Dans un rapport publié vendredi 7 octobre, le think tank Terra Nova formule une série de propositions autour du télétravail pour, notamment, lutter contre la culture du présentéisme en entreprise et mettre en place un « travail hybride socialement responsable ».
Le groupe de réflexion marqué à gauche part du constat que le travail à distance provoqué « à marche forcée » par la pandémie de Covid-19 « est là pour durer ». Parmi quatre-vingt-six propositions, le rapport suggère, entre autres, la mise en place par un accord national interprofessionnel d’un socle annuel minimal de télétravail fixé « à 24 jours (comme en Allemagne) », si les tâches des salariés et les activités de l’entreprise le permettent.
Il évoque aussi la création d’un « titre télétravail », pour « inciter les entreprises à faciliter l’accès de leurs collaborateurs à des espaces de travail partagés et leur donner ainsi le choix du lieu de travail (sur site, dans un tiers-lieu ou à domicile) ».
Formation des manageurs et adaptation des rituels sociaux
Le rapport suggère aussi de lutter contre la culture du présentéisme « encore trop profondément ancrée dans notre pays » ou recommande aux employeurs qui peinent à recruter ou à garder leurs salariés de s’interroger sur la place donnée au travail à domicile, « souvent peu développée ». Les auteurs relèvent également que « 71 % des dirigeants d’entreprise n’ont pas prévu une formation des manageurs » aux pratiques adaptées au travail hybride, notant un risque d’une transition managériale qui risque de « s’encalminer ».
Ils invitent aussi les entreprises à revoir leurs « rituels sociaux » (pauses, réunions, ) pour les adapter au travail hybride. Parmi leurs nombreuses propositions, ils suggèrent encore d’annexer aux accords télétravail un droit à la déconnexion ou d’établir la possibilité pour tout salarié de faire connaître son souhait non satisfait de télétravailler – au sein d’une commission de suivi dans les entreprises de plus de cinquante salariés, auprès des syndicats ailleurs.
[La politique de l’emploi s’appuie sur des dispositifs créés au fil des besoins, qui restent parfois méconnus longtemps après leur création. Quelle est leur efficacité contre le chômage ? Elle n’est pas toujours évaluée. Le Monde publie une série d’articles sur les aides à l’emploi, pour tenter d’estimer ce qu’on en sait – leur objectif initial, leurs résultats.]
Créé en 2007 par l’Union européenne (UE), le FEM visait initialement à financer des mesures de reclassement des travailleurs ayant perdu leur emploi en raison de la mondialisation.
Doté d’un budget annuel de 209 millions d’euros pour la période 2021-2027, ce dispositif a été élargi par la suite aux licenciements résultant d’une crise économique mondiale ou à la transition énergétique et numérique. « Ce soutien de l’UE (…) aidera [les salariés d’Air France] à se reconvertir et à trouver de nouveaux emplois, ou à créer leur propre entreprise », défend le commissaire européen à l’emploi et aux droits sociaux, Nicolas Schmit.
Durement touchée par la crise du Covid-19, Air France s’est vue dans l’obligation de procéder à des suppressions massives de postes au sein de la maison mère et de sa filiale Hop ! Au nom de la compagnie aérienne, le gouvernement français a sollicité une aide européenne au titre du FEM pour financer les mesures de retour à l’emploi et se l’est vu accorder par la Commission européenne en mai. Il ne restera à la charge d’Air France que 15 % du financement du coût total de ces mesures, estimé à 21 millions d’euros environ. Air France a déjà bénéficié par deux fois de ce dispositif, en 2013 et en 2017.
Les aides publiques au financement de plans sociaux sont régulièrement sujettes à polémique. Dans le cas de la compagnie aérienne, le gouvernement français « a confirmé qu’une contribution financière du FEM ne se substituerait pas » aux mesures « revêtant un caractère obligatoire pour l’entreprise concernée en vertu du droit national ou de conventions collectives », précise la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à Air France.
Le fonctionnement
Le FEM cofinance des mesures d’aide au retour à l’emploi à hauteur de 60 % à 85 % de leur montant : aides à la recherche d’emploi, à l’orientation professionnelle, à la formation, au reclassement externe ou à la création d’entreprise (dans la limite de 22 000 euros par bénéficiaire).
