Archive dans 2021

Le rapport qui acte la fin de la croissance folle des plateformes VTC

L’ère de l’ubérisation a-t-elle pris fin ? Partout, par petites touches, sont apparus depuis plus d’un an les signes d’un affaiblissement de l’économie ultralibéralisée des plates-formes numériques de transport de personnes, dont le californien Uber est l’inventeur. Les décisions de régulation des villes ou des Etats se multiplient, les chauffeurs réclament des statuts moins précaires. Dernier épisode en date : au Royaume-Uni, Uber a cédé et accordé le 16 mars à ses chauffeurs d’être des « travailleurs salariés ».

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Un rapport, publié mardi 6 avril, consacré à l’activité des transports publics particuliers de personnes (T3P), autrement dit les taxis et les voitures de transport avec chauffeur (VTC), vient confirmer cette impression. Signé par Jean-Charles Simon, économiste, président-fondateur de la société d’études Stacian, le travail de recherche a été réalisé – détail important – à la demande de l’Union nationale des industries du taxi (Unit). M. Simon était déjà auteur, en 2016, d’un rapport sur le même sujet, avec le même commanditaire, mettant en évidence les risques liés à la saturation de ce marché des T3P avec la montée fulgurante des plateformes de VTC.

En 2021, la tonalité du nouveau rapport Simon a changé. L’étude note d’abord le puissant coup d’arrêt de l’activité des T3P : probablement autour des − 40 % en France en 2020, avec des creux à − 90 % pendant le confinement strict du printemps. Surtout, le rapport met en évidence le fait que le secteur a atteint un point de bascule majeur avant même la pandémie. « A l’arrivée du Covid, le secteur des taxis et VTC présentait tous les signes d’un marché en phase de consolidation », résume M. Simon.

Tendance au recul

Pour étayer sa thèse, l’auteur dispose, en France, de peu de chiffres directs. Le rapport fustige d’ailleurs le fait que la transmission de données sur les T3P prévue dans la loi Grandguillaume de 2016 n’est pour le moment pas appliquée. Mais il repère les signaux de ce retournement. Alors que le nombre de chauffeurs de VTC a explosé dans les années 2016-2018 (on est passée de 13 500 inscrits au registre des VTC en 2015 à 47 500 début 2020, contre 18 500 taxis l’an dernier), la préfecture de police indique des hausses inférieures à 10 % à partir de fin 2018.

Pour la première fois, en 2020, les revenus des livraisons ont dépassé chez Uber ceux des VTC

De même, le nombre d’inscrits aux épreuves d’admissibilité taxis-VTC en Ile-de-France était en recul de 2,5 % entre 2019 et 2020, alors qu’il avait augmenté de 53 % entre 2018 et 2019. Quant à la vaste enquête transports de l’Observatoire de la mobilité en Ile-de-France, elle indiquait pour 2019 une stabilisation du ratio des déplacements en T3P : 60 % en VTC et 40 % en taxis.

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L’Etat vole au secours d’Air France en devenant son premier actionnaire

Avions de la compagnie Air France, le 15 septembre 2014, à l’aéroport d’Orly (Val-de-Marne).

Réuni en urgence un lundi de Pâques, le conseil d’administration d’Air France-KLM a approuvé, lundi 5 avril, les conditions de l’accord passé entre le gouvernement français et la Commission européenne pour une nouvelle aide financière de l’Etat à Air France. Pour participer à la recapitalisation de la compagnie, Paris va ouvrir en grand son porte-monnaie et apporter un nouveau coup de pouce.

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Il y a un an, le gouvernement avait déjà accordé 7 milliards d’euros à la compagnie aérienne sous la forme de deux dispositifs : un prêt garanti par l’Etat (PGE) de 4 milliards d’euros et un prêt d’Etat de 3 milliards d’euros. Selon l’accord intervenu avec Bruxelles, ce prêt d’actionnaire va être transformé en obligations convertibles, des instruments financiers considérés comme des quasi-fonds propres.

