Archive dans 2021

L’équipe décidera qui viendra sur site à Noël

Carnet de bureau. L’équipe pourrait devenir maître d’œuvre du travail du futur. Les entreprises confrontées à la persistance du télétravail ont planché sur des modes de réorganisations durables, qui ont abouti à des accords d’entreprise très divers, analysés dans son rapport du 7 décembre par l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact). Les plus avancés dans le développement du travail hybride, qualifiés d’« expérimentaux » par l’Anact, offrent plus d’autonomie au collectif. Après les accords de branche et les accords d’entreprise, ils donnent ainsi naissance à l’« accord d’équipe » informel mais déterminant pour le quotidien des salariés.

Comment répartir le travail en présentiel ou à distance ? Combien de jours télétravailler ? Comment réguler la charge de travail ? Comment contrôler l’activité ? Comment revenir provisoirement à l’organisation antérieure ? Autant de questions auxquelles les entreprises doivent pouvoir répondre rapidement et régulièrement au rythme des vagues de la pandémie.

Pour ce faire, certaines ont établi une cartographie des activités, des métiers, voire des tâches réalisables en télétravail en association étroite avec les équipes. On les retrouve dans les accords « expérimentaux », qualifiés ainsi pour leur durée déterminée. Chez BNP Paribas, par exemple, la cartographie des activités télétravaillables réalisée à partir du travail d’équipe a une clause de revoyure semestrielle.

Pour une réorganisation plus efficiente

Autre exemple, l’assureur AXA, passé au fil de la crise de un à trois jours de télétravail par semaine, a ainsi repensé le management, la technologie, l’utilisation des locaux. Concrètement, « des accords d’équipe ont été établis avec les manageurs pour redéfinir quels formats sont gérables à distance, comment les documents doivent être transmis, etc., avec des règles propres à chaque équipe. Ces accords nous ont permis d’accompagner la transition du retour au bureau », explique Amélie Watelet, la DRH France du groupe.

Dans l’industrie aussi, chez Michelin, c’est l’équipe qui sera maître d’œuvre dans la conception du travail hybride. L’accord triennal signé le 2 décembre met, à partir de janvier 2022, « l’équipe au cœur du dispositif » afin que les salariés du groupe pneumatique définissent « les missions nécessitant du présentiel et donc le nombre de jours de télétravail et leur positionnement ».

En présence d’un « référent télétravail » chaque collectif sera invité à estimer les besoins du service et la performance du salarié selon qu’il est sur site ou à distance. Michelin a jugé que c’est à ce niveau que la réorganisation serait la plus efficiente, y compris concernant l’espace de travail. Les équipes sont également appelées à décider de quels bureaux elles ont besoin.

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Négociations sous tension dans l’hôtellerie-restauration

Une terrasse parisienne, en mars 2021.

Les négociations dans l’hôtellerie-restauration vont-elles enfin commencer ? Un mois après une réunion sans réel dialogue, syndicats et patronat du secteur se rencontrent, jeudi 16 décembre, sous le regard scrutateur du gouvernement et du grand public, après que la crise de l’emploi a mis en évidence les conditions de travail du secteur.

Manque de main-d’œuvre et pression politique : enhardies par ce contexte favorable, les organisations syndicales voient là une occasion rare de mettre à jour la convention collective d’un secteur très éclaté, où leur influence est relative. Mais les employeurs du secteur sont peu habitués aux concessions. « Est-ce que j’ai une tête de Père Noël ? », interrogeait Thierry Grégoire, le négociateur de l’Union des métiers et industries de l’hôtellerie (UMIH), lors du congrès de l’organisation patronale, fin novembre, à Strasbourg.

Les employeurs y ont disserté sur la panne d’attractivité de l’hôtellerie-restauration et ses conséquences sur l’activité : étages d’hôtels fermés faute de personnel de ménage, service unique dans les restaurants privés de cuisiniers ou de serveurs. Pas moins de 237 000 salariés ont quitté le métier durant la pandémie, et 30 % des postes sont non pourvus, selon l’UMIH.

