Archive dans mars 2022

Election présidentielle 2022 : conditionner le RSA à une activité, une idée qui fait son chemin dans l’entourage d’Emmanuel Macron

Sur les politiques de solidarité, Emmanuel Macron ne paraît pas insensible à une idée chère à la droite : conditionner le versement du revenu de solidarité active (RSA) à l’exercice d’une activité. C’est ce que laissent supposer des déclarations faites par Gabriel Attal, mardi 15 mars. Invité de l’émission « Les 4 Vérités » sur France 2, le porte-parole du gouvernement s’est toutefois abstenu de livrer des détails, expliquant que le président de la République lèverait le voile sur ses intentions, jeudi, en présentant son programme pour le scrutin présidentiel.

M. Attal est intervenu sur le sujet pour répondre à une remarque selon laquelle le chef de l’Etat s’inspirerait de mesures défendues par Valérie Pécresse, notamment celle sur le RSA. La candidate de LR à l’Elysée veut que les bénéficiaires de ce minimum social donnent « chaque semaine quinze heures d’activité à la société ». Est-ce que M. Macron souhaite aussi s’engager dans une telle voie ? « Il y a une logique qu’on porte qui est (…) que les devoirs ouvrent les droits et non l’inverse », a indiqué le porte-parole du gouvernement, en citant comme exemple le contrat d’engagement jeune. Lancé début mars, ce dispositif offre un soutien renforcé aux 16-25 ans qui peinent à s’insérer. Il leur permet également de toucher une allocation, à condition de suivre le « parcours » proposé, sous la forme de quinze à vingt heures par semaine d’occupations diverses (formation, tâches d’intérêt général, mise en situation professionnelle…). « Evidemment, pour le RSA, c’est une logique qu’on pourrait suivre », a, prudemment, avancé M. Attal.

« Choquant et inacceptable »

Cette rhétorique hérisse des dirigeants d’associations de lutte contre l’exclusion. Elle s’inscrit dans une philosophie consistant à suggérer que les aides sont apportées « aux bons pauvres qui remplissent leurs devoirs », confie Marie-Aleth Grard, présidente de ATD Quart Monde. C’est « très choquant » et « inacceptable », poursuit-elle, car un tel discours « stigmatise » les publics concernés en sous-entendant que ceux-ci cherchent à « profiter du système » alors que l’écrasante majorité « souhaite retrouver un emploi ». « C’est une manière de diviser un peu plus la société », considère Mme Grard.

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Délégué général de la Fondation Abbé Pierre, Christophe Robert s’interroge : les propos de M. Attal constituent-ils un « effet d’annonce pour rassurer » tous ceux qui, au sein de la population, pensent que l’Etat-providence se montrerait trop généreux et pas assez exigeant ? Si le débat s’orientait dans cette direction, ce serait regrettable, aux yeux de M. Robert : la bonne question à soulever, selon lui, se situe dans les « moyens consacrés à l’accompagnement » pour que les allocataires sortent du RSA et se fraient un chemin dans le monde du travail. Les crédits prévus à cet effet avaient été considérablement réduits, jusqu’à une période récente. Résultat : fin 2019, 36 % des personnes qui percevaient la prestation se trouvaient dans ce système depuis plus de cinq ans, selon un rapport de la Cour des comptes. « Il faut que nous ayons des précisions sur cet aspect du dossier », affirme M. Robert.

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Election présidentielle 2022 : l’idée d’un revenu universel d’activité relancée par le candidat Macron

Le revenu universel d’activité revient dans l’actualité. Le candidat Emmanuel Macron donne en effet suite à l’idée du président Macron de fusionner plusieurs prestations et minima sociaux. Il l’avait évoqué le 6 janvier, au congrès de la Fédération des acteurs de la solidarité, puis le 2 février, lors de la journée sur le mal-logement organisée par la Fondation Abbé Pierre, et Richard Ferrand, président de l’Assemblée nationale (La République en marche), le confirme, mardi 15 mars, dans un tweet : « Un versement automatique des prestations sociales sera mis en œuvre en cas de deuxième mandat d’Emmanuel Macron. »

Le 13 septembre 2018, à l’occasion de la présentation de sa stratégie de lutte contre la pauvreté, le chef de l’Etat avait déclaré devant plusieurs centaines d’élus, membres d’associations et fonctionnaires réunis dans le cadre prestigieux du Musée de l’homme : « Je souhaite lancer aujourd’hui une transformation profonde de notre système de minima sociaux. » Il critiquait « un système opaque qui érode la confiance et nourrit la défiance et le discours lancinant sur les profiteurs, les assistés… Je souhaite créer sur la base d’un travail collectif, par une loi, en 2020, un revenu universel d’activité qui fusionne le plus grand nombre possible de prestations et dont l’Etat serait entièrement responsable ».