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Est-ce que vous travaillez, lorsque vous lisez cet article ? Pour répondre à cette question, nous avons besoin de nous accorder sur ce que nous désignons par « travail ». Et l’enjeu n’est pas mince, puisque ce mot est un pilier de notre société et de nos existences. Renonçant à trouver une définition universelle à ce substantif sans substance, il convient de l’ausculter en tant que catégorie de la pensée, comme une construction sociale au sens d’Emile Durkheim [1858-1917], qui exprime l’état de la société et nous équipe en retour pour penser et agir.
Depuis dix siècles, ses significations se sont diversifiées, au point que le mot est aujourd’hui spectaculairement polysémique dans ses usages ordinaires mais aussi scientifiques. Il désigne l’activité, mais aussi la tâche, l’ouvrage, la production utile, ou profitable, et l’emploi. Les usages institutionnels du mot « travail », eux, tendent à l’inverse, à réduire le travail à l’emploi. Cette définition, dont on sait, avec les féministes des années 1970, qu’elle est toute politique, n’abolit cependant pas les autres significations sociales, propices aux quiproquos. Par exemple, « défendre le travail », est-ce défendre une activité vivante pour chacun, ou une production utile au marché, ou bien l’emploi, c’est-à-dire un rapport de subordination ?
Après-guerre, un accord social s’était construit autour de l’idée que le travail désigne une activité qui demande des efforts afin de produire des choses utiles, dans le cadre d’un emploi dont on peut vivre. Or cette convention se craquelle depuis les années 1990. Notre société est en effet caractérisée par des emplois vécus comme inutiles, voire nocifs ou destructeurs ; à l’inverse, hors emploi, on trouve de nombreuses pratiques qui demandent des efforts (accoucher et éduquer, militer, se former, réparer…) et sont indispensables à notre subsistance. Des revenus peuvent être obtenus sans rien faire (dividendes, emplois fictifs, placardisés, revenus de l’assistance…), tandis que l’emploi n’est pas toujours un « gagne-pain » du fait de l’accroissement du nombre de travailleurs pauvres et de la multiplication de statuts légaux permettant d’employer des personnes à des conditions bradées.
Valeurs purielles
Au même moment, des pratiques profitables pour des firmes sont réalisées par la foule, sur Internet, mais sans être vécues comme du « travail ». Des salariés, eux, esquivent régulièrement le travail psychique, les tâches de « care »et de production ménagère, qui n’entrent pas dans le périmètre de leur emploi. Et, bien que notre vie et notre société reposent sur l’emploi massif des productions animales, végétales et machiniques, celui-ci n’est inscrit dans aucun droit qui assignerait des droits et des devoirs à ceux qui les exploitent.
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Le report de l’âge légal de départ est la mesure centrale de la réforme des retraites que le président de la République, Emmanuel Macron, souhaite mettre en œuvre. En faisant passer l’âge d’ouverture des droits à une pension de 62 ans à 65 ans, par un allongement progressif de quatre mois chaque année, le chef de l’Etat a crispé les syndicats ainsi qu’une grande partie de la classe politique française, jusqu’au sein de son camp.
La France insoumise (LFI), hostile à cette réforme, estime qu’il n’y a aucune justification économique au report de l’âge de départ à la retraite. Invité sur France Inter, mardi 4 octobre, le député des Bouches-du-Rhône Manuel Bompard, a rappelé que le dernier rapport du Conseil d’orientation des retraites (COR) « dit qu’à la date à laquelle on parle le dispositif de retraites en France est excédentaire ». Et d’ajouter : « Aujourd’hui, vous avez à peu près deux tiers des Français qui, au moment où ils arrivent à 60 ans, sont déjà au chômage. Vous n’allez pas faire d’économie, car vous allez transférer les gens d’une caisse à l’autre. » Est-ce vraiment le cas ?
Un tiers environ des 60-64 ans en activité
Globalement, la proportion des seniors occupant un emploi a augmenté ces vingt dernières années, selon une étude publiée en avril 2022 par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, chargée des études au sein du ministère du travail.
Qu’en est-il de l’activité des femmes et hommes âgés précisément de 60 ans ? Une étude publiée en juillet 2022 par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) le détaille dans une « Photographie du marché du travail en 2021 ». Pour la population âgée de 60 ans, qui représente environ 825 000 personnes en France, 55,3 % sont en situation d’emploi. Cela signifie donc que 44,7 % des 60 ans ne travaillent pas, soit environ la moitié, comme l’a noté le 28 septembre sur Franceinfo le député de la Somme François Ruffin (LFI).