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Ils ont aussi pu évaluer l’impatience du gouvernement à leur égard. Après avoir déversé des milliards d’euros sur une industrie contrainte à la fermeture, puis consenti à la défiscalisation des pourboires et annoncé une campagne de communication de 10 millions d’euros pour aider à recruter, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a d’entrée mis les professionnels devant leurs responsabilités : « Je souhaite que les négociations salariales permettant une augmentation substantielle (…) puissent être conclues avant la fin de l’année 2021 ; en tout cas c’est l’espoir que je mets dans vos négociations. » Le parterre est resté silencieux. Dans un message vidéo, Elisabeth Borne, ministre du travail, a apporté l’addition : « Votre secteur doit répondre à un enjeu d’attractivité. (…) Je suivrai de près les résultats de cette négociation qui, je l’espère, aboutira à un compromis ambitieux. Au-delà de la rémunération, les négociations de branche doivent prendre en compte la qualité de l’emploi. »

Les syndicats « comptent sur l’œil du ministère »

En septembre, la ministre avait convoqué les employeurs afin de préparer le terrain, offrant « un point de vue assez musclé et positif pour nous », selon Arnaud Chemain, le négociateur de la CGT : « On espère pouvoir compter sur l’œil du ministère, qui a donné ses exigences : on aimerait que les employeurs les écoutent, s’ils n’entendent pas les nôtres. » Depuis, le contexte sanitaire et économique a changé, la reprise est de nouveau incertaine, et si des discussions ont lieu actuellement entre les employeurs et le gouvernement, il est davantage question d’un retour des aides que d’une généreuse augmentation des salaires.

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Rencontres RH : comment utiliser les formes d’emploi flexibles sans occulter leur précarité

Et si le CDI était voué à s’éteindre à petit feu ? C’est ce que laisse entrevoir l’avis des trois directeurs des ressources humaines qui ont participé à la vingtième édition des Rencontres RH, le rendez-vous mensuel de l’actualité du management créé par Le Monde, qui s’est tenu mardi 7 décembre à Paris, en petit comité.

CDD, intérim, sous-traitance, activité partielle, auto-entrepreneuriat… Le faible nombre de présents dit beaucoup de la frilosité des DRH à parler de la frange précaire de leurs effectifs, pourtant loin d’être dérisoire. L’économiste Thomas Coutrot, souffrant, n’ayant pas pu participer à la discussion en direct, a été joint ultérieurement par téléphone. Il dresse un constat clair : « Les CDD et l’intérim représentent 12 % de l’emploi salarié total en France, contre 5 % au début des années 1980. Sur les embauches, 85 % sont en CDD. Surtout, les contrats sont de plus en plus courts. En quinze ans, ils sont passés de vingt à cinq mois en moyenne. »

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Avant d’évoquer la précarité, les DRH présents ont vanté l’utilité du travail flexible dans leur domaine respectif. A commencer par l’entreprise de sécurité privée Panthera, qui compte pourtant 95 % de CDI dans ses effectifs, mais recourt à la sous-traitance et à l’intérim dans l’une de ses filiales. « Dans l’urgence, la sous-traitance et l’intérim sont des outils de flexibilité. L’activité a redémarré mais on craint d’embaucher en CDI, » explique le DRH, Alexis Berthel, qui met en avant l’intérêt d’être souple dans l’incertitude de la crise sanitaire.

Des questionnements sur le CDI

Dans le secteur de la prestation intellectuelle, les consultants sont souvent des indépendants payés à la journée. « La sous-traitance est un de nos piliers, avec un réseau de 1 200 intervenants vacataires, souvent autoentrepreneurs. L’intérêt pour nous, PME de 400 salariés, c’est qu’on ne va chercher leur expertise que ponctuellement », remarque Christophe Le Bars, DRH de la Cegos, leadeur de la formation professionnelle. Laurence Breton-Kueny, la DRH de l’organisme de certification Afnor, fait un constat similaire : « La majorité de nos 1 000 contrats sont en CDI, mais pour les activités de certification, on prend des auditeurs, aujourd’hui environ 1 600. Il y a aussi beaucoup de prestataires sur les métiers informatiques, car c’est très difficile de recruter. »

