Louvain-la-Neuve avait fermé ! »

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Le CAP brasseur a en effet disparu en France dans les années 1980, avec la fermeture de nombreuses brasseries, retrace Daniel Thiriez, vice-président du Syndicat national des brasseurs indépendants et brasseur à Esquelbecq (Nord) : « Depuis, il restait quelques cursus, mais il n’y avait plus de socle de formation pour cette profession artisanale, plus de diplôme… Et pourtant, le secteur connaît un nouvel essor. » D’où l’idée de développer une certification professionnelle de cent quarante heures, avec quatre semaines de stage en entreprise, validée par un examen national. Les premières promotions ont débuté en 2019.

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« La France est un des rares pays européens à avoir vu la taxation totale du travail décroître »

L’existence dans toute l’Europe de règles complexes et hétérogènes en matière de prélèvements obligatoires rend peu pertinents les exercices de comparaison de cas types. Par ailleurs, les frontières du secteur privé et du secteur public varient selon les pays. D’où l’intérêt de la production par Eurostat (l’office statistique de la Commission européenne) de niveaux agrégés de taxation du travail.

Cet exercice a cependant ses limites. Par exemple, les fonctionnaires statutaires allemands bénéficient d’un régime spécial de retraite entièrement financé par la fiscalité. Ni ces fonctionnaires ni leurs employeurs publics ne payent de cotisation sociale retraite. L’Etat en France construit, lui, la fiction d’un système par répartition pour ses fonctionnaires : impôts et taxes financent des cotisations sociales employeurs et des salaires bruts ; puis l’Etat récupère sur ces salaires des cotisations sociales, et se verse à lui-même ses cotisations employeurs, le tout pour payer les pensions des fonctionnaires retraités. L’opération nette pour l’Etat est la même dans les deux systèmes, mais pour la France, sa fiction crée des contributions sociales salariés et employeurs qui sont alors considérées comme taxation du travail par Eurostat, gonflant le poids des taxes.

« A politique française constante, cette tendance devrait s’accentuer dans les années à venir, du fait d’un vieillissement accéléré chez nombre de nos partenaires »

Restons toutefois sur les chiffres d’Eurostat récemment publiés. La dernière année disponible, 2020, confirme que la France conserve la première place dans la taxation du travail payée par les employeurs privés comme publics, à 12,4 % du produit intérieur brut (PIB). Elle inclut notamment les contributions sociales employeurs, et une kyrielle de dispositifs, taxe sur les salaires, sur les stock-options, ou encore, la contribution à la formation professionnelle. Le gouffre est abyssal avec l’Allemagne qui n’affiche qu’une taxation des employeurs sur le travail de 7,3 % du PIB. Les entreprises françaises trouvent là un argument de poids pour se plaindre de la trop forte taxation qu’elles subissent ainsi que de la perte de compétitivité associée, et pour exiger des réformes.

Toutefois, cet indicateur isolé n’a guère de pertinence. La France se distingue en effet de nombre de ses voisins par une clé de répartition des cotisations sociales relativement élevée pour les employeurs et faible pour les salariés. Nous ne sommes ainsi que quatorzième en matière de taxation du travail (y compris l’impôt sur les salaires) payée par les salariés. Or cette clé ne joue que marginalement sur la compétitivité, les incitations ou le pouvoir d’achat : le salarié regarde son salaire net quand l’employeur regarde le coût total où s’additionnent indistinctement les deux types de cotisations. Il convient également d’intégrer les travailleurs indépendants, car, là aussi, la frontière salarié-indépendant varie à travers l’Europe.

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Endométriose : la parole des femmes se libère en entreprise

« La médiatisation du sujet par des célébrités frappées par la maladie a joué un rôle. L’annonce, en début d’année, d’une stratégie nationale sur l’endométriose par Emmanuel Macron aurait aussi favorisé une dynamique en ce sens » « Manifestation en 2018, à Paris).