Harmoniser sans fusionner

La réforme, ambitieuse, n’a cependant pu être menée à terme à cause de l’irruption, au printemps 2020, du Covid-19 et parce que sa mise en œuvre s’avère plus ardue que prévu. « Il y a eu de nombreuses et longues réunions, des groupes de travail thématiques, des ateliers régionaux, se souvient Patrick Doutreligne, président de l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux. Nous avons été beaucoup consultés mais peu écoutés. » La crainte des associations était que cette réforme soit le prétexte à des économies, en rognant notamment sur les aides au logement.

Fabrice Lenglart, désigné en janvier 2019 rapporteur général à cette réforme, a conduit les travaux plus techniques auprès des douze ministères et vingt-quatre administrations concernées, dont la Caisse d’allocations familiales, distributrice, chaque année, des 91 milliards d’euros d’aides sociales. « Avec dix minima sociaux et quinze prestations sociales, notre système permet de contenir la pauvreté et la grande pauvreté, mais il est illisible et parfois peu incitatif à la reprise d’une activité », résume M. Lenglart qui, après l’interruption des travaux au printemps 2020, à cause de la pandémie, a repris l’ouvrage. Il a donc remis au premier ministre, en décembre 2021, un rapport de préfiguration resté confidentiel, ce qui ne rassure guère les associations concernées.

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Créer les conditions favorables à l’accession des femmes aux plus hautes responsabilités

« Seules seize entreprises sur quelque 40 000 n’ont pas su, en quatre ans, corriger les inégalités mesurées par l’index et tombent aujourd’hui sous le coup de la sanction prévue par la loi de 1 % maximum de la masse salariale. »

« Longtemps on a pensé que l’accès des femmes aux postes à responsabilité se ferait naturellement. Mais il n’a pas eu lieu sans intervention législative, a rappelé Quentin Lippmann, maître de conférences en sciences économiques de l’université Paris-II-Panthéon-Assas en introduction des Rencontres RH du 8 mars. Du point de vue de la recherche, la loi Copé-Zimmermann sur les quotas a très bien marché, en faisant passer la part des femmes aux conseils d’administration de 10 % en 2010 à 46 % en 2021, mais l’effet de ruissellement n’a pas eu lieu. D’où la loi Rixain pour faire monter les femmes dans les comités exécutifs (Comex) des entreprises et enfin le name and shame [“nommer et faire honte”] avec l’index sur l’égalité femmes-hommes [dans les entreprises]

La note globale moyenne de l’index 2022 publiée le 7 mars par le ministère du travail est de 86 sur 100, en progrès chaque année, tout comme les cinq indicateurs qui la composent, y compris les deux plus difficiles à respecter comme celui sur la hausse de salaire au retour de congé maternité ou la parité dans les dix plus hautes rémunérations.

Archives : Egalité femmes-hommes : les petites mesures sont parfois plus efficaces que les grandes politiques

Seules seize entreprises sur quelque 40 000 n’ont pas su, en quatre ans, corriger les inégalités mesurées par l’index et tombent aujourd’hui sous le coup de la sanction prévue par la loi de 1 % maximum de la masse salariale. La dynamique d’ensemble est positive, « mais est-ce que ça a réduit les inégalités ? » interroge Quentin Lippmann.

Réserves sur l’« index Pénicaud »

Une dizaine de DRH de secteurs aussi différents que les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), la bancassurance, ou les services à la personne, réunis à Paris à l’occasion de ce rendez-vous mensuel de l’actualité du management, créé par Le Monde en 2019 en partenariat avec ManpowerGroup, ont tenté d’y répondre. Ils ont échangé leurs interrogations, les pratiques au sein de leur entreprise et l’efficacité de leur politique de réduction des inégalités femmes-hommes, en particulier concernant l’évolution de carrière.