En sus, jusqu’à 1 milliard d’euros pourra être apporté en cash en échange d’une montée dans le capital d’Air France. Avec ces nouvelles dispositions, la compagnie ne devra plus rembourser, comme elle s’y était engagée, l’aide de 3 milliards d’euros en quatre ans, mais sur une période beaucoup plus longue. Cette opération se fera à l’occasion d’une augmentation de capital.

Juste sous les 30 %

Comme le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, l’a confirmé, mardi 6 avril, « l’Etat va monter au capital d’Air France-KLM » pour redevenir « le premier actionnaire » de la compagnie, avec une participation pouvant aller jusqu’à 29,9 %. Juste sous les 30 %, pour ne pas avoir à lancer une offre publique d’achat (OPA) sur la totalité du capital. Cette opération se traduira par une recomposition du tour de table du groupe franco-néerlandais.

En février 2019, les Pays-Bas étaient montés de façon surprise et agressive à hauteur de 14 % du capital d’Air France-KLM pour égaler les 14,3 % de la participation de la France au tour de table. Cette fois, les autorités néerlandaises ont indiqué qu’elles ne suivraient pas la future augmentation de capital. De même, l’américaine Delta Airlines, qui détient 8,8 % du capital, a fait savoir qu’elle ne participerait pas non plus à l’augmentation de capital. Seule China Eastern, qui possède aussi 8,8 % des parts, a indiqué qu’elle participerait à l’opération, mais que sa participation future sera « strictement inférieure à 10 % du capital social ».

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Si Bruxelles a donné son feu vert à la recapitalisation, la Commission européenne a posé ses conditions. Elle a obtenu qu’Air France abandonne 18 « slots », des créneaux de décollages et d’atterrissages quotidiens, à Orly et à Roissy. Ces contreparties ont fait l’objet de négociations acharnées entre Paris et Bruxelles. A l’origine, la Commission européenne exigeait d’Air France qu’elle abandonne 24 slots quotidiens, comme elle l’avait demandé à l’allemande Lufthansa pour valider un plan d’aide financière.

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Une journée avec les sages-femmes de l’hôpital d’Arpajon : « Ce qui se passe dans les maternités, ce n’est pas tout rose »

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Publié aujourd’hui à 10h00, mis à jour à 13h03

« Cigognes mais pas pigeonnes ». L’affiche accrochée dans l’entrée de la petite maternité du centre hospitalier d’Arpajon (Essonne) sonne comme un cri de cœur. Voilà plusieurs mois que les sages-femmes hospitalières se mobilisent partout en France pour demander une reconnaissance du caractère médical de leur profession, une hausse des salaires et davantage d’effectifs… avec l’impression de ne pas être entendues par le gouvernement. « Code rouge ! », ont-elles écrit en majuscules pour signifier leur colère et alerter les futurs parents sur leurs conditions de travail. Pour cette profession très majoritairement féminine, ces deux mots disent l’urgence de la situation : il s’agit d’une césarienne à réaliser en cas de menace immédiate de pronostic vital maternel ou fœtal. L’ultime recours.

Dans le hall d'accueil de la maternité du centre hospitalier d'Arpajon, le 19 mars.

Peu avant 8 heures, Fouzia Berbere descend au bloc obstétrical, situé au moins un, et enfile sa blouse violet clair. Elle commence sa garde de douze heures. Epaulée par deux infirmières et deux aides puéricultrices, la sage-femme de 34 ans est briefée sur les dossiers médicaux des trois patientes en salle de naissance ce vendredi matin. Le relais fait avec l’équipe de nuit, il faut vérifier que le « respirateur néonat » fonctionne correctement, tout en surveillant l’écran qui réunit les « monitos » (lesquels mesurent à la fois le rythme cardiaque du bébé et les contractions de l’utérus). Sa jeune collègue sage-femme, Catherine Albagli-Curiel, actualise les tableaux Veleda des patientes avec le nombre de semaines de grossesse, la dilatation, la ou les méthode(s) de déclenchement s’il y a, dans les chambres Lilas, Jonquilles et Mimosas.