« Etre étalée au sol en salle de réunion est une situation pour le moins désagréable. » Ce jour-là, Christelle fait une « crise » au sein de son entreprise. Atteinte d’endométriose, cette assistante sociale ne peut rester debout, prise de vives douleurs. Une « crise » violente, et surtout imprévisible, qui illustre le quotidien de centaines de milliers de femmes touchées par cette pathologie. « On ne connaît jamais le moment où cela va arriver mais on sait qu’on sera clouée sur place », résume Yasmine Candau, présidente de l’association EndoFrance.

Douleurs pelviennes, lombaires, fatigue chronique, troubles digestifs ou urinaires… La liste des symptômes de l’endométriose est longue. Ils s’accompagnent fréquemment d’un mal-être psychique du fait de l’« invisibilité » de la maladie : « on se sent incomprises », explique Mme Candau.

Les conséquences de cette pathologie sont bien évidemment nombreuses dans le quotidien professionnel. Les douleurs handicapent et imposent un absentéisme supérieur à la moyenne. Elles génèrent aussi un dilemme : faut-il évoquer ouvertement sa maladie ? Dans le cabinet dentaire où elle a travaillé durant huit ans comme assistante, Marion avait fait le choix du silence : « Je n’ai jamais osé en parler. » Par peur, notamment, de « passer pour quelqu’un de faible ». Son travail lui impose pourtant des journées entières en station debout, une posture particulièrement difficile à maintenir durant les phases de crise.

Méconnaissance et incompréhension

Beaucoup de femmes, comme Marion, ont fait le choix de ne pas évoquer leur situation. Parler d’une maladie gynécologique revenait, pour elles, à livrer une part de leur intimité à leurs supérieurs, à leurs collègues. Et, parfois, à être confrontées à une méconnaissance du sujet, voire une incompréhension.

Mais c’est aussi par peur de conséquences sur leur parcours professionnel que certaines ont préféré le silence : 45 % des femmes touchées estiment que l’endométriose peut avoir un impact important sur leur carrière et 39 % sur leurs opportunités d’évolution, selon une enquête Ipsos de 2020. Christelle confirme : « L’endométriose peut parfois être un frein dans la carrière. Lorsque j’ai postulé sur certains postes en interne, mon absentéisme a été évoqué de façon détournée. »

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Un sujet tabou ? Tous les spécialistes de la question en conviennent : la maladie l’a longtemps été en entreprise et le reste encore en de nombreuses situations. Toutefois, une lueur d’espoir apparaît aujourd’hui, à mesure que la parole des femmes touchées semble se libérer. « On perçoit enfin, depuis quelques années, une évolution positive en ce sens », se félicite Mme Candau. La médiatisation du sujet par des célébrités frappées par la maladie a joué un rôle.

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Du coaching aux techniques d’infiltration

Carnet de bureau. Faut-il se méfier des coachs en cette période de mode des formations en développement personnel ? Un exemple édifiant de dérive sectaire vient d’en rappeler les dangers. Quatre mises en examen pour « harcèlement moral », « banqueroute » ou « complicité de banqueroute » et « abus de biens sociaux » ont été prononcées contre le dirigeant de l’entreprise de BTP Arcadia, deux auditeurs et un consultant, tous scientologues à l’époque des faits, a révélé l’AFP le 15 avril.

Ces mises en examen sont l’aboutissement de huit ans de procédure. Une information judiciaire avait été ouverte par le parquet de Versailles, à la suite de la plainte déposée le 3 juin 2014 par douze salariés pour avoir laissé l’entreprise Arcadia se faire « infiltrer » par la scientologie. Selon les salariés, qui disent avoir subi « une sujétion psychologique », l’objectif était de « piller financièrement » l’entreprise. La justice tranchera.

Quoi qu’il en soit, le coaching aura joué un rôle déterminant dans la dégringolade de cette entreprise d’aménagement de combles, qui a compté jusqu’à une centaine de personnes lorsqu’elle était prospère. Recrutement, coaching, formation : l’entreprise, implantée à Voisins-le-Bretonneux dans les Yvelines, a suivi ce scénario en trois temps jusqu’au départ de nombre de ses salariés et au plan de redressement judiciaire.