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A ces avantages s’ajoute l’observation que de plus en plus de travailleurs questionnent le CDI à l’ancienne. Selon les trois DRH présents, ce n’est pas la priorité des salariés. « On a des salariés qui quittent l’entreprise pour 30 euros de plus, note Alexis Berthel, donc, pour beaucoup, le CDI ne fait plus rêver, conclut-il. L’avantage du CDD, c’est que les gens perçoivent la prime de précarité, c’est important, surtout dans les activités hypertendues où ils peuvent trouver du travail facilement. C’est le cas de la sécurité privée. » Thomas Coutrot relativise le poids de cette prime : « Une étude de l’Insee de 2019 a montré qu’à un moment donné les CDD ont un revenu équivalant aux CDI grâce à la prime, mais à moyen terme les CDI gagnent bien plus, car ils cumulent de l’ancienneté. »

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Les salariés neuroatypiques sont un vivier de talents pour l’entreprise

Stigmatisées pour leur manque de sociabilité ou leurs différences comportementales, les personnes neuroatypiques, haut potentiel intellectuel (HPI), Asperger, DYS et souffrant d’autres troubles déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) sont des candidats que les recruteurs accueillent avec une certaine frilosité. Elles constituent pourtant un vivier de talents pour les entreprises, à condition que ces dernières s’adaptent à elles et les emploient aux postes dans lesquels elles excellent.

Après des études d’ingénieur à l’Institut national des sciences appliquées de Rouen, Arnaud Khun a commencé à travailler sur la sécurité et l’environnement pour une entreprise du bâtiment. Cette première expérience professionnelle s’est terminée au bout d’un an. « J’avais beaucoup de difficultés de communication avec mes collègues, on m’a dit que je ne montrais pas assez mes émotions », explique-t-il.

Pendant qu’il recherche un nouvel emploi, il est diagnostiqué Asperger, un trouble du spectre de l’autisme. Il a également un handicap auditif depuis sa naissance, pour lequel il est appareillé. Sa vie prend un nouvel élan lorsque Pôle emploi lui parle d’une formation de développeur en intelligence artificielle (IA) un peu particulière. Un cursus développé dans le cadre des formations gratuites et professionnalisantes à l’IA organisées par les Ecoles IA Microsoft by Simplon en sept mois de cours et un an d’alternance en entreprise, destinées à des demandeurs d’emploi en formation initiale ou en reconversion. « En 2019, nous réfléchissions à comment engager des personnes Asperger dans l’entreprise après leurs études, dans le prolongement d’Aspie Friendly, le programme d’inclusion des autistes dans les universités », raconte Philippe Trotin, directeur de la mission Handicap et accessibilité numérique de Microsoft.

Complications avec le confinement

« Nous avons imaginé de faire une promotion pour les “intelligences atypiques”, incluant les Asperger, les HPI, les TDAH et les DYS, atteints de troubles de l’attention, de dyspraxie ou de dyslexie, etc. » De la promotion 2020, huit personnes ont finalement obtenu leur diplôme et travaillent aujourd’hui comme développeurs IA dans des entreprises du numérique. Un neuvième a abandonné.

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Les candidats, identifiés par Pôle emploi et différents réseaux et associations, ont été sélectionnés à l’issue de deux tests, l’un de savoir-être (motivation, autonomie, etc.), l’autre de savoir-faire (niveau en maths, capacité d’abstraction…). « Le groupe était très hétérogène, tant dans la neurodiversité que dans les profils. Il était composé d’hommes et de femmes âgés de 21 à 39 ans, de niveau bac à master, et même un doctorat », détaille Frédéric Bardeau, président et cofondateur de Simplon.co.

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Insertion des jeunes : la Cour des comptes plaide pour un « guichet unique »

Dispositifs éparpillés, ressources budgétaires insuffisamment ciblées, répartition des compétences mal dessinée… Dans une note rendue publique mardi 14 décembre, la Cour des comptes dresse un bilan critique des politiques d’insertion professionnelle en faveur des jeunes. Pour améliorer les performances, elle esquisse « plusieurs pistes de progrès » qui passent par une simplification des procédures et un redécoupage des pouvoirs attribués aux acteurs en présence.

La part des moins de 25 ans qui ont un emploi est plus importante aujourd’hui qu’avant la récession déclenchée par l’épidémie de Covid-19. Mais la situation de cette tranche d’âge demeure préoccupante : au troisième trimestre, le taux de chômage en son sein se situait à 20,1 %, soit plus du double que la moyenne nationale (8,1 %). Le risque de se retrouver sans activité quand on est jeune est plus important dans notre pays qu’« en Allemagne et aux Pays-Bas », soulignent les magistrats de la rue Cambon dans leur audit diffusé mardi.