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Les lignes ont bougé. Relativement unanimes sur les progrès récents et l’efficacité des politiques de quotas, les responsables des ressources humaines ont toutefois exprimé leurs réserves sur les limites de l’« index Pénicaud » et les solutions envisagées pour faire face aux problèmes structurels. L’index « oblige à se poser des questions », « permet d’identifier et de mesurer les réalités ». « Il a mis au jour qu’un nombre important d’entreprises ne respectaient pas l’augmentation de salaire au retour de congé maternité », remarque Caroline Courtin, responsable RH chez BNP Paribas. « Mais il ne fait pas tout. Il faut le mettre en corrélation avec d’autres choses », résume Anne-Marie Husser, la DRH France d’Amazon.

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L’anglais en entreprise, entre nécessité et effet de mode

Connaissez-vous le métier de « growth hacker » (littéralement « pirate de la croissance ») ? Cet intitulé de poste, fréquent dans le numérique, est souvent moqué, car personne ne sait ce qu’il recouvre : pour Valentin Pouillart, PDG de la plate-forme CVDesignR, « un jeune qui fait ce métier va dire qu’il est un peu le couteau suisse du développement de la boîte. Mais dans les pays anglo-saxons, le growth hacking est une fonction de développement commercial. L’exportation en France d’intitulés de postes anglais peut changer leur sens, d’autant que tout le monde ne saura pas à quoi ils renvoient… »

L’anglais tient une place importante dans la société et les entreprises françaises, et la semaine de la francophonie, qui se tient du 12 au 20 mars, aura sans doute l’occasion de le rappeler. Sa maîtrise est aujourd’hui un atout pour obtenir un emploi : selon une étude publiée en décembre 2021 sur le site d’emploi Monster, 13 % des offres d’emploi disponibles en France exigent une sérieuse maîtrise de l’anglais, et le chiffre monte à 31 % dans le secteur de l’information et des nouvelles technologies.

La tendance est aussi à angliciser les noms de métiers, majoritairement pour les cadres, les secteurs du numérique, du marketing et du management. L’intitulé de poste en anglais est ainsi devenu une norme, selon Julien Broue, cofondateur du cabinet de recrutement Easy Partner, « du chef de produit devenu “product owner” au simple mot “manager”, car l’entreprise qui garde la terminologie française ne sera même plus visible sur le marché de l’emploi. »

« Entre 2020 et 2022, la part des intitulés de poste en anglais a été multipliée par deux sur nos offres, de 0,8 % à 1,6 % », précise Flavien Chantrel, directeur éditorial chez HelloWork, qui édite plusieurs plates-formes d’emploi. « On en voit passer beaucoup plus, sous l’effet de l’essor des métiers de la tech, reconnaît Alexandre Judes, économiste au Hiring Lab du site d’emploi Indeed. Le principal objectif est de rendre l’emploi plus attractif, montrer qu’on appartient à un écosystème dynamique. Mais il faut reconnaître qu’un certain nombre d’indicateurs et de concepts sont difficilement traduisibles en français. » Les entreprises ouvertes à l’international sont soucieuses de standardiser leur fonctionnement dans plusieurs pays avec les mêmes documents, les mêmes outils informatiques et la même dénomination de poste.

Traduction obligatoire

Mais dans le milieu des start-up, l’usage de l’anglais relève souvent d’une culture, où son utilisation est synonyme d’innovation. « Les mots-clés les plus utilisés sont “chief officer”, tout ce qui se termine par “manager” (“community manager”, par exemple), tout ce qui concerne le business, avec des termes comme “growth”, “account”, “owner”, “sales”, “key”… C’est très lié à l’univers des start-up et ça infuse du côté commercial », décrypte Flavien Chantrel. « Certaines jeunes structures injectent abusivement des anglicismes, se plongent dans cette tendance mais n’en ont pas forcément besoin », déplore Julien Broue.

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Situation de crise à la rédaction de « Livres Hebdo »

Des arrêts maladie en pagaille, des salariés obligés de se médicamenter pour trouver le sommeil, des crises de larmes soudaines… A Livres Hebdo, le mensuel destiné aux professionnels du livre (éditeurs, libraires, bibliothécaires), la vie de bureau tient davantage du désenchantement crépusculaire façon Connemara, le dernier roman de Nicolas Mathieu, que de situation modèle pour ouvrage de développement personnel. Alors qu’une réorganisation hiérarchique était attendue au début du mois, les équipes craignaient qu’elle ne réinstalle leur ancien rédacteur en chef, devenu directeur du développement éditorial entre-temps, dans le poste. De fait, jeudi 10 mars, Fabrice Piault a été rétabli dans la fonction qu’il occupait jusqu’à l’été 2020, faisant redouter le retour d’un management qualifié de « toxique » par plusieurs sources, ainsi que celui d’une liberté éditoriale relative.

