Archive dans 2021

Réforme de l’assurance-chômage : les réserves de Muriel Pénicaud

L’ancienne ministre du travail, Muriel Pénicaud, à Matignon, en avril 2019.

La réforme de l’assurance-chômage n’en finit pas de causer des contrariétés à Elisabeth Borne. Cette fois-ci, c’est la prédécesseure de la ministre du travail qui en est à l’origine. Lancée dans une campagne de promotion pour son livre, Pousser les murs (L’Observatoire, 352 pages, 21 euros), Muriel Pénicaud vient de laisser entendre que la temporalité choisie pour transformer le régime d’indemnisation des demandeurs d’emploi n’était pas forcément la bonne, les nouvelles dispositions devant entrer en vigueur à partir du 1er juillet, en plusieurs étapes.

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De la part de celle qui avait conçu, en 2019, la réforme incriminée, dans sa première version, ces déclarations constituent une pierre de plus dans le jardin de Mme Borne, qui s’ajoute à celles déposées par les syndicats. Vendredi 21 mai, plusieurs organisations de salariés, parmi lesquelles la CFDT, la CFE-CGC, la CGT, FO, devaient confirmer, séparément mais de façon coordonnée, qu’elles avaient saisi le Conseil d’Etat pour contester les règles introduites par un décret du 30 mars. Des règles qui durcissent les conditions d’accès au dispositif et les modalités de calcul de la prestation.

A deux reprises, Mme Pénicaud est revenue sur le sujet ces derniers jours. Mercredi 19 mai, sur Paris Première, celle qui est aujourd’hui la représentante de la France à l’OCDE a rappelé que, lorsque la réforme avait été présentée, il y a deux ans, les indicateurs étaient « au vert ». Une réflexion déjà présente dans l’ouvrage qu’elle vient de publier. « Quand on est en croissance et que l’on s’approche du plein-emploi, ce n’est pas la même chose que quand on est dans une crise comme aujourd’hui où il y a beaucoup d’incertitudes », a-t-elle développé.

L’exécutif a revu sa copie

Selon elle, « les systèmes d’assurance-chômage doivent tenir compte des contextes » et « le gouvernement a d’ailleurs modifié ce qui était prévu ». Une allusion au fait que, après avoir repoussé l’application des mesures les plus contestées en raison de la crise, l’exécutif a revu sa copie sur plusieurs points-clés : ainsi, les baisses du montant mensuel de l’allocation seront, en moyenne, moins importantes, par rapport à celles qui auraient découlé des dispositions prises en 2019, pour les demandeurs d’emploi alternant petits boulots et périodes d’inactivité.

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Jeudi, sur RTL, l’ex-ministre du travail a tenu des propos qui laissaient entrapercevoir des états d’âme sur ce dossier. D’abord, elle a indiqué que « de façon générale [elle] ne commente pas » l’action du gouvernement, sans doute pour signifier que sa fonction à l’OCDE l’oblige à une certaine retenue. Ce qui ne l’a pas empêchée ensuite de souligner qu’il y a « des discussions en cours » entre le pouvoir en place et les partenaires sociaux, et qu’« il faut continuer à discuter puisqu’il faut vraiment qu’une réforme de l’assurance-chômage soit adaptée à un contexte ».

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Dans la Sarthe, l’ancienne papeterie d’Arjowiggins va fabriquer des gants chirurgicaux

Le président de la République, Emmanuel Macron, lors de sa visite à l’usine Kolmi-Hopen de Saint-Barthélemy-d'Anjou (Maine-et-Loire), le 31 mars 2020.

Ce sont deux histoires industrielles qui, au bout du compte, finissent par se rejoindre. D’un côté, celle du fabricant de masques chirurgicaux Kolmi-Hopen, en difficulté au mitan des années 2010, mais qui se trouve aujourd’hui dopé par la crise sanitaire due au Covid-19 ; de l’autre, celle d’Arjowiggins, dont la papeterie de Bessé-sur-Braye (Sarthe) a été liquidée en mars 2019, laissant du même coup 568 salariés sans emploi.