Il est donc exagéré d’affirmer que les deux tiers des personnes de 60 ans sont au chômage, comme le dit M. Bompard. Joint par Le Monde, le député « insoumis » affirme qu’il parlait du taux d’emploi pour la tranche de la population âgée de 60 à 64 ans. « C’est bien ce chiffre qui est pertinent en cas de report de l’âge de départ à la retraite à 64 ou 65 ans », précise-t-il.
Alors, si l’on regarde la situation des 60-64 ans, selon le rapport du COR, seuls 35,5 % occupaient un poste en 2021, ce qui signifie que deux tiers des hommes et des femmes de cette tranche d’âge n’étaient pas en activité. Ce pourcentage a fortement augmenté depuis le début des années 2000, et en particulier, précise le COR, de « 15,6 points entre 2011 et 2021 du fait de la forte augmentation de l’activité entre 60 et 62 ans ». Il demeure cependant très faible comparé à celui de l’activité des seniors chez nos voisins européens et internationaux.
Parmi les Etats membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques, la France figure en effet parmi les plus mauvais élèves. En 2020, le taux d’emploi des femmes et hommes ayant entre 60 et 64 ans était bien inférieur à celui des seniors américains (53,2 %), allemands (60,7 %) et japonais (71 %).
M. Bompard a commis une autre imprécision en parlant de « chômeurs », alors que la majorité des personnes de 60 ans qui ne travaillent pas sont des « inactifs ».
Une personne inactive est quelqu’un qui n’est ni en emploi ni au chômage. C’est le cas des retraités, mais aussi des personnes au foyer ou en incapacité de travailler, par exemple.
Dans son rapport publié en septembre 2022, le COR précise que les 55,3 % de 60 ans en situation d’emploi se répartissent ainsi :
Le ton monte entre la direction de la compagnie et les syndicats représentatifs des personnels navigants commerciaux (PNC). La renégociation de l’accord collectif des hôtesses et des stewards, qui arrive à échéance le 31 octobre, a mis le feu aux poudres. Depuis plus d’un an, Air France fait pression pour obtenir une nouvelle composition des équipages et réduire le nombre des hôtesses et des stewards lors des vols long-courriers.
En pratique, la compagnie souhaite un PNC pour 51 passagers (contre 48 aujourd’hui). Les salariés s’insurgent contre ce projet. A 72 %, ils ont déjà rejeté lors d’un vote organisé mi-novembre 2021 par les syndicats l’idée d’une réduction du nombre des hôtesses et des stewards dans les vols long-courriers d’Air France.
Pour Sébastien Portal, secrétaire général du Syndicat des navigants du groupe Air France (SNGAF), première organisation auprès des PNC, la nouvelle composition des équipages voulue par la direction pèsera « sur la sécurité des vols et sur l’emploi ».
Le syndicat a sorti sa calculette. Selon lui, avec une telle composition d’équipage, ce sont de 800 à 1 200 hôtesses et stewards qui se trouveront en sureffectif à partir du 1er novembre. Et dont les postes sont donc menacés, prévient M. Portal, tout en soulignant que cela risquerait alors de peser sur la « caisse de retraite », qui n’est alimentée que par les cotisations des PNC et des pilotes d’Air France.
12 600 hôtesses et stewards
Pendant la crise liée à la pandémie de Covid-19, 1 400 postes de PNC ont déjà été supprimés à l’occasion d’une rupture conventionnelle collective. Air France compte aujourd’hui 12 600 hôtesses et stewards.
Pour le SNGAF, la direction serait prête à passer en force. Dans un courriel adressé aux PNC, le 7 novembre 2021, que nous avons pu consulter,Anne Rigail, directrice générale de la compagnie, se faisait menaçante.
Elle prévenait que « la direction pourra, en octobre 2022, prendre des mesures unilatérales en remplacement de l’accord qui arrivera à échéance ». D’après M. Portal, « la direction considérerait la nouvelle composition des équipages comme primordiale pour assurer la pérennité de l’entreprise, notamment pour combler le déficit de compétitivité par rapport à Lufthansa et British Airways ».
L’objectif de Ben Smith, directeur général d’Air France-KLM, étant de restaurer la marge opérationnelle du groupe. « Nous sommes prêts à faire grève et nous n’attendrons pas le 31 octobre », prévient Sébastien Portal. Un raidissement qui n’est pas sans lien avec les prochaines élections pour le renouvellement des représentants des personnels, en mars 2023. Le SNGAF veut créer un front commun. Il a proposé à tous les syndicats de PNC de la compagnie de se réunir lors de « la semaine [du 10 au 14 octobre] » pour un éventuel « appel à la grève ».