Les licenciements intervenus dans le cadre du plan de 2020 font l’objet de huit contestations aux prud’hommes

Dès début juin 2021, quelques jours avant que le sexagénaire ne reprenne le travail après plusieurs mois d’arrêt, la rédaction avait demandé à ses représentants de « faire part de son inquiétude » en conseil économique et social. « Comment se prémunir contre les risques psychosociaux que déclenche son retour à la rédaction ? », faisait-elle demander à la direction. Le plan social qui l’a dévastée au premier semestre 2020, la réduisant de moitié, a laissé chez les huit derniers salariés et la vingtaine de pigistes des souvenirs douloureux. Intervenu dans la foulée, le licenciement pour « agressivité » d’une journaliste, Pauline Leduc, sans qu’elle puisse bénéficier des conditions du plan de départ, avait été vécu comme une injustice. « Nos relations [avec M. Piault] s’étaient brutalement dégradées quand j’ai pris la présidence de la Société des journalistes, raconte la jeune femme. Je ne faisais rien de mal, seulement porter la parole de la rédaction. »

Mise à la porte à son retour de congés maternité, après le premier confinement, elle demande désormais la nullité de son licenciement et espère obtenir une décision qui puisse faire jurisprudence – contrairement aux délégués syndicaux, les membres des sociétés de journalistes ne bénéficient d’aucune protection juridique. En tout, les licenciements intervenus dans le cadre du plan de 2020 font l’objet de huit contestations aux prud’hommes.

Positions inconfortables

La direction d’Electre, propriétaire de Livres Hebdo, s’est résolue à « déclencher une démarche d’évaluation des risques psychosociaux » le 11 janvier dernier. La plupart des réunions destinées à établir ce diagnostic s’étant déroulées « en présence de la personne à l’origine du malaise », selon plusieurs témoins, les salariés n’en attendaient pas grand-chose. Restituée oralement le 10 mars, l’enquête reconnaîtrait une « situation de crise » au magazine, mais pas de faits de harcèlement, par exemple, qui doivent empêcher le travail collectif. « On nous a dit que tout le monde, donc y compris la direction, avait souffert de la situation », indique une source.

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Au procès Deliveroo, l’art de l’esquive de deux anciens dirigeants

Chaque jour, dans les grandes agglomérations, des norias de livreurs à vélo ou en scooter slaloment entre les voitures, s’accommodent de la couleur des feux, évitent de justesse les piétons, et improvisent leur propre code de la route. Face au tribunal correctionnel de Paris, deux anciens dirigeants de Deliveroo ont fait preuve de la même dextérité, lundi 14 mars, lors de leur interrogatoire. Zigzag entre les formules, contournement d’obstacles et esquive sur le code du travail qu’il leur est reproché de ne pas avoir respecté.

De quoi Deliveroo est-elle le nom ? Est-elle seulement, comme elle l’affirme, une « plate-forme de mise en relation » entre clients, restaurateurs et livreurs indépendants ou, comme le soutient l’accusation, une société de service de livraison de repas entretenant un « lien de subordination » avec les coursiers auxquels elle fait appel ? De la réponse à cette question dépend l’appréciation du délit de « travail dissimulé » qui vaut à ses anciens dirigeants et à l’entreprise elle-même, en qualité de personne morale, de comparaître devant les juges.

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Adrien Falcon, 42 ans, a été numéro 1 en France de Deliveroo de 2015 à 2016. Sa mission, explique-t-il, était de « dupliquer à l’identique » et de « déployer » en France le modèle né deux ans plus tôt au Royaume-Uni. De la société, il propose cette définition : « Une plate-forme technologique, avec trois interactions hyperconnectées qui s’autorégulent le plus souvent. » « Ça ne nous avance pas, souffle la présidente, Sylvie Daunis. Comment expliquez-vous ce nom, Deliveroo ? A priori, ça vient de “livrer” en anglais… » « Je ne me suis pas posé la question. C’est une marque », élude le prévenu. Son argumentaire est parfaitement rodé. La plate-forme gère des « flux complexes » dont le fonctionnement repose sur « la flexibilité et la liberté », deux raisons vitales de « recourir à des indépendants. »

« Pas de surveillance »