Le premier connaît depuis un an une activité exponentielle. La production de l’usine de Saint-Barthélemy-d’Anjou, dans le Maine-et-Loire, est ainsi passée de 300 000 masques par jour avant l’épidémie à 3 millions aujourd’hui. Elle fonctionne désormais en continu, vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Un deuxième site a même dû être ouvert de l’autre côté d’Angers, à Beaucouzé, en juillet 2020, portant l’effectif total à 260 personnes.

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Ce regain de santé se matérialise à travers un nouveau projet qui vise à fabriquer des gants chirurgicaux. Kolmi-Hopen vient en effet de remporter l’appel d’offres lancé par le Réseau des acheteurs hospitaliers et s’apprête à investir 40 millions d’euros pour produire plus de deux milliards d’unités par an. Et c’est l’ancienne usine sarthoise d’Arjowiggins qui a été choisie pour accueillir cette production, après avoir été mise en balance avec celle du fabricant de pneus Bridgestone à Béthune (Pas-de-Calais), fermée en septembre 2020.

« La marche à franchir est assez réduite »

« Ce qui a fait la différence, ce sont les caractéristiques techniques du site. Le bâtiment était mieux adapté et les délais pour obtenir les autorisations plus courts. On pouvait démarrer de manière sécurisée dès 2022 », se réjouit Agnès Pannier-Runacher, la ministre déléguée à l’industrie. L’Etat va financer le projet à hauteur de dix millions d’euros. Quant à la région Pays de la Loire, elle apportera cinq millions.

Le directeur général de Kolmi-Hopen, Gérald Heuliez, juge qu’il lui faudra de 150 à 200 salariés pour lancer la production de gants, et même 300 à terme

La présidente du conseil régional, Christelle Morançais (Les Républicains), est, elle aussi, soulagée par cette perspective. « 60 % des salariés d’Arjowiggins n’ont toujours pas retrouvé d’emploi », explique l’élue de la Sarthe, candidate à un nouveau mandat aux élections des 20 et 27 juin. Des formations seront proposées à ces demandeurs d’emploi afin de leur permettre d’intégrer le projet. « La marche à franchir est assez réduite. Les anciens d’Arjowiggins sont a priori qualifiés, et ils connaissent le site. Sincèrement, je ne suis pas inquiète sur la capacité de Kolmi-Hopen à mettre en place des passerelles éventuelles », observe Mme Pannier-Runacher.

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Quand l’idée devient produit : la création d’une entreprise innovante décryptée

Le livre. Comment de jeunes ingénieurs créent-ils une nouvelle entreprise dans un secteur qui leur est totalement étranger ? Et comment y trouvent-ils une place face à des acteurs puissants ? Pour certains, les entrepreneurs qui réussissent seraient dotés de dispositions spécifiques. Mais aucune étude scientifique ne démontre qu’ils ont des qualités innées. Pour d’autres, la réussite s’explique par une idée géniale. Pourtant l’idée de Mark Zuckerberg lorsqu’il crée Facebook est loin d’être originale : à l’époque, de puissants réseaux sociaux existent déjà.

Plutôt que d’étudier le couple que forme cet être singulier que serait l’entrepreneur et l’idée géniale que lui seul a repérée, Philippe Mustar regarde de près ce que font les entrepreneurs. Dans L’entrepreneuriat en action, le professeur à l’Ecole des mines de Paris raconte la création de trois start-up technologiques et donne à voir, en acte, l’émergence de leurs innovations radicales.

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Un siège d’avion ultraléger pour Expliseat, une imprimante à ADN pour DNA Script, et le reciblage publicitaire personnalisé sur Internet pour Criteo : au commencement, les idées de produits des trois start-up présentées dans cet ouvrage ne sont pas révolutionnaires. C’est la transformation de cette idée en un produit ou service qui intéressera des utilisateurs ou des clients.

Comment les équipes mettent-elles concrètement au point leur produit ? Quels types de ressources mobilisent-elles pour faire se rencontrer leur innovation technologique et un marché ? Comment élaborent-elles leur business model ? Le livre suit le processus qui se déploie du moment où les entrepreneurs « démarrent avec quelques vagues idées à celui où leur entreprise a mis au point un produit qui rencontre l’intérêt d’utilisateurs ou de clients prêts à payer pour l’utiliser ».