Plusieurs milliers de personnes ont manifesté, jeudi 6 octobre à Paris, pour demander la revalorisation des salaires et dénoncer la pénurie de professionnels dans le secteur de la petite enfance, l’un des domaines qui souffrent le plus de manque de personnel.
L’appel à la grève a été lancé par le collectif Pas de bébés à la consigne, qui rassemble une cinquantaine d’associations et d’organisations syndicales. Environ 2 500 personnes ont manifesté à Paris selon la police, quelque 5 000 selon les organisateurs, en chantant « Les crèches surbookées et les pros surmenés, c’est les bébés qui sont sacrifiés ».
Les jouets pour enfants, instruments de musique, poupées et autres accessoires étaient portés par les manifestants, dont certains criaient à destination des passants : « C’est pour vos bébés qu’on fait grève ! ».
Adèle Reboux, 22 ans, travaille dans une crèche au Pré-Saint-Gervais, au nord-est de Paris, et dénonce « des conditions de travail épuisantes ». « En plus de [nous] occuper des enfants, nous devons former ceux qui n’ont aucune qualification », dit-elle en référence à un arrêté paru en juillet 2022. Ce texte autorise à recruter plus facilement des salariés non diplômés et à les former en interne pour pallier la pénurie de personnel dans les crèches.
« Aujourd’hui, une auxiliaire de crèche gagne 1 300 euros net en début de carrière, c’est bien trop peu », regrette Sandrine Aragou, 50 ans, auxiliaire dans les Yvelines. Les crèches emploient entre autres des éducatrices, des auxiliaires de crèche, des puéricultrices.
Des manifestations ont également eu lieu en région, par exemple à Lille, à Marseille et à Bordeaux, selon le collectif Pas de bébés à la consigne. En France, le nombre de places proposées par les établissements d’accueil du jeune enfant a augmenté durant la dernière décennie, pour atteindre 471 000 en 2019, la plupart d’entre eux étant gérés par les municipalités. Environ la moitié (48,6 %) des établissements rapportent un manque de personnel, selon une enquête réalisée par la Caisse nationale d’allocations familiales et publiée en juillet.
Les sujets les plus conflictuels ne seront pas abordés d’entrée de jeu. Mercredi 5 octobre, le ministre du travail, Olivier Dussopt, a donné le coup d’envoi de la « concertation » sur la réforme des retraites. Durant une heure et demie, il a reçu les partenaires sociaux pour leur expliquer comment les échanges allaient se dérouler. Relancée récemment par l’exécutif, l’idée de reporter à 65 ans de l’âge d’ouverture des droits à une pension figurera dans le dernier chapitre des discussions. Cette promesse de campagne d’Emmanuel Macron constitue le plus gros point de blocage, l’ensemble des syndicats étant hostiles à une telle mesure, qu’ils se disent prêts à combattre par « tous les moyens d’action nécessaires ».
Le calendrier et la méthode présentés mercredi s’inscrivent dans la droite ligne des annonces faites le 29 septembre par Elisabeth Borne. La cheffe du gouvernement avait déclaré que des consultations seraient engagées durant l’automne sur ce chantier, son souhait étant d’en tirer un bilan « avant Noël ». « On privilégie l’inscription de cette réforme dans un projet de loi qui devrait être voté avant la fin de l’hiver, pour une entrée en vigueur de la réforme à l’été 2023 », avait-elle ajouté.
Menace d’un mouvement social
Mercredi, M. Dussopt a apporté des précisions à cette feuille de route, en expliquant que les pourparlers seraient découpés en trois « cycles ». Le premier, centré sur « l’emploi des seniors et la prévention de l’usure professionnelle », débutera le 10 octobre. Sur cette problématique, le patronat est attendu de pied de ferme, les employeurs étant souvent accusés de vouloir couper au sommet de la pyramide des âges en se séparant de leurs salariés vieillissants.