La présidente reprend un à un les éléments de l’enquête qui, selon les conclusions de l’inspection du travail reprises par l’accusation, écornent cette affirmation d’indépendance des coursiers, en établissant un « lien de subordination. » L’existence de formations organisées par la société ? « C’était des réunions d’information », nuance Adrien Falcon. L’usage d’un logiciel pour gérer le temps de travail des livreurs ? « Pas du tout. C’est un outil qui leur permettait de choisir leurs shifts. Il y a une liberté totale pour décider quand prester, où prester et de refuser la commande. » Les consignes de porter la tenue Deliveroo sous peine de sanctions, rapportées par les plaignants ? « Ce n’était qu’une proposition pour donner de la visibilité à la marque. Et un élément de sécurité car les vestes et les sacs sont équipés de bandes réfléchissantes. »

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Emploi : des pistes pour atténuer les difficultés de recrutement

Lorsqu’ils veulent embaucher, les patrons se heurtent à des difficultés analogues à celles qui prévalaient avant la crise sanitaire. Pour les surmonter, l’une des solutions envisageables consisterait à épauler les entreprises dans leurs démarches de recrutement en faisant davantage appel à des prestataires privés. Cette piste figure dans une note diffusée, lundi 14 mars, par le Conseil d’analyse économique (CAE), un cercle de réflexion placé auprès du premier ministre. Elle est susceptible de déplaire à ceux qui considèrent que les services publics, comme Pôle emploi, sont mieux à même d’offrir une telle assistance.

Après le « choc sans précédent » de la récession liée à l’épidémie de Covid-19, le marché du travail a retrouvé « une situation très favorable (…) à partir de l’été 2021 », écrivent François Fontaine et Roland Rathelot, les deux auteurs de l’étude. Au quatrième trimestre de 2021, le taux de chômage a continué de baisser, se situant à 7,4 % – un ratio relativement élevé, mais inférieur à celui de la fin 2019 et qu’on n’avait pas connu depuis 2008. Parallèlement, le nombre de postes vacants est reparti à la hausse, si bien que « la tension semble (…) revenue, au troisième trimestre 2021, à un niveau proche ou un peu supérieur à ce qu’elle était en 2019 ».

Priorité aux PME

En réponse à ce problème, M. Fontaine et M. Rathelot suggèrent de développer des « interventions ciblées » sur les entreprises. Pôle emploi l’a fait, durant les dernières années, en déployant « ses services d’aides au recrutement » à l’intention des patrons. Une initiative qui a démontré son « efficacité », précise la note.

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Aujourd’hui, il est possible d’aller plus loin, « en renforçant les moyens » accordés à l’opérateur public, mais aussi « en externalisant une partie » de son action à des sociétés privées. L’idée est de favoriser l’émergence d’un « marché de l’accompagnement des entreprises » qui serait organisé par le « service public de l’emploi » – ce vocable regroupant des administrations de l’Etat, les missions locales, Pôle emploi, etc.

Dans ce marché seraient mis en concurrence des prestataires – privés et, « éventuellement », publics – « pour lesquels des indicateurs de performances seraient affichés ». Un tel système aurait vocation à être instauré en priorité pour les PME, celles-ci étant moins bien outillées pour procéder à des embauches. Le CAE recommande par ailleurs au « service public de l’emploi » de prendre en charge un dispositif de « tests certifiés » afin d’évaluer les aptitudes des candidats à un poste, les résultats de ces examens étant ensuite communiqués aux entreprises.

Covid-19 : plus de masque en entreprise, plus de protocole, un quasi retour à la normale

« La fin du masque va faire du bien à tout le monde. L’ambiance est beaucoup plus détendue qu’il y a un an, on sentait venir la fin des protocoles. Mais on n’est pas sortis du Covid19 », confie Amélie (les personnes citées dont le nom n’apparaît pas ont souhaité garder l’anonymat), une salariée du service marketing d’Amazon, recrutée en 2020, en plein confinement. Dans les grands groupes, on se réjouit aussi de la fin du Plexiglas entre collègues dans les cantines. Dans les TPE-PME, « on va mettre fin aux équipes restreintes et aux horaires décalés », annonce Bernard Cohen-Hadad, le président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises d’Ile-de-France.

« On va reprendre une vie normale en entreprise », affirmait, mardi 8 mars, la ministre du travail, Elisabeth Borne, en annonçant, pour lundi 14 mars, la fin des protocoles sanitaires et du port du masque obligatoire au bureau, remplacés par un « Guide des mesures de prévention des risques de contamination au Covid-19 hors situation épidémique ».