Outil pédagogique

Destiné aux étudiants entrepreneurs, aux ingénieurs et à celles et ceux qui veulent créer ou participer à la création d’une entreprise technologique, le texte est conçu comme un outil pédagogique pour comprendre le processus d’innovation entrepreneuriale. A la différence de nombreux récits de créations d’entreprise, « où l’on présente la maison terminée sans les échafaudages qui ont permis de la construire », le lecteur est invité à entrer dans ces expériences, racontées dans trois chapitres qui peuvent se lire de façon indépendante. « Ils racontent le chemin, à chaque fois long et sinueux, suivi par ces projets pour tenter de réaliser ce que le langage des start-up appelle le “product/market fit”. »

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« La crise sanitaire a brutalement révélé l’insuffisante protection sociale des travailleurs indépendants »

Tribune. Tout le monde s’accorde à reconnaître que les indépendants ont été les plus frappés par la crise du Covid-19. Parmi eux, plusieurs centaines de milliers d’auto-entrepreneurs « non intermédiés » – c’est-à-dire des travailleurs indépendants n’exerçant pas pour le compte de plates-formes – dont beaucoup sont passés à travers les mailles du filet des aides pendant et entre les trois confinements, parce qu’ils ne pouvaient justifier d’un volant d’affaires suffisant, qu’ils ne relevaient pas des bons secteurs, ou qu’ils avaient repris partiellement leur activité.

Les récentes études menées par l’Union des auto-entrepreneurs (UAE) et par l’Union-indépendants démontrent la fragilité de cette population qui doit impérativement être accompagnée dans cette période transitoire entre confinement et reprise, et révèlent le faible nombre d’entre eux à avoir obtenu les aides de l’Etat. Près de 59 % d’entre eux n’ont perçu aucune des aides malgré leur demande ou leur éligibilité.

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Ces « nouveaux » indépendants, nés depuis 2009 avec le régime de l’auto-entrepreneur ont été particulièrement touchés car ils ne relèvent pas de professions réglementées ou protégées et exercent pour la plupart dans les services à la personne. Plus grave encore, leur statut juridique et leur situation économique ne leur donnent que peu accès aux financements traditionnels.

Transformation du fonds de solidarité en fonds de relance

Pour compenser leur baisse d’activité, la plupart de ces indépendants qui ont été beaucoup moins nombreux que d’autres à solliciter et à obtenir un prêt garanti par l’Etat (PGE), ont dû s’endetter auprès de leurs proches ou par des crédits à la consommation renouvelables, pour faire face. Ils se trouvent aujourd’hui, comme beaucoup de petites entreprises et peut-être plus encore en proportion, confrontés au « mur de la dette ».

Ce tableau serait désespérément sombre si ces indépendants étaient prêts à baisser les bras. Bien au contraire, ils souhaitent dans leur écrasante majorité (87 % selon l’étude de l’UAE) pouvoir reprendre l’exercice de leur activité professionnelle sous cette forme, et les Français continuent plus que jamais à se lancer sous ce statut depuis la crise. Au début 2021, la barre des 2,3 millions d’auto entrepreneurs a été franchie, dépassant aujourd’hui en nombre toutes les autres catégories d’indépendants d’avant 2009 qui restent stables aux environs de 1,2 million.

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Et pourtant, le printemps sanitaire qui s’annonce risque de les laisser au bord du chemin si aucun dispositif de relance n’est imaginé pour les aider à redémarrer dans de bonnes conditions. La transformation du fonds de solidarité en fonds de relance devient une nécessité, car en dépendra le maintien de l’activité des 2,3 millions indépendants, 10 % de notre population active.

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« Les plates-formes doivent prendre leurs responsabilités face à la précarité et la mise en danger de leurs livreurs »

Tribune Le jeudi 6 mai, à Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime), un livreur à vélo a perdu la vie, alors qu’il essayait péniblement de la gagner. Il s’appelait Chahi et laisse derrière lui une femme et quatre enfants. Après une journée pluvieuse et froide, cet homme de 41 ans livrait un repas sous pression, dans la fatigue et le surmenage. Nous apportons notre plus grand soutien et nos pensées à sa famille, à ses proches, à ses collègues.

