Archive dans janvier 2022

Cas contacts, salariés positifs, parents d’enfants malades : les intérimaires se font rares dans le BTP et la logistique, les employeurs se les arrachent

« Pas de télétravail pour les ouvriers du BTP et de l’industrie, des secteurs friands de personnel intérimaire.  »

« Le téléphone n’arrête pas de sonner », confie Gilles Cavallari, le président de Samsic Emploi. En ce mois de janvier, le personnel de ses agences d’intérim croule sous les sollicitations d’entreprises qui cherchent à recruter des intérimaires pour pallier les absences de leurs salariés en arrêt maladie pour cause de Covid-19. « On a actuellement entre 5 % et 11 % de nos intérimaires qui sont cas positifs. On essaie de répondre au minimum à une demande d’entreprise sur deux, mais on n’arrive pas à les satisfaire toutes », note Gilles Cavallari.

Pas de télétravail pour les ouvriers du BTP et de l’industrie, des secteurs friands de personnel intérimaire. Sur les chantiers ou dans des entrepôts, les salariés demeurent en première ligne face à la pandémie. « On a vu des taux d’absentéisme monter jusqu’à 40 % dans certaines entreprises, déplore Gaëtan Deffrennes, le directeur général de Randstad. C’est en train de se calmer, mais on a encore beaucoup de salariés parents d’enfants malades qui doivent rester à la maison pour les garder. »

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Chez Adecco, le constat est plus nuancé. « Bien qu’il y ait des sollicitations accrues de la part de nos clients liées à l’absentéisme causé par la vague Covid de ce mois de janvier 2022, en particulier dans les secteurs de la grande distribution et de la logistique, nous ne constatons pas un “boom” spectaculaire des remplacements, relate une porte-parole d’Adecco. Dans des secteurs comme le BTP, certaines missions sont repoussées. En ce qui concerne la restauration, le télétravail étant synonyme de baisse d’activité, il n’y a pas de boom de missions. »

De l’hôtellerie à la logistique

Un effet de « vases communicants » compense en partie la pénurie de personnel, note Gaëtan Deffrennes. Les salariés de secteurs encore en berne, comme l’hôtellerie-restauration, n’hésitent pas à postuler dans des filières qui recrutent en masse. « Depuis 2020, on a vu les salariés de l’hôtellerie-restauration se tourner vers l’industrie et la logistique, un secteur qui a explosé avec la livraison à domicile. Ils ont découvert des horaires davantage compatibles avec une vie de famille, et ils sont restés. Un secteur qui reste compliqué, c’est le BTP. Beaucoup d’entreprises hésitent à prendre de nouveaux chantiers. »

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La crise sanitaire aggrave les pénuries de personnel dans la logistique et le bâtiment, des secteurs qui étaient déjà en tension avant la crise, s’accordent à dire les acteurs de l’intérim. « On met trois fois plus de temps pour recruter un cariste ou un préparateur de commandes », avoue Gilles Cavallari. A l’instar du personnel ultra-qualifié de la tech, les entreprises s’arrachent désormais les intérimaires du BTP et des plates-formes de distribution de colis.

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En Belgique, la forte inflation relance le débat sur l’indexation automatique des salaires

Les centres d’appel des compagnies débordés, les centres d’aide sociale de plus en plus sollicités, les décideurs politiques hésitants quant aux mesures à prendre : la flambée des prix du gaz, de l’électricité et des carburants est « le » sujet du moment en Belgique. Selon la Commission de régulation de l’électricité et du gaz, la facture annuelle d’électricité d’un ménage belge moyen a grimpé en 2021 de 400 euros, s’établissant à près de 1 321 euros, quand, en France, la facture restait quasiment stable, autour de 700 euros. Celle du gaz a bondi de 1 539 euros (2 800 euros par an), alors qu’en France la progression est de 964 euros, s’établissant à 2 572 euros.