A cela s’ajoute la paperasse à remplir à la main : le futur logiciel de centralisation des dossiers ne sera pas mis en place avant juin. Tout en répondant aux inquiétudes des trois femmes enceintes, il faut s’occuper du codage des actes et des entrées-sorties sur ordinateur, tandis que pour les certificats de naissance et surtout des dossiers périnataux, il est nécessaire de recopier des informations sur la santé de la mère et de l’enfant à venir, sur deux, voire trois autres documents manuscrits.

Dans l’îlot central, entre les salles de naissance, de réanimation et le bloc opératoire, le 19 mars. L'équipe en service de jour fait le point sur l'évolution des quatre accouchements en cours ce jour-là.

Autour de l’îlot central – la « tour de contrôle » située au croisement des différentes salles de naissance –, on prépare dans la bonne humeur les bracelets de naissance, on parie sur le poids des enfants à venir, les vannes fusent et des rires éclatent : l’équipe est soudée pour traverser les épreuves. « Contrairement à ce qu’imagine la société, ce qui se passe dans les maternités, ce n’est pas tout rose. Il y a des fausses couches, des enfants mis en danger par leur mère en post-partum, des femmes qu’il faut détecter comme victimes de violences conjugales », raconte Fouzia, diplômée en 2010. Mais « ici, on sait qu’on peut compter les unes sur les autres. »

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La papeterie de Bègles au bout du rouleau

L’usine compte aujourd’hui 91 employés en passe d’être licenciés (ici, un des hangars, le 2 mars).

Dans la cour de la papeterie de Bègles, des croix en bois ont été disposées sur le sol. Elles sont l’incarnation d’une aventure marquée de moult rebondissements, depuis que l’entreprise propriétaire, Etex, a annoncé, en octobre 2020, son désengagement. Après des négociations menées avec trois repreneurs potentiels, il n’en reste désormais plus qu’un, Global Hygiène, avec qui Etex est entré en négociation exclusive le 23 mars. Les deux entreprises devront se mettre d’accord d’ici à l’été.

Certains salariés, quant à eux, n’ont pas dit leur dernier mot. Réunis le 10 mars en association, ils souhaitent également proposer un projet de reprise. En attendant le dénouement, l’usine, créée en 1929, qui fabrique aujourd’hui du papier pour plaques de plâtre, s’arrêtera, et ses 91 employés seront licenciés. Certains seront peut-être réembauchés dans le cadre du nouveau projet industriel, d’autres bénéficieront du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) négocié par les syndicats ou partiront à la retraite, après avoir passé presque quarante ans dans l’usine béglaise.

Bois de la forêt landaise

Lorsqu’elle ouvre ses portes, au début du XXsiècle, la papeterie de Bègles s’intègre très vite dans le paysage urbain de cette ville idéalement située aux portes de Bordeaux. En bordure de Garonne, à proximité de la gare Saint-Jean, Bègles est à l’époque le lieu idéal pour implanter une usine de cette taille, qui produit à l’époque de la pâte à papier avec du bois de la forêt landaise. Mieux, les odeurs de fabrication ne viennent pas importuner les Bordelais.

En 1960, l’usine, qui emploie 600 personnes, est rachetée par la Cellulose du Pin (groupe Saint-Gobain) et se spécialise dans le papier stratifié. Ensuite, la société Lafarge Plâtres reprend le site, qui fabrique alors ce fameux papier pour plaques de plâtre à partir de fibres recyclées, cœur de l’activité aujourd’hui.

« Il y a des compétences en France et on laisse partir toutes ces industries pour, le jour où on en a besoin, se demander où elles sont. » Daniel Castanon, délégué syndical de l’usine

Enfin, en 2011, le groupe belge Etex devient à son tour propriétaire. Pour le syndicat Filpac-CGT de la papeterie, cette dernière opération a entraîné la fin de l’usine. « Ils savaient déjà qu’on était limites en termes d’investissement, et ils n’ont jamais investi, à part dans la maintenance. Donc, quelque part, c’était déjà une volonté stratégique de leur part », dénonce Daniel Castanon, 58 ans, délégué syndical de l’usine.