Ce drame n’est malheureusement pas le premier, il doit être le dernier. Aujourd’hui en France, environ 4 % de la population active dépend directement des plates-formes en ligne de ce type. En Europe, ce sont 24 millions de personnes qui en vivent totalement ou partiellement. On estime qu’en 2024, ce modèle de livraison pourrait représenter 20 % des ventes des restaurants.

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La massification de cette activité doit s’accompagner d’une régulation du modèle d’exploitation inhumain de ces plates-formes et d’une protection des livreurs en vertu du droit du travail. En effet, le qualificatif d’« autoentrepreneur » est bien loin de la réalité de leur quotidien. Plusieurs décisions de justice ont déjà permis de faire la lumière sur les pratiques intolérables de ces plates-formes.

Le lien de subordination

Car le lien de subordination est avéré entre ces entreprises, leurs algorithmes et les livreurs. Rythme de travail infernal, systèmes de notation, de pénalités infligés par les plates-formes sur des critères de performance et de disponibilité. Voici la « liberté » qu’elles vantent tant. Les verdicts s’accumulent partout et sont sans appel.

Pas de contrat de travail, aucun droit ni protection sociale, pas de cotisation retraite, chômage, pas de congés, pas d’indemnisation ni couverture des frais médicaux en cas d’accidents hormis de très rares motifs précisés dans les contrats d’assurance des plates-formes.

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Pas de salaire minimum non plus, ni de rémunération pendant les temps d’attente, elle est fixée à la tâche, au nombre de kilomètres parcourus, calculée en toute opacité par les applications. La cadence de travail des livreurs leur est imposée à la fois par les algorithmes des plates-formes, par les exigences d’immédiateté des clients, et par cette forme de rémunération qui leur impose de travailler le plus possible, sans pause ni congé.

L’Espagne en pionnière

Plus d’un siècle après la naissance du droit du travail, les pratiques des plates-formes qui les exploitent constituent un effrayant retour en arrière. Avec des conséquences toutes plus graves les unes que les autres. Là où ces droits constituent également une régulation de la concurrence sociale entre les travailleurs, le modèle prédateur de ces plates-formes impose à celles et ceux qui sont les plus précaires, celles et ceux qui n’ont pas le choix, de faire le travail que personne d’autre ne veut faire.

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En Allemagne, la concurrence entre les plates-formes de livraison s’intensifie

Coursier de l’entreprise de livraison Wolt dans le quartier berlinois de Kreuzberg, le 12 février 2021.

A Berlin, la « guerre de la pizza », qui sommeillait depuis deux ans et demi, est sur le point d’entrer dans une nouvelle phase. En l’espace de quelques mois, le quasi-monopole dont bénéficiait le géant néerlandais Takeaway.com dans les services de livraison de repas par coursiers a été brisé. Mercredi 12 mai, de façon inattendue, le groupe allemand Delivery Hero a annoncé son intention de revenir sur son marché d’origine, après s’en être retiré fin 2018. Quelques jours plus tôt, c’est l’américain Uber Eats qui avait attaqué le marché, après le finlandais Wolt mi-2020.

Cette fois, l’enjeu n’est plus uniquement la pizza, les burgers ou les sushis. Ce qui s’ouvre, c’est une bataille sans pitié entre les plates-formes pour la domination du marché allemand de la livraison de proximité ultrarapide. Elle oppose différents acteurs – grands groupes cotés en Bourse et start-up – qui tous sont prêts à essuyer des pertes énormes pour s’imposer.

L’affrontement se tient dans les quelques rues les plus en vue des métropoles, Berlin en tête, là où vivent et travaillent les jeunes actifs pressés et connectés, très consommateurs des services de commande depuis leur smartphone. Et pour mener l’offensive, tels des pions sur un jeu d’échecs, des livreurs, jeunes travailleurs le plus souvent armés d’un vélo (parfois d’une voiture) et de l’emblématique sac à dos cubique, aux couleurs de l’entreprise.