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Personne ne prévoit de festivités de sortie de crise sanitaire, car le virus est toujours là, et, avec la guerre en Ukraine, l’ambiance est lourde. Mais le soulagement est général. Le « retour à la normale » n’est toutefois pas l’avant-Covid. « L’hybride est devenu la norme dans nos entreprises », déclare Audrey Richard, la présidente de l’Association nationale des DRH (ANDRH). Les accords et chartes de télétravail continueront de s’appliquer. Quelque 1 980 accords ad hoc ont été signés rien qu’en 2020, alors que le ministère du travail n’a toujours pas communiqué de bilan pour 2021. Chez BNP Paribas, « l’accord entré en vigueur en novembre 2021 reste en place avec la possibilité de télétravailler jusqu’à 2,5 jours, sur la base du volontariat, indique une porte-parole de la direction. L’ambition est de continuer à faire évoluer les modes de travail ».

Economies

Alors qu’un salarié sur quatre travaillait à distance lors du premier confinement de 2020, ils n’étaient plus qu’un sur cinq lors du deuxième qui a pris fin en juin 2021, indique une étude de la direction du Trésor, publiée le 10 mars. Pour 2022, près d’une entreprise sur deux (45 %) interrogée, en février, par le Boston Consulting Group (BCG) et l’ANDRH a déclaré avoir révisé les fiches de poste pour élargir l’éligibilité au télétravail. « Avant la crise, on était à 15 000 télétravailleurs. Aujourd’hui, on en a 36 000 sur 56 000 postes éligibles ; 20 % ont signé un avenant pour trois jours, 60 % pour deux et 20 % pour un », détaille Gervais Pellissier, le DRH groupe Orange.

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L’argot de bureau : « VUCA », quand l’entreprise navigue à vue

« Une seule chose est certaine, c’est que rien n’est certain. » Cette maxime issue de l’Histoire naturelle de Pline l’Ancien peut être interprétée de manière assez radicale dans un sens ou dans l’autre : soit l’avenir est un nuage sombre et insondable, soit l’incertitude est pavée d’opportunités. Le dirigeant ou le salarié choisira le chemin qui lui sied le mieux, mais une chose est sûre, Pline dit vrai : avec près de deux millénaires d’avance, il vivait déjà dans le « VUCA ».

Un avenir VUCA, c’est un avenir délicat. Ce mot – ou cet adjectif, car on parle souvent d’un monde VUCA ou d’un travail en mode VUCA – est un acronyme issu de l’anglais, signifiant « volatilité, incertitude, complexité et ambiguïté ». Il désigne l’atmosphère dans laquelle évoluent les entreprises, partout dans le monde, au XXIe siècle : le terme est si large qu’il est utilisé à l’envi par les amateurs de grands discours managériaux.

Petit retour historique : nous sommes en 1991, l’URSS s’est effondrée, le mastodonte américain jubile… Mais il voit s’inviter à la table diplomatique de nouveaux pays émergents. La grille de lecture binaire de la guerre froide laisse place au multilatéralisme, et il est difficile pour l’US Army War College de décrire ce nouveau monde… Ce dernier donne naissance à VUCA, un prisme pour analyser les plans stratégiques qui s’annoncent : il impose d’être toujours sur ses gardes.

Un concept économique

Au tournant de l’an 2000, l’économie s’est emparée de l’acronyme : la mondialisation et les progrès technologiques s’enchaînant à toute vitesse ont entraîné la volatilité des marchés et bouleversé la stratégie des multinationales. L’incertitude, quant à elle, reflète l’asymétrie d’information des différents acteurs, incapables de savoir comment les autres répondront, tandis que la complexité s’explique par la multiplication des parties prenantes. Enfin, toute information est ambiguë car elle peut être interprétée de différentes façons.

Le management, ou plutôt les consultants ad hoc, ont digéré le terme dans la foulée, même s’il est par exemple difficile de transposer à l’échelle humaine un concept aussi purement économique que la « volatilité des marchés ». Dans un monde VUCA, où tout va à vau-l’eau, le patron avance dans une purée de pois.

Si l’on navigue à vue, la solution est un cap, une vision claire : comme toujours, le collectif sera sauvé en réagissant avec souplesse, réactivité et agilité. La réponse du leadership passe, pour le professeur de management à Harvard Bill George, par un « VUCA 2.0 » : vision, compréhension (understanding), courage et adaptabilité. Dans une tribune sur le site de Forbes, on trouve « client » et « agile » pour les deux dernières initiales.

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