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Eric Dupond-Moretti veut créer des droits sociaux du détenu travailleur

Le ministre de la justice Eric Dupond-Moretti part après une réunion hebdomadaire du cabinet à l’Elysée, à Paris, le 31 mars 2021.

Cette promesse du chef de l’Etat sera tenue. Dans le projet de loi « pour la confiance dans l’institution judiciaire » que le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti, devrait présenter mi-avril au conseil des ministres, un volet important est consacré au statut du travailleur détenu. En mars 2018, Emmanuel Macron avait souhaité « que le droit du travail, en étant adapté évidemment à la réalité et aux contraintes de la prison, puisse s’appliquer aux détenus ».

Un « contrat d’emploi pénitentiaire » est ainsi inscrit dans le projet de loi. Signé par la personne détenue, le chef d’établissement et l’entreprise privée concessionnaire qui l’emploie, il introduit une véritable révolution derrière les barreaux. Un entretien préalable permettra notamment aux employeurs de choisir qui ils prennent dans leurs ateliers, suivi d’une période d’essai. La contrepartie sera le paiement en heures supplémentaires pour les dépassements d’horaires prévus au contrat. Les modalités de rupture de celui-ci seront précisées par décret et les éventuels contentieux seront jugés par les tribunaux administratifs, pas les prud’hommes. L’administration pénitentiaire gardera le droit de « déclasser » un détenu du travail pour les mêmes motifs disciplinaires qu’aujourd’hui.

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Nicolas Ferran, responsable juridique de l’Observatoire international des prisons (OIP), se réjouit de voir cette vieille revendication voir le jour. Mais il demande à rester prudent. « Le principe du contrat est une bonne chose, mais l’important ce sont les droits et obligations du détenu et de l’employeur qui seront dans le contrat », prévient-il. Or, tout n’est pas encore précisé. L’autre revendication de l’OIP, un niveau minimum de rémunération se rapprochant du smic, risque, en revanche, d’être déçue.

Dans un second temps, de nouveaux droits sociaux devraient être créés. Le projet de loi prévoit de demander au Parlement l’autorisation de légiférer par ordonnance sur ces sujets qui doivent encore faire l’objet de discussion, par exemple avec l’assurance-chômage.

Droits au chômage, à la retraite…

Actuellement, les droits au chômage qu’une personne peut avoir au moment de son incarcération sont perdus au bout de trois ans. Une solution devra donc être prévue pour qu’elle conserve ces droits au moment de sa libération. Non seulement elle a cotisé, mais c’est en outre un élément déterminant pour accompagner le moment de la sortie qui est toujours une phase délicate. Autre innovation : les détenus devraient pouvoir cotiser à l’assurance-chômage pour acquérir des droits au titre du travail effectué pendant leur incarcération.

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Congés, télétravail, chômage partiel : les salariés contraints de s’adapter

Les annonces d’Emmanuel Macron, mercredi 31 mars, pour tenter d’endiguer la progression de l’épidémie de Covid-19, ont causé quelques maux de tête aux parents d’élèves et de nourrissons tout comme aux employeurs. Fermeture – pendant trois à quatre semaines – des crèches, écoles, collèges et lycées ; bouleversement du calendrier des vacances scolaires, désormais fixées du 10 au 26 avril sur l’ensemble de l’Hexagone… Ces décisions chamboulent les plans de millions de ménages qui avaient prévu de s’octroyer quelques jours de repos pour la période de Pâques.

Elles les plongent aussi dans des situations où la poursuite de l’activité professionnelle durant le mois d’avril s’annonce compliquée, avec des enfants qui auront « école à la maison ». Autant d’imprévus soulevant des questions très concrètes : si des dates de congés ont déjà été posées, peuvent-elles être modifiées ? Un salarié peut-il réclamer le chômage partiel dans l’hypothèse où il ne sait comment faire garder sa progéniture ?