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Pourquoi un tel baroud, sur un marché où les marges sont notoirement très faibles ? La pandémie de Covid-19 a fait reconsidérer les perspectives d’affaires. La fermeture des restaurants et des commerces non essentiels a fait exploser la demande d’intermédiation du commerce et de la livraison, une tendance qui devrait se maintenir à l’avenir, jugent les plates-formes et les investisseurs. Aujourd’hui, ce ne sont plus seulement les repas qui sont proposés à la livraison à domicile ou au bureau, mais tous types de produits de la vie courante : courses alimentaires, chaussures ou ordonnances de pharmacie. Le tout, toujours plus vite, en moins de 30 minutes, voire en moins de 10 minutes.

Contre-offensive

C’est la promesse donnée par la start-up berlinoise Gorillas, fondée en 2020. Au vu du dernier tour de table effectué par la jeune entreprise, qui a levé 244 millions d’euros le 25 mars dernier, les investisseurs semblent croire qu’à l’avenir de moins en moins de personnes feront elles-mêmes leurs courses. Le modèle d’affaires de la start-up, baptisé « Quick commerce » (commerce rapide), est de transformer radicalement le fonctionnement de la chaîne de distribution classique : en lieu et place des supermarchés et commerces où l’on se rend, Gorillas livre directement au consommateur à partir de petits sites de stockage urbains, les « Dmarts ». Elle n’est pas la seule sur ce créneau : d’autres start-up (Flink, Grovy, Bringoo), proposant peu ou prou les mêmes services, ont poussé ces derniers mois en Allemagne.

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Iziwork souhaite concilier hypercroissance et management respectueux

« On se sent rassurés, les choses vont dans le bon sens. Je ne vais pas jusqu’à saluer l’action de Balance ta start-up, mais cela a permis de faire bouger les choses. » Pour Johanna Pretot, manageuse depuis huit mois chez Iziwork, comme pour nombre de ses collègues, le début d’année 2021 marque un renouveau managérial.

Lancée en septembre 2018, la start-up française a gravi les échelons à une vitesse fulgurante. Elle porte un projet ambitieux : digitaliser l’intérim, par le biais d’une plate-forme qui facilite la recherche de missions pour les intérimaires. En janvier, elle annonçait une nouvelle levée de fonds de 35 millions d’euros. Juste avant d’être rattrapée par les excès de son management, dénoncés en janvier 2021 par des témoignages anonymes sur la page Instagram Balance ta start-up (BTS).

Profond mal-être

Des dizaines d’anciens salariés pointaient du doigt la charge de travail extrême dans les bureaux parisiens d’Iziwork. Pour certains, l’atmosphère stressante et l’absence de limites entre vie privée et vie professionnelle furent la cause d’un profond mal-être. « Les commerciaux finissaient à 21 heures ou 22 heures, quand ils sortaient ils allaient picoler pour tenir, se souvient un ancien développeur. Deux ou trois amis ont perdu 20 kilos et ont fait un burn-out. On voyait des gens pleurer dans les bureaux. »

Le non-respect du droit du travail est aussi au cœur des critiques : plusieurs anciens évoquent au Monde des contacts persistants en dehors des horaires de travail, des licenciements abusifs quand les objectifs ne sont pas respectés, ou un nombre anormalement élevé de ruptures conventionnelles. « On vous force à faire signer des ruptures conventionnelles pour vous faire dégager », peut-on lire sur la plate-forme Glassdoor. Le cofondateur, Mehdi Tahri, réfute de telles pratiques et affirme que la société n’a connu que quatre licenciements et trois procédures aux prud’hommes en deux ans et demi.

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Tous les salariés contactés reconnaissent que l’hypercroissance d’Iziwork, conjuguée à la crise sanitaire, n’a pas favorisé la prise en compte de ce mal-être. « Entre janvier 2019 et fin 2020, l’entreprise est passée de 30 à 250 collaborateurs, le chiffre d’affaires a été multiplié par dix, explique Mehdi Tahri. Pour une entreprise aussi jeune, ça pose un certain nombre de questions. » Depuis sa naissance, l’entreprise a connu un fort turnover et des réorganisations fréquentes.