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Pourtant, les pouvoirs publics ne sont pas restés les bras ballants. Leur effort pour aider les moins de 25 ans à pénétrer dans le monde du travail s’élevait à quelque 10 milliards d’euros par an, avant la crise sanitaire.

En outre, les réponses au problème sont nombreuses et ont fait l’objet de réformes depuis cinq ans afin de mettre l’accent sur « la formation et l’accompagnement renforcé », comme l’indique la Cour. Un exemple : la garantie jeunes, qui combine « remobilisation collective », soutien individuel et immersion professionnelle. Mais les résultats sont « assez ténus » : un mois après la sortie de ce dispositif, « le taux d’emploi (…) est en baisse, d’année en année » (23,9 % en 2019, contre 28,7 % en 2015).

Deux scénarios

Autre limite signalée par la haute juridiction : les actions mises en place ne se focalisent pas assez sur ceux qui en ont le plus besoin. Ainsi, les entrées en apprentissage se sont envolées (+ 42,6 % entre 2019 et 2020), mais « l’essentiel des nouvelles places créées a profité aux élèves capables de suivre un cursus long et a peu bénéficié aux publics vulnérables ».

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De son côté, Pôle emploi propose un « accompagnement intensif jeunes » qui « n’est pas (…) orienté vers les plus éloignés du marché du travail ». L’établissement public pâtit, par ailleurs, d’une « insuffisante délimitation des frontières » avec un autre opérateur : les missions locales. Du coup, la coopération entre les deux réseaux s’avère « aléatoire » et il peut même y avoir des « tensions », voire de la « concurrence ».

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Politique industrielle : la Cour des comptes critique l’empilement des dispositifs

Emmanuel Macron ne résistera sans doute pas à la tentation de le rappeler lors de son intervention télévisée, mercredi soir : depuis 2017, la France recrée des emplois industriels alors qu’elle en détruisait depuis au moins dix ans. Le chef de l’Etat le répète dès qu’il en a l’occasion, comme à l’été, devant les salariés de l’usine CAF, à Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées). « On est en train de conjurer ce qui apparaissait comme une fatalité dans notre pays, s’est-il enthousiasmé, évoquant le déclin de l’industrie textile et les délocalisations ayant frappé la région. Nous pouvons redevenir une grande nation industrielle. » Il n’est pas le seul, ni le premier, à le promettre. Presque tous les candidats défendent, ces jours-ci, les vertus d’une politique industrielle offensive, pourvoyeuse d’emplois bien rémunérés et gardienne d’une souveraineté. Les vingt mois de pandémie ont, en tout cas, replacé cette thématique au cœur de la campagne.

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Le sujet, lui non plus, ne date pas d’hier. Les tentatives successives des pouvoirs publics pour freiner le phénomène de désindustrialisation, qui a frappé plus durement la France que d’autres pays similaires depuis les années 1970, ont conduit à un empilement de plans et de dispositifs pas toujours bien articulés, pointe la Cour des comptes dans une note parue mardi 14 décembre. Au risque de nuire à leur efficacité et à leur diffusion dans le tissu productif. « Au cours de la dernière décennie, tous les deux à trois ans, les pouvoirs publics ont annoncé des plans et des stratégies industrielles, en se référant, selon les cas, à des objectifs de souveraineté ou d’indépendance nationale, d’autonomie stratégique, de remédiation des failles de marché, d’accompagnement des restructurations industrielles et de leur impact territorial », écrit la Cour.

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A l’arrivée, les moyens publics engagés sont colossaux : chiffrés entre 17 et 20 milliards d’euros par an en 2019 par France Stratégie, ils sont encore supérieurs aujourd’hui avec les mesures adoptées depuis deux ans (baisse des impôts de production, plan de relance, France 2030). Sans qu’il soit pour autant possible d’en évaluer finement l’efficacité, ces objectifs étant « associés à des indicateurs de moyens », mais « rarement à des indicateurs de résultats », juge la Cour. Ainsi, malgré les sommes mobilisées, il n’existe pas de document budgétaire recensant l’effort financier au titre de la politique industrielle de façon exhaustive, l’information étant dispersée dans une dizaine de programmes différents.