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Selon le Bureau fédéral du Plan, la hausse de la facture énergétique représente à elle seule près de la moitié de l’inflation, qui devrait s’établir à 6,67 % en janvier et culminer à 6,77 % en février. Un taux record depuis 2008, bien au-delà de l’objectif de 2 % de la Banque centrale européenne. Il est dû, aussi, à une forte augmentation du prix des produits alimentaires, des biens industriels non liés à l’énergie et du gasoil de chauffage, très prisé par les ménages. A la fin de 2020 déjà, le taux d’inflation belge dépassait de 0,7 point celui de la zone euro, qui s’établissait à 4,9 %.

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De quoi inquiéter la population, faire hésiter le gouvernement quant aux mesures à prendre et s’interroger le monde patronal : selon le Voka, groupement des entrepreneurs de Flandre, l’addition devrait s’élever à 11 milliards d’euros pour les firmes du pays. La cause ? Le mécanisme d’indexation automatique des salaires. Lorsque les prix d’un panier de produits dépassent un plafond, les allocations sociales et les rémunérations de la fonction publique sont adaptées sans discussion. L’adaptation des salaires se fait aussi dans le privé, mais de manière différée, après que des conventions sont négociées par secteurs.

Un potentiel « saut d’index »

Défendue bec et ongles par la gauche et les puissants syndicats, l’indexation automatique, également en vigueur sous une forme atténuée dans quelques autres pays européens, fut dénoncée naguère par la Banque centrale européenne, l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’Allemagne d’Angela Merkel et la France de Nicolas Sarkozy. Tous estimaient qu’il alimentait une spirale inflationniste : l’augmentation des prix entraîne une hausse des rémunérations, d’où un nouvel accroissement des prix puisque les entreprises y intègrent la progression du coût salarial. Le tout handicapant la compétitivité et l’emploi.

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A Blois, les convoyeurs de fonds en grève pour un dégel des salaires

La caisse centrale de Blois, austère bunker blanc derrière la gare SNCF, fait travailler une soixantaine de salariés, chacun s’appelant par un surnom et utilisant un jargon très singulier : « sécurisation de la phase trottoir », « mallette Axytrans », entend-on sur le parking où reviennent au compte-gouttes quelques véhicules, blindés ou non. Ces routiers armés collectent ou livrent les devises des banques, restaurants McDonald’s, supermarchés et certains bars-tabacs entre Chartres et Yzeures-sur-Creuse (Indre-et-Loire). Ils se partagent le marché avec le groupe américain Brink’s. Le site de Blois est l’un des 64 que compte la société suédoise Loomis.

Eric Grelet, 54 ans, adepte de krav-maga et moniteur de tir en club, est convoyeur depuis vingt-trois ans. Ce colosse gagne autour de 2 000 euros net par mois, avec 400 euros de prime de sécurité, d’habillement et de repas inclus. Face aux hausses de l’essence, des produits alimentaires et du gaz, l’intersyndicale (FO, CGT, CFDT, UNSA, CFTC) a lancé un appel à une augmentation des salaires. Ils demandent une hausse de 95 euros brut (+ 5 %). La direction leur a accordé 25 euros, soit, dans le détail, une hausse de 0,6 % en avril, puis de 0,4 % en septembre et de 1 % en janvier 2023. « Ce n’est pas dans notre culture de faire grève, mais on déplace des fonds très importants et on se bat pour une augmentation dérisoire pour au moins amortir l’inflation », explique ce délégué syndical FO, dont le salaire n’a plus varié depuis trois ans. « Pendant le Covid-19, on a toujours travaillé mais on n’a jamais été récompensés… Il n’y a jamais eu de prime Macron, par exemple. »

Débrayages serrés

Eric travaille en trinôme dans des camions blindés ou en binôme, lorsqu’on lui confie des valises intelligentes où stocker les billets. « Lesquelles implosent si vous dépassez le temps imparti entre le véhicule et le sas de livraison, ou si vous vous éloignez un peu trop de l’itinéraire. On a connu deux braquages à Blois… c’est un métier dangereux et qui restera dangereux. On est bien d’accord que tous les jours, on risque notre vie », explique cet employé au regard porté sur chaque passant qui approche.