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Restaurateurs cherchent serveurs désespérément : la tentation des contrats courts

Carnet de bureau. Le restaurant « bistronomique » de Bruille-lez-Marchiennes, dans le Nord, recherche serveur ; idem chez Mama, à Lille ; tout comme la crêperie Octopus, à Paris ; le restaurant Le Clos normand, à Saint-Aubin-sur-Mer, recherche un plongeur. « Après sept mois de fermeture consécutifs, j’ai deux cuisiniers de partis », regrette Yann France, le chef de La Flambée à Deauville qui compte une dizaine d’employés. L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) évalue à 110 000 le nombre de départs liés au Covid.

Les terrasses viennent de rouvrir mercredi 19 mai, le service en salle devrait suivre partiellement le 9 juin et complètement le 30. Mais la main-d’œuvre est difficile à trouver et déjà le conseil scientifique exprime ses craintes qu’une quatrième vague de Covid ne sonne le glas de cette reprise d’activité. Comment recruter dans un tel contexte d’incertitude ?

« Je ne vais pas prendre de risque »

La quasi-totalité des établissements de la branche déplorent le manque de visibilité. « Habituellement, d’avril à juin, on prenait toujours des saisonniers, mais on a seulement maintenant un début de visibilité pour rouvrir avec une jauge de 50 %. Et à partir du 30 juin, les préfets auront la main pour décider de l’ouverture des établissements en fonction de l’évolution du risque sanitaire, décrit Yann France. Pour ma part, je ne vais pas prendre de risque. Je vais recruter mes deux cuisiniers et faire avec l’équipe existante et les heures supplémentaires. D’autres prendront des contrats courts », confie-t-il.

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« Il y a différentes stratégies, décrit Frédéric de Boulois, président de l’UMIH Loire-Atlantique. Certains réduisent leurs heures d’ouverture faute de personnel, d’autres font de la modulation de contrat de travail. Il y a un tel besoin de personnel pour juillet-août, que certains vont volontairement surstaffer, car du personnel risque de partir en cours de route ».

Le recrutement a commencé. « Ceux qui ont des terrasses ont anticipé, en commençant par faire le point avec leur équipe pour savoir qui revenait. Pendant cette période de rodage, s’il manque un chef de cuisine, il faut vite le trouver. L’encadrement en général est resté, mais pour le reste on arrive à compenser avec des étudiants en extra », explique Michel Bédu, président d’UMIH Formation.Avant le Covid, le secteur était très gourmand en contrats courts. La branche représentait plus de 1 million d’emplois, répartis entre les salariés (612 300), les indépendants (plus de 134 000) et les saisonniers (environ 380 000 dans la filière hébergement & restauration) et extras. « Dans l’hôtellerie-café-restauration (HCR), le recours aux contrats courts apparaît comme un instrument de gestion à l’économie des ressources humaines », note la Dares dans une vaste analyse sur les motivations des employeurs à recourir aux contrats courts.

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Réforme de l’assurance-chômage : « Face à la précarisation des saisonniers du spectacle, nos remerciements ne suffiront pas… »

Tribune. Tout en préparant l’été culturel, nous craignons, dans le même temps, la réforme de l’assurance-chômage, dont le second volet, applicable au 1er juillet 2021, va avoir un impact négatif immédiat sur de nombreuses personnes, dont les travailleurs en contrat court, et plus particulièrement les saisonniers. Notre filière du spectacle en parle peu et, pourtant, que serions-nous sans eux ?

Assistants à la communication, personnels d’accueil, de billetterie, techniciens informatiques, métiers de la convivialité, chauffeurs, gardiens, standardistes, agents d’entretien, renforts administratifs… Un nombre important de ces salariés en contrat saisonnier reviennent depuis plusieurs années, dans une fidélité réciproque. Le Festival d’Avignon les a formés, ils acceptent l’incertitude de leurs emplois pour retrouver les professionnels et les festivaliers au moment où l’on a besoin d’eux, ils participent ainsi au plaisir des spectateurs, au service public de la culture, à la réussite économique de toute une filière, ils sont acteurs et actrices d’une mission d’intérêt général. Nos remerciements risquent de ne pas suffire face à la précarisation annoncée.