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Le groupe France Loisirs trouve un repreneur, mais va perdre 90 % de ses employés

Une librairie France Loisirs, à Paris, en novembre 2020.

Le tribunal de commerce de Paris a choisi, lundi 13 décembre, parmi les deux offres de reprise du groupe France Loisirs, celle soutenue par la société par actions simplifiée Financière Trésor du patrimoine. Le club de livres est plombé par un déficit de 14 millions d’euros, accumulé rien qu’entre janvier et fin octobre, après une perte de 7,7 millions en 2020. France Loisirs, qui comprend un centre de logistique, un centre d’appels, de l’impression à la demande et des activités informatiques, avait été placé en liquidation judiciaire avec poursuite d’activité, le 25 octobre.

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Selon le jugement du tribunal, qui ne se prononce pas sur les filiales étrangères, le plan de reprise de Financière Trésor du patrimoine ne conservera que quarante-quatre salariés en CDI sur 484 et trois apprentis sur les trente-deux du club de livres. Il ne gardera que quatorze boutiques sur les 122 actuelles. Ce repreneur, qui débourse 500 000 euros pour cette acquisition (hors stock) a été préféré à l’offre rivale du groupe de presse Reworld Media, qui proposait de sauver pourtant cent neuf salariés en CDI. L’entreprise n’est donc pas liquidée, mais considérablement amputée.

Le comité social et économique du club de livres juge l’offre « décevante » et ne comprend pas comment un projet peut être mis en œuvre avec un « nombre si faible de salariés ». Les représentants des salariés ont pourtant soutenu, par dépit, l’offre « la moins mauvaise », celle de Reworld restant « insuffisamment aboutie », selon les administrateurs judiciaires.

Une transformation « trop lourde et trop lente »

A la tête d’un groupe familial très discret aux 164 millions d’euros de chiffre d’affaires, Derek Rémy Smith a créé la Financière Trésor du patrimoine, une société de vente par correspondance, d’abord spécialisée dans les monnaies, les médailles et les timbres. Elle s’est diversifiée, avec Liriade, dans l’édition de beaux livres et de livres d’histoire, cantonnés aux batailles napoléoniennes, aux décorations françaises et aux guerres coloniales.

Franco-américain, M. Smith a repris le catalogue de L’Homme moderne, puis Reder, avant de se lancer dans la vente, toujours par correspondance, de produits alimentaires des terroirs et de foie gras (notamment Léon Fargues ou Traditions du Périgord) et de vins (comme le Château de Rayne Vigneau, un premier cru de sauternes). Il estime le besoin de financement à 5,3 millions d’euros pour relancer France Loisirs et vise 25 millions de chiffre d’affaires en 2022.

Déjà au bord de la faillite, France Loisirs avait été repris, en 2015, par Adrian Diaconu, un homme d’affaires à la tête d’un groupe luxembourgeois diversifié dans l’intelligence artificielle. Refusant de voir disparaître ce groupe criblé de dettes, il y a injecté quelque 30 millions d’euros de sa fortune personnelle pour tenter de le maintenir à flots. Et essayer de garder les deux mille employés. Sans succès. Au fil des années, il a dû licencier. « Malheureusement, nous n’avons pas réussi à amener tous les salariés de l’autre côté, la transformation de l’entreprise a été trop lourde et trop lente », regrette-t-il, en ajoutant : « La crise sanitaire ne nous a pas épargnés. »

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Alibaba licencie une employée qui avait accusé un collègue de l’avoir violée

Alibaba fait régner la loi du silence. Quatre mois après les allégations de viol d’une jeune employée à l’encontre d’un de ses supérieurs, le numéro un chinois du commerce en ligne a licencié la jeune femme, au prétexte qu’elle aurait « diffusé des mensonges », rapporte le quotidien Dahe Daily, un journal d’Etat de la province du Henan, dans le centre de la Chine. En août dernier, la jeune employée avait dénoncé l’absence de réaction d’Alibaba après ses plaintes, sur un réseau social interne à l’entreprise, suscitant des réactions indignées parmi les employés, puis sur les réseaux sociaux chinois une fois l’affaire connue du grand public.