A partir du 7 novembre commencera une deuxième séquence de réflexion, sur l’« équité et [la] justice sociale », qui pourrait alimenter les tensions, car il sera notamment question de « l’avenir des régimes spéciaux ». Ces dispositifs permettent aux travailleurs de certaines entreprises (comme la RATP) de partir à la retraite avant 62 ans – la règle de droit commun pour les salariés du privé. Devrait également être examiné le sort des fonctionnaires en « catégories actives », qui, eux aussi, peuvent réclamer le versement de leur pension plus tôt que les autres (policiers, militaires, certains personnels soignants dans les hôpitaux…). La remise en cause de ces systèmes dérogatoires est une source potentielle d’affrontements, comme l’ont montré, par exemple, les grèves de cheminots en 2018 contre la mise en extinction de leur statut et l’affiliation des recrues de la SNCF au régime général de l’assurance-vieillesse.
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Quel rôle pour l’assurance-chômage auprès des demandeurs d’emploi ? Quelle relation doivent avoir les salariés au travail ? Ces questions, très politiques, « mais aussi philosophiques » selon les mots du député « insoumis » de Seine-Saint-Denis Alexis Corbière, ont traversé les débats, de lundi 3 à mercredi 5 octobre, à l’occasion de l’examen du projet de loi ouvrant la voie à une réforme de l’assurance-chômage. Ils ont aussi illustré les clivages entre la coalition présidentielle, soutenue par les élus du parti Les Républicains (LR), et la coalition de gauche, la Nouvelle Union populaire, écologiste et sociale (Nupes).
Ce texte constitue la première étape du vaste projet de réforme du marché du travail qui, selon le gouvernement, doit mener vers le plein-emploi d’ici à 2027. Il prévoit notamment de changer les règles d’indemnisation pour en moduler la durée en fonction de l’état du marché du travail. Les cinq articles du texte ayant été adoptés, le résultat du vote solennel, qui n’aura lieu que mardi 11 octobre après les questions au gouvernement, ne fait guère de doute.
Pour s’assurer du soutien du groupe LR à l’Assemblée nationale, dont les bancs étaient très clairsemés en séance, le gouvernement et la majorité présidentielle ont durci le texte en incorporant des dispositions sur les abandons de poste. Actuellement, les salariés qui quittent leur emploi sans préavis doivent ensuite être licenciés par leur employeur, ce qui leur permet de bénéficier des indemnités chômage. Les députés Ensemble citoyens (Renaissance, MoDem et Horizons) et LR, qui assurent à l’unisson s’appuyer sur des « retours de terrain » et des « témoignages d’employeurs », ont déposé des amendements communs, travaillés avec le gouvernement en amont, pour créer une « présomption de démission » qui bloquerait donc l’ouverture des droits.
En l’absence du ministre du travail, Olivier Dussopt, qui ouvrait ce mercredi la concertation avec les partenaires sociaux sur le projet de réforme des retraites, c’est Carole Grandjean qui a défendu l’amendement : « Ce phénomène d’abandon de poste est en augmentation constante et pose divers problèmes, notamment pour les entreprises qui voient leur collectif se désorganiser », a affirmé la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. « L’abandon de poste est utilisé pour dévoyer la démission et percevoir l’assurance-chômage », a abondé l’élu (Horizons) de Maine-et-Loire, François Gernigon.
Un amendement visant à durcir le texte
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Les salariés abandonnant leur poste pourraient être privés d’allocations-chômage. L’Assemblée nationale a voté en ce sens, mercredi 5 octobre, en première lecture, des amendements portés par les députés de la majorité et de droite, dans le cadre de l’examen du projet de loi de réforme de l’assurance-chômage.
Malgré les critiques de la gauche, les amendements, qui précisent que « le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure à cette fin (…) est présumé démissionnaire », ont été largement adoptés, par 219 voix contre 68.
Mesure défendue par la majorité et Les Républicains
Actuellement, les salariés qui ne viennent plus travailler sans justification et qui finissent par être licenciés peuvent bénéficier de l’assurance-chômage. Un licenciement pour abandon de poste constitue en effet un licenciement pour faute grave : il ne prive donc pas la personne licenciée de son droit à bénéficier de cette protection, quand bien même l’abandon de poste est « volontaire ».
Mercredi, le gouvernement, par la voix de la ministre déléguée Carole Grandjean, s’est dit favorable à une réforme en la matière, qualifiant les abandons de poste de « phénomène en augmentation constante ». Le député de la majorité Dominique Da Silva a argué que les abandons de poste désorganisaient les entreprises et qu’il s’agissait de prévoir une mesure « claire et juste » pour chacun.