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Depuis l’entrée en vigueur du premier volet de la réforme, ces salariés flexibles ont déjà été fragilisés par le durcissement des conditions de rechargement des droits. Avant novembre 2019, un demandeur d’emploi en cours d’indemnisation qui reprenait une activité pendant au moins un mois pouvait prolonger ses droits à l’assurance-chômage pour une durée équivalente. Depuis la mise en œuvre du premier volet de la réforme, il lui faut au moins six mois pour les recharger.

Le second volet entrera en application en juillet. A compter de cette date, les indemnités journalières seront calculées sur la base du revenu mensuel moyen, en tenant compte des jours d’inactivité (moins bien rémunérés), et non plus sur la base des seuls jours travaillés. Ce mode de calcul, qui fera automatiquement diminuer le montant de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE), ajouté au durcissement des règles d’indemnisation, va lourdement pénaliser des salariés saisonniers qui alternent contrat court et période d’inactivité.

Coût social calamiteux

Ainsi, les contrats courts désavantagent ces demandeurs d’emploi, alors même que ceux-ci n’ont pas le choix de la durée des contrats auxquels ils peuvent accéder. Comme leur nom l’indique, le recours à cette typologie de salariés répond à un besoin induit par la saisonnalité de l’activité, qu’il s’agisse du tourisme, de la restauration, de l’agriculture ou des festivals.

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Les policiers manifestent à Paris pour réclamer des peines plus lourdes pour les agresseurs des forces de l’ordre

Hommage au brigadier Eric Masson tué au cours d’une opération antidrogue, devant le commissariat d’Avignon (Vaucluse), le 9 mai 2021.

La « marche citoyenne » prévue mercredi 19 mai à Paris, à deux pas de l’Assemblée nationale, devait être un hommage au brigadier Eric Masson, tué le 5 mai à Avignon au cours d’une opération antidrogue, et à Stéphanie Monfermé, agente administrative de police assassinée par un terroriste à Rambouillet (Yvelines) douze jours plus tôt. Ce sera finalement une démonstration de force voulue, conçue et organisée par les syndicats de policiers. Le bénéfice politique en est déjà certain : chefs de partis, candidats déclarés à l’élection présidentielle de 2022, états-majors et parlementaires ont annoncé en nombre leur intention de s’y rendre.

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Lundi, en déplacement dans l’Eure, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a confirmé qu’il irait, lui aussi, saluer les manifestants : « La colère des policiers est légitime. Nous sommes tous dans le même bateau pour lutter contre l’insécurité. » Un ministre qui manifeste « contre sa propre inaction », a ironisé François-Xavier Bellamy, député (Les Républicains, LR) au Parlement de Strasbourg.

Qu’importe si le calendrier électoral explique en grande partie cette ruée vers l’ordre, à un mois du scrutin régional et à peine plus d’un an de la présidentielle, alors que la sécurité s’est imposée comme une thématique majeure de la campagne à venir. Pour les syndicats, l’essentiel est de peser « politiquement ». Pari tenu, de ce point de vue. A droite, Damien Abad, patron des députés LR, conduira une délégation réunissant pratiquement tout son groupe ; Xavier Bertrand, candidat aux élections régionales dans les Hauts-de-France, en sera aussi.

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Sous les deux écrans géants diffusant des scènes de violences contre les forces de l’ordre et un clip d’hommage aux policiers morts, ils devraient y croiser Jordan Bardella, numéro deux du Rassemblement national, Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, ou Fabien Roussel, candidat communiste à l’élection présidentielle, favorable à une « peine de trente ans de prison » en cas d’assassinat de « tout détenteur d’une autorité ».

L’eurodéputé écologiste Yannick Jadot fera également le déplacement – en solitaire, toutefois. « Chacun est libre d’aller ou non [à la manifestation], il n’y a pas d’appel », a apprécié Sandra Regol, secrétaire nationale adjointe d’Europe Ecologie-Les Verts, à l’annonce de sa décision de se joindre au mouvement. Seul Jean-Luc Mélenchon a prévenu sur Facebook : pas question pour La France insoumise de cautionner « l’ambiance générale de surenchère sécuritaire ».

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