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C’est apparemment ce dernier point qu’Alibaba n’a pas digéré : fin août, la société avait déjà licencié une dizaine d’employés pour avoir diffusé les accusations de Mme Zhou (on ne connaît que son nom de famille) sur des réseaux sociaux. Alibaba avait alors averti ses 250 000 employés en leur rappelant ses règles strictes, qui interdisent la diffusion en public des échanges ayant lieu sur son forum interne, rapporte l’agence Bloomberg.

D’après sa lettre de licenciement, publiée par Dahe Daily, elle est accusée par l’entreprise d’avoir « diffusé des mensonges, comme le fait qu’elle ait été “violée par des cadres et que l’entreprise le savait et n’a pas réagi” ». La jeune femme avait pourtant raconté son agression à la cantine armée d’un haut-parleur, puis publié un long récit sur le forum interne de l’entreprise, pour obtenir une réaction de sa hiérarchie. « Depuis août, l’incident a connu beaucoup de rebondissements et le dommage causé à l’entreprise, et les parties, vous y compris, est incalculable », poursuit la missive. Mme Zhou entend contester son licenciement, effectif depuis le 25 novembre, d’après son avocat, qui a confirmé les faits à plusieurs médias.

Reconnaissance de problèmes « systémiques »

En août, Alibaba avait dû faire amende honorable, le PDG, Daniel Zhang, aux manettes depuis le départ de Jack Ma en 2019, déclarant dans une lettre publique : « Cet incident est une humiliation pour tous les employés d’Alibaba. » Le dirigeant s’en prenait aussi à « l’horrible culture de la consommation forcée d’alcool ». Reconnaissant des problèmes « systémiques », il avait annoncé la mise en place d’une politique antiharcèlement et des formations sur la question. D’après la lettre, le manageur mis en cause, qui a reconnu avoir commis des « actes intimes » sur la jeune femme alors qu’elle était en état d’ébriété, a été licencié. Deux cadres, qui n’ont pas réagi aux accusations de Mme Zhou, ont aussi démissionné. Daniel Zhang promettait aussi : « Nous ferons tout ce que nous pouvons pour prendre soin d’elle. »

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Situation préoccupante pour l’usine LSI, ex-GM&S à La Souterraine

C’était le premier dossier chaud que Bruno Le Maire avait trouvé sur son bureau en devenant ministre de l’économie et des finances, en 2017 : la fermeture annoncée de l’équipementier automobile GM&S de La Souterraine (Creuse) contre laquelle ses salariés se battaient avec acharnement depuis des mois. Une lutte très médiatisée, dans le contexte de la campagne présidentielle. Au terme de nombreux rebondissements, elle avait trouvé son épilogue dans une reprise par le leader français de l’emboutissage, le groupe GMD, avec des engagements de commandes des constructeurs Renault et PSA, le renfort d’aides publiques, et des promesses d’investissements. Mais la suppression de 157 des 277 emplois.

D’une campagne à l’autre, à quelques mois de la fin du quinquennat, voilà de nouveau le sous-traitant automobile, rebaptisé « LSI », dans une situation préoccupante. Ses salariés ont donné l’alerte à la suite d’une réunion avec Bercy, mercredi 8 décembre. « On va droit au dépôt de bilan, résume Patrick Brun délégué CGT. La raison, elle est simple : les promesses n’ont pas été tenues. Les constructeurs n’ont pas respecté les engagements signés devant Bruno Le Maire en juillet 2017 ! Et, depuis, la trésorerie fond à vue d’œil. »

« Les promesses n’ont pas été tenues. Les constructeurs n’ont pas respecté les engagements signés devant Bruno Le Maire en juillet 2017 ! Et, depuis, la trésorerie fond à vue d’œil », Patrick Brun délégué CGT

Une situation qui n’est pas soudaine et dont Bercy a connaissance. Des réunions de suivi ont lieu toutes les six semaines depuis le début de l’année, et se sont accélérées dernièrement, à toutes les trois semaines. Tempérant les déclarations des salariés, sur un dépôt de bilan rapide, le ministère confirme cependant leur analyse et estime leur inquiétude légitime.