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Ces sujets ont été abordés lors d’une réunion, jeudi, entre la ministre du travail, Elisabeth Borne, le secrétaire d’État chargé des retraites et de la santé au travail, Laurent Pietraszewski, et les partenaires sociaux. A l’issue de ce temps d’échanges en visioconférence, le ministère a fait savoir, par un communiqué, que les patrons « sont invités à faciliter la prise de congés » de leurs personnels qui ont des enfants « sur les nouvelles dates de vacances scolaires », en recommandant que des solutions soient trouvées « dans le cadre du dialogue ». « Mme Borne a proposé que des mesures de bon sens soient prises et que les parties en présence, au sein des entreprises, se mettent d’accord pour décaler les vacances, pour ceux qui en avaient posé sur la première et la dernière semaine d’avril », relate Eric Courpotin (CFTC).

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Les services de Mme Borne ont indiqué, jeudi, que le délai pour caler les congés – « habituellement d’un mois » – pourra être raccourci « en bonne entente » entre l’employeur et ses équipes : le but est que des compromis soient conclus si un travailleur souhaite changer les dates où il sera absent. Le ministère a, dans le même temps, rappelé qu’une ordonnance du 16 décembre 2020 offre la faculté à un dirigeant de société d’imposer jusqu’à six jours de congés payés à sa main-d’œuvre si un accord collectif sur le sujet existe. « Nous allons nous organiser au mieux pour tenir compte des contraintes de chaque collaborateur et de celles de l’entreprise », confie Benoît Serre, vice-président de l’Association nationale des directeurs des ressources humaines.

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Covid-19 et troisième confinement : assistantes maternelles, télétravail… Suivez les dernières informations

Clément Beaune donne des détails sur le « pass vert »

« Le pass vert, ce n’est pas une espèce de sésame pour aller au restaurant ou au théâtre. Le sujet européen, c’est de retrouver, le moment venu, vers l’été, de la circulation. Circuler librement, c’est un acquis européen important, mais aujourd’hui, ce n’est pas le cas pour des raisons sanitaires. L’idée de ce pass sanitaire, et pas seulement vaccinal, c’est d’avoir une application ou un petit papier qui dirait « Test PCR », ou « vaccin » ou « immunité » parce que vous avez eu le Covid et ça permettrait de retrouver de la circulation en Europe. Chaque Etat décidera s’il utilise ce petit outil ou pas. Je pense que l’on passera du test obligatoire pour circuler à ce petit document pour circuler en Europe. Pour l’instant, c’est fermé. Grâce à ce pass, on pourrait retrouver un peu de mobilité et c’est bien qu’il y ait un cadre européen. »

« Est-ce le rôle de la loi que de transformer la “tricoche” en retraite chapeau ? »

Tribune. La proposition de loi « sécurité globale » offre une nouvelle occasion de saisir l’importance d’une facilitation sans véritable limite de la relation ambiguë qu’entretiennent les sociétés privées et certains agents, qui exercent souvent de hautes responsabilités de la fonction publique.

Depuis environ trois décennies, la mission régalienne essentielle qu’exerce la force publique constitue un marché en expansion constante dans lequel les fonctionnaires de la police et les militaires de la gendarmerie trouvent des opportunités lucratives de compléter une retraite que des régimes spéciaux permettent de prendre dans la fleur de l’âge.

On ne compte plus les anciens hauts fonctionnaires de la police ou hauts gradés de la gendarmerie qui exercent la fonction de directeur de la sécurité dans des entreprises, parfois prestataires de services pour le ministère de l’intérieur, ou qui créent des officines de conseil en sécurité pour vendre à leur profit les compétences que le service de l’Etat leur a permis d’acquérir.

Jalousie

La proposition de loi autorise à craindre un accroissement de l’attractivité de la sécurité privée pour ces personnes titulaires de l’autorité publique, au risque de la confusion des genres que les actuels dispositifs en matière de transparence et de conflits d’intérêts ne permettent manifestement pas de circonscrire efficacement.