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A la suite du décès de sa fille de 20 ans, le PDG Frédéric Langlois rejoint l’Eglise de scientologie dans les années 2000 et affiche ses nouvelles croyances, sans impact sur l’organisation du travail dans un premier temps. Jusqu’à ce qu’il fasse entrer d’autres adeptes dans l’entreprise. Il s’agit d’abord du consultant Eric Ianna. Dirigeant de l’organisme de formation professionnelle Certitude, ce scientologue notoire fait passer des tests de personnalité pour déterminer si les salariés sont « culture pro ou anti-entreprise ». « Ces tests sont un point d’accroche pour arriver à modifier les organisations au sein des entreprises. On déstabilise pour ensuite réorganiser », explique l’avocat des salariés, Me Olivier Morice.

« Il s’est fait manipuler »

A partir de 2013, deux autres membres de l’Eglise de scientologie, deux auditeurs, Cyrille Pincanon et Pascal Maffre, intègrent Arcadia. Ils y prendront des postes-clés : le service qualité et la trésorerie. Pour les salariés, c’est à partir de là que « tout a basculé ». L’entreprise est réorganisée selon les conseils des scientologues et les salariés doivent suivre des formations de communication, des exercices de déstabilisation, qui consistent par exemple à se tenir face à face et à se laisser insulter sans réagir. « Frédéric Langlois n’était pas au courant de ces formations », affirme son avocat, Me Marc Bensimhon.

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Management : « Les algorithmes sont plus opaques que les méthodes de contrôle traditionnelles »

Les algorithmes s’appuient sur le big data et l’intelligence artificielle pour prédire et analyser les comportements des individus. Ils sont devenus essentiels, au cours de la dernière décennie, dans le fonctionnement des organisations : ils peuvent être utilisés pour mieux connaître les clients, faciliter une meilleure prise de décision, assurer une coordination plus fluide ou encore améliorer l’apprentissage organisationnel. Ils sont par ailleurs essentiels à l’économie de plate-forme et à l’industrie 4.0.

Mais les algorithmes ne bouleversent pas seulement les modèles économiques ou la relation client, ils modifient aussi les modes de management. Ainsi, dans les organisations, est pratiqué de plus en plus le « management algorithmique », une nouvelle forme de management, qui s’appuie sur les algorithmes pour organiser les modes de production et de contrôle. Qu’y a-t-il de nouveau avec le management algorithmique ?

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Selon la synthèse réalisée récemment par des chercheurs de l’Institut de technologie du Massachusetts (MIT) et de l’université Stanford (Cafifornie), les algorithmes ont, comparés aux systèmes de contrôle traditionnels, trois caractéristiques qui les distinguent.

Instantanés et interactifs

Tout d’abord, ils permettent de capter davantage d’aspects du comportement humain : les dispositifs connectés peuvent désormais enregistrer avec plus d’acuité les mouvements corporels (jusqu’aux mouvements du visage et les données biométriques) et les pensées des salariés (à travers les vidéos et les enregistrements audio, mais aussi l’analyse des données textuelles).

Cela permet de prescrire et d’encadrer le travail d’une manière nouvelle, souvent de manière beaucoup plus stricte et en temps réel. Par exemple, Uber analyse les données d’accélération et de freinage pour produire des « nudges » incitant les chauffeurs à prendre des pauses. Certaines entreprises analysent le vocabulaire utilisé et les sentiments exprimés sur les réseaux par les salariés ; quand d’autres localisent les employés qui interagissent fréquemment ensemble ou, au contraire, ceux qui s’isolent. D’autres utilisent même la reconnaissance faciale pour évaluer le moral de leurs employés.

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Ensuite, les algorithmes sont instantanés et interactifs : on peut maintenant davantage calculer, sauvegarder et communiquer des informations en temps réel. Cela a des conséquences importantes sur les modes d’évaluation des salariés, qui se fait de plus en plus instantanément à travers notamment les notes attribuées par les consommateurs.

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