D’abord parce qu’en effet, les engagements de commandes, obtenus sous la pression de Bercy en juillet 2017 – pour 12 millions d’euros par PSA, devenu Stellantis ; pour 10 millions par Renault – n’ont en effet été que partiellement tenus.

La situation n’a fait que se dégrader lentement

Et ce, dès la reprise : en janvier 2018, les salariés apprenaient lors d’une réunion du comité de suivi à Bercy, qu’ils n’auraient pas les 22 millions d’euros de commandes prévus pour l’année, mais seulement de 15 millions à 16 millions. Depuis, la situation n’a fait que se dégrader lentement, comme l’avaient craint les salariés. « Aujourd’hui, on est à moins de 2,7 millions d’euros pour Stellantis, et moins de 5 millions d’euros pour Renault », souligne M. Brun.

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BackMarket, Swile, Doctolib… L’envol de la French Tech

Par et

Publié hier à 17h30, mis à jour à 08h50

Nous sommes le 29 juin 2017, moins de deux mois après son arrivée à la tête de l’Etat, Emmanuel Macron est l’invité de marque de l’inauguration du site parisien géant de la Station F, qui se présente comme le plus grand incubateur de start-up au monde. Devant un parterre d’entrepreneurs, d’investisseurs et d’universitaires, le président fraîchement élu, le coq de la French Tech épinglé au revers de sa veste, séduit son auditoire. Il est déjà considéré comme le promoteur de la « start-up nation » depuis son arrivée au ministère de l’économie, en août 2014, où il supervisait les dossiers du numérique. A Las Vegas, en 2016, il avait fait fureur quand il était allé à la rencontre des start-up françaises venues participer au Consumer Electronics Show. L’année suivante, le candidat à la présidentielle leur a réservé un meeting au Palais Brongniart à dix jours du premier tour de l’élection pour leur dévoiler son programme sur le numérique et leur demander de l’aider à « changer le pays ».

Pour Cédric O, aujourd’hui secrétaire d’Etat au numérique, la préoccupation d’Emmanuel Macron pour les start-up fait alors « partie de son ADN et de sa lecture des dynamiques économiques. Son analyse des enjeux économiques de la France, c’est que les leaders de demain seront ceux qui se seront convertis à l’économie de l’innovation, alors que la France était dans une économie de rattrapage. Au-delà, c’est un message politique de progrès ».

Au fil du quinquennat, l’exécutif n’a cessé de démontrer son attachement à l’écosystème « tech » : de la conférence annuelle Choose France organisée à partir de 2018 pour attirer les géants mondiaux au plan de secours des start-up pendant la pandémie, sans oublier le plan France 2030, annoncé en octobre et doté de 30 milliards d’euros dont une bonne partie ira à ses chères start-up. Une somme qui complétera les 57 milliards d’euros dépensés en dix ans par le programme des investissements d’avenir (PIA), destiné à transformer la France en leader des nouvelles technologies, dans la recherche, la santé, l’industrie, le numérique… Pour quel résultat ?

Lire l’analyse : Article réservé à nos abonnés France 2030 : le discours en attendant la méthode

A la demande de l’organe public « mission French Tech », le cabinet Roland Berger s’est penché sur le sujet et a étudié les 120 start-up les plus prometteuses du pays, qui composent l’indice French Tech 120. Publié en juin, le « baromètre d’impact » livre son verdict. Ces 120 entreprises, comme le souligne Olivier de Panafieu, senior partner et directeur général du bureau de Paris de Roland Berger, sont « le fer de lance de l’économie française ». « Avec 41 % de croissance par an en moyenne de leur activité, elles doublent leur chiffre d’affaires presque tous les deux ans. Ce chiffre est environ 14 fois plus élevé que celui constaté au sein des entreprises du CAC 40 entre 2015 et 2019 (environ 3 % par an), mais il doit bien sûr être remis en perspective : les start-up, en effet, se caractérisent justement par une croissance rapide – d’autant plus rapide qu’elles partent de zéro », explique-t-il. Selon le cabinet, de cinq à dix entreprises de la French Tech apparaîtront dans le classement des 120 premières cotations de la Bourse de Paris (SBF 120) et au moins une appartiendra au CAC 40 d’ici à 2025.

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