D’une grève totale, le mouvement social, suivi à plus de 80 %, a évolué à Blois en débrayages serrés. « On démarre à 8 heures et on arrête à midi. Comme on rayonne dans la région et qu’un blindé ne roule qu’à 90 km/h, cela veut dire qu’une tournée à Chartres ou à Chinon [Indre-et-Loire], qui, normalement, compte entre vingt et trente arrêts, n’en compte désormais que deux, puisqu’il faut déjà 1 h 45 pour y aller ! Je peux vous dire que beaucoup de magasins et de distributeurs ne sont plus approvisionnés. »

Covid-19 : soulagement des professionnels de la culture après les annonces de Jean Castex

Lors d’un concert à l’AccorHotels Arena, à Paris, en mai 2021.

Les professionnels l’attendaient avec impatience. Jeudi 20 janvier, le premier ministre, Jean Castex, a annoncé un allègement « gradué et progressif » des restrictions sanitaires qui frappent le secteur culturel depuis le début de l’année. Concrètement, les spectacles se déroulant avec un public assis pourront avoir lieu sans jauge à partir du 2 février. Depuis le 3 janvier, la capacité maximale des salles avait été fixée à 2 000 spectateurs en intérieur et à 5 000 en extérieur, ce qui avait entraîné l’annulation de nombreuses manifestations.

Pour les concerts debout, qui étaient purement et simplement interdits depuis le 3 janvier, à l’intérieur comme à l’extérieur, les professionnels devront attendre le 16 février avant de pouvoir reprendre leur activité. Un délai supplémentaire jugé nécessaire par le premier ministre pour « absorber les effets du pic épidémique » et s’assurer d’un réel reflux de la cinquième vague de contamination, alors que plus de 425 000 cas positifs au Covid-19 ont été encore enregistrés jeudi.

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Cette reprise d’une activité normale se fait à une condition : les spectateurs âgés de 16 ans et plus devront, dès le 24 janvier, présenter un passe vaccinal, c’est-à-dire un schéma vaccinal complet, pour pouvoir entrer dans une salle de spectacle, un cinéma ou un musée. Seuls ceux âgés de 12 à 15 ans pourront encore présenter un passe sanitaire et être admis dans un lieu culturel avec un simple test négatif. Les enfants de moins de 12 ans ne sont pas concernés par ces restrictions. Le port du masque, en revanche, reste obligatoire pour tout le monde.

« On sort enfin du flou artistique »

Sans surprise, ces annonces ont été plutôt bien accueillies par les professionnels. « On sort enfin du flou artistique. Depuis la fin décembre [2021], on réclamait un calendrier pour pouvoir travailler avec les producteurs et programmer des concerts. Dès demain, le public va pouvoir recommencer à acheter des places sereinement », se réjouit Daniel Colling, le président des Zénith de Paris, Nantes et Toulouse, qui avait suspendu tous les spectacles et concerts prévus dans ses salles en janvier.

« C’est bien, on avait besoin de visibilité, on l’a demandé et on l’a eue, abonde Angelo Gopee, directeur général de la filiale française de Live Nation, le plus gros organisateur de concerts au monde. Mais il faut être réaliste, le public va avoir du mal à s’y remettre. Quand on a rouvert l’an dernier, beaucoup de salles ont continué à souffrir à cause de la lassitude des gens. On va devoir encore recaler des dates la semaine prochaine. Notre activité ne devrait reprendre normalement que fin mars. »

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Un million d’entreprises créées en 2021 en France, signe d’attractivité ou de précarité ?

« Un record tout simplement historique. » Le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, s’est félicité, lundi 17 janvier, du nombre d’entreprises créées en 2021 en France – un million –, qu’il considère comme le signe d’un regain d’attractivité du pays.