La droite développe un argumentaire similaire. « Nous ne privons les salariés d’aucun droit. Ils ont toujours la possibilité d’un recours » devant le conseil de prud’hommes, a ainsi fait valoir Jean-Louis Thiériot, député Les Républicains (LR), pour appuyer la position de son parti. Il en a profité pour critiquer chez certains élus de gauche « le choix du droit à la paresse », en référence à la récente affirmation de la députée écologiste Sandrine Rousseau sur Franceinfo, décriée par le camp présidentiel et la droite, et qui a relancé le débat à gauche.
La gauche pointe la dégradation des conditions de travail
Lors de débats houleux dans l’Hémicycle, la gauche s’est inscrite en faux sur ce phénomène, évoquant des cas « marginaux » et plaidant pour ne pas « affaiblir la protection des salariés », sur la même ligne qu’une partie des syndicats de salariés.
« Quelle est la cause de ces abandons de poste ? », a questionné le communiste Pierre Dharréville, suggérant un lien avec des conditions de travail qui se dégradent pour un nombre croissant d’employés.
Les socialistes ont assuré que la mesure adoptée était inconstitutionnelle et non compatible avec les normes de l’Organisation internationale du travail.
Lors des discussions, un amendement porté par Marine Le Pen (Rassemblement national) a, en revanche, été rejeté : il prévoyait que soit considéré comme une démission le refus d’accepter un contrat à durée indéterminée (CDI) à la fin d’un contrat à durée déterminée (CDD). « Il y a une partie des gens qui fraudent » en alternant CDD et allocations-chômage, et en refusant des CDI, a prétexté la présidente du groupe d’extrême droite.
Mais le sujet n’est pas clos. Le camp présidentiel s’est en effet aussi intéressé au sujet : des amendements prévoyant la même mesure, applicable après trois refus de CDI, avaient même été déposés par des députés Horizons et MoDem. Mais ils ont été retirés par leurs auteurs, à la demande du gouvernement, qui souhaite retravailler la disposition. En réaction, Mme Le Pen a dénoncé les « pudeurs de vierge du gouvernement ».
Hasard du calendrier ? Les premiers états généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes, qui se sont tenus le 4 octobre 2022 à Paris, ont coïncidé avec le « News Engagement Day » – un rendez-vous annuel visant à promouvoir la confiance de la population envers les journalistes. « Si nous ne prenons pas la mesure de la perte de confiance du public envers les médias, la démocratie est en danger fatal », a souligné, dès l’ouverture de cet événement, Pascal Guénée, président de la Conférence des écoles de journalisme (CEJ), organisme qui rassemble les quatorze écoles reconnues et pilotant cet événement. Une façon de rappeler que si c’est la première fois que la profession se mobilise de la sorte pour les jeunes, c’est aussi parce que son avenir est en question.
Désinformation, évolution du rapport au travail, nouveaux modes de consommation de l’information,impact des nouvelles technologies, précarité associée au travail en « free-lance »… Le métier de journaliste est touché par les changements profonds qui traversent la société, comme l’ont montré les travaux menés dans le cadre de ces états généraux, financés par le plan France relance et le ministère de la culture. Un dispositif a été mis en place en 2022, avec des actions dans les écoles et auprès des employeurs.
Une enquête a été menée auprès de néodiplômés (des promotions de 2019 à 2022) pour entendre leurs aspirations. On y apprend que le journalisme reste un métier vocation : deux tiers des 1 600 jeunes répondants de l’enquête déployée par le cabinet Pluricité rêvaient d’être journalistes depuis des années, voire depuis l’enfance. Mais la plupart refusent de tout sacrifier pour leur passion et réclament un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et personnelle. Ainsi, seuls 37 % déclarent que travailler en horaire décalé ne leur pose pas de difficultés.
Incompréhensions dans le management
La CEJ a identifié douze thématiques pour changer les conditions d’entrée dans le métier. Le management en fait partie, avec la volonté de dépasser le « choc des générations ». Tous constatent des incompréhensions entre d’un côté, des employeurs agacés que les nouvelles recrues ne souhaitent pas s’impliquer « à fond » pour leur métier passion, et de l’autre, des jeunes qui souhaitent préserver leur vie privée, mener des projets personnels…Ou simplement respecter leurs horaires de travail, alors que les salaires dans le journalisme restent bien inférieurs à ceux d’autres secteurs recrutant des diplômés bac + 5.
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