Inflation : les PME prises en étau entre fournisseurs gourmands et clients mécontents
« Au début, c’est le coton qui a flambé. Le prix de la matière brute a été multiplié par trois en deux ans. Le fil teint, lui, a pris 50 % en un an. Puis le polyamide, puis l’élasthanne, puis les pigments pour teindre les chaussettes, qui ont augmenté de près de 50 % sur le seul mois de mars, car ils viennent d’Europe de l’Est. Le tout avec une explosion des frais de transport. Faire venir un conteneur de coton d’Inde nous coûte sept fois plus cher [qu’en 2021] ! » A la tête de Maison Broussaud, une PME familiale qui fabrique des chaussettes pour plusieurs marques dans le Limousin depuis 1938, Alexandra Broussaud passe désormais une grande partie de son temps à calculer et recalculer ses coûts de revient.
Elle tente de desserrer l’étau dans lequel elle est prise, entre fournisseurs gourmands et clients mécontents. « Les premiers mois, on a essayé de ne pas répercuter cette hausse, en mangeant sur nos marges. Mais c’est intenable. La pérennité de l’entreprise est en jeu. Mes clients me disent qu’ils ne peuvent plus accepter d’augmentation de prix. Ils ne peuvent pas vendre une paire de chaussettes plus de 14 ou 15 euros. Ça ne passe plus. »
Dans un tout autre secteur d’activité, Aurore Lebon doit se colleter avec les mêmes difficultés. « Tous les matériaux sont concernés : le laiton, qui n’est filé que dans deux pays d’Europe, l’Italie et l’Allemagne, a grimpé de 20 % environ depuis septembre [2021]. Tout comme les peintures. On manque de métaux, de composants électroniques pour fabriquer les moteurs de nos stores », explique la présidente de Gauthier & Cie, une entreprise artisanale installée près de Chartres, qui fabrique des tringles et stores haut de gamme.
L’inflation ne ronge pas seulement le pouvoir d’achat des ménages, elle met aussi des milliers de TPE ou de PME dans une situation délicate. Pas besoin d’importer des matières premières, d’utiliser des machines-outils sophistiquées ou des métaux rares pour être touché. La flambée de l’énergie frappe toutes les entreprises, même dans le domaine des services à la personne.
« Négociations parfois très âpres »
A Creutzwald, en Moselle, Ludovic Faroult exploite une petite salle de sport dans le centre-ville. « La facture d’électricité pour chauffer et éclairer la salle, qui est ouverte sept jours sur sept, de 6 heures à 23 heures, a grimpé de 30 % depuis la fin 2021. Impossible de jouer sur le prix de nos abonnements, alors que nous sommes déjà dans une situation financière très délicate, avec trois concurrents dans la commune. Et nous venons d’apprendre qu’une nouvelle salle va ouvrir ! »
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