Avec 995 868 entreprises créées en 2021, « cela représente une augmentation de 17,4 % par rapport à 2020, elle-même une année record avec près de 850 000 entreprises créées », détaille un communiqué du gouvernement.

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Deux tiers de microentrepreneurs

Les données de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), sur lesquelles s’appuie M. Le Maire, apportent cependant une nuance de taille : parmi ces créations d’entreprises, près de deux tiers étaient des microentreprises. Si on les exclut, le nombre d’entreprises créées en 2021 n’est plus que de 354 325.

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La différence est importante. Le régime de l’autoentrepreneur créé en 2009 – devenu microentrepreneur depuis 2014 – est bien souvent plus fragile que celui des entrepreneurs classiques.

Selon une étude publiée par l’Insee en juillet 2021, les microentrepreneurs retiraient en 2019 en moyenne 590 euros par mois de leur activité non salariée, soit 6,5 fois moins que les non-salariés classiques (essentiellement des entrepreneurs individuels ou des gérants majoritaires de sociétés à responsabilité limitée). L’étude précise ainsi :

« Leur faible revenu est lié à la nature de ce régime, qui impose des plafonds sur les chiffres d’affaires pour en bénéficier. Un sur quatre gagne moins de 100 euros par mois, la moitié moins de 330 euros et un sur dix plus de 1 510 euros. »

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Indépendance et précarité

Gage d’indépendance, le statut de microentrepreneur s’est imposé ces dernières années pour les personnes qui souhaitent lancer leur activité. Ce régime simplifié offre une exonération de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à condition de ne pas dépasser certains seuils et une exonération partielle de charges sociales pendant la première année d’activité.

A la fin de 2019, la part des microentrepreneurs augmentait dans presque tous les secteurs, selon l’Insee :

« Elle atteint 75 % dans le commerce de détail hors magasin (sur les marchés ou à distance) et jusqu’à 98 % dans les activités de livraison à domicile et de coursiers urbains. »

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Si cette promesse d’affranchissement du salariat est séduisante, elle est aussi synonyme d’instabilité et de petits boulots. Parmi les microentrepreneurs, 29 % cumulaient leur activité avec un travail salarié à la fin de 2019. L’arrivée de la crise sanitaire, en 2020, a aggravé les choses. Un sondage publié au début de 2021 par l’Union des autoentrepreneurs montrait que, si plus de 83 % des personnes interrogées sur un échantillon de 3 320 répondants avaient repris une activité à l’issue du deuxième confinement, ils n’étaient que 10 % à avoir récupéré au moins 60 % de leur chiffre d’affaires de l’année précédente.

L’autoentrepreunariat peut aussi être subi, et s’apparenter à du salariat déguisé sous la coupe d’une entreprise ayant recours à des microentrepreneurs pour ne pas avoir à les employer. Sanctionnée par la loi, la dissimulation d’emploi salarié est caractérisée, selon l’Urssaf, lorsque « les personnes employées fournissent un travail à un donneur d’ordre, dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci ; et que le donneur d’ordre a volontairement pu échapper à ses obligations d’employeur par ce moyen ».

Lire la tribune : Article réservé à nos abonnés L’hypothétique retraite des micro-entrepreneurs

Des microentreprises moins pérennes

Une autre enquête de l’Insee montre que les microentreprises sont moins pérennes que les entreprises individuelles classiques :

« Cinq ans après leur immatriculation au premier semestre 2014, un tiers des autoentrepreneurs ayant démarré leur activité sont toujours actifs. Pour la même génération, la proportion d’entrepreneurs individuels classiques pérennes à cinq ans est beaucoup plus élevée (53 %). »

Derrière le chiffre record de 995 000 entreprises créées en 2021, on trouve ainsi 641 000 nouveaux microentrepreneurs, dont le profil ne correspond pas toujours à l’image du patron fortuné.