Aux termes de l’article 15 de ce texte, il est créé un régime dérogatoire de cumul emploi-retraite et prévu que, par dérogation aux dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite, « les revenus perçus à l’occasion de l’exercice d’une activité [de sécurité privée] peuvent être entièrement cumulés avec la pension s’agissant des retraités des catégories actives de la police nationale ». En clair, les policiers prenant leur retraite pourront cumuler leur pension et leur nouveau salaire s’ils vont pantoufler dans le domaine de la sécurité privée.

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Officiellement, il ne s’agit que d’offrir aux fonctionnaires de police le même privilège que celui dont jouissent déjà les militaires de la gendarmerie. Après l’usage des armes, la loi doit donc permettre à nouveau d’apaiser la jalousie d’une des composantes du ministère de l’Intérieur envers l’autre.

Qu’importe que le Conseil constitutionnel consacre la sujétion particulière du seul état militaire comme un motif d’exception juridique et que la carrière des gendarmes s’effectue dans des conditions bien différentes de celles des policiers ; qu’importe aussi que le secteur de l’action publique qui fut longtemps présenté comme le plus vertueux, avec des fonctionnaires qui ne pantouflaient pas, soit désormais concerné au premier chef.

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Travail en prison : un label et des projets

Dans le centre de détention d’Oermingen (Bas-Rhin), des détenus assemblent des colliers de serrage en plastique, le 18 mars.

A Nice, depuis six mois, des détenus font les repas des surveillants. Le « mess », service de restauration du personnel pénitentiaire, de la maison d’arrêt a rouvert en septembre 2020 avec comme particularité d’avoir mis des détenus aux fourneaux. Grâce à un partenariat avec le Forum Jorge François, association niçoise, ils sont cinq condamnés en fin de peine à y travailler tout en se formant au métier de commis de cuisine, une formation diplômante.

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Une goutte d’eau face à l’océan d’oisiveté qui submerge les détentions. Seules 28,5 % des personnes incarcérées ont aujourd’hui un travail en détention. Ils étaient 49,7 % en 2000. Emmanuel Macron avait promis en mars 2018 d’inverser la tendance lors d’un important discours sur la dignité en détention prononcé devant les élèves de l’Ecole nationale d’administration pénitentiaire.

« Dans beaucoup de maisons d’arrêt, les détenus, parce qu’ils n’ont pas le choix, sont dans leur cellule près de vingt-deux heures par jour, désœuvrés », avait déploré le chef de l’Etat, voyant dans cette oisiveté imposée « le plus sûr moyen de les précipiter dans la désocialisation et de ruiner leurs chances de retour à une vie normale ».

Mettre « l’activité au cœur de la peine »

A un an de la fin du quinquennat, la pression monte à l’Agence du travail d’intérêt général et de l’insertion professionnelle (ATIGIP) pour que l’engagement présidentiel de mettre « l’activité au cœur de la peine, qu’il s’agisse de travail ou de formation » ne reste pas lettre morte. Dirigée par Albin Heuman, l’ancien conseiller social et modernisation de Nicole Belloubet à la justice, l’agence mise sur pied début 2019 jouit d’un atout.

Travailler permet aux détenus de « cantiner », c’est-à-dire acheter divers biens et services, mais aussi commencer à rembourser les amendes dues et les parties civiles à indemniser

Directement rattachée au ministère de la justice avec le statut d’agence nationale, elle réunit des prérogatives (travail, formation, TIG) auparavant réparties entre plusieurs services de l’administration pénitentiaire. « Cela a permis d’avancer sur des sujets qui étaient en jachère depuis plusieurs années », constate M. Heuman, notamment lors des réunions interministérielles.

Du point de vue des détenus, travailler permet d’abord de gagner un peu d’argent pour « cantiner », c’est-à-dire acheter divers biens (cigarettes, nourriture, revues, etc.) ou services (communications téléphoniques, téléviseur, frigo, etc.), commencer à rembourser les amendes dues et les parties civiles à indemniser. Une partie de la rémunération est bloquée pour être remise au détenu au moment de sa libération. Avec un taux horaire allant en principe de 25 % à 45 % du SMIC et un travail organisé par demi-journée, la rémunération moyenne oscille entre 200 euros et 600 euros